L. 75.  >
À Charles Spon,
le 12 décembre 1642

Monsieur, [a][1]

J’ai reçu votre belle et bonne lettre datée du 25e de novembre, par laquelle vous m’avez extrêmement obligé, [1] sur le fait principalement de M. Daléchamps, [2] duquel j’honore fort la mémoire. Je confesse lui avoir grande obligation : il m’a aidé autrefois en la lecture de Pline, [3] et ai appris aussi quelque chose en son herbier. [2] Vous me mandez qu’il est mort en l’an 1588, et ainsi l’ai-je trouvé marqué en mes mémoires. [3] Je ne sais de qui je l’avais, car M. Cahaignes, [4] médecin de Caen, [4][5] qui a fait Elogia illustrium Cadomensium[5] n’a pas remarqué ladite année, combien qu’il lui ait donné un éloge, mais assez stérile. J’espère de lui en donner quelque jour un plus ample, et de bon cœur, où je ferai mention de l’obligation que je vous ai pour la peine que vous avez prise de m’envoyer son épitaphe, afin que la postérité vous en sache gré. [6] Pour la relation de M. de Thou, [7] on m’a dit qu’il y en a deux différentes, toutes deux imprimées à Lyon. [6][8] Si cela est, je recommande le tout à votre diligence. J’aurai soin, en récompense, de ce qui se fera de deçà, j’amasse toutes les thèses [9] et rien ne m’échappera. Pour le sieur Meyssonnier, [10] vous m’obligerez fort de ses Opuscules, et encore plus de me mander, en ami et en secret, ce que vous pensez du personnage, quem puto non admodum sapere[7] J’ai vu ici un placard de lui contenant quelques règles prétendues de santé, quo nihil vidi miserabilius, cuius auctorem hic serio egisse non puto, si sapio[8] Je ne le tiens pas plus sage que ce fanfaron dans Plaute, [11] qui crus fractum obligaverat Æsculapio, etc[9] Depuis ma dernière par laquelle je vous avais mandé que j’ai vu le sieur Columbanus, [12] rien n’est ici arrivé que la mort de M. le cardinal de Richelieu, [13] le jeudi à midi, 4e de décembre. In dissecto cadavere deprehensus est abscessus insignis in parte infima thoracis, a quo mirum in modum permebatur diaphragma[10][14] Il n’a été que six jours malade, durant lesquels il a eu beaucoup de faiblesse, argumentum puris intus latentis certissimum, præsertim in corpore extenuatissimo et emaciatissimo[11] Tout le sang qu’on lui a tiré était très pourri, sans aucune fibre, avec une sérosité laiteuse. Eiusmodi serum γαλακτωδες sanguini supernatans, indicium est in febribus certissimæ malignitatis[12] Le quatrième jour de sa maladie, desperantibus medicis[13] on lui amena une femme qui lui fit avaler de la fiente de cheval [15] dans du vin blanc ; et trois heures après, un charlatan, [16][17] qui lui donna une pilule de laudanum ; [14][18][19] et hæc omnia frustra : Contra vim mortis non est medicamen in hortis[15][20] Il était revenu de Rueil [21] à Paris en intention de n’en sortir de tout l’hiver ; car il avait cela de commun avec les grands princes, il ne faisait qu’aller et venir, stare loco nescebat ; [16][22] mais la mort qu’il portait en son sein l’a enfin empêché d’aller plus loin ; et a vérifié ce distique de Martial [23][24] en mourant ici,

Nullo fata loco possis excludere, cum mors
Venerit, in medio Tibure Sardinia est
[17]

Le roi [25] a laissé les affaires en l’état qu’elles étaient, et les mêmes officiers ; mais je crois que cela ne durera pas. [18] Ubi nova adfuerint, plura tibi scribam[19] comme aussi de ce qui sera sur sa mort. Il sera enterré en Sorbonne. [26][27] On m’a dit aujourd’hui que M. Citois, [28] son médecin, se meurt aussi d’une fièvre continue. [29] Vous avez à Lyon un certain P. Labbé [30] qui a fait plusieurs épitaphes et inscriptions, et même quelquefois avec beaucoup de flatteries ; nec mirum, hæc enim est vera indoles gentis Loyoloticæ : colaces, mendaces, rapaces[20] Si tout ce qu’il a fait se pouvait trouver, je le désirerais volontiers, mais principalement celle qu’il a faite à feu M. le cardinal, où il l’appelle un grand mystère : Mysterium es, etc[21] Je vous prie de vous en souvenir, et de vous charger encore de cette commission, pour laquelle je vous aurai très grande obligation. Je voudrais bien pouvoir recouvrer un livre que je n’ai jamais pu voir, que cite M. Duchesne [31] en sa Bibliothèque des auteurs de l’histoire de France[22] page 112, sous ce titre : Tabulæ historicæ, triumphales et funerales Henrici iv, cognomento Magni, Galliarum et Navaræ regis, auctore Petro Cornu in suprema Curia Delphinatus regio senatore, Lugduni sumptibus Horatii Cardon, 1615, in‑fo[23][32] Vous m’obligerez fort si j’en puis avoir quelque nouvelle. L’an 1567, il a été imprimé à Genève in‑4o le Cordelier ou Franciscanus de Buchanan, [33][34] en vers français, dont l’auteur est Florent Chrestien. [24][35] Si jamais vous en découvrez une copie, je vous prie de ne la laisser pas aller ; je voudrais l’avoir et qu’il m’eût coûté grand’chose. Quand vous vous souviendrez de la mort du cardinal de Richelieu, lisez attentivement le chapitre 14 d’Isaïe [36] et repassez en votre mémoire les belles choses qu’il a faites en sa vie. [25] Je vous prie de me mander le nom de votre rue et l’adresse que vous voudrez que je mette sur mes lettres pour vous ; pour les miennes, adressez-les à votre serviteur, rue des Lavandières près de la chapelle aux Orfèvres, tout devant l’Étoile. [26][37] À Dieu, Monsieur.


a.

