Tout ce que vous avez toujours voulu savoir sur la Base biographique de la BIU Santé

Une nouvelle version lancée ce jeudi

La Base biographique de la BIU Santé a été restructurée, et sa nouvelle version vient d’être publiée.

La Base biographique de la BIU Santé, le 24 mai 2018

La Base biographique, c’est aujourd’hui un ensemble de 46231 fiches nominatives, et de 83761 sources distinctes. On peut espérer y trouver des informations et des références bibliographiques sur toute personne ayant contribué à l’histoire de la santé, de tous les lieux, de toutes les époques.

 

Réorganisation des données

Sans doute l’usager occasionnel de la Base biographique ne sera-t-il pas bouleversé lors de son prochain passage par le changement qui s’est opéré.

C’est même notre souhait que ses habitudes de recherche ne soient pas trop perturbées. Un outil de recherche doit être aussi simple que possible, et il n’est pas nécessaire qu’il paraisse perfectionné ou innovant, mais seulement qu’il rende le service qu’il doit rendre, et mieux qu’hier si possible.

Donc, notre chercheur percevra peut-être, cela nous l’espérons, une meilleure organisation des données. Il trouvera peut-être que les informations qui sont données sont plus claires et mieux expliquées.

Enrichissements

Un fait essentiel est toujours difficilement perceptible lorsqu’on consulte une base de données : c’est la dimension de ce réservoir d’informations. Sur ce point, nous avons la satisfaction d’annoncer que la nouvelle version contient nettement plus de données que la précédente.

Notamment, le dépouillement systématique de quelques grosses sources biographiques systématiques (par exemple le Dictionnaire historique de la médecine ancienne et moderne d’Eloy (1778), le Dictionnaire encyclopédique des sciences médicales de Dechambre (1864- 1889), ou le Dictionary of medical biography de W. et H. Bynum (2007) comblent des lacunes qui résultaient du mode de constitution de la version précédente de la base biographique. Le développement de celle-ci était en effet, légitimement d’ailleurs et très utilement, fondé surtout sur le dépouillement au fil de l’eau des entrées de documents dans les fonds de la bibliothèque. On y trouvait ainsi et on y trouve toujours des sources rarement citées ailleurs, mais on pouvait regretter que certains noms importants ne soient pas du tout présents, parce que le hasard des publications et des entrées ne les avaient pas fait rencontrer. Ces lacunes devraient être plus rares.

Prise en charge de données hétérogènes

D’autre part, la nouvelle base biographique est structurée pour pouvoir prendre en charge des données de nature très hétérogène. Essayons de nous expliquer.

Et ceci se passait dans des temps très anciens…

À l’origine, la Base biographique de la BIU Santé était un fichier bio-bibliographique. Les fiches, de très petit format, comportaient un nom, quelques informations de base (dates et lieux, profession, parfois quelques indications sur la carrière), et surtout les références bibliographiques de documents imprimés et d’articles présents dans la collection de la bibliothèque.

Ce fichier a été transformé au début de notre siècle en une base de données informatique, sur le même modèle.

Complexification

Puis, peu à peu, grâce aux possibilités offertes par l’informatique, des données assez diverses se sont agglomérées autour de ce noyau principal de références bibliographiques (qui continuait à se développer).

Aux noms des personnes présentes ont été liés les portraits numérisés dans la Banque d’images et de portraits.

On a signalé également des portraits qui n’ont pas fait l’objet d’une numérisation (souvent pour des raisons de droit de propriété intellectuelle), mais qui existent dans la collection.

On y a adjoint, grâce à la coopération de la bibliothèque de l’Académie de médecine, les appartenances à cette compagnie (“Membre de l’Académie de médecine”), ou la présence d’un “Dossier à l’Académie de médecine”. On a versé l’intégralité du contenu du Fichier Laborde, un important dépouillement d’archives effectué sous la direction de Léon de Laborde, garde général des Archives de l’Empire à partir de 1857, qui permet notamment de repérer tout un monde de médecins et de chirurgiens du XVIe et du XVIIe siècles.

Des chercheurs,  Pierre Moulinier et Jean-Marie Mouthon, nous ont permis de charger des dépouillements d’archives et des notices biographiques rédigés par eux.

À mesure que les années passaient, la base de données devenait ainsi plus riche, mais aussi plus compliquée, et plus difficile à gérer et à documenter.

Une hétérogénéité inévitable

Pourtant, il était évident que cette complexité allait encore croître : en effet, le développement de la numérisation, à la BIU Santé et dans le monde, rendait indispensable de pouvoir ajouter à la base biographique une très grande diversité de données directement accessibles en ligne et de partout, et non seulement les nécessaires références aux collections imprimées consultables sur place à la bibliothèque.

