Congrès 2007

XIIIe journées annuelles
Lyon, 22-24 mars 2007


22 mars 2007
Histoire de l’embryologie et Evolution, 1880-1950

Université Lyon 3, Salle Athéna J

Programme

08h45 Accueil des participants
09h10 Mot d’introduction de M. le professeur Jean-Jacques Wunenburger, doyen de la Faculté de philosophie, et de M. le professeur Daniel Parrochia, directeur du Centre de recherches philosophiques.
Ouverture de la journée par M. le professeur Michel Morange (ENS-Ulm), président de la SHESVIE
Matin
  président de séance : Philippe Jaussaud, Professeur, LIRDHIST, Université Lyon1
09h30 « La rencontre de Chabry et de Bataillon à Lyon, autour de l’embryologie expérimentale », Jean-Louis Fischer (CNRS, Centre Alexandre Koyré)
10h10 Questions et discussion
10h20 Pause
10h40 « Embryologie végétale, la double fécondation chez Guignard », Christian Dumas, Professeur, ENS Sciences, Lyon
11h20 « Les travaux d’embryologie expérimentale de Michel Delsol autour de la néoténie chez les Amphibiens », Jean-Marie Exbrayat, Professeur, Université catholique de Lyon et directeur de recherches à l’EPHE
12h00 Questions et discussion
12h30 Déjeuner
Après-midi
  président de séance : Jean Gayon, Professeur, Université Paris 1
14h15 « Les apports scientifiques de Georges Coutagne (1854-1928) à la génétique », Frédéric Vivien, Cédric Audibert, Muséum d’Histoire naturelle de Lyon
14h55 « La question de l’hérédité de l’acquis dans la conception transformiste de Maurice Caullery (1868-1958) », Laurent Loison, doctorant, Université de Nantes
15h35 Questions et discussion
16h00 Pause
16h20 [Conférence sur Dubois] Christian Bange, Professeur honoraire, Université Lyon 1
17h00 Questions et discussion
17h15 Conférence finale « Embryologie et évolution, perspectives épistémologiques », par Michel Delsol, Professeur honoraire, Université catholique de Lyon, directeur de recherches honoraire à l’EPHE
18h00 (vers) Discussion finale et fin de la journée

23 mars 2007
Congrès de la société (1e partie)

Lieu : Université Catholique, 25 rue Plat, Lyon 2e

09h00

Accueil des participants par le recteur et les doyens des facultés de sciences et de philosophie de l'université catholique

09h15

Ouverture de la journée
par le Président de la Société, Michel Morange

09h30 Marino Buscaglia (Université de Genève)
Une étape de l'histoire générale de la méthode scientifique: le Discours de Niels Steensen sur l'anatomie du cerveau (1669)
10h10

Léo Coutellec (LIRDHIST, Université Lyon 1)
La place de l’homme dans les cycles biogéochimiques de la Biosphère, chez V.I. Vernadsky (1863-1945)

10h50

Pause

11h00 Sophie Jourdin (Université de Nantes)
Gottlieb Haberlandt (1854-1945) et la culture in vitro de tissus et de cellules végétales 
11h40 Emmanuel d'Hombres (UMR 7596 REHSEIS)
La « division du travail physiologique » : naissance, vie et mort d’un concept
12h20 Elodie Giroux (Paris 1 Panthéon Sorbonne)
L’épidémiologie entre individu et population : quelques clarifications à partir dela notion de "pensée populationnelle",
13h00 Pause déjeuner

Symposium sur Buffon
14h30 Jean-Louis Fischer
Le concept de monstre chez Buffon à la lumière des molécules organiques
15h10 Maelle Levacher
Le traitement des lieux communs dans l'Histoire naturelle de Buffon
15h50 Pause
16h10 Stéphane Schmitt
L'Histoire naturelle des oiseaux de Buffon et les planches enluminées de Martinet
16h50 Michel Morange
François Jacob lecteur de Buffon
17h30

Assemblée générale et Conseil d’administration de la Société


24 mars 2007
Congrès de la société (2e partie)
 
09h00

Jonathan Simon
La Sérothérapie en France 1894–1900 : santé, industrie et microbiologie

09h40 Simon Gouz (LIRDHiST, Université Lyon 1)
Influence de l'engagement politique et du marxisme chez J.B.S. Haldane dans les années 30 à 50
10h20 Floriane Blanc
De Deshaye à Chopard, Evolution(s), Espèce(s) et genre(s) au Muséum. Aspects du processus de construction des connaissances. Contribution à l’analyse
11h00 Pause
11h10 Laurent Cherlonneix
Auto suspension et auto initiation intranucléaires de la mort cellulaire
11h50

Laurence Perbal
La génétique des comportements à l’ère post-génomique

Résumés des interventions

La place de l’homme dans les cycles biogéochimiques de la Biosphère, chez V.I. Vernadsky (1863-1945)
Léo Coutellec
Au début du XXème siècle, un savant russe, très peu connu de nos jours en Occident, soutenait la thèse selon laquelle la vie, et particulier l'homme, joue un rôle majeur dans le fonctionnement biogéochimique de la planète.