Ms BnF no 9357, fo 12 ; Triaire no lxxvii (pages 253‑258) ; Reveillé-Parise, no clxxii (tome i, pages 307‑309). Au revers, de la main de Charles Spon : « 1642, Paris sans date ; Lyon, 26 décembre ; Risposta, adi 30 décembre »

La lettre n’est pas signée, mais elle est de l’écriture de Patin. Elle est datée d’une main inconnue du 12 décembre 1642 ; mais on ne sait pourquoi, tous les éditeurs antérieurs l’ont classée au 12 décembre 1643. Richelieu étant mort le 4 décembre 1642. Il a été facile, grâce à la note de Spon apposée au revers, d’inscrire sur le manuscrit une date approximative ; mais cette date du 12 ne peut cependant être considérée comme d’une exactitude absolue, puisque nous savons par les différentes notes de Spon inscrites sur les lettres de Patin que l’espace de temps nécessaire à la transmission des lettres de Paris à Lyon variait parfois de plusieurs jours. Nous avons, en conséquence, maintenu la date de décembre sans préciser celle du jour qui ne pouvait être strictement déterminée (Triaire).

1.

Guy Patin accusait ici réception des réponses aux questions qu’il avait posées à Charles Spon dans sa lettre du 9 novembre.

2.

Jacques Daléchamps (v. note [2], lettre 71) a donné une Histoire naturelle de Pline (Lyon, Bathelémy Honorat, 1587, in‑fo ; seconde édition, Cologne, Samuel Crispinus, 1615), sous ce titre pompeux et immodeste :

C. Plinii Secundi Historiæ Mundi libri xxxvii. Opus omni quidem commendatione maius, sed nullis ad hunc diem editionibus, nulla cuiusquam singulari vel opera, vel industria, a mendis, quæ aut temporum iniquitate, aut superiorum ætatum negligentia, inter Latinos primæ notæ scriptorem hactenus occuparunt, satis unquam purgatum : Nunc vero, quanta potuit expectari fide, cura, diligentia, ex vetustissimorum excusorum et complurimum manuscriptorum codicum attentissima collatione, et auctoritate, sic detersum et emaculatum, ut ad pristinam eius integritatem et splendorem attulisse nostra hæc editio post alias omnes adiumenta sane maxima indicari merito possit. Accessere ad varias lectiones, quas multiplices in marginum spaciis tibi religiosissime indicamus, et repræsentamus, Castigationes et Anotationes eruditissimæ, quibus infinita Plinii loca cum Græcis et Latinis scriptoribus, illis præsertim, unde pleraque omnia sua ille sumpsit, summa cum utilitate conferuntur. Una cum Indice totius operis copiosissimo, additamentis rursus non pœnitendis aucto, locisque propemodum innumeris, quæ cum auctoris sensu non bene congruebant, accuratissime correcto, et restituto. Omnia quidem multorum antehac doctorum hominum, novissime vero laboriosis observationibus conquisita, et solerti iudicio pensitata, Iacobi Dalecampii, Medici, Cadomensis.

[Les 37 livres de l’Histoire du Monde de Pline l’Ancien. Ouvrage qui surpasse toutes les recommandations, mais aussi toutes les précédentes éditions, car à ce jour, aucune n’a mis autant de soin et d’assiduité à purger les fautes qui, soit par l’injustice du temps, soit par la négligence des siècles passés, ont jusqu’ici envahi le texte d’un auteur de premièrequalité parmi les Latins. Avec toute la fidélité, l’application et l’attention qu’on pouvait attendre du collationnement très attentif et de l’autorité des plus anciens exemplaires imprimés et d’un grand nombre de manuscrits, le voici aujourd’hui nettoyé et corrigé ; et ce de si belle manière, qu’il est possible de déclarer légitimement que notre présente édition l’a ramené à son intégrité et à son éclat premiers, et qu’elle la immensément secouru, après toutes celles qui l’ont précédée. On y a ajouté des commentaires nombreux et variés, que nous t’indiquons et te mettons immédiatement sous les yeux dans la marge des pages : ce sont des corrections et des annotations très érudites qui comparent fort utilement une infinité de passages de Pline avec les auteurs grecs et surtout latins dont il a tité toutes ses connaissances. Avec un très copieux index couvrant l’ensemble de l’ouvrage ; il a été augmenté d’additions qu’on n’aura pas à regretter, de citations presque innombrables, en ayant corrigé et restitué avec le plus grand soin ce qui ne s’accordait pas bien avec ce qu’entendait l’auteur. Le jugement habile de Jacques Daléchamps, médecin natif de Caën, a recueilli toutes les laborieuses observations des savants, anciens comme modernes, et les a jaugées].