C’est cette diversité de données que nous essayons de mieux gérer dans notre nouvelle base en ligne.

On trouvera déjà de très nombreux liens entre la base biographique et les ressources biographiques que fournit la bibliothèque numérique Medic@. Des milliers de liens ont été créés, principalement vers des dictionnaires pour l’instant, et vers les précieux “Titres et travaux scientifiques”, ces curriculum-vitae dont la bibliothèque conserve une riche collection largement numérisée. Mais nous verserons prochainement d’autres ressources.

Dans les prochains mois, la base biographique permettra ainsi d’exploiter le considérable fichier manuscrit que la famille de Jacques Léonard a donné à la BIUM lors du décès de ce chercheur en 1988, qui est constitué par le dépouillement de milliers de dossiers d’archives sur des médecins de l’ouest de la France au XIXe siècle.

Nous travaillons également à repérer dans les périodiques que nous avons numérisés les nécrologies innombrables qu’ils contiennent. Si nous en avions les moyens, nous pourrions également nous attaquer à des ressources qui se trouvent dans d’autres bibliothèques numériques ou bases de données en ligne.

Nous serions heureux de nouer de nouvelles collaborations avec des chercheurs ou des institutions, que ce soit pour signaler des ressources distantes ou pour inclure directement de nouvelles biographies rédigées. Le champ est immense, plus grand que nos forces. L’intérêt permanent du public pour la biographie nous semble justifier des efforts importants.

Les utilisateurs verront également que nous avons fait notre possible pour documenter les dépouillements que nous avons effectués. Il est indispensable d’accumuler des données : il est utile aussi de dire d’où elles viennent, et quelles sont les sources qui ont été exploitées (et donc quelles sont celles qui ne l’ont pas été). De plus, certaines de ces ressources – le fichier Laborde déjà nommé par exemple – ont absolument besoin d’être expliquées : la documentation des sources est une nécessité qui est liée à l’hétérogénéité du contenu. Cet effort de documentation nous est d’ailleurs indispensable à nous aussi, pour savoir où nous en sommes et mieux organiser nos dépouillements.

Une base techniquement plus ouverte

Enfin, la base nouvelle manière est plus ouverte, et nous nous efforcerons de l’ouvrir encore davantage dans la prochaine étape technique de son développement.

Ouverture aux moteurs de recherche

Jusque là, la base biographique appartenait au «web caché», comme on dit : on n’en trouvait pas tout le contenu par l’intermédiaire des moteur de recherche du web comme Google. La nouvelle architecture devrait permettre que les moteurs de recherche viennent lire le contenu de la base, et le proposent donc à leurs utilisateurs, c’est-à-dire à nous tous.

Les identifiants d’autorité à l’horizon

Notre prochaine étape technique, dans la mesure de nos forces, sera de lier nos données avec d’autres jeux de données disponibles, plus précisément d’abord avec ce que les professionnels de la documentation appellent les «données d’autorité».

Les données d’autorité répondent d’abord à un besoin pratique de gestion des collections, en différenciant les homonymes dans les catalogues, ou en liant entre eux les différents noms d’une même personne ; ainsi on peut indiquer quel est le Jean Durand qui a écrit un certain livre (qui n’est pas le Jean Durand qui a écrit tel autre livre) ; et on peut fournir, à celui qui cherche les ouvrages de Jacobus Sylvius, ceux qui sont notés sous le nom de Jacques Dubois.

Mais l’informatique a donné un rôle accru à ces données d’autorité et aux numéros d’identification qui les accompagnent : si vous savez quel est le numéro qui désigne une personne, vous avez en principe la possibilité de joindre ensemble toutes les informations qui contiennent ce numéro d’identification. Par exemple, si vous savez que Sigismond Jaccoud a un identifiant 64023688  dans la base de données internationale VIAF, vous pouvez récupérer les informations qui s’y trouvent liées parce qu’elles utilisent également cet identifiant, notamment les diverses pages Wikipedia (https://en.wikipedia.org/wiki/Sigismond_Jaccoud, https://fr.wikipedia.org/wiki/Sigismond_Jaccoud, etc.), les données de Worldcat Identities, mais aussi les données bibliographiques qui concernent Jaccoud dans les catalogues de bibliothèques, etc. Ce numéro pourrait permettre aussi, en principe, que d’autres outils informatiques viennent à leur tour puiser dans la Base biographique.

L’usage de ces identifiants devrait se développer dans les temps qui viennent : nous espérons que la base biographique est aujourd’hui mieux préparée à s’intégrer dans le paysage documentaire qui se met en place. Le chemin, il faut le dire, est encore un peu long pour nous, mais l’essentiel est de pouvoir le commencer.

