L. 201.  >
À Charles Spon,
le 8 octobre 1649

Monsieur, [a][1]

Outre ma lettre du 22e de septembre que vous recevrez quant et celle-ci, [1] je vous dirai que le bruit de la cour porte que les deux princes [2][3] ont accordé avec la reine, [4] laquelle se retient le droit de la collation des bénéfices vacants ; mais pour les affaires d’État, elles seront dorénavant régies par quatre conseillers qui n’ouvriront aucuns paquets, ni ne feront aucunes dépêches ni réponses que par l’avis des dits deux princes ; et cela se dit bien, mais nous ne voyons pas qu’il s’exécute de la sorte. [2] Toute la querelle du prince de Condé est un mystère. Il ne fait plus le mauvais dès qu’on lui donne de l’argent. Nous avons ici nouvelles de Rome que Famianus Strada [5] y est mort. C’est celui qui nous a donné deux volumes de bello Belgico[3] Le P. Petau, [6] qui est ici un des plus anciens de la Société, qui a fait imprimer, entre autres choses, Dogmatum theologicorum partes tres, fait ici imprimer deux volumes de Incarnatione ; [4] et combien que sa présence soit ici nécessaire en apparence pour la correction de son livre, il abandonne néanmoins tout et part dans huit jours pour s’en aller à Rome, en qualité de député, pour y assister au nom de sa province à l’élection d’un général. [5] Il a fait quantité de petits volumes et outre plus, il fit ici imprimer il y a près de 30 ans deux volumes in‑fo de Doctrina temporum[6] dans lesquels il a combattu à outrance, sinon de raisons, au moins d’injures, l’incomparable Joseph Scaliger ; [7] et néanmoins, soit qu’il ait trop dit d’injures ou qu’il n’ait pas bien pris ses mesures, faute de raison, sa doctrine n’a pas été bien suivie et ce sien livre n’a pas été de bon débit. Il a pareillement perdu son escrime contre M. Arnauld, [8] docteur de Sorbonne, [9] qui avait fait le beau livre De la fréquente Communion, dans lequel les loyolites sont si bien drapés[7][10] J’apprends même que ses trois tomes Dogmatum theologicorum ne sont pas bien reçus en théologie et que le libraire n’est pas content du débit qu’il en a ; et toutefois, les jésuites ne laissent pas de l’exalter comme un prétendu parfait et comme le plus grand homme qui ait jamais été. Il avait fait amitié avec feu M. Grotius, [11] qui haïssait tous les jésuites et en disait toujours du mal. Comme je visitai un jour ce M. Grotius, je vis ces trois tomes sur sa table ; je lui en demandai son avis, il me répondit sur-le-champ : Le P. Petau, qui est mon ami, me les a donnés ; je les ai lus tout entiers ; c’est un étrange fatras. Cela n’est point de la théologie, les jésuites n’entendent point la vérité de cette science ; il n’y a là-dedans qu’une chose de bien, c’est que l’auteur entend bien le grec, lequel y est fidèlement traduit. Sed dic sodes si morosus aliquis censor mearum epistolarum interveniret, et quæreret, cui bono et quorsum tam multa de Petavio ? Statim illi responderem, nec aliter possem : Adeo mihi suave est et iucundum colloqui cum amico, ut, quoniam mihi deest quod scribam, ad eiusmodi nugas Loyoliticas confugiam, quibus impleam paginam[8][12] Je quitte donc cet entretien et laisse de bon cœur la troupe loyolitique pour ce qu’elle vaut afin d’achever ma lettre de quelque chose qui vaille mieux que les écrits de ces animaux.

Je veux vous faire part, comme au meilleur de mes amis, d’une chose qui m’est arrivée cette semaine avec joie et contentement. Ne pensez pas que ce soit une succession, ce n’est rien de pareil, et néanmoins j’en suis fort réjoui. C’est que l’incomparable M. de Saumaise [13] m’a envoyé une belle lettre écrite de sa main par laquelle il me recommande fort pathétiquement un jeune homme allemand porteur d’icelle qui vient ici pour étudier en médecine, à quoi il a déjà commencé in variis Academiis Germaniæ[9] à ce qu’il dit. Sa lettre est toute belle et courtoise, et au bas d’icelle sont les mots suivants : Si vous me demandez ce que je fais à présent, je suis sur l’Apologie que le roi d’Angleterre m’a chargé de faire pour le feu roi son père. Elle s’imprime et sera bientôt achevée. C’est un sujet assez chatouilleux et qui ne contentera pas tout le monde. Pour moi, je serai toujours content quand vous me ferez la faveur de croire que je suis, etc. [10][14][15] J’ai promis à cet Allemand que je ferais pour lui, et à cause de M. de Saumaise, tout ce qu’il voudrait ; et lui ai parlé comme fit le Soleil à Phaéton : [11][16][17]

