Je vous écrivis plein de douleur et accablé de regret de la mort de mon cher et précieux ami, M. Miron [2] le maître des comptes, qui a été un homme incomparable, le vendredi 5e de juillet qui est le même jour de sa mort, car il mourut le même jour à deux heures du matin entre mes bras. Ô le digne homme que c’était ! Mon Dieu que de malheurs pour un malencontreux ministre étranger ! Usquequo, Domine, usquequo ? [1][3] Il était tellement aimé et honoré que cent mille âmes lui sont venues jeter de l’eau bénite. Du même accident sont morts un maître des requêtes, M. Le Gras, [4] et M. < Le > Boulanger, auditeur des comptes ; [5] un conseiller de la Cour, nommé M. Ferrand le jeune, sieur de Janvry, [6] deux honnêtes marchands et le greffier même de l’Hôtel de Ville, nommé Le Maire, [7] qui est très malade de 14 plaies ; il y en a encore d’autres blessés. [2] Le samedi 6e de juillet, le prévôt des marchands [8] ayant peur d’être remarqué comme du parti de Mazarin, [9] envoya sa démission à l’Hôtel de Ville et aussitôt le duc d’Orléans [10] ayant fait assembler le Corps de Ville, en fit élire un autre, savoir M. de Broussel, [11] conseiller de la Grand’Chambre ; lequel, après l’avoir bien refusé, l’a enfin accepté, mais pour jusqu’à la mi-août seulement, et en a prêté le serment entre les mains du duc d’Orléans. C’est celui pour qui furent faites les barricades [12] l’an 1648, primus dies ille malorum. [3][13]
On dit que les Normands ont grande envie de remuer pour Paris, d’autant que durant la guerre, leurs denrées ne se débitent point ici et leurs lettres de change ne s’y acceptent point. Je ne sais ce qu’ils feront, mais je n’ai point bonne opinion de leur secours : s’il nous en vient, il descendra de plus haut, rien ne réussira si Dieu ne s’en mêle tout de bon car les hommes sont trop méchants ; il y a toujours quelques députés qui vont et viennent dans une espérance de paix, mais ce n’est qu’abus et amusement. Les présidents au mortier du Parlement sont sortis de Paris de peur d’être maltraités comme mazarins. Néanmoins, il n’y en a pas un d’eux à Saint-Denis, [14] tous sont allés deçà et delà prendre l’air un peu loin de Paris. [4]
Le 10e de juillet. La cour menace fort Paris, je ne sais ce qui nous arrivera, je n’en attends rien de bien. Beaucoup de gens sortent d’ici funesto omine. [5] Les princes sont toujours bien résolus, mais je ne sais d’où leur viendra de la force, il me semble que l’Archiduc [15] ne se hâte guère. Le roi et la reine d’Angleterre [16][17] s’en vont tous deux à Gaillon près de Rouen, [6][18] où elle le quittera et il s’en ira à Spa. [7][19][20] Delà il s’en ira en Danemark [21] où le roi est son parent : la femme du roi Jacques ier d’Angleterre [22][23] était de là. Ils sont allés pour prendre congé du duc d’Orléans qui ne les a point voulu voir et leur a mandé que jamais il ne les verra puisqu’ils ont préféré l’amitié du Mazarin à la sienne et au bien de toute la France (c’est qu’ils servirent tous deux à faire l’accord du Mazarin avec le duc de Lorraine). [8][24] Le roi d’Angleterre a témoigné le regret qu’il en avait par ses larmes et a dit qu’il ne verrait jamais le milord Germain qui lui avait conseillé cela. [9][25] Je ne sais ce que nous deviendrons, mais j’apprends que les troupes du duc de Lorraine, qui étaient sur la frontière, rebroussent et reviennent en deçà sans savoir encore pour quel parti des deux ce sera : les uns le prient, les autres le réclament. Deux choses pourtant me font croire qu’il ne fera jamais rien contre la reine, [26] dont la première est qu’elle peut lui faire rendre Nancy, [27] qui est ce qu’il désire fort ; la deuxième, que le roi d’Espagne [28] ne l’autorisera jamais de rien faire contre la reine sa sœur, laquelle fait pour lui en ruinant la France comme elle fait, sans qu’il en coûte rien au dit seigneur, roi des Maures et des Marranes, [10][29] et ainsi, lui et elle se vengent sur la France. On parle aussi de l’Archiduc Léopold, duquel je ne fais point plus d’état, vu que c’est même nature de secours : s’il entre en France, ce ne sera que pour nous manger ; ainsi nous mettrons toujours la nappe et paierons les pots cassés. [11] Les princes et le Parlement