Nous comptons sur les utilisateurs pour nous signaler les défauts qu’ils trouveront, et nous faisons appel à leur indulgence critique.

Jean-François Vincent
24 mai 2018

[Medical Heritage Library] 13 698 documents de la BIU Santé disponibles

Le 19 janvier dernier, nous vous annoncions que la BIU Santé allait «petit à petit» compléter l’impressionnante collection de la Medical Heritage Library (si vous ne savait pas de quoi il s’agit, vous pouvez relire ce billet de blog).

[Caricature] Le Professeur John Bland-Sutton (B. Moloch) – Chanteclair
Le projet a avancé beaucoup plus vite que ce que nous avions anticipé et, deux mois plus tard, ce n’est pas sans fierté que nous vous annonçons qu’il y a très exactement 13 698 documents provenant des fonds de la bibliothèque en ligne sur Internet Archive au sein de la collection «Medical Heritage Library» ! 13 698 documents qui correspondent à la totalité des documents de la bibliothèque numérisés depuis 2001 et tombés dans le domaine public.  13 698 documents qui sont désormais consultables avec des  fonctionnalités inédites (téléchargement des images en haute définition, reconnaissance de caractères, formats d’export variés, recherche plein texte, pour en citer quelques-unes).

La rapidité avec laquelle ce versement a été fait n’aurait pas été possible sans la collaboration efficace d’Internet Archive, nous les en remercions vivement !

Nous vous souhaitons de belles découvertes dans les collections d’ici et d’ailleurs !

Ps : Vous pouvez désormais retrouver certaines de nos numérisations mises en avant via le compte Facebook de la MHL.

Actes Journée d’étude « Fecit ex natura »

Le 18 novembre 2016, la BIU Santé organisait une journée d’étude sous le titre «Fecit ex natura. Le métier d’illustrateur des sciences médicales du XVIe au XXe siècle».

Nous avions invité les intervenants à exposer leurs travaux sur les différents aspects de la production d’illustrations dont la bibliothèque possède une vaste collection.

Aujourd’hui, nous avons le plaisir d’annoncer à ceux qui n’ont pas pu être présents ce jour-là ou à ceux qui souhaiteraient retrouver les différentes allocutions, que nous avons réuni et publié en ligne les actes de cette journée.

De nombreuses pistes de recherche ont été évoquées et nous ne pouvons qu’espérer qu’elles ouvrent la voie à de nombreuses et fructueuses recherches.

Chloé Perrot

 

 

Bonne lecture à tous !

Musée Virtuel de l’Art Dentaire : une exposition qui a du mordant

Le Musée Virtuel de l’Art Dentaire (MVAD), dont la BIU Santé est partenaire, voit le jour en 2013, après la vente de l’Hôtel de Miramion qui abritait les collections de l’ancien musée Pierre Fauchard. Ces collections, issues de nombreux dons, sont désormais stockées à l’hôpital du Kremlin-Bicêtre où elles ne sont plus visibles.

Scène dentaire extérieure. Le patient est assis sur un banc entouré de ceux qui attendent leur tour. L’arracheur de dents. Hans Weiditz (1495-1537). École allemande, gravure, 1531, tirée d’une série intitulée « Frost spiegel » de Pétrarque (Pennsylvania Academy of Fine Arts)

C’est ainsi que Guy Robert, président de l’Union des Chirurgiens-Dentistes Retraités (UCDR), eut l’idée, en collaboration avec les membres de la Société Française d’Histoire de l’Art Dentaire (SFHAD), de créer un musée virtuel afin de proposer un accès visuel à ce riche patrimoine.

Lime rectangulaire, tout métal, manche doré, travaillé, XVIIe s.

Illustré par des photos en haute définition, ce musée retrace l’histoire des instruments utilisés par les dentistes, du XVe siècle jusqu’au milieu du XXe siècle. Les expositions se présentent de façon chronologique, selon l’ordre d’apparition des instruments dans les ouvrages.

 

Ouverture d’une nouvelle salle

Cinq instruments, provenant d’un coffret, manches en ivoire, XVIIIe s.

Une nouvelle salle d’exposition virtuelle vient d’ouvrir : elle est consacrée à la petite instrumentation pour l’excision des caries. Vous y trouverez de nombreuses photos et illustrations, ainsi que des commentaires issus d’ouvrages, sur l’utilisation  des différents instruments.

Venez découvrir la passionnante histoire des scies, limes, sondes, ou autres grattoirs en cliquant ici.