Quoque minus dubites, quodvis pete munus, et illud
Me tribuente feres : promissi testis adesto
Diis iuranda palus, oculis incognita nostris
[12]

C’est pourquoi je lui ai offert ce qu’un certain promettait et offrait dans Térence, [18] rem, opem, operam et consilium ; [13] et de l’argent aussi quand il en voudra. Il demande à voir des dissections anatomiques, des opérations de chirurgie, des disputes en nos Écoles, quelque entrée dans les hôpitaux. Il aura tout cela et de plus, je lui ai promis par-dessus le marché que je le mènerai voir quelques malades avec moi et que je lui ferai voir de nos consultations où entre autres il connaîtra MM. Riolan, [19][20] Moreau [21] et autres. J’ai fait réponse au dit M. de Saumaise et comme j’ai porté ma lettre chez M. de Sarrau, [22] conseiller de la Cour, son ami et le mien, pour le prier de mettre la mienne dans son paquet, il m’a appris deux choses dont je veux vous faire part. Pour la première, ce sont deux vers qu’il a fait mettre sur le tableau du dit M. de Saumaise, que voici :

Quantum scire hominem divina potentia vellet,
Ostendit terris, Salmasiumque dedit
[14]

L’autre est que les Elsevier [23][24] s’en vont réimprimer en Hollande les Épîtres latines de M. Grotius en un gros volume in‑4o, en ayant grande quantité qu’ils ont recouvrées deçà delà. [15] Il m’a dit aussi que l’on a trouvé chez M. Grotius après sa mort des lettres de feu M. Vossius, [25] assez pour en faire trois volumes, et qu’elles sont toutes très bonnes, comme aussi celles de feu M. Grotius chez M. Vossius, et que tout cela s’imprimera. [16] Voilà des nouvelles qui me réjouissent.

Ce 6e d’octobre. J’ai ce matin rencontré dans la rue un bénéficier angevin, homme de savoir et d’esprit, nommé M. Ménage, [26] lequel m’a dit que M. Heinsius [27] le fils (duquel il était ici fort l’intime) lui avait écrit depuis huit jours qu’il s’en allait faire un voyage en Suède pour y voir la reine, [17][28] laquelle a envie de le voir ; et qu’il espère d’obtenir d’elle qu’il sera payé de quelque somme notable qui était due à son oncle Janus Rutgersius, [29] frère de sa mère, lequel a été par ci-devant ambassadeur du roi de Suède vers les États de Hollande. Vous pouvez en avoir vu Varias lectiones illius Rutgersii, in‑4o, ce n’est pas un mauvais livre pour ce qu’il contient ; si vous le désirez, il se rencontre quelquefois ici. [18] Plusieurs grands seigneurs font ici des assemblées chez M. le marquis de Sourdis [30] où, dit-on, on dresse un cahier de plaintes pour être présenté à la reine. [19] C’est toujours un contrecoup qui ira donner contre la tête du Mazarin [31] et contre le gouvernement présent ; mais ce qui est de bon pour lui, c’est que tout le monde l’attaque en particulier et non tous ensemble. C’est pourquoi on peut dire d’eux ce que César [32] a écrit des anciens Gaulois, Dum pugnant singuli, vincuntur universi[20][33] Je pense pourtant qu’à la fin, il en sera mauvais marchand.

Voilà qu’il vient de sortir de céans un honnête homme nommé M. Huguetan, [34] avocat à Lyon, frère du libraire, qui m’est venu saluer de votre part. [21] Il n’a guère tardé céans voyant que plusieurs me demandaient, il m’a promis de me revenir voir d’autres fois. Je vous prie de faire mes très humbles recommandations à M. Huguetan [35] son frère, à M. Ravaud [36] et à l’excellent homme M. Gras [37] que j’honore particulièrement, aussi véritablement que je suis de toute ma puissance et en pur effet, [22] Monsieur, votre très humble et obéissant serviteur,

Patin.