C'est donc à travers l'œuvre de ce géologue, minéralogiste, cristallographe, créateur de la biogéochimie, mais aussi philosophe et penseur indépendant, Vladimir Ivanovitch Vernadsky (1863–1945), que nous aborderons une tentative de compréhension historique d’un fondement théorique possible de l'écologie scientifique moderne.

Vernadsky est considéré comme le père de l'écologie globale, créateur de la théorie moderne de la biosphère, il est aussi l'un des grands penseurs de l'histoire et de la philosophie des sciences. Sa contribution à la science en général et à l'écologie en particulier est considérable. Son œuvre est considérée, par certains penseurs, comme une révolution scientifique, « la révolution vernadskienne ».

En adoptant une approche originale, multidimensionnelle et globale face aux problèmes complexes de la planète, Vernadsky replace l'homme (ou humanité), avec toutes ses dimensions, dans le processus géologique à l'échelle de la Biosphère. En définissant la matière vivante, Vernadsky intègre l'homme dans l'ensemble des organismes qui existent ou ont existé avant lui.

Nous aborderons donc la question de la matière vivante et de ses manifestations dans la biosphère. Puis, nous analyserons la place donnée à l’homme dans le processus géologique évolutif de la biosphère et les raisons contextuelles qui ont amené Vernadsky à inscrire le concept philosophique de noosphère dans son travail scientifique. Nous finirons par définir ce concept, ce qui nous permettra d’ouvrir notre propos sur une dimension épistémologique et de mesurer son importance dans l’histoire des idées en écologie. Ainsi, dans un contexte de crise écologique, comment appréhende-ton l’écosystème globale et, ipso facto, comment le nomme-ton, Ecosphère, biosphère, noosphère ou Gaïa ?

Nous faisons le pari que l’œuvre de Vernadsky peut éclaircir le débat, ainsi que celui sur la place de l’homme au sein de la biosphère, en dépassant les oppositions plusieurs fois séculaires entre anthropocentrisme et écocentrisme.
Gottlieb Haberlandt (1854-1945) et la culture in vitro de tissus et de cellules végétales
Sophie Jourdin
Le cas du botaniste autrichien Gottlieb Haberlandt (1854-1945) permet de retracer le commencement des cultures in vitro de végétaux supérieurs. Dans ses « Recherches sur la culture de cellules isolées de plantes » (1902), notamment, ce biologiste propose clairement d’étudier, par la culture de cellules et de tissus isolés in vitro, l’ensemble des corrélations cellulaires dans l’organisme végétal, c’est-à-dire les potentialités de la cellule. Au-delà des réalisations expérimentales pour étudier la morphologie et la physiologie végétales, cet auteur projette des perspectives pratiques et théoriques engageant le concept même de cellule.
La « division du travail physiologique » : naissance, vie et mort d’un concept 
Emmanuel d'Hombres
La division du travail physiologique fait aujourd’hui assurément partie de ces notions dont l’étude relève de l’histoire des sciences périmées – pour employer une expression chère à Gaston Bachelard. Cette infortune est d’autant plus frappante à première vue qu’elle contraste avec le sort réservée à l’autre terme du couple notionnel auquel la division du travail physiologique fut pendant si longtemps appariée, savoir le concept de différenciation morphologique. Il faut donc croire que les notions n’étaient pas logiquement liées au point que la première ne puisse un jour faire cavalier seul. Dans le présent article, nous nous efforcerons de dégager les raisons ou les problèmes qui ont conduit les biologistes à les articuler au cours du XIXe siècle, puis, compte tenu de l’évolution du contexte théorique et des difficultés insurmontables que rencontre l’application du concept de division du travail en biologie, à les dissocier au début du XXe siècle et à ne retenir finalement que le seul concept de différenciation.
L’épidémiologie entre individu et population : quelques clarifications à partir de la notion de "pensée populationnelle"
Elodie Giroux
Depuis la deuxième moitié du 20e siècle, l’épidémiologie dite « moderne » joue un rôle fondamental dans l’analyse étiologique des maladies. L’identification de facteurs de risque de maladie a conduit à des transformations profondes dans la pratique médicale et la manière de définir et appréhender la maladie, aussi bien au niveau de la médecine individuelle que de la santé publique. L’épidémiologie semble bien contribuer, de manière distincte de la physiopathologie et de la clinique, aux savoirs sur la maladie. Quelle pourrait être la spécificité de ce savoir ? A première vue, et si l’on considère l’histoire de l’épidémiologie avant le milieu du 20e siècle, il apparaît que l’étiologie environnementale et sociale est son domaine de prédilection. Pour l’investigation de ce type d’étiologie, le niveau populationnel ou statistique d’analyse – que l’épidémiologie introduirait alors en médecine – serait requis. Cependant des épidémiologistes considèrent que « l’épidémiologie moderne », celle qui a contribué à démêler l’étiologie des maladies chroniques, s’est essentiellement focalisée sur le niveau individuel d’analyse. Les facteurs de risque qu’elle contribue à identifier sont majoritairement des caractéristiques individuelles : hypertension, hypercholestérolémie, consommation individuelle de tabac, diabète, obésité, etc. Cette oscillation entre individu et population requiert l’analyse de ce que signifie « population » et « niveau populationnel » en épidémiologie.