En savoir plus sur l’association

L’Association du Musée Virtuel de l’Art Dentaire (MVAD) regroupe l’Ordre national des chirurgiens-dentistes (ONCD), l’Académie nationale de chirurgie dentaire (ANCD), la Société française d’histoire de l’art dentaire (SFHAD), l’Association Dentaire Française (ADF), la Confédération nationale des syndicats dentaires (CNSD) et l’Union des chirurgiens-dentistes retraités (UCDR).

Avec d’autres donateurs, ces institutions soutiennent financièrement l’association. Cette dernière fonctionne également en partenariat avec la BIU Santé , l’Association de sauvegarde du patrimoine de l’art dentaire (ASPAD), le musée de l’Assistance Publique-Hôpitaux de Paris (AP-HP) et le Musée dentaire de Lyon (MDL).

En savoir plus

Interview de Guy Robert, président de l’association du Musée Virtuel de l’Art Dentaire ;

La page Facebook du musée ;

– Pour des renseignements plus précis, écrivez à : mvad2014@gmail.com

Fabien LAFAGE

Nudité, santé, beauté pour les Dievx de février

Bénédicte Prot a soutenu en juin 2017 une thèse de doctorat en littérature sur La représentation de la nudité dans la littérature du XVIIIe siècle sous la direction de Catriona Seth (Université de Lorraine) et Alexandre Wenger (Université de Fribourg). Elle est aujourd’hui assistante-docteure de la chaire Médecine et société de l’Université de Fribourg et s’intéresse notamment aux liens qui unissent la médecine à la littérature.

Nous avons eu le plaisir de la rencontrer lors du colloque Habillage du texte aux XVIIe et XVIIIe qui s’est tenu à Metz en septembre 2017. Son intervention portait sur «Nudité et habillage du texte dans L’Ami des femmes (1804) du docteur P. J. Marie de Saint-Ursin» [1]. L’occasion était trop belle et nous n’avons pas résisté à l’envie de la solliciter pour notre rendez-vous mensuel. Nous la remercions infiniment d’avoir bien voulu nous faire l’amitié de se prêter à l’exercice et lui cédons la tribune sans plus tarder.

Chloé Perrot

[1] La publication des actes est prévue courant 2018.

L’Ami des femmes

En ce mois de février, les amoureux de médecine et de littérature seront ravis de découvrir L’Ami des femmes du méconnu docteur P.-J. Marie de Saint-Ursin (1763-1818).

Télécharger le calendrier de février 2018.

Publié en 1804, réédité l’année suivante, le texte est dédié à l’impératrice Joséphine et se présente comme les lettres d’un médecin concernant l’influence de l’habillement des femmes sur leurs mœurs et leur santé, et la nécessité de l’usage habituel des bains en conservant leur costume actuel, avec un Appendix contenant des recettes cosmétiques et curatives.

C’est non sans ironie que le médecin-accoucheur Jean-François Sacombe (1750 (1755 ?)-1822) observe que son contemporain a «mis à contribution tous les arts, la poésie, la gravure, la typographie, et jusqu’au prestige d’un grand nom, pour mieux s’assurer le succès de son ouvrage[1]», étant entendu que la majorité des lecteurs «ne jug[e] du mérite d’une production littéraire que sur l’étiquette du sac[2]».

Au-delà de son caractère péjoratif, cette remarque attire notre attention sur les éléments composant ce qu’on appelle aujourd’hui le paratexte. Titre, épigraphe et frontispice sont autant de seuils de lecture où se manifeste la double appartenance au littéraire et au médical de L’Ami des femmes.

Par la mince frontière sémantique qui sépare l’ami de l’amant, L’Ami des femmes affiche d’entrée de jeu l’ambivalence de la figure du médecin. Cet ouvrage d’hygiène féminine sur la conservation de la beauté et de la santé s’inscrit en cela dans la continuité des textes médico-littéraires, en particulier du roman médical d’Antoine Le Camus (1722-1772) Abdecker, ou l’art de conserver la beauté (1754) – à consulter gratuitement dans notre bibliothèque numérique Medic@.

L’Ami des femmes comprend un frontispice allégorique réalisé sous la direction du célèbre graveur et dessinateur Nicolas Ponce (1746-1831). Le bain et l’habillement y sont respectivement suggérés par la nudité de la figure de la Beauté et par les petits génies tenant des plumes de paon symboles des modes changeantes. Les éléments de végétation et d’architecture antique ne permettent pas de déterminer précisément le lieu de cette scène mythologique. Cette dernière se déroule-t-elle dans le temple de la déesse Hygie entourée de rayons célestes ? Sommes-nous plutôt dans le sanctuaire de la Beauté, qui ne se distingue de Vénus que par la guirlande fleurie qui lui sert d’attribut[3] ? Les deux figures féminines font ici l’objet d’un culte commun, se faisant les incarnations d’un discours qui entremêle l’art de préserver ses charmes à celui d’entretenir sa santé.