De Paris, ce vendredi au soir, 8e d’octobre 1649.


a.

Ms BnF no 9357, fo 62 ; Reveillé-Parise, no ccxiv (tome i, pages 484‑487) ; Jestaz no 16 (tome i, pages 523‑528).

Le 2e paragraphe et sa citation d’Ovide se lisent dans Du Four (édition princeps, 1683), no xxix (pages 101‑104), Bulderen, no xlix (tome i, pages 139‑141), lettre bizarrement datée du 18 novembre 1650 et certainement fabriquée par les premiers éditeurs.

1.

En même temps que celle-ci : Guy Patin avait emprunté le même courrier pour porter les deux lettres à Charles Spon, la présente et précédente (datée du 24, et non du 22 septembre).

2.

L’accommodement du 27 septembre stipulait entre autres que « les bénéfices seulement demeureront en la pleine disposition de la reine » (v. note [10], lettre 198). Il y était aussi stipulé « qu’aucunes dépêches ne seront faites ni ouvertes pour les affaires du roi que dans le Conseil ; que toutes les charges, gouvernements et autres grâces seront donnés en plein Conseil à la pluralité des voix » (Journal de la Fronde, volume i, fo 103 ro).

Les deux princes étaient Condé et Gaston d’Orléans.

3.

Deux décades « sur la guerre de Flandre » de Famiano Strada, mort le 6 septembre 1649 (v. note [11], lettre 152).

4.

De Incarnatione Verbi [L’Incarnation du Verbe], quatrième tome des Theologica dogmata [Dogmes théologiques, dont les trois premiers (partes tres) avaient paru successivement depuis 1640] du P. Denis Petau, jésuite (v. note [8], lettre 72), allait sortir des presses de Sébastien Cramoisy en 1650, à Paris.

5.

Vincenzo Carafa (v. note [5], lettre 132) étant mort le 6 juin 1649, on allait procéder à Rome à l’élection d’un nouveau général des jésuites : ce fut Francesco Piccolomini, élu le 21 décembre suivant, mais qui allait décéder le 17 juin 1651.

6.

V. note [4], lettre 119, pour les deux tomes de Denis Petau de Doctrina temporum [sur la science des temps] (Paris, 1627) : Joseph Scaliger est omniprésent dans ce livre de chronologie qui est extrêmement critique à son encontre.

7.

En riposte au De la fréquente Communion d’Antoine ii Arnauld (v. note [47], lettre 101), paru en 1643, Denis Petau avait publié un Abrégé de la doctrine ou livre de la fréquente Communion et de la réfutation comprise dans les livres de la pénitence publique et de la préparation à la communion (sans lieu ni nom, vers 1644).

8.

C’est à nouveau Guy Patin (et non plus Hugo Grotius) qui s’exprime :

« Mais dites, s’il vous plaît, si quelque censeur morose de mes lettres survenait, et demandait dans quel but et pour le bien de qui je confie tant de choses au sujet du P. Petau ? Je lui répondrais aussitôt et sans pouvoir faire autrement : il m’est si doux et agréable de deviser avec un ami, et parce que si j’étais à court d’idées pour écrire, je recourrais aux sornettes jésuitiques de ce genre, dont je remplirais ma page. »

Joseph-Henri Reveillé-Parise a glosé sur ce passage :

« Si nous devons ces lettres à des motifs aussi futiles en apparence, il faut nous en féliciter. Ces bagatelles, qu’il emploie, dit-il, pour remplir ses pages, sont pourtant marquées au coin d’une incomparable vigueur d’esprit. On doit seulement lui reprocher d’être un peu trop de l’avis de son cher ami Gabriel Naudé, répétant souvent l’admiration, ce vrai signe de notre faiblesse. » {a}


  1. Ce sentencieux commentaire est un bel échantillon d’effronterie car Reveillé-Parise s’est lui-même complu à être ce « censeur morose » que redoutait Patin. Ne serait-ce qu’ici, il a soigneusement supprimé tout ce qui médisait des jésuites : le iesuiticas de ce passage latin, et toute la phrase française qui la suit.

9.

« dans diverses facultés d’Allemagne, ».

10.

V. note [52], lettre 176, pour la Defensio regia… de Claude i Saumaise.

11.