Dans cette intervention, mon objectif sera de montrer que le concept de « pensée populationnelle » – un concept introduit par Ernst Mayr en opposition à celui de « pensée typologique » ou « essentialiste » – est utile et pertinent, d’une part, pour rendre compte, au sein de l’histoire de l’épidémiologie, des changements survenus avec l’avènement de ce qu’on a coutume d’appeler « l’épidémiologie moderne » au milieu du 20e siècle et, d’autre part, pour analyser ce que cette épidémiologie apporte et modifie dans la pensée médicale. Ce sera l’occasion d’ébaucher les caractéristiques d’une conceptualisation épidémiologique des phénomènes de santé.
La Sérothérapie en France 1894–1900 : santé, industrie et microbiologie
Jonathan Simon
L’introduction de la sérothérapie comme traitement contre la diphtérie marque un tournant dans l’histoire des sciences biomédicales à plusieurs égards. Dans les histoires de l’immunologie, par exemple, le travail de Behring et Kitasato sur la possibilité de transférer l’immunité par le biais du sang des animaux en 1890, est identifié comme un élément clé pour la fondation de la discipline. Malgré l’opposition entre la théorie cellulaire de Metchnikoff et la vision humorale des allemands, la pratique de la sérothérapie fut vite diffusée partout en Europe et en Amérique. Par la suite elle fut appliquée aux maladies autres que la diphtérie avec plus ou moins de succès. Dans cette communication, je considère la sérothérapie en France comme lieu d’interaction entre la biologie, l’économie et la médecine. Mené par Émile Roux et Louis Martin, l’équipe qui a développé la sérothérapie en France a utilisé la production à grande échelle comme moyen d’assurer la pérennité économique de l’Institut Pasteur en même temps que sa présence médiatique. Dans le contexte de la médecine, la sérothérapie a effectué une rupture dans les relations qui avaient traditionnellement existées entre patient, médecin et pharmacien. C’était le premier médicament officiellement enlevé du giron du pharmacien avec une réglementation qui enterrait sa production centralisée. Pour situer ce développement, il faut reconnaître le fonctionnement de l’Institut Pasteur comme un acteur clé qui a orienté l’application de cette nouvelle réglementation. En explorant les enjeux économiques de la sérothérapie, j’explore la particularité des finances de l’Institut Pasteur qui récolta des fonds à la manière d’une oeuvre charitable en même temps qu’il a vendu le sérum comme un produit pharmaceutique commercial à partir de la fin de 1894. Finalement, je veux souligner le rôle de la sérothérapie dans la diffusion de la microbiologie en France à la fin du dix-neuvième siècle.
Influence de l'engagement politique et du marxisme chez J.B.S. Haldane dans les années 30 à 50
Simon Gouz
Le biologiste anglais John Burdon Sanderson Haldane, principalement connu pour son travail fondateur en génétique des populations, a été une des figures de proue des scientifiques britanniques engagés politiquement à partir des années 30. Dans le contexte politique et social marqué par les répercussions de la crise économique mondiale, par la monté des fascismes en Europe et le danger croissant d'une nouvelle guerre mondiale, Haldane rejoint le Parti Communiste et affirme son adhésion aux théories politiques mais aussi philosophiques du marxisme. Loin de dissocier cet engagement de son activité scientifique, il affirme au contraire l'utilité et la fécondité de la philosophie marxiste dans le travail scientifique et dans son travail de biologiste en particulier.