On peut s’étonner de l’absence de toute figuration picturale du médecin à l’orée d’un texte qui, par son titre, lui accorde une place prépondérante. La légende de la gravure, l’imposant livre posé sur les genoux de la Beauté ainsi que la théâtralité qui préside à cette scène – voyez le rideau au bord supérieur du cadre – indiquent que le sujet de l’image est avant tout la mise en scène de l’écriture. C’est à travers cette représentation de l’acte d’écrire que la figure du médecin apparaît, et plus spécialement celle du médecin-écrivain mettant sa plume et les beautés du langage au service du discours hygiéniste.

S’éloignant du ton prescriptif du traité, le docteur et auteur cherche tout autant à séduire qu’à instruire les dames. Son style est parfois salué et souvent critiqué. La mise en place d’un contexte sans doute fictif destine les lettres qui composent L’Ami des femmes à une mère de famille en vue de l’éducation de ses filles. Le choix de la lettre n’est pas sans rappeler les correspondances entretenues entre patients et médecins (comme par exemple Samuel-Auguste Tissot). Il s’agit également de cibler le lectorat en se basant sur l’idée selon laquelle l’épistolaire serait un genre littéraire féminin. Les lettres sont en outre agrémentées de vignettes et de reproductions de médailles représentant différentes figures de Vénus. Tirées pour la plupart de la Dissertation sur les attributs de Vénus (1776) de l’abbé de La Chau, ces illustrations font de la déesse un modèle pour les lectrices et contribuent à faire de L’Ami des femmes un livre dont la matérialité tout autant que le propos doit demeurer plaisant.

Portons enfin notre attention sur l’épigraphe située en bas du frontispice et qui place d’emblée le texte sous le patronage de Jean-François Guichard (1731-1811), dramaturge et auteur de contes et de fables légères. Par son rythme et sa construction, l’alexandrin «La pudeur le demande et la santé l’exige» rapproche sur un même plan les deux notions. Le sens de ce vers à valeur de maxime joue de la quasi-synonymie et des nuances entre les verbes demander et exiger, la pudeur étant du côté du côté du souhait et la santé relevant d’un impératif. Le vers de Guichard fait référence aux critiques que suscitent les tenues vestimentaires féminines du début du XIXe siècle, jugées trop découvertes et trop légères par bien des médecins. Saint-Ursin est de ceux qui y voient un péril pour la santé et pour les mœurs, au point de considérer l’habillement des femmes à la mode comme un «appareil plus séduisant que la nudité[4]».

Les seuils de lecture en disent long sur la nature de cet ouvrage entre médecine et littérature galante. L’auteur se verra satisfait s’il «rencontre quelque fois [L’Ami des femmes] sur leur toilette, se glissant entre Gentil Bernard, Dumoustier, Bertin et Legouvé[5]». Ce souhait convie non seulement à de bien réjouissantes lectures mais témoigne encore de manière concrète de l’ambivalence d’un livre médical qui circule aisément de la bibliothèque à la toilette des dames.

Bénédicte PROT, Université de Fribourg

[1] Jean-François Sacombe, « L’ami des femmes », Lucine française, ou Recueil d’Observations médicales, chirurgicales, pharmaceutiques, historiques, critiques et littéraires, relatives à la Science des Accouchements, t. II, à Paris, Au bureau de la Lucine française, Chez Lefebvre, imprimeur, Ier. Vendémiaire An XII [1804], p. 438.

[2] Ibid.

[3] « Beauté », Iconologie par Figures, ou Traité complet des Allégories, Emblèmes, etc. Ouvrage utile aux Artistes, aux Amateurs, et pouvant servir à l’éducation des jeunes personnes, par MM. Gravelot et Cochin, Chez Le Pan, s.d., t. II, pp. 81-82.

[4] P. J. Marie de Saint-Ursin, L’Ami des femmes, ou lettres d’un médecin concernant l’influence de l’habillement des femmes sur leurs mœurs et leur santé, et la nécessité de l’usage habituel des bains en conservant leur costume actuel, avec un Appendix contenant des recettes cosmétiques et curatives, à Paris, chez Barba, 1804, p. 62.

[5] Ibid., p. xii.

Breaking news : La BIU Santé rejoint la Medical Heritage Library !