Ce que Guy Patin appelait « son herbier » est son :

Historia generalis plantarum, in libros xviii per certas classes artificiose digesta ; Haec plusquam mille imaginibus plantarum locupletior superioribus, omnes propemodum quæ ab antiquis scriptoribus, Græcis, Latinis, Arabibus, nominantur  necnon eas quæ in Orientis atque Occidentis partibus, ante seculum nostrum incognitis, repertæ fuerunt, tibi exhibet ; habes etiam earundem plantarum peculiaria diversis nationibus nomina : habes amplas descriptiones, e quibus singularum genus, formam, ubi crescant et quo tempore vigeant, nativum temperamentum, vires denique in Medicina proprias cognosces. Adiecti sunt Indices, non solum Græci et Latini, sed aliarum quoque linguarum, locupletissimi.

[Histoire générale des plantes artistement réparties en 18 livres suivant une classification sûre. Par ses plus de mille dessins de plantes, elle est plus riche que celles qui l’ont précédée. Elle te montre presque toutes celles à qui les anciens auteurs grecs, latins et arabes ont donné un nom, ainsi que celles, précédemment inconnues, qu’on a trouvées dans les contrées d’Orient et d’Occident. Tu as aussi les noms particuliers que les diverses nations donnent à ces plantes. Pour chacune d’elle tu disposes d’une description : genre, aspect, où elle pousse et à quel moment elle fleurit, tempérament natif, vertus particulières en médecine. Avec à la fin de très riches index, non seulement grecs et latins, mais aussi dans les autres langues]. {a}


  1. Lyon, Guillaume Rouillé, 1586, 2 volumes in‑fo totalisant 1 922 pages (v. note [5], lettre de Charles Spon, datée du 5 mars 1658, pour Rouillé ou Roville) ; traduit en français par Jean Desmoulins, id. ibid. 1615, 2 volumes in‑fo.

Cet ouvrage a été rédigé par Desmoulins, mais Daléchamps en avait tracé le plan et fourni la plupart des matériaux. Il contient 2 686 planches, avec la description de 2 731 plantes, classées selon un ordre purement arbitraire, c’est-à-dire non générique, mais suivant leur grandeur, leur forme, leurs qualités, etc. (J. in Panckoucke).

3.

Guy Patin, en prévision de ce qu’il pourrait avoir à écrire ou à déclamer, notait soigneusement tout ce qu’il jugeait mémorable. Il enregistrait notamment les détails biographiques remarquables sur les personnes qu’il estimait, les « lieux communs » (citations surtout latines) glanées au fil de ses lectures, et le journal de sa correspondance (date, destinataire et contenu succinct des lettres qu’il envoyait). On retrouve des bribes de ce travail de fourmi, ce qu’il appelait ici « mes mémoires », dans les recueils manuscrits Montaiglon du Collège de France et de la BIU Santé : v. le Manuscrit 2007 de la Bibliothèque interuniversitaire de santé (recueil Peÿrilhe).

4.

Caen (Calvados) avait été la capitale des ducs de Normandie depuis le xe s. jusqu’au rattachement de la province à la Couronne de France au milieu du xve s. Elle était le siège d’une Université avec une École de médecine. Durant les guerres de Religion, Caen avait été un puissant fief calviniste.

5.

Elogiorum civium Cadomensium centuria prima. Authore Iacobo Cahagnesio Cadomensin Medicinæ Professore Regio [Première centurie d’éloges de citoyens de Caen. Par Jacques Cahaignes, natif de Caen, professeur royal de médecine] (Caen, Jacques Bassi, 1609, in‑4o).

Jacques Cahaignes (ou Cahagnes, Caen 1548-1612) était docteur en médecine et professeur de la Faculté de Caen (mais ne fut pas professeur au Collège de France). Il en a rédigé les statuts et a laissé plusieurs autres ouvrages médicaux (Jourdan in Panckoucke). Son éloge par Daléchamps porte le no 53 (pages 77‑79). C’est un hommage assez plat, dont la fin peut à juste titre irriter ceux qui prisent la précision des biographies :

His aliisque ingenii fœturis insignem doctrinæ famam per Galliam longe lateque propagavit, et gloriæ suæ multis annis supervixit, cum tamen initium gloriæ hominum sit ut plurimum finis vitæ. Adhuc enim vivens legit scriptas de se laudes, et iucundissimum immortalis gloriæ fructum degustavit, cuius dulcedine pellectus, licet iam decurso vitæ spatio terram spectaret, acrius tamen quam unquam alias lectioni et scriptioni vacabat, illos qui in stadio currunt imitatus, qui non quiescunt a cursu donec metam attigerint, imo quo metæ viciniores eo velocius gradum accelerant. Obiit iam plenus annis. Dices, matura fuit illa mors ; non ita est, nam semper mors illorum est immatura qui aliquid immortale parant, qui posteritatis curam habent, et gloriose factis, aut eruditis scriptis sui memoriam extendunt.