ne laissent pas de s’assembler pour continuer d’obtenir l’expulsion du Mazarin ; mais s’ils ne vont autrement en besogne qu’ils ont fait jusqu’à présent, je ne pense pas qu’ils en viennent à bout car la reine demeure merveilleusement obstinée à la conservation de ce ministre. [12] Lequel se trouve fort surpris et affligé de ce que son neveu Mancini [30] se trouve en danger de la vie, d’une blessure qu’il a reçue dans la cuisse le jour de l’escarmouche du prince de Condé [31] avec l’armée du roi [32] où le marquis de Saint-Mesgrin [33] fut tué, la charge duquel avait été donnée à ce Mancini. [13] Les chirurgiens qu’on est venu quérir à Paris pour le panser ont jugé sa plaie mortelle et qu’il avait été fort mal pansé par ceux de la cour qui n’avaient pas reconnu l’importance de cette plaie. C’est d’un coup de mousquet dans la cuisse qu’il eut près de la porte Saint-Antoine [34] quand ce faubourg [35] fut attaqué par les turennes et mazarins pour y attraper les gens des princes, il y a environ 15 jours. Ce fut le 2d de juillet.
Ce 13e de juillet. Il y a ici un médecin par quartier de chez le roi nommé M. Esprit, [36] qui est fils d’un médecin de Béziers, [14][37][38] lequel offre 10 000 écus de la charge de médecin de M. le duc d’Anjou. [39] C’est avoir grande envie d’avoir de l’emploi à la cour de donner plus que son vaillant pour y être occupé, [15] et principalement en ce temps présent que les officiers son si mal payés de leurs gages et de leurs pensions, et qu’il n’y a pas grande apparence que le tout puisse être bientôt rétabli. On dit que le roi d’Espagne, à la prière du prince de Condé, a remis en liberté M. de Guise [40] et qu’il l’a rendu à des Espagnols qui l’ont amené jusqu’à Bourg, [41] où il doit être tout à fait élargi dès que le prince de Condé l’aura demandé. [16]
Les nouvelles de la cour portent que le roi s’en va à Pontoise [42] et à Mantes, [43] et que la plus grande part de l’armée s’en va en Picardie pour s’opposer aux troupes qu’envoie l’Archiduc Léopold, qui a ramassé ce qu’il a pu pour faire un corps d’armée considérable, pour venir secourir les princes ; à quoi se rejoignent aussi 4 000 hommes que l’on tient de l’armée du duc de Lorraine, mais j’ai peur que tout ce secours ne soit encore qu’un galimatias de princes qui sont ravis de continuer la guerre.
Ici sont arrivés tout fraîchement huit grands bateaux de blé que le Mazarin a eu la charité de laisser passer, moyennant 8 000 écus qu’il s’est fait donner pour le travers par les marchands, qui ont grande hâte de débiter ici leurs denrées. [17][44]
Je suis tout triste dans le moment que je vous écris, non pas de la guerre et des désordres qu’elle cause, j’y suis tout accoutumé, ni des ravages que font les Espagnols en notre pays de Picardie, cela est au-dessus de moi, ni du tort que j’ai reçu au pillage de ma maison des champs [45] où la perte est fort grande, du 4e de ce mois. [18] Tout cela est au-dessous de mon esprit, je laisse le bien où la Nature l’a mis, sous mes pieds et dans les entrailles de la terre. La cause de mon affliction est plus sensible que tout cela, c’est que M. Naudé, [46] mon bon ami, se va séparer de nous et part dans trois jours pour s’en aller en Suède en qualité de grand bibliothécaire de la reine. [47][48] Le voyage est grand, long et pénible. J’ai 50 ans passés et lui, plus vieux que moi de trois ans, il peut n’en jamais revenir et moi mourir sans jamais le revoir. Mon âge me porte à penser à la retraite, combien que je ne sente encore rien ex quo possim ipsum senium trahere in crimen ; [19] mais néanmoins, fæx illa sæculorum ad quam Deus nos reservavit [20] est si pleine d’afflictions et de calamités qu’il me semble que j’ai raison de tout soupçonner. La mort de mon cher ami et bon voisin M. Miron m’a fort touché et même presque fait tourner la tête : Cum rapiant mala fata bonos, etc., [21][49][50] mais ce départ me renouvelle la douleur qu’une nécessité de mourir plus que fatale représentait en quelque façon excusable à mon esprit ; joint que ledit M. Miron était fort délicat et admodum raræ texturæ. [22] Il avait été fort malade trois fois depuis deux ans et n’avait plus guère de quoi se promettre une plus longue vie que deux ou trois ans au plus, verum, quid faciam ? Sic fuit in fatis ut ille mihi præiret, tandem sequuturo. [23][51]
