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Observations de Guy Patin et Charles Guillemeau sur les us et abus des apothicaires (1648) : vi  >

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Correspondance complète de Guy Patin et autres écrits, édités par Loïc Capron. – Paris : Bibliothèque interuniversitaire de santé, 2018. – Autres écrits. Observations de Guy Patin et Charles Guillemeau sur les us et abus des apothicaires (1648) : VI

Adresse permanente : https://www.biusante.parisdescartes.fr/patin/?do=pg&let=8159

(Consulté le 28/03/2024)

 

Des pierres précieuses [a][1][2]

J’entends les escarboucles, [3] les grenats [4], les hyacinthes, [5] les rubis, les saphirs, [6] les émeraudes [7] et autres drogues, dont je parlerai en gros, [1][8] vu qu’il faudrait faire un gros livre s’il m’en fallait traiter d’un chacun en particulier. Je dis seulement, en général, de toutes ces pierres que ce sont des pierres, et rien de plus ; qui, pour être un peu plus fines et plus déliées que n’est la meule du moulin, laquelle écache [2] le blé (combien que celle-ci soit extrêmement nécessaire à la vie des hommes), ont été introduites en la médecine par les Arabes, [9] qui ont voulu tout mettre en œuvre et leur ont attribué des facultés merveilleuses, dont ils n’eurent jamais l’ombre et que l’expérience n’a jamais confirmées ; joint que ces fragments qu’ils appellent précieux et toutes ces poudres si artificiellement préparées ne peuvent en aucune façon être digérées par la chaleur naturelle, non plus que des cailloux ou de la pierre-ponce pulvérisée. Elles ont leurs qualités matérielles, qui est de dessécher, et rien de plus. Dans les fièvres malignes [10] et pestilentes, [11] elles n’ont non plus de pouvoir sur la pourriture qui les produit que de la craie ou du plâtre. C’est folie d’en attendre aucun secours. Et ce qui est vrai de la peste [12] est vrai pareillement en toutes les maladies dans la guérison desquelles les Arabes recommandent telles bagatelles.

Mais, me dira quelqu’un, ces fragments précieux, étant pulvérisés, boivent comme une éponge les sérosités malignes qui regorgent du foie [13] ou de la rate [14] dans l’estomac, et qui y abondent ordinairement dans les fièvres pestilentes et pourprées. [15] À quoi je réponds que ce dégorgement de sérosités dans le fond du ventricule, [16] qui est le plus souvent imaginaire, n’est, tout au pis aller, qu’un simple symptôme qui n’a besoin d’aucun remède particulier ; ou même, quand il lui en faudrait, au moins ne faudrait-il point aller dans les Indes Orientales, [17] ni passer le cap de Bonne-Espérance ou la mer Rouge pour en apporter des remèdes si chers et de si peu de profit. Outre qu’il en faudrait prendre beaucoup pour boire cette sérosité maligne, et s’ensuivrait que cela ferait un mortier dans l’estomac, qui ferait obstruction, boucherait les orifices des veines, si bien qu’empêchant la transpiration, [18] cela augmenterait la pourriture et, par conséquent, la maladie ; vu qu’un bouillon, [19] un verre de tisane commune, [20] un quartier de pomme cuite, un verre de limonade bien faite, [21] voire même un verre d’eau fraîche, y valent mieux que tous ces fragments qui ne sont précieux qu’aux apothicaires [22] qui les vendent, et qui peuvent être nommés fragments pernicieux aux malades qui se fient à ces remèdes de coupe-bourses, au lieu de servir des grands remèdes, de l’usage desquels la vraie médecine nous promet du secours, qui croissent chez nous et que nous avons en main, tels que sont la saignée, [23] la purgation[24] le régime de vivre, [25] les citrons, les oranges, [26] les grenades, [27] l’épine-vinette, [3][28] le verjus et autres rafraîchissements acides qui résistent à la pourriture.

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Rédaction : guido.patin@gmail.com — Édition : info-hist@biusante.parisdescartes.fr
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