[Par ces productions, et bien d’autres, il a propagé de tous côtés en France l’insigne renom de la doctrine, et il a survécu de nombreuses années à sa gloire, bien que la gloire des hommes ne commence le plus souvent qu’avec leur mort. De fait, tant qu’il a vécu, il a lu les louanges qu’on écrivait de lui et s’est délecté du fruit très agréable d’une gloire immortelle, dont la suavité l’a enjôlé. Dans le déclin de la vie il aurait pu se contenter de contempler enfin le monde, mais il s’occupait à lire et à écrire avec plus d’acharnement que jamais, imitant ceux qui courent dans le stade, qui ne se reposent pas de leur effort tant qu’ils n’ont pas atteint le poteau d’arrivée, et même qui accélèrent quand ils approchent du but. Il est mort comblé d’années. Vous direz que cette mort vint à point ; mais non, car la mort vient toujours trop tôt à ceux qui préparent quelque chose d’immortel, qui se soucient de la postérité, et dont les hauts faits ou les écrits savants prolongent glorieusement le souvenir].

Daléchamps n’a fourni les dates de naissance et de mort d’aucun des personnages dont il a écrit l’éloge.

6.

La première de ces relations est anonyme (sans lieu, ni nom, ni date) : Particularité de tout ce qui s’est passé en la mort de Messieurs Henri Coiffier, marquis de Cinq-Mars, et de Thou, décapités le 12 septembre 1642.

La seconde est de François de Barancy (v. note [3], lettre 211) : Histoire véritable de tout ce qui s’est fait et passé dans la ville de Lyon en la mort de Messieurs de Cinq-Mars et de Thou, ensemble les interrogations qui leur ont été faites, et réponses à icelles (sans lieu ni nom, 1643, petit in‑fo de 28 pages). La narration quasi photographique des derniers instants des deux condamnés y fige encore le sang du lecteur (pages 22‑28) :

« L’exécuteur tira de son sac son couperet (qui était fait comme celui des bouchers, mais plus gros et carré). Enfin, ayant levé d’une grande résolution les yeux au ciel, il {a} dit : “ Allons, il faut mourir. Mon Dieu, ayez pitié de moi. ” Puis, d’une constance incroyable, sans être bandé, posa proprement son cou sur le poteau, tenant le visage droit tourné vers le devant de l’échafaud, et embrassa fortement de ses deux bras le poteau ; il ferma les yeux et la bouche, et attendit le coup que l’exécuteur lui vint donner assez lentement et pesamment, s’étant mis à sa gauche et tenant son couperet des deux mains ; en recevant le coup il poussa une voix forte comme Ah, qui fut étouffée dans son sang ; il leva les genoux de dessus le bloc comme pour se lever et retomba en la même assiette qu’il était. La tête n’étant pas entièrement séparée du corps par ce coup, l’exécuteur passa à la droite par derrière et prenant la tête par les cheveux de la main droite, de la gauche il scia avec son couperet une partie de la trachée-artère et la peau du cou qui n’était pas coupée ; après quoi il jeta la tête sur l’échafaud, qui de là bondit à terre, où l’on remarqua soigneusement qu’elle fit encore un demi-tour et palpita assez longtemps. Elle avait le visage tourné vers les religieuses de Saint-Pierre, {b} et le dessus de la tête vers l’échafaud, les yeux ouverts. Son corps demeura droit contre le poteau qu’il tenait toujours embrassé, tant que l’exécuteur le tira de là pour le dépouiller ; ce qu’il fit, et puis il le couvrit d’un drap et mit son manteau par-dessus. La tête ayant été rendue sur l’échafaud, elle fut mise auprès du corps sous le même drap. C’est une merveille incroyable qu’il ne témoigna jamais aucune peur ni trouble, ni aucune émotion, mais parut toujours gai, assuré, inébranlable et témoigna une si grande fermeté d’esprit que tous ceux qui le virent en sont encore dans l’étonnement. M. de Cinq-Mars étant mort, on leva la portière du carrosse, d’où M. de Thou sortit d’un visage riant, lequel ayant salué fort civilement ceux qui étaient là auprès, monta assez vite et généreusement {c} sur l’échafaud, tenant son manteau plié sur le bras droit […]. Après, il mit son cou sur le poteau (qu’un frère jésuite avait torché de son mouchoir parce qu’il était tout mouillé de sang) et demanda à ce frère s’il était bien, qui lui dit qu’il fallait qu’il avançât un peu davantage la tête sur le devant, ce qu’il fit. […] Et lors ses bras commencèrent à trembloter en attendant le coup, qui lui fut donné tout au haut du cou, trop près de la tête, duquel coup son cou n’étant coupé qu’à demi, le corps tomba au côté gauche du poteau, à la renverse, {d} le visage contre le ciel, remuant les jambes et les pieds et haussant faiblement les mains. Le bourreau le voulut renverser pour achever par où il avait commencé, mais effrayé des cris que l’on faisait contre lui, il lui donna trois ou quatre coups sur la gorge, et ainsi lui coupa la tête qui demeura sur l’échafaud. L’exécuteur l’ayant dépouillé porta son corps couvert d’un drap dans le carrosse qui les avait amenés, puis il y mit aussi celui de M. de Cinq-Mars, < avec > leurs têtes qui avaient encore toutes deux les yeux ouverts, particulièrement celle de M. de Thou, qui semblait être vivante. »


  1. Cinq-Mars.

  2. Actuel musée des beaux-Arts de Lyon (palais Saint-Pierre), sur le côté sud de la place des Terreaux.

  3. Bravement.

  4. Sur le dos.

7.