Phaéton, « fils du Soleil et de Clymène, ayant eu un différend avec Epaphus, qui lui reprochait de n’être pas le fils du Soleil, alla s’en plaindre à sa mère, qui le renvoya au Soleil pour apprendre de sa propre bouche la vérité de sa naissance. Phaéton se rendit donc au palais du Soleil, lui expliqua le sujet de sa venue et le conjura de lui accorder une grâce, sans la spécifier. Le Soleil, cédant aux mouvements de l’amour paternel, jura par le Styx de ne lui rien refuser. Alors le jeune téméraire lui demanda la permission d’éclairer le monde pendant un jour seulement, en conduisant son char. Le Soleil, engagé par un serment irrévocable, fit en vain tous ses efforts pour détourner son fils d’une entreprise si difficile. Les chevaux du Soleil s’aperçoivent bientôt du changement de conducteur. Ne reconnaissant plus la main de leur maître, ils se détournent de la route ordinaire ; et tantôt montant trop haut, ils menacent le ciel d’un embrasement inévitable ; tantôt descendant trop bas, ils tarissent les rivières et brûlent les montagnes. Jupiter, pour prévenir le bouleversement de l’univers, renverse d’un coup de foudre le fils du Soleil et le précipite dans l’Éridan » (Fr. Noël).

12.

« Sans le moindre doute, demande n’importe quel service pour obtenir de moi que je te le concède : je l’ai promis, et que le Styx, inconnu de nos yeux, par lequel doivent jurer les dieux, en soit témoin » (Ovide, Métamorphoses, livre ii, vers 35-37).

Ce passage, depuis « Je vous veux faire part… », se retrouve presque mot pour mot dans la 3e partie des lettres xlix (tome i, pages 139‑140) de l’édition Bulderen, à Charles Spon, et ccclxxxix de l’édition Reveillé-Parise (tome ii, pages 568‑570), à André Falconet, mais toutes deux datées du 18 novembre 1650. Il s’agit donc, sans contestation possible, de fabrications (v. note [23], lettre 207).

13.

« mon avoir, mon aide, mon attention et mon conseil » ; réminiscence possible, mais altérée, de L’Andrienne de Térence (acte ii, scène 1, vers 320, avec remerciements à Marie-France Claerebout pour avoir débusqué cette référence) :

Ad te advenio, spem, salutem, auxilium, consilium expetens.

[Je viens à toi pour te demander espoir, salut, aide et conseil].

14.

« La puissance divine aurait voulu savoir combien l’homme est grand ; elle s’est montrée sur terre et elle a donné Saumaise. »

Claude Sarrau (Sarravius, né en Guyenne 1599, mort à Paris le 19 mai 1651, v. note [3], lettre latine 237) avait été nommé conseiller au parlement de Rouen en 1627, puis à celui de Paris en 1635, en la deuxième des Enquêtes. Il avait été renvoyé l’année suivante à Rouen avec d’autres conseillers pour y faire l’intérim pendant l’exil du parlement de Normandie, interdit de séance par Richelieu. Sarrau fit alors tout son possible pour adoucir la punition de ses anciens collègues. Réputé pour sa grande érudition, il entretenait des relations épistolaires avec la plupart des savants illustres de l’Europe (Saumaise, Grotius, Ménage…). Christine de Suède figurait aussi parmi ses correspondants, il était son agent à Paris pour l’acquisition de livres rares et de manuscrits (Michaud et Popoff, no 2246). V. note [6], lettre 379, pour ses Epistolæ publiées à Orange en 1654.

15.

Hugonis Grotii Epistolæ ad Gallos, secunda editio, priore auctior et emendatior.

[Lettres de Hugo Grotius {a} à des Français, seconde édition {b} augmentée et corrigée]. {c}


  1. Mort en 1645, v. note [2], lettre 53.

  2. V. note [73], lettre 150, pour la première édition (Leyde, 1648).

  3. Leyde, Elsevier, 1650, in‑12 (et non in‑4o) de 472 pages, avec dédicace d’Abraham et Bonaventure Elsevier aux frères Pierre et Jacques Dupuy (de Leyde, le 1er mars 1648), contenant 204 lettres, datées de 1599 à 1643, avec Catalogus eorum quibus hæ Epistolæ scripsa sunt [Liste de ceux à qui ces lettres ont été écrites], où ne figure pas Guy Patin.

