Don Flandrin : la correspondance d’un étudiant en pharmacie au milieu du XIXe siècle

Autoportrait au fusain de Joseph III Flandrin, 1874

La BIU Santé a récemment accueilli dans ses collections un fonds d’archives retraçant le parcours professionnel, politique et familial de Joseph III Flandrin (1837-1903), pharmacien originaire de Grenoble. Cet ensemble d’archives a été donné à la bibliothèque par l’un de ses descendants, Georges Flandrin, médecin et hématologue ayant effectué sa carrière aux hôpitaux Saint-Louis et Necker à Paris. Il documente plus particulièrement la période étudiante de la vie de Joseph Flandrin et la correspondance que celui-ci entretenait avec son père, percepteur et botaniste.

Joseph Flandrin appartient à une famille grenobloise composée d’artistes et de médecins. Il s’oriente vers des études de pharmacie qu’il effectue à l’École supérieure de pharmacie de Paris de 1860 à 1864, Il effectue son internat à l’hôpital Lariboisière puis à l’Hôtel-Dieu, avant de retourner dans sa région d’origine pour exercer en officine. A partir des années 1870, il s’engage dans plusieurs sociétés de secours mutuel et participe à diverses  commissions municipales portant notamment sur des questions de santé publique, telles que le travail des enfants.

Groupe d’internes en pharmacie de l’hôpital Lariboisière, 1863

Le fonds d’archives se compose majoritairement de lettres échangées entre Joseph et son père durant ses années d’études à Paris de 1861 à 1864. La fréquence et le contenu de ces lettres témoignent de l’étroite relation qui existait entre les deux correspondants. Les fondements de cette relation sont non seulement familiaux mais également intellectuels et économiques : Joseph est dépendant financièrement de sa famille. S’il reçoit plus de lettres de son père qu’il ne lui en envoie, il se montre néanmoins fort loquace dans ses écrits : il aborde le contenu académique de sa formation, les multiples événements qui ponctuent sa scolarité, comme par exemple la visite d’une délégation étrangère. Il n’omet pas non plus des questions plus triviales, telles que l’argent dont il a besoin pour faire retoucher son costume. Ses lettres fourmillent de détails et anecdotes et constitue ainsi une véritable chronique de la vie d’un étudiant parisien au milieu du XIXe siècle.

Joseph Flandrin par Auguste Mollard

Les correspondants de Joseph Flandrin se diversifient avec le temps. Il commence ainsi à échanger à partir de 1863 avec Adèle Ricard, mère de sa future épouse et fille d’un pharmacien d’officine à Grenoble. Le fonds d’archives documente également ses jeunes années au collège du Pont de Beauvoisin puis au lycée de Grenoble, ainsi que la période plus tardive de sa vie, évoquant ses multiples engagements politiques et scientifiques. Une photographie des internes en pharmacie de l’hôpital Lariboisière en 1863 ainsi qu’un autoportrait au fusain complètent et illustrent ces archives familiales.

Le fonds Georges Flandrin est actuellement en cours d’inventaire et de numérisation à la BIU Santé. Un mémoire d’étude en histoire de la pharmacie exploitant ces sources inédites est également en cours de rédaction. Pour toute question relative aux conditions d’accès à ce fonds, vous pouvez écrire à info-hist@biusante.parisdescartes.fr.

Nous profitons de cette publication pour remercier à nouveau Monsieur Georges Flandrin ainsi que son épouse pour leur don à la BIU Santé, pour l’accueil qu’ils nous ont réservé et pour toutes les informations relatives à l’histoire de leur famille et de leur collection qu’ils nous ont communiquées.

Pour en savoir plus sur la famille Flandrin :

  • Senot-Tercinet, Marie-Amélie. Jules Flandrin : examen sensible : œuvres de 1889-1914. [Exposition. Grenoble. Musée de l’ancien évêché. 2008-2009]. Lyon, Libel, 2008. Disponible sur Issuu : https://issuu.com/libel/docs/flandrin_issuu (consulté le 2 mai 2018).

Catherine Blum

La bibliothèque de la Société anatomique de Paris

La Société française de pathologie et l’université Pierre-et-Marie-Curie ont déposé à la BIU Santé les ouvrages qui composaient l’ancienne bibliothèque de la Société anatomique de Paris.

Cet ensemble de livres était conservé au Musée Dupuytren, dans les locaux qu’il occupait depuis 1967, au fond du cloître du 15, rue de l’École-de-Médecine.

Ces livres ont été les derniers objets à quitter les lieux lors de la fermeture du musée, en octobre 2016. Bref déménagement, puisque leur destination était au 12, de l’autre côté de la même rue. Les 270 cotes (SAP 1 à SAP 270), correspondant à des ouvrages publiés de 1565 à 1889, peuvent désormais être consultés à la BIU Santé et sont quasiment tous déjà signalés dans son catalogue. Dans les prochains mois, certains d’entre eux seront en outre numérisés dans la bibliothèque numérique Medic@ (nous tâcherons d’en présenter quelques-uns ici).