En octobre 2017, la BIU Santé a intégré la liste des principaux contributeurs de la Medical Heritage Library. Ainsi rejoint-elle un certain nombre d’établissements prestigieux tels que  :

La Medical Heritage Library (MHL) est un consortium des plus grandes bibliothèques de médecine du monde. Son but principal est de promouvoir la libre diffusion des ressources historiques en médecine. Elle s’emploie donc à créer une collection thématique cohérente et la plus complète possible pour l’étude de l’histoire de la médecine et des disciplines affiliées.  Dans cette perspective, la MHL c’est avant tout une bibliothèque numérique (hébergée sur la plateforme Internet Archive) où vous pouvez chercher, consulter, télécharger les collections historiques numérisées d’une quarantaine de bibliothèques américaines, canadiennes, britanniques (et donc maintenant française).

Vous trouverez par exemple dans MHL un nombre important de publicités pour les cigarettes datant des années 60 : https://archive.org/details/tobacco_leo23e00

À ce jour, plus de 215 000 documents numérisés de toutes sortes (imprimés, manuscrits, collection iconographique, enregistrements audios, enregistrements vidéos…) du XIIIe au XXe siècle sont accessibles en ligne. La BIU Santé va, petit à petit, compléter cet impressionnant catalogue avec ses propres documents qui sont (et resteront) disponibles en ligne dans la bibliothèque numérique Medic@ et la banque d’images et de portraits. Plus de 15 000 documents viendront ainsi s’ajouter à la MHL. La collection de la BIU Santé, complétée et enrichie par les collections des autres bibliothèques participantes, gagnera ainsi considérablement en valeur et en visibilité.

Autres gains majeurs, nos lecteurs vont pouvoir bénéficier dans ce nouvel environnement de fonctionnalités très pratiques, utiles, parfois très attendues. Depuis la plateforme Internet Archive :

  • Toutes les images seront directement téléchargeables en haute définition. (NB : Étant placées sous licence ouverte – Etalab, elles sont toutes librement et gratuitement réutilisables à condition de mention de la source «BIU Santé (Paris)»).
  • Nos documents feront tous l’objet d’une océrisation ;
  • Ils seront exportables dans un grand nombre de formats (Text, Daisy, PDF, Epub, Kindle…) ;

Le site de la MHL propose de son côté d’autres outils qui pourraient s’avérer aussi très utiles pour les chercheurs qui voudront exploiter les données que nous mettons à disposition :

  • Un moteur de recherche plein texte dans la totalité du contenu des documents de la collection «Medical Heritage Library» ou dans n’importe quel sous-ensemble (il sera par exemple possible de restreindre la recherche aux documents de la BIU Santé) a été développé par l’université de Harvard ;
  • Via l’outil ArchiveSpark, l’extraction des données (pour des opérations de fouille de texte par exemple) est à l’étude.
Thèse de médecine de Jean Poisson, 1682

Un échantillon est déjà en ligne, en attendant un versement plus massif dans les mois qui viennent. On y trouve le Traité complet de l’anatomie de l’homme de Bourgery et Jacob, le Traité des accouchemens de Maygrier, des manuscrits (les statuts des épiciers apothicaires de Paris, traité de médecine du XVe s.), des dessins originaux (de Léveillé et de Reignier), des albums photographiques (album de l’internat, album des blessés de la face de la guerre de 1870), le Traité des drogues de Pomet, quelques placards contre la peste nouvellement acquis… Vous y trouverez aussi quelques thèses illustrant la collection exceptionnelle que nous conservons à la BIU Santé (toutes les thèses de médecine de Paris depuis 1539) dont la thèse de baccalauréat en médecine de Jean Poisson, soutenue en 1682, présidée par Nicolas Liénard, dessinée, gravée et éditée par Louis Cossin, exceptionnelle par la taille imposante et la finesse de l’illustration de sa dédicace.

Bonne balade !

Solenne Coutagne

En savoir plus

L’annonce en anglais sur le site de la MHL

Madeleine Pelletier, psychiatre et militante

Photo Gallica

«Mon costume dit à l’homme : je suis ton égal.»

Avec son costume, sa canne, et son chapeau melon, elle fait passer un message fort.

Première femme interne en psychiatrie, Madeleine Pelletier (1874-1939) est connue pour son combat moral et politique en faveur de la lutte des femmes.

Née de parents pauvres, elle se voit refuser l’inscription au concours des internats des asiles en 1902, sous prétexte qu’elle est une femme. Elle décrochera finalement ce concours l’année qui suit, avec l’aide du journal féministe La Fronde, fondé par Marguerite Durand.

Parallèlement à son métier de psychiatre, Madeleine fréquente les mouvements communistes et anarchistes, où elle tente de faire entendre ses idées. Droit de vote des femmes, droit à l’avortement, mais aussi destruction du modèle familial sont ses chevaux de bataille. Elle, qui assume une chasteté militante, affiche des prises de position jugées extrêmes, même chez les féministes.