« pour qui je crois ne pas avoir beaucoup de goût. » Aucun des nombreux ouvrages de Lazare Meyssonnier ne porte le titre d’Opuscules ; v. note [4], lettre 72, pour une liste de quelques-uns de ses titres récents d’alors.

8.

« je n’ai rien vu de plus déplorable que ça ; si je ne me trompe, je ne crois pas que leur auteur ait agi là avec sérieux. »

9.

« qui avait réduit une jambe cassée à Esculape [v. note [5], lettre 551], etc. » ; passage des Ménechmes de Plaute (acte v, scène 3, vers 882-888) où le vieillard Senex dit à Ménechme Sosiclès (frère jumeau de Ménechme ravi) :

« J’ai mal aux reins de rester assis, mal aux yeux de regarder, en attendant que le médecin revienne de ses visites. L’ennuyeux personnage ! qu’il a eu de peine à en finir avec ses malades ! Il prétend qu’Esculape et Apollon avaient l’un le bras cassé, et l’autre la jambe, et qu’il les leur a réduits. {a} En y pensant bien, je doute si c’est un médecin que j’amène, ou un forgeron. Le voici qui s’avance à pas de fourmi. »


  1. Ait se obligasse crus fractum Æsculapio, Apollini autem brachium. V. note [8], lettre 997, pour Apollon.

10.

« À la dissection du cadavre, on a trouvé un abcès remarquable dans la partie la plus basse du thorax, qui, de manière étonnante, avait traversé le diaphragme. »

11.

« preuve très certaine du pus caché à l’intérieur, surtout dans un corps tout à fait diminué et épuisé. »

12.

« Cette sorte de sérosité laiteuse (galactôdes) qui surnage du sang est l’indice d’une malignité absolument certaine dans les fièvres. »

La « fibre » (filaments du sang) est l’armature solide du caillot sanguin ; elle porte aujourd’hui le nom de fibrine. Il faut croire que le sang du cardinal ne coagulait plus quand il stagnait dans la poêlette de saignée. La lactescence du sérum (partie liquide du sang sédimenté) s’observe surtout quand il existe une forte concentration de graisses (triglycérides) dans le sang. Au vu des connaissances présentes, ces deux signes « biologiques » pourraient faire évoquer un syndrome d’activation macrophagique (hémophagocytose), conséquence d’un état infectieux gravissime ; mais avec une bonne dose d’imagination…

13.

« les médecins ayant perdu tout espoir ».

14.

V. note [3], lettre 672, pour l’emploi médicinal des excréments d’animaux.

Hermant (tome i, chapitre xvi, pages 176‑177) a identifié ce charlatan qui vint au chevet de Richelieu mourant :

« Sa maladie s’augmentant parmi ses inquiétudes, il se servit d’un médecin de Troyes, nommé Le Fèvre, {a} qui lui donna son passeport pour l’autre monde par une pilule qui lui avança ses jours. On crut pendant quelque temps qu’il était guéri et il le croyait peut-être lui-même ; mais la crainte que l’on en avait se trouva sans fondement. Le roi le visita dans cette dernière extrémité. Il fit paraître jusqu’à la fin une constante politique, et M. Tonnelier, docteur en théologie, curé de Saint-Eustache, qui lui administra les sacrements, l’interrogeant, selon l’usage de l’Église, s’il ne demandait point pardon à ceux qu’il avait offensés et ne pardonnait point à ses ennemis, il lui répondit qu’il n’avait jamais eu d’autres ennemis que ceux du roi et de l’État et qu’il n’avait point de pardon à leur demander. Tant de sang qu’il avait répandu dans le cours de son ministère ne lui causait aucun scrupule, et au lieu que les plus justes craignent leurs meilleures actions, de peur de faire pour le monde et par un motif d’amour-propre ce qui ne doit être fait que pour Dieu, il n’avait pas la moindre peine ni la plus légère appréhension d’avoir recherché sa vengeance particulière sous le voile des intérêts de l’État. Il mourut dans cette paix extérieure le 4 décembre, jour de la Saint-Cyran, {b} à l’âge de 56 ans. On remarque que, comme on faisait ce jour-là dans le diocèse de Paris la fête des Saintes Reliques, l’épître que l’on chantait à la messe, et qui était tirée de la fin du xe chapitre des Proverbes et du commencement du xie, était une terrible conjoncture, et ceux qui ont assez de foi pour croire que tout est réglé dans l’ordre de la Providence en faisaient une étrange application. » {c}


  1. V. note [5], lettre 61.

  2. Cyran (Sigiramnus), ascète et saint français du viie s., avait fondé le monastère de Longoret à Saint-Michel-en-Brenne (plus tard nommé abbaye de Saint-Cyran) et l’abbaye de Méobecq dans le Berri. Hermant prenait ici malin plaisir à évoquer le souvenir de Jean Duvergier de Hauranne, abbé de Saint Cyran (v. note [2], lettre 94) et l’un des pires ennemis de Richelieu.