Ils rejoignent à la bibliothèque les archives de l’ancienne Société anatomique de Paris, qui y ont été déposées en 2013 et dont l’inventaire et le traitement devraient s’achever dans le courant de 2017. Ces archives peuvent d’ores et déjà être consultées au besoin. La Société française de pathologie et l’actuelle Société anatomique de Paris ont également participé financièrement à l’acquisition du 2e registre des séances de la société, ainsi qu’à la restauration de plusieurs autres volumes. Qu’elles en soient ici remerciées.

La Société anatomique a eu une histoire longue et assez tourmentée [1] . La collection dont il est ici question n’a semble-t-il été constituée que durant la première période de sa seconde vie, je veux dire après sa résurrection en 1826, et sous la très longue présidence de Jean Cruveilhier : les ouvrages publiés après son retrait en 1873 sont des exceptions dans ce petit ensemble.

C’est après la mort de Bichat, en 1802, que des étudiants de médecine brillants, élèves de l’École pratique de médecine, souhaitèrent se réunir pour poursuivre son œuvre tôt interrompue. Poursuivre l’œuvre de Bichat, c’était, selon les termes du compte rendu de la séance inaugurale du 12 Frimaire an XII (= 4 décembre 1803), s’occuper de « l’anatomie de l’homme sain et [de] celle de l’homme malade, [ainsi que de] la physiologie dans l’état de santé et dans celui de maladie » : vaste programme, à accomplir grâce à la nouvelle méthode anatomo-clinique. Des séances hebdomadaires réuniraient les membres de la Société. Des procès verbaux en seraient établis systématiquement.

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Les archives du cancérologue Georges Mathé à la BIU Santé

Au moment où s’achève l’exposition Georges Mathé à l’hôpital Paul-Brousse, la BIU Santé met à jour sa présentation Medic@ consacrée à ce cancérologue et immunologue, pionnier de la greffe de moelle osseuse.

CIPN20067Il est difficile de résumer en quelques lignes la carrière de ce chercheur, mort en 2010 à l’âge de 88 ans. Étudiant en médecine à Paris, et résistant, pendant la Guerre, il devient chef de clinique à l’hôpital Broussais en 1953. C’est en 1958 qu’il réalise les premières greffes de moelle osseuse, avant de devenir chef du service d’hématologie de l’Institut Gustave-Roussy en 1961. Ses multiples recherches portèrent sur l’immunothérapie, la polychimiothérapie, la médecine translationnelle, la lutte contre le Sida…

Il participa activement à la création et au fonctionnement de l’Inserm, du Circ, de l’Icig, de l’Arc, de l’Esmo et de l’OERTC.

En plus d’avoir été un scientifique renommé, Georges Mathé fut aussi un lecteur assidu de la bibliothèque de la faculté de Médecine, devenue BIU Santé. De ses années d’étude jusqu’à la fin de sa carrière, il fut un habitué de nos salles pendant plus de 60 ans, passant plusieurs fois par mois pour ses recherches, jusqu’à sa mort en 2010.

En 2003, la Bibliothèque interuniversitaire de Médecine a acquis un tapuscrit de Georges Mathé. Ce texte, «les greffes incompatibles» avait été rédigé pour une conférence au début des années 1960. Georges Mathé participa à la mise en ligne de ce document sur le site de la BIUM, complété par deux autres articles.

En 2016, la BIU Santé a pu accueillir un certain nombre d’archives lui ayant appartenu, grâce à un don de sa fille, Catherine Gaston-Mathé. Notamment 38 cartons, contenant plus d’un millier de tirés à part, écrits par Georges Mathé entre 1948 et 2009. L’ensemble est aussi accompagné de documents divers (une conférence écrite pour la Chine en 2009 mais jamais prononcée, les cartes de FFI et du RPF de cet ancien résistant…) et de photographies, qui ont pu être légendées avec l’aide de Mme Mathé. Cet ensemble sera prochainement consultable à la BIU Santé.

Vous retrouverez donc sur la nouvelle présentation Medic@ :


Nous remercions Mme Gaston-Mathé, tous les professeurs et intervenants, ainsi que le BMJ Publishing Group, les éditions Elsevier, Masson et Robert Laffont, d’avoir autorisé la reproduction des documents composant ce dossier.

En savoir plus

La présentation Medic@ sur le professeur Mathé

Notice et bibliographie dans la base Biographie de la BIU Santé

Le dossier consacré à Georges Mathé sur le site Histoire de l’Inserm

Page Wikipédia de Georges Mathé

Archives du Dr Jean Carpentier

Le 19 novembre, les archives du Dr Jean Carpentier (1935-2014) sont arrivées à la BIU Santé. Voici la petite histoire de ce don.

carpentierC’est en mars 2015 que le Pr Mathias Gardet a été en contact avec Philippe Galanopoulos, alors conservateur au pôle Pharmacie. Il est question des archives d’un médecin, décédé quelques mois plus tôt, et de leur intérêt. Le Pr Gardet nous fait parvenir quelques informations, sur la biographie de Jean Carpentier, sur le volume des documents qu’il laisse (« environ 4,5 mètres linéaires », essentiellement du papier, mais aussi « un petit fonds audiovisuel très intéressant »), et nous met en relation avec Danièle Milhaud-Cappe, compagne de Jean Carpentier, et Clarisse Boisseau, sa collègue et collaboratrice.