Ironie du sort, 30 ans après ses études à Saint-Anne, elle est internée, jugée coupable de «crime d’avortement» sur une fille de 13 ans. Elle mourra quelques mois plus tard.

On doit à Madeleine Pelletier de nombreuses publications telles que : la femme en lutte pour ses droits (1908), L’émancipation sexuelle de la femme (1911), ou encore Mon voyage aventureux en Russie communiste (1922). Elle créé même sa propre revue mensuelle, La suffragiste, en 1907.

Vous trouverez dans les collections de la BIU santé sa thèse d’exercice : L’association des idées dans la manie aiguë et dans la débilité mentale, ainsi qu’un ouvrage qui lui est consacré : Madeleine Pelletier, une féministe dans l’arène politique.

Si vous voulez en savoir plus France culture lui a récemment dédié un portrait :

Fabien LAFAGE

En savoir plus

Madeleine Pelletier (1874 – 1939), une femme d’avant-garde, sur le site de France Culture

Femme travestie en homme et morte il y a 75 ans, Madeleine Pelletier était la première interne en psychiatrie (HuffPost, 2014)

Revue e.sfhm et Prix 2017 de la SFHM

Nouveau numéro de la revue e.sfhm

Le dernier numéro de la revue e.sfhm (supplément illustré électronique à la revue Histoire des sciences médicales) vient de paraître.

Au sommaire :

  • Véronique Boudon-Millot. – De la thériaque pour les empereurs : de l’archiatre de Néron à celui des Sévère
  • Jean-François Hutin. – Les illustrations des Sonnets du Docteur Georges Camuset
  • Prix de thèse en histoire de la médecine Georges Robert 2016
  • Prix 2016 d’histoire de la médecine de l’Académie nationale de médecine et de la Société française d’histoire de la médecine

Prix 2017 de la SFHM

La Société Française d’Histoire de la Médecine décerne chaque année des prix donnant droit au titre de lauréat de la Société.

Les prix concernent des mémoires de master ou des thèses consacrés à l’histoire de la médecine, publiés ou soutenus, en langue française, durant les 24 derniers mois.

Ces prix sont attribués de la manière suivante :
– l’un au titre d’une thèse de médecine ;
– et l’autre au titre d’une thèse ou d’un mémoire de master émanant d’une faculté ou d’une école « autre que médicale ».

Félix Vicq d’Azyr. Frontispice du Traité d’anatomie et de physiologie (F-A Didot, 1786).

Chaque prix donne droit à une médaille de la Société gravée au nom du lauréat et sera accompagné d’un chèque (d’un montant variable décidé chaque année par le CA), à condition que le candidat assiste à la séance de proclamation et de remise des prix lors de la séance solennelle du mois de mars.

Les candidats doivent envoyer deux exemplaires de leur mémoire ou thèse, accompagnés d’une notice biographique, avant 31 décembre 2017 à l’adresse suivante (envoi possible par mail) :

M. Guy COBOLET
Bibliothèque Interuniversitaire de Santé
12, rue de l’École-de-Médecine
75270 PARIS Cedex 06

En savoir plus

Pour tout renseignement, contacter G. Cobolet, tél : 01 76 53 19 70 ; email : guy.cobolet@biusante.parisdescartes.fr

Page de présentation du prix et palmarès des années précédentes

Colloque « Santé et médecine à la cour de France » (19-20 octobre)

Un colloque international sur le thème «Santé et médecine à la cour de France» se tiendra les 19 et 20 octobre 2017 à l’Institut d’études avancées de Paris.

Il est organisé par Stanis Perez (MSH Paris Nord) et Jacqueline Vons (Université de Tours / SFHM) dans le cadre de l’axe de recherche «La médecine à la cour de France» de Cour de France.fr, et est consacré aux questions relevant de la santé et de la médecine à la cour de France, du Moyen Âge au XIXe siècle. Il a pour but d’approfondir l’étude du rôle des médecins, chirurgiens et apothicaires dans la vie quotidienne des espaces et des personnes de l’entourage royal ainsi que dans la mise en place de stratégies collectives pour éviter, fuir ou combattre les épidémies. Cette manifestation apportera également un éclairage nouveau sur le rôle joué par le mécénat royal en tant que vecteur de promotion et de diffusion de notions ou de pratiques médicales nouvelles. Les communications présentées interrogeront enfin l’image que les médecins de cour ont voulu ou ont pu donner d’eux-mêmes tant à leurs contemporains qu’à la postérité. Toutes ces pistes seront explorées à travers un panel de sources variées, à la lumière de l’historiographie récente et à la confluence tant de l’histoire des textes médicaux que de l’étude de la cour de France.

Les inscriptions (obligatoires et gratuites) sont ouvertes sur le site de l’IEA.