  3. « Jamais le juste ne sera ébranlé ! mais les méchants n’habiteront pas le pays. La bouche du juste produit la sagesse, la langue perverse sera arrachée. Les lèvres du juste distillent la bienveillance, la bouche des méchants la perversité. Abomination pour Yahvé : la balance fausse ! mais le poids juste lui plaît. Vienne l’insolence, la honte viendra ; chez les humbles se trouve la sagesse. Leur honnêteté conduit les hommes droits ; leur perversité mène à la ruine les perfides. Au jour de la fureur, la richesse sera sans profit, mais la justice délivre de la mort. La justice de l’homme intègre lui aplanit la voie, le méchant s’abîme dans la méchanceté » (Proverbes, 10:30-32, 11:1-5).

Le laudanum, mot venu par déformation de laudatum ou laudandum (digne de louange) ou, moins probablement, de ladanum (gomme du ciste, plante qui n’a aucun rapport avec le pavot), est une panacée, comme une sorte de thériaque (v. note [9], lettre 5), inventée par Paracelse. Elle était composée de feuilles d’or et de perles fines, mais aussi, et surtout quant aux effets, d’une bonne dose d’opium (v. note [8], lettre 118) : « on le mêle avec du sel de tartre, du sucre, de l’esprit de vin, des teintures, d’aromates, poudres cordiales, magistères, sels volatiles et autres extraits, et on s’en sert en une infinité de maladies » (Furetière). Guy Patin le tenait pour une drogue chimique et ne le prescrivait pas, lui préférant l’opium pur, quand les circonstances imposaient un puissant remède narcotique et antalgique (mais potentiellement mortel). Le laudanum, diversement modifié, notamment par l’Anglais Thomas Sydenham (mort en 1689), est resté en usage médical jusqu’à la fin du xixe s.

V. la Leçon de Guy Patin au Collège de France sur le laudanum et l’opium et l’observation x pour maints autres détails critiques sur cette préparation. La pilule narcotique était le mode d’administration le plus courant de l’opium et du laudanum.

15.

« et tout cela en vain : “ Contre la puissance de la mort, il n’y a pas de médicament dans les jardins. ” » Guy Patin a souvent cité cette sentence fataliste extraite de la Schola Salernitana [L’École de Salerne], dans les cinq vers De Salvia [La Sauge, v. note [2], lettre latine 307] (édition commentée de René Moreau, Paris, 1625 [v. note [4], lettre 12], chapitre xxxviii, page 406) :

Cur moriatur homo, cui salvia crescit in horto ?
Contra vim mortis non est medicamen in hortis.
Salvia confortat nervos manuumque tremores
tollit et eius ope febris acuta fugit.
Salvia, castoreumque, lavendula, primula veris
Nasturt. Athanas. hæc sanant paralytica membra.
Salvia salvatrix, naturae conciliatrix
.

[Pourquoi mourrait l’homme, quand pour lui pousse la sauge dans le jardin ? Contre la puissance de la mort, il n’y a pas de médicament dans les jardins. La sauge donne des forces, elle enlève les tremblements des mains, et la fièvre aiguë se dissipe sous son effet. Sauge, castoréum, lavande, primevère, nasturce, athanasia guérissent les membres paralytiques. La sauge est secourable, elle nous gagne les bonnes grâces de la nature].

Traduction en vers burlesques de Louis Martin (probable pseudonyme de Guy Patin, Paris, 1650, v. note [5], lettre 203 ; pages 30‑31) :

« Pourquoi faut-il que l’homme meure,
Puisqu’en son jardin à toute heure
Il a de la sauge planté ?
Dieu contre la mort n’a planté
Aucune herbe dessus la terre
Pour garder l’homme de la guerre,
Et des lacs que la mort a tendus
À son chétif individu.

Sauge pourtant les nerfs conforte,
Rend la main qui tremble plus forte,
À la fièvre donne congé,
Si j’ai bien le latin changé
Sauge, lavande et primevère
Redonnent la santé première
Aux malades du mal saint Pris,
Quand avec cresson ils sont pris,
Y joignant de la tanaisie,
Dont j’ai mangé par fantaisie,
Sauge sauve de plusieurs maux,
Ainsi s’accordent ces deux mots. »

Sur la mort de Richelieu, Triaire cite la lettre de F.S.D.I.C. (le frère Séraphin de Jésus, alias Christophe Billard, carme tourangeau mort en 1644) au marquis de Fontenay-Mareuil, datée de Paris le 6 décembre 1642 (BnF L.B36.3315) :

« Richelieu succomba à une pneumonie. Cette affection aiguë n’était que le dénouement d’un état morbide préexistant depuis longtemps, surtout depuis son séjour en Roussillon. Voici la seule relation médicale qu’on possède sur sa fin : “ Le 28 novembre, le cardinal fut pris d’un violent frisson et d’un point de côté. Bouvard, appelé, le saigna deux fois dans la nuit du dimanche au lundi ; mais le malade cracha du sang et la fièvre redoubla. Du lundi au mardi, la douleur ayant augmenté, on pratiqua deux nouvelles saignées. Le mardi 2 décembre eut lieu une consultation dans laquelle il fut décidé de pratiquer une nouvelle émission sanguine et d’avoir recours aux purgatifs. La fièvre ayant redoublé le soir, on fit deux nouvelles saignées. Le mercredi, 3 décembre, un empirique de Troyes, nommé Le Fèvre, fut appelé et administra une pilule qui sembla donner un peu de soulagement. Enfin, le jeudi 4 décembre, septième jour de la maladie, le cardinal fut pris de sueurs froides et expira à midi. ” On ouvrit le crâne et on examina le cerveau. “ Il ne faut pas s’étonner, puisqu’on lui a trouvé tous les organes de l’entendement doublés et triplés, s’il avait un esprit qui s’arrêtait où il lui plaisait et s’en dégageait quand il voulait, avec autant de facilité qu’il semblait qu’il y eût autant de différents esprits en lui comme étaient différentes les affaires qu’il maniait. ” »

16.