Le mercredi 17e de juillet, le roi est allé à Pontoise laissant à Saint-Denis Messieurs les députés de la Cour que le prince de Condé fut dès le même jour requérir, et qu’il ne put obtenir à cause qu’ils avaient promis au roi de ne bouger de là jusqu’au jour suivant ; mais le lendemain, jeudi 18e, arrêt de la Cour ayant été donné pour les faire revenir et leur pouvoir étant révoqué, ce même prince se chargea de l’exécution et prenant avec soi 3 000 cavaliers, les alla quérir et les ramener presque en triomphe. [24] Ils étaient là en grand nombre, mais il y avait entre autres deux présidents au mortier qui sont de son parti, savoir MM. de Nesmond [52] et Longueil de Maisons ; [53] tous les autres sont absents, hormis M. de Bellièvre [54] qui est malade, aut saltem fingit. [25]
Le roi et toute la cour sont encore à Pontoise, [26] d’où le roi a envoyé le comte de Quincé [55] à Rouen pour y traiter et y moyenner de l’entrée du roi. [27] Si cela se peut une fois faire, ils incommoderont fort Paris et se serviront du parlement de Rouen [56] pour casser nos arrêts, et tâcheront aussi d’y faire justifier le Mazarin ; mais d’ailleurs, ceux de Rouen ne débiteront point leurs drogues à Paris et n’en tireront point de bonnes lettres de change, ce qui ne se peut faire sans leur très grande incommodité.
Le jour que le roi partit de Saint-Denis, 17e de juillet, mourut le petit Mancini, neveu du Mazarin, de la blessure qu’il avait reçue à l’escarmouche qui fut entre les troupes du roi et celles des princes au faubourg Saint-Antoine, le 2d de ce mois. On dit qu’il était mort un jour devant. [28] Les chirurgiens de la cour, qui ne valent pas mieux que les médecins de ce pays-là, promirent guérison de ce mal, mais la gangrène [57] qui a succédé y a causé la mort. Il y avait un os fracassé d’un coup de mousquet d’où sont sorties force esquilles et des vers aussi en abondance. [29] S’il eût été enterré à Saint-Denis, le peuple de Paris y fût allé en foule et en fureur le déterrer et le traiter indignement, comme l’on fit celui [30] du marquis d’Ancre : [58] ceux de Saint-Denis ont dit qu’ils l’eussent mangé à belles dents si on leur eût laissé. On ne sait s’il était encore en vie ou déjà mort quand le roi sortit de Saint-Denis ; tout au pis aller, il était moribond. Il a été enterré à Pontoise dans l’église des jésuites. Ces sortes de gens savent faire profit de tout, et des vivants et des morts, Quod non capit Christus, rapit fiscus. [31][59] Le samedi 20e de juillet, a été arrêt donné et publié en Parlement, en présence des princes, par lequel M. le duc d’Orléans a été déclaré lieutenant général de la Couronne, le roi prisonnier entre les mains de ses ennemis, le prince de Condé général des armées, etc. ; [32] que tous les parlements du royaume seront invités de donner pareil arrêt ; [33] que grande assemblée sera faite à l’Hôtel de Ville pour y confirmer l’union de la Ville de Paris avec le Parlement et les princes ; que les trésoriers et receveurs enverront ici leurs finances, etc. Enfin, après avoir longtemps marchandé, nous voilà en pleine guerre. Le duc d’Orléans s’en va dorénavant faire de nouveaux officiers de sa nouvelle dignité, savoir un garde des sceaux, quatre secrétaires d’État, un surintendant des finances, etc. Le duc d’Orléans a envoyé exprès à la cour donner avis au roi de cet arrêt, dont il attend réponse et après, on travaillera pour l’exécution. [34]
Le mardi 23e de juillet, ont été pendus dans la cour du Palais deux de ces boutefeux qui causèrent tant de désordres dans l’Hôtel de Ville et dans la Grève, [60] le 4e de juillet. Le droit du jeu était que l’exécution se fît à la Grève, mais on n’a osé l’entreprendre de peur de quelque nouveau tumulte. [35]
Le dimanche 21e de juillet, je fis dans le chapitre de Notre-Dame [61] une harangue de la présentation de nos licentiandes au chancelier de l’Université, [62] ut moris est, præsentibus Canonicis beatæ Mariæ et Collegis nostris. [36] J’en suis quitte, nous allons bientôt faire leurs licences, [63] et puis après j’aurai un peu plus de repos.