Notre travail vise à interroger cette influence revendiquée d'un engagement politique et philosophique dans la production scientifique de Haldane. En particulier à travers son engagement dans le débat sur l'eugénisme, nous verrons comment s'articulent autour d'une question à la fois politique et scientifique, les interactions entre science, philosophie et engagement politique.
De Deshaye à Chopard, Evolution(s), Espèce(s) et genre(s) au Muséum.Aspects du processus de construction des connaissances. Contribution à l’analyse.
Floriane Blanc
Les leçons inaugurales du Muséum National d’Histoire Naturelle, constituées en corpus de textes, sont riches d’informations pour l’historien des sciences quant aux aspects humains et matériels du processus à l’œuvre dans la construction des connaissances. Pour présenter et illustrer cette recherche en cours, quatre des textes ont été choisis. Parce qu’ils ont centré tout ou partie de leur propos sur les notions d’évolution(s), d’espèce(s) et de genre(s), les quatre orateurs nous permettent de connaître plus avant certains aspects du « comment » dans un domaine scientifique, projetant une lumière crue sur la réalité de l’organisation et de la construction scientifique. Irréductible part de l’homme, contribution de non-spécialistes, apport des amateurs, etc. c’est de la science telle qu’elle s’est faite dont il sera question. À contre-courant des représentations actuelles, l’histoire rappelle ainsi que la science n’est pas une construction aseptisée.
Auto suspension et auto initiation intranucléaires de la mort cellulaire 
Laurent Cherlonneix
Cette intervention commence par définir le « rôle » des « acteurs » fondamentaux dans la biologie contemporaine de l’auto initiation et de l’auto suspension de la mort cellulaire : des gradients de concentrations protéiques « protègent » au niveau du cytoplasme la cellule de l’auto initiation de son effacement ou au contraire « activent » celle-ci.

Sur cette base se détache aujourd’hui un nouveau programme de recherche proposant l’importation intranucléaire des concepts de cette nouvelle biologie de la mort cellulaire : la « décision » cellulaire de vivre ou de mourir se prend bien avant  la « confrontation » cytoplasmique des différents « produits » de l’expression génique, elle « se prend » dès le niveau des gènes, celui des facteurs de transcription, des co-répresseurs et co-activateurs déterminant en amont les gradients de concentration protéiques du cytoplasme. Bref : c’est à même la molécule d’ADN et non seulement dans le cytoplasme qu’« activateurs », « protecteurs » et « anti-protecteurs » se livrent une « guerre » ou une « danse » d’influence.

C’est en ce sens un nouveau continent au sein du nouveau monde que la biologie commence de fouler  qui émerge en ce moment sous nos yeux : celui d’une dialectique nucléique ou transcriptionnelle de la suspension et de l’initiation de la mort cellulaire, c’est-à-dire une dialectique transcriptionnelle de la vie et de la mort.
La génétique des comportements à l’ère post-génomique
Laurence Perbal
Ce début de nouveau millénaire marque l'avènement d'une nouvelle ère en sciences biologiques, l'ère post-génomique. Elle succède à une période dominée par le paradigme génético-évolutif du néodarwinisme et de la biologie moléculaire marqué notamment par une grande confiance des chercheurs dans le pouvoir explicatif des gènes.

Cette communication commencera par montrer en quels sens la génétique des comportements, qui est devenue une discipline à part entière à partir des années 1960, est caractéristique, conceptuellement et expérimentalement, de cette période.

Ensuite, nous soulignerons que l’ère post-génomique s’accompagne d’un retour des concepts et des approches systémiques du vivant. Elle semble assumer pleinement la complexité des phénomènes biologiques, révélée notamment par la biologie moléculaire, et souligne la nécessité de multiplier leurs modes d’appréhension.

Nous nous intéressons au devenir de la génétique des comportements dans cette nouvelle ère biologique. Nous tenterons d’expliciter les évolutions conceptuelles et expérimentales observables dans cette discipline à l’heure actuelle et d’en étudier certains enjeux philosophiques.