« il ne savait pas tenir en place ».

Description du cheval par Virgile (Géorgiques, livre iii, vers 83‑85) :

Tum, si qua sonum procul arma dedere,
Stare loco nescit, micat auribus et tremit artus,
Collectumque premens voluit sub naribus ignem
.

[Puis, si au loin retentit le bruit des armes, il ne sait tenir en place, il dresse les oreilles, tressaille de tous ses membres, et roule en frémissant le feu qui s’est amassé dans ses naseaux].

17.

« Il n’y a pas de lieu sur terre où tu puisses échapper à ton destin ; quand la mort vient, la Sardaigne se trouve au beau milieu de Tibur » (Martial, Epigrammes, livre iv, 60, vers 5‑6). Tibur est un faubourg de Rome (Tivoli) et la Sardaigne était un endroit proverbialement insalubre.

Martial (Bibilis, nord de l’Espagne 40-ibid. 104) est un poète latin contemporain de Néron. Guy Patin le prisait fort et a largement puisé dans ses 14 livres d’Épigrammes.

18.

Mémoires de Henri de Campion (page 164) :

« Le roi, après la mort du cardinal de Richelieu, se servit des mêmes ministres qu’il lui avait donnés, et prit pour chef de son Conseil, à sa place et à sa recommandation, le cardinal Mazarin, sa créature ; homme qui s’était employé heureusement dans plusieurs grandes négociations, d’un esprit souple, accommodant et tout à fait propre pour le cabinet. Quoiqu’il fût italien, le crédit de la France lui avait procuré le cardinalat, et il y avait si longtemps qu’il était à la cour qu’il la connaissait parfaitement. Il savait que la plupart des princes et des grands seigneurs avaient été persécutés par son prédécesseur, qui ne s’était maintenu que par la violence, et jugea qu’un étranger comme lui, sans amis ni parents, devait s’établir par d’autres voies. Il chercha à s’appuyer des plus considérables personnages du royaume »

Un peu plus haut (page 160), Campion, un des hommes de confiance du duc de Beaufort (v. note [14], lettre 93), alors réfugié en Angleterre, donne un éclairage sur la manière dont Louis xiii se comporta à la mort de Richelieu :

« En apprenant cette nouvelle, qui donna aux exilés la joie qu’on peut penser, le duc de Beaufort reçut une lettre de la reine [Anne d’Autriche], près de laquelle il était alors tout à fait bien, et qui le priait de repasser en France. Cela nous fit partir en poste la même nuit, les mêmes que nous étions venus avec le duc. Nous nous embarquâmes à Rye et fûmes mettre pied à terre à Saint-Valéry-en-Caux. Nous y achetâmes des chevaux sans nous faire connaître, ayant appris en arrivant qu’il y avait ordre aux villes d’arrêter tous les Français qui viendraient d’Angleterre. Le roi avait fait ce commandement afin de tenir encore quelque temps les exilés hors du royaume, pour faire croire que ce qui s’était fait pendant la vie du cardinal avait été de son pur mouvement, ne craignant rien tant, alors qu’il se voyait libre, sinon que l’on crût qu’il avait été gouverné par un de ses sujets. Cette fantaisie l’obligea à faire le sévère encore quelques mois contre son sentiment. »

19.

« Quand des nouvelles seront parvenues, je vous en écrirai plus ».

20.

« et il n’y a rien d’étonnant à cela, ce sont en effet des qualités naturelles à la race loyolitique : flatteries, mensonges, rapacité » (passage écrit dans la marge).

Pierre Labbé (Clermont-Ferrand 1594-1678), admis dans l’Ordre des jésuites en 1612, avait enseigné la grammaire, puis les humanités, la rhétorique et la philosophie, avant d’être, 18 années durant, professeur de théologie. Il était ensuite devenu tour à tour recteur de cinq collèges de son Ordre (allant et venant entre Arles, Grenoble et Lyon). Archéologue et poète, dévoué à Richelieu, le P. Labbé avait notamment composé :

Au fil de ses lettres, Guy Patin a cité quelques-unes de ses autres productions.

21.

Le Mysterium politicum de Pierre Labbé, texte latin de trois pages, en prose, commence par ces mots :

Hoc tu ipse mysterium es (cardinalis Eminentissime). Aspicit te Anglia, nec agnoscit ; legit te Germania, nec intelligit ; studet tibi Italia, nec te capit ; evoluit Hispania, nec detegit ; admiratur Europa te, et te nescit, Mysterium es. Pates omnibus et lates ; sentiris, et nesciris ; occultus et publicus ; negotiosus, et vacuus ; absens et præsens ; otiari videris ubi es, negotiaris ubi non es ; moves Europam, et quiescis ; exerces omnia ingenia, et ludis, Mysterium es […].