Les Elsevier (Elzevier ou Elzevir) ont été la plus prospère famille d’imprimeurs hollandais au xviie s. Charles Pieters a dressé leur généalogie dans ses Annales de l’imprimerie elsevirienne, ou Histoire de la famille des Elsevier et de ses éditions… (Gand, Annoot-Braeckman, 1851, in‑4o).

  1. Première génération : le fondateur, Louis i (Lodewijk Elzevir), natif de Louvain vers 1540, était venu s’installer à Leyde autour de 1580. Il mourut le 6 décembre 1617.

  2. Deuxième génération, des quatre fils de Louis i :

    1. Matthieu imprima à Leyde de 1591 à 1622, il mourut le 6 décembre 1640 ;

    2. Louis ii s’établit à La Haye vers 1600 et y imprima jusque vers 1621, époque de sa mort ;

    3. Gilles (Egide) établi à La Haye en 1599, mourut en 1651 ;

    4. Joost (Josse), établi à Utrecht de 1603 jusqu’au moins 1607, mourut vers 1617 ;

    5. Bonaventure, établi à Leyde avec Matthieu, y imprima de 1617 et mourut le 17 septembre 1652.

  3. Troisième génération :

    1. fils de Matthieu,

      1. Abraham, établi à Leyde avec Bonaventure de 1622 à 1652, mourut le 14 août 1652 ;

      2. Isaac, établi à Leyde de 1616 à 1625, mourut le 8 octobre 1651 ;

      3. Jacob, établi à La Haye de 1621 à 1636, mourut après 1652 ;

    2. fils de Joost,

      1. Pierre i ne fut pas imprimeur et mourut avant 1657 ;

      2. Louis iii, établi à Amsterdam de 1638 à 1664‑1665, mourut en 1670 

    3. Daniel, fils de Bonaventure, s’établit à Leyde et à Amsterdam (avec Louis iii) de 1632 à 1680, année de sa mort.

  4. Quatrième génération :

    1. Jean, fils d’Abraham, établi à Leyde de 1652 à 1661, mourut le 8 juin 1661 ; sa veuve et ses enfants continuent jusqu’en 1681 ;

    2. Pierre ii, fils de Pierre i, eut pour tuteur Louis iii ; établi à Utrecht de 1667 à 1672, il mourut en 1696.

La correspondance de Guy Patin a parlé de Bonaventure (ii‑5) et son neveu Abraham (iii‑1‑a), de Louis iii (iii‑2‑b) et Daniel (iii‑3), et de Jean (iv‑1). Les actuelles éditions scientifiques Elsevier, fondées en 1880, ne sont héritières que par le nom des Elsevier du xviie s.

16.

V. note [13], lettre 212.

17.

Nicolas Heinsius, le correspondant de Gilles Ménage, était appelé comme professeur de grec auprès de Christine ire. Il devint avec Isaac Vossius l’un de ses deux bibliothécaires de la reine de Suède. Tour à tour, ils allaient sillonner l’Europe, l’Italie en particulier pour Heinsius, en vue d’acheter aux frais du trésor royal éditions et manuscrits précieux.

Bien qu’il eût parfois de la peine à obtenir le remboursement de ses frais, Heinsius ne manquait pas d’égards envers sa reine : « Le premier de mes bonheurs, lui écrivait-il, c’est celui d’être né à une époque où Dieu tout-puissant a bien voulu donner à l’Humanité l’auguste personne de Votre Majesté ; le second, c’est celui d’avoir été connu de Votre Majesté ; le troisième de mes bonheurs, ce serait que la postérité […] sache que je n’ai jamais déplu à Votre Majesté. À cela se borne toute mon ambition » (cité par Quilliet, page 195).

18.

Jan Rutgers (Janus Rutgersius, Dordrecht 1589-La Haye 1625), un des meilleurs élèves de Vossius, vint achever ses études en France, fut nommé conseiller d’État par Gustave-Adolphe et représenta la Suède auprès des États de Hollande. Guy Patin citait ici ses Variarum lectionum libri vi ad Gustavum ii Suecorum etc. regem [Six livres de leçons diverses, à Gustave ii, roi de Suède etc.] (Leyde, Elsevier, 1618, in‑4o de 636 pages), recueil de remarques philologiques sur les auteurs grecs et latins.

En 1615, en dépit de sa prévention contre le mariage (v. note [24] du Naudæana 4), Daniel Heinsius avait épousé Ermegarde Rutgers, sœur de Jan. Nicolaas Heinsius était né de cette union en 1620 ; v. note [24], lettre 237, pour les poèmes de son oncle maternel qu’il a publiés en 1653.