Programme

Jeudi 19 octobre

9h15 : accueil
9h45 : introduction au colloque par Stanis Perez

10h-12h – La cour, un lieu privilégié des connaissances et des pratiques médicales ?
Président de séance : Alexandre Lunel, Université Paris 8

Franck Collard, Université Paris X-Nanterre,
Entre savoir et pouvoir : les professionnels de la santé à la cour de Charles VII.

Évelyne Berriot-Salvadore, Université de Montpellier,
La cour, caution et vecteur d’un savoir médical vulgarisé

Stanis Perez, MSH Paris Nord,
Antimoine, médecine et alchimie à la cour autour de la guérison de Louis XIV en 1658

12h00-14h00 – Déjeuner

14h-18h – Quand la cour est malade…
Présidente de séance : Élisabeth Belmas, Université Paris XIII

Bénédicte Lecarpentier-Bertrand, Université Paris XII-Créteil
Des corps souffrants et sous surveillance : problèmes et soins de santé à la cour de France dans la première moitié du XVIIe siècle (années 1590-1670)

Xavier Le Person, Université Paris IV, IEP Paris,
Les Mercures de la politique. Les médecins de cour au chevet de la politique en France aux XVIe et XVIIe siècles

Justin Rivest, Université de Cambridge,
Médicaments curiaux, médicaments charitables : Le médecin de cour Adrien Helvétius et la distribution des remèdes aux soldats et aux pauvres sous Louis XIV

15h40-16h00 – Pause

Geneviève Xhayet, Université de Liège,
Curistes issus de la cour de France aux eaux de Spa

Charles-Eloi Vial, BnF,
Soigner et être malade à la cour de Napoléon Ier

Vendredi 20 octobre

9h30-12h – Le monde médical à la cour : influences et stratégies ….
Président de séance : Vivian Nutton, First Moscow State Medical University

Isabelle Coquillard, Université Paris X-Nanterre
L’affirmation d’un groupe professionnel à la cour

Joël Coste, EPHE (APHP),
Chirac, la Cour et la peste de Provence (1720-3)

Jacques Rouessé, Académie nationale de médecine,
La maladie de Louis XV l’été 1721

Jacqueline Vons, Université François-Rabelais de Tours, présidente de la SFHM
Pierre Dionis, chirurgien aulique (1643-1718)

12h00-14h00 – Déjeuner

14h-16h – Le médecin de cour en montre
Président de séance : Guy Cobolet, Bibliothèque interuniversitaire de Santé

Magdalena Koźluk, Université de Lödz,
Prescrire et plaire aux Seigneurs et aux Dames de la cour : Les Ordonnances de N. A de la Framboisière

Chloé Perrot, université de Lille 3, École du Louvre,
La Médecine absente. Portraits de médecins de cour du XVIe au XIXe siècle

Loïc Capron, Université Paris-Descartes, APHP,
Diafoirus père et fils, ou la revanche des médecins auliques ?

Conclusions du colloque par Jacqueline Vons

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Un fiascaud pour la rentrée des Dievx de la BIV

Après le hipster-triton du mois d’août, retour à des considérations plus terre à terre pour le calendrier de rentrée. En septembre, période de reprise des études, la BIU Santé est fière de vous présenter Fiascaud, carabin du milieu du XIXe s.

Télécharger le calendrier de septembre 2017.

L’image provient de la couverture de l’ouvrage suivant : Comment on étudie la médecine à Paris. Histoire de Fiascaud, (Bien Aimé) ex étudiant, ex noceur, viveur, polkeur, aujourd’hui père de famille et propriétaire. Consultable au pôle Médecine de la BIU Santé (cote 9175 ou 156766/395-24). Ou directement en ligne dans notre bibliothèque numérique Medic@ (plus de 16.000 ouvrages anciens numérisés, disponibles gratuitement en ligne).

De médecine, il ne sera au final guère question dans cet album, qui préfigure par sa forme les futures bandes dessinées. Mais on y retrouve bien des livres (sans doute) médicaux (p. 18), on y parle tisanes (p. 11), et on y souligne l’importance de la polka pour réussir dans le domaine médical (p. 15). Quant aux problèmes rencontrés par les étudiantEs en médecine de la même période, retrouvez-les dans le calendrier de juin dernier.

Étudiantes en médecine qu’on retrouve plus sérieuses dans une série de cartes postales Royer du début du XXe s. On peut notamment lire, en légende de la n°2 :

«N’allez pas croire que le béret sur l’oreille et le parapluie en bataille je vais comme un homme perdre mon temps à déambuler de brasserie en brasserie. Je travaille.»

En savoir plus

Pour davantage d’informations sur cet album, consulter l’excellent billet de blog sur Töpfferiana.