[C’est que vous êtes vous-même, Éminentissime cardinal, un mystère. L’Angleterre vous regarde, mais ne vous connaît pas ; l’Allemagne vous lit, mais ne vous comprend pas ; l’Italie vous recherche, mais ne vous attrape pas ; l’Espagne vous scrute, mais ne vous dévoile pas ; vous émerveillez l’Europe, mais elle vous ignore. Vous êtes un mystère. Vous êtes ouvert à tous, mais vous en cachez ; on vous perçoit, mais on ne vous connaît pas ; dissimulé et public ; occupé et oisif ; absent et présent ; on vous voit vous reposer là où vous êtes, négocier là où vous n’êtes pas ; vous remuez l’Europe, mais vous vous reposez ; vous pratiquez toutes les activités de l’esprit, mais vous jouez. Vous êtes un mystère (…)].

Suivent quatre autres déclamations fournissant des motifs pour considérer que le cardinal est un mystère politique, tant il est habile avec les ennemis de la France.

22.

André Duchesne (L’Île-Bouchard, Touraine 1584-Verrières 1640) a consacré sa vie aux travaux historiques et géographiques. Il étudia à Loudun d’abord, à Paris ensuite, sous l’érudit Boulanger, et devint géographe et historiographe du roi. Richelieu avait coutume de l’appeler familièrement « mon bon voisin », à cause de la proximité de leurs lieux de naissance. Duchesne mourut écrasé sous une charrette en se rendant à sa maison de campagne de Verrières, près de Paris (G.D.U. xixe s.).

Il a laissé de nombreux ouvrages, dont celui que Guy Patin citait ici : Historiæ Francorum scriptores coætanæi ab ipsius gentis origine usque ad Philippi iv dicti Pulchri tempora, cum epistolis regum, pontificum, ducum, abbatum, etc., opera ac studio Andreæ Duchesne et Philippi, Andreæ filii, post mortem patris [Écrivains contemporains de l’histoire des Français, depuis l’origine de cette nation jusqu’à l’époque de Philippe iv dit le Bel, avec les lettres des rois, des pontifes, des ducs, des abbés, etc., par les soins et l’étude d’André Duchesne et de Philippe, fils d’André, après la mort de son père] (Paris, Sébastien Cramoisy, 1636-1649, 5 tomes in‑fo). Le cinquième et dernier tome (v. note [54] du Naudæana 2) a été publié par François Duchesne (v. note [7], lettre 481), autre fils d’André.

23.

« Tableaux historiques, triomphaux et funèbres de Henri iv, surnommé le Grand, roi de France et de Navarre, par Pierre Cornu conseiller au parlement de Dauphiné, Lyon, Horace Cardon, 1615, in‑fo » ; référence exacte d’un ouvrage de Pierre de Cornu, poète et magistrat de Grenoble, qui mourut en 1615.

24.

Édition (Genève, 1567) du Franciscanus de George Buchanan traduit en vers français (Le Cordelier… v. note [11], lettre 65). Son auteur, l’érudit calviniste français, Florent Chrestien (Quintus Septimius Florens Christianus, Orléans 1541-Vendôme 1596), était disciple de Henri Estienne et ami de Joseph Scaliger (v. note [2], lettre latine 426). Il fut précepteur de Henri de Navarre (futur roi Henri iv) et collabora à la Satire Ménippée (v. note [18], lettre 310). Outre ses traductions de Buchanan, il a notamment publié :

25.

Guy Patin avait perdu sa bonne et respectueuse opinion du cardinal depuis qu’il avait fait mettre à mort François-Auguste de Thou. Il devait ici singulièrement penser aux versets 14:3‑7 du Livre d’Isaïe :

« Et au jour où Yahvé te fera reposer de ton labeur, de tes anxiétés et de la dure servitude qu’on t’avait imposée, tu entonneras cette satire contre le roi de Babylone, {a} et tu diras : Comment a fini le tyran, a cessé l’oppression ? Yahvé a brisé le talon des méchants, le sceptre des dominateurs ! Il frappait avec fureur les peuples de coups sans relâche ; dans sa colère, il tenait les nations sous le joug par une persécution sans répit. Toute la terre est en repos, elle est tranquille, elle éclate en cris d’allégresse. »


  1. Nabuchodonosor, v. notule {a}, note [28] du Borboniana 9 manuscrit.

26.

V. note [14], lettre 73. Ces deux dernières phrases ont été supprimées dans l’édition de Reveillé-Parise. Guy Patin y répétait en effet ce qu’il avait demandé et dit à Charles Spon de leurs adresses respectives à la fin de sa lettre du 24 novembre : il marquait avec insistance son souhait de pouvoir correspondre régulièrement avec son nouvel ami lyonnais, en utilisant la poste (et non plus seulement la voie des porteurs).


Correspondance complète de Guy Patin et autres écrits, édités par Loïc Capron. – Paris : Bibliothèque interuniversitaire de santé, 2018. – À Charles Spon, le 12 décembre 1642

Adresse permanente : https://www.biusante.parisdescartes.fr/patin/?do=pg&let=0075

(Consulté le 18/04/2024)

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