19.

Dubuisson-Aubenay (Journal des guerres civiles, tome i, page 188) :

« Mardi matin, 5 octobre, encore assemblée de la noblesse opposante, que l’on appelle anti-tabouretiers, chez M. le marquis de Sourdis, lui absent et son fils, le marquis d’Alluyre, présent. »

Pour satisfaire aux exigences de Mme de Longueville, appuyée par son frère le prince de Condé, la cour avait accordé six tabourets aux épouses de certains nobles dont le rang ne justifiait pas un tel honneur : il fallait au moins être femme d’un duc et pair confirmé pour bénéficier d’un tabouret chez la reine pendant qu’elle tenait son cercle. Parmi les nouvelles élues se trouvaient Mmes de Marcillac (épouse du futur duc François de La Rochefoucauld, v. note [7], lettre 219) et de Pons (amie de Mme de Longueville ; v. note [12], lettre 214). La noblesse y trouva un prétexte pour s’échauffer et s’assembler régulièrement depuis le 1er octobre en nombre de plus en plus grand.

Journal de la Fronde (volume i, fos 107 ro‑108 ro) :

« la reine envoya dire {a} aux ducs et pairs et aux députés de la noblesse qu’elle ne toucherait point à cette affaire et ne donnerait aucun tabouret ni brevet de duc à personne jusqu’à la majorité. {b} […]

Le 5, les ducs et pairs continuèrent leurs assemblées dans l’hôtel de Chevreuse où M. de Beaufort se trouva, et la noblesse en nombre de 200 à 300 gentilshommes dans l’hôtel de Sourdis, pour délibérer sur la réponse qu’on leur avait faite de la part de la reine, dont n’étant point satisfaits et ne se contentant point de la parole de Sa Majesté, ils furent d’avis d’en tirer assurance par un arrêt du Conseil d’en haut contenant ladite réponse. Ce que leur ayant été refusé, ils résolurent de demander que tous les tabourets et autres prérogatives qui ont été donnés depuis 1643, tant au duc de Bouillon qu’autres qui en ont obtenu, fussent révoqués, que le tiers des bénéfices du royaume fût donné à la noblesse, et les fermiers et receveurs des gentilshommes fussent déchargés des tailles ; que toutes les charges de chez le roi fussent remplies par des nobles, avec quantité d’autres privilèges dont la noblesse a joui autrefois ; ce qui fait grand bruit à la cour, ces prérogatives ayant été signées de plus de 300 personnes et de M. de Beaufort le premier. »


  1. Le 4 octobre.

  2. Du roi (septembre 1651).

20.

Jugement de Jules César sur les tribus bretonnes, rapporté par Tacite (Vie d’Agricola, chapitre xii, § 5) : Ita singuli pugnant, universi vincuntur [Ainsi chacune se bat pour son propre compte et toutes essuient les défaites].

21.

Jean Huguetan (Lyon 1599-ibid. 6 janvier 1671) avocat à Lyon puis à Paris, était le frère aîné du libraire lyonnais, ami de Guy Patin, Jean-Antoine ii Huguetan (v. note [107], lettre 166). Jean se fit plus tard connaître par le :

Voyage d’Italie curieux et nouveau, enrichi {a} de deux listes, l’une de tous les curieux et de toutes les curiosités de Rome, et l’autre de la plupart des Savants, Curieux, et Ouvriers excellents de toute l’Italie à présent vivants.


  1. Par Jacob Spon (fils de Charles, v. note [6], lettre 883) ; v. note [28], lettre 433, pour son Voyage d’Italie, de Dalmatie, de Grèce et du Levant… (Lyon, 1678).

  2. Lyon, Thomas Amaulry, 1681, in‑12 de 246 pages.

On lit au début de la Préface de la première édition des Lettres (1683) et ses auteurs (Charles Patin et Jacob Spon) que « Feu M. Huguetan, avocat de Lyon, qui connaissait particulièrement [Guy Patin], trouvait qu’il donnait de l’air à Cicéron dont on voit la statue à Rome ».

22.

Très réellement.


Correspondance complète de Guy Patin et autres écrits, édités par Loïc Capron. – Paris : Bibliothèque interuniversitaire de santé, 2018. – À Charles Spon, le 8 octobre 1649

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(Consulté le 24/04/2024)

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