Mémoires de Louis Robach, lauréat de l'Ecole dentaire de Paris en 1897

Présentation par Micheline RUEL-KELLERMANN
Docteur en chirurgie dentaire et en psychopathologie clinique et psychanalyse
Membre titulaire de l’Académie nationale de chirurgie dentaire
Secrétaire générale de la Société française d'histoire de l’art dentaire (SFHAD)
micheline@ruel-k.net

Les cinq cahiers manuscrits de Louis Robach (1871-1959)

Lors du XVe congrès de la Société française d’histoire de l’art dentaire (SFHAD) qui s’est tenu à Reims, en 2005, Philippe Vergnes, chirurgien-dentiste à Auch, avait présenté "Histoire de soins en Armagnac". Parmi ces dentistes du passé, il nous avait exposé succinctement la vie éclectique de Louis Robach. C’est par l’une de ses patientes, très âgée, qu’il avait entendu parler pour la première fois de ce confrère original et exceptionnel. Les recherches de notre confrère, curieux d’en savoir plus, l’ont conduit jusqu’à l’un des fils Robach, Gerald. Celui-ci, très charmant et ému de l’intérêt porté à son père, a bien voulu confier les manuscrits autobiographiques, lesquels ont été écrits entre 1948 et 1950, au milieu de l’Océan Atlantique, lors des nombreuses navigations vers l’Amérique du Sud de cet intrépide voyageur.

Ces manuscrits sont passionnants et se lisent comme un roman. Doué d’une mémoire prodigieuse, Louis Robach relate avec minutie et humour les épisodes d’une vie commencée en 1871 à Besançon. Une enfance soumise à la rudesse paternelle; un service militaire mouvementé, qui durait trois ans dans cette fin du XIXe siècle; des études à l’École dentaire de Paris qui était encore rue Rochechouart, dont il sera le lauréat en 1897; ses premiers remplacements, sa première installation à Condom etc. Puis, ses déboires à la déclaration de guerre de 14 lorsqu’on le prend pour un espion; son activité à l’hôpital de Toulouse, sortant largement de sa compétence de chirurgien-dentiste, lorsqu’il recevait et soignait les soldats blessés : toutes ces évocations sont celles d’une époque captivante. Et dans un tout autre registre tout aussi étonnant, il décrit ses activités de pyrénéiste, d’alpiniste, d’astronome et de photographe qui sont des exploits porteurs d’un véritable intérêt historique. En 1905, admis à la Société astronomique de France, il prend les premières photos de Mercure et montre que la Lune est aplatie aux pôles. Il escalade de nombreux sommets dont 43 fois le Mont-Perdu, 8 fois le Mont Blanc. Grâce à son appareil photo "Makenstein", il prend et conserve 8000 plaques de ses escalades et voyages qui seront prochainement numérisées aux archives d’Auch. Louis Robach est véritablement une personnalité fascinante dont la longue vie fut exceptionnellement sobre : un régime végétarien et une consommation permanente de sucre et d’eau. Cet homme singulier ne devait pas rester inconnu, non seulement de ses pairs, mais aussi de tous ceux qui s’intéressent à la vie des pionniers de la fin du XIXe siècle et de la première moitié du XXe. Deux articles lui sont consacrés dans les actes 2007 de la SFHAD; ils ne sont qu’un aperçu de tout ce qui peut être découvert dans ces manuscrits qui de surcroît sont merveilleusement écrits et très lisibles.