Nous sommes intéressés par les dons d’archives de médecins. Nous avons constaté que les archives des Dr Dalsace et Vellay, entrées en 2006, sont souvent consultées par les chercheurs. Il existe un intérêt, que nous trouvons légitime d’encourager, pour les problématiques sociales autour de la médecine au XXe siècle, et que des documents d’archive peuvent nourrir.

Un coup d’œil sur la biographie du Dr Carpentier suffit pour constater que sa carrière mouvementée a rencontré et animé des aspects importants de la vie de notre société depuis les années 60 : libération sexuelle, prise en charge des toxicomanes, mission officielle auprès du Directeur général de la santé à propos des produits de substitution, réflexion autour du rôle du « médecin de quartier » et de la signification de la maladie. Ce médecin de Paris engagé a écrit des livres, de nombreux articles, il a joué un rôle important dans le journal Tankonalasanté, il a réalisé des films, des expositions…

Notre intérêt pour ces archives est donc vif.

Clarisse Boisseau et Danièle Milhaud-Cappe viennent rapidement nous rencontrer à la bibliothèque. Nous connaissons l’émotion qui accompagne le désir de donner les archives d’une personne proche. C’est une démarche qui donne certes une garantie de durée à sa mémoire, et qui lui rend hommage. Mais en même temps il s’agit de déplacer les souvenirs de cette personne dans un autre espace, à la fois éloigné – quels traitements vont-ils donc subir ? par quelles mains vont-ils être manipulés ? – et exposé, puisqu’il s’agit d’archives destinées à être rendues publiques. Cela participe ainsi au deuil des donateurs. Nos invitées sont là pour se rendre compte si la bibliothèque est un endroit qui leur convient, et si elles nous feront confiance.

Nous aussi, nous avons des interrogations. Accepter un don, c’est s’engager dans un travail souvent long et coûteux. Nos invitées nous proposent de faire un premier tri des archives. Le volume est assez imprécis, c’est bien normal, mais c’est un volume conséquent. Certains éléments sont problématiques techniquement, nous le savons, notamment les enregistrements vidéo, dont la lecture et la conservation sont difficiles. Nous évoquons quelques points importants à propos du tri préalable (par exemple : pas d’archives qui pourraient porter atteinte à la vie privée d’autrui, pas de dossiers médicaux ; y a-t-il des documents qui devraient être communiqués seulement après une certaine durée ? etc.). Et il faut aussi aborder des aspects légaux : qui sont les ayant droits ? Sont-ils tous sur la même longueur d’onde que nos interlocutrices ? Accepteront-ils d’indiquer par écrit leur accord avec les conditions du don ? Et puis il y a un point vraiment trivial : c’est que la bibliothèque n’a pas de véhicule. On s’arrangera, car ce que nous ont dit nos interlocutrices nous confirme l’intérêt que doit avoir l’ensemble.

Nous nous quittons donc sur un consentement de part et d’autre. Il faudra quelques mois de rangement avant que les archives puissent nous être remises. Il faudra quelques temps aussi, ensuite, pour que nos emplois du temps s’accordent… Nous trouvons enfin une date pour le déménagement. Clarisse Boisseau et Danièle Milhaud-Cappe nous proposent même de nous apporter, elles-mêmes, les cartons – quelle gentillesse. C’est accompagnées du second fils de Jean Carpentier, David Carpentier, qu’elles arrivent dans la cour d’honneur avec un coffre de voiture assez plein de cartons, et aussi avec la « valise à symptômes », donnée par l’ex-épouse de Jean Carpentier, Raymonde Carpentier.

À nous de jouer désormais…

Jean-François Vincent

Remerciements à : MM. Laurent et David Carpentier, au Dr Clarisse Boisseau, à Mmes Danièle Milhaud-Cappe et Raymonde Carpentier, et au Pr Mathias Gardet.

La valise à symptômes

 valiseD’abord montrée en avril 1984 à la galerie L’Arcade (Paris) à l’exposition Médecine de quartier, elle a été diffusée ensuite « à quelques dizaines d’exemplaires » avec ce mode d’emploi :

« Cet objet peut prendre place dans votre cabinet ou votre salle d’attente. Il peut être considéré comme un instrument d’usage quotidien au même titre que le stéthoscope, le tensiomètre ou l’otoscope. Il s’agit d’un matériel de communication : il permet d’accélérer la prise de conscience et la verbalisation de ce qui peut être à l’origine du symptôme. […] »

(Jean Carpentier. Medical flipper : le médecin généraliste, identité et mode d’emploi. – Paris : La Découverte, 1985. – p. 57.)

Archives du Dr Jean Carpentier (1935-2014), don du 18 novembre 2015.