M. Naudé est parti d’ici pour son voyage de Suède le dimanche 21e de juillet. Il s’en va par Leyde [64] où il verra M. de Saumaise. Nous nous sommes dit adieu tous deux l’un à l’autre avec beaucoup de regret, cette séparation m’a semblé fort rude. Puisse-t-il faire bon voyage, il me semble que j’aurai beaucoup gagné si je puis jamais avoir le bonheur de le revoir de deçà car il n’y a point d’apparence que j’aille de delà.
Le vieux bonhomme M. Du Moulin, [65] ministre de Sedan, [66] a depuis peu et tout fraîchement fait imprimer une nouvelle décade de sermons que l’on attend ici ; [37] et M. Amyraut, [67] ministre à Saumur, [68] a fait une Morale que nous attendons aussi. [38] Ce sont deux écrivains que j’aime et dont je fais état. J’ai autrefois appris quelque chose dans la lecture de leurs ouvrages. Je mettrais volontiers ces deux hommes inter reliquias aurei sæculi, [39] ou plutôt qui ont mérité un meilleur siècle, car le nôtre est abominable.
On travaille ici à trouver de l’argent pour faire la guerre et pour cet effet, on fait diverses assemblées au Parlement et à l’Hôtel de Ville : on s’en va taxer les communautés, les portes cochères, les boutiques et autres maisons. [69] Le bonhomme de Broussel, qui est le nouveau prévôt des marchands, a déjà regret d’avoir pris cette charge et en est au lit malade. [40] Il court ici un libelle de six cahiers intitulé La Vérité toute nue, ou avis sincère et désintéressé sur les véritables causes des maux de l’État, et les moyens d’y apporter remède, duquel l’auteur, [70][71] quel qu’il soit, est fort habile homme : il y a bien des vérités là-dedans, et des princes, et des parlements, et du cardinal, etc. [41]
Le dimanche 28e de juillet, nous avons ici fait les paranymphes [72] pour nos licenciés et le lendemain matin, nous leur avons donné les lieux à l’ordinaire. [36]
Le mardi à cinq heures au soir, 30e de juillet, M. de Beaufort [73] se battit en duel [74] pour une préséance dans le Conseil du duc d’Orléans contre M. le duc de Nemours, [75] son beau-frère, qui y a été tué sur la place. Le mort a toujours tort : tout le monde blâme M. de Nemours d’avoir appelé M. de Beaufort en duel qui est bien plus fort et plus vaillant que lui. [42]
Le lendemain, mercredi 31e de juillet, querelle étant survenue entre le prince de Tarente, [76] fils de M. de La Trémoille [77] (qui est un peu parent de M. le prince de Condé), et le comte de Rieux, [78][79] fils de M. d’Elbeuf, [80] pour une autre préséance dans le même Conseil, dans la galerie du duc d’Orléans, le prince de Condé, soutenant le prince de Tarente, donna un soufflet au comte de Rieux ; lequel se voyant frappé de la sorte, voulant se défendre, donna un coup de poing au dit prince et mit la main à l’épée, mais il fut en même temps séparé, et accablé d’hommes et de coups. M. le duc d’Orléans survint, qui y mit le holà et qui envoya sous bonne garde aussitôt prisonnier dans la Bastille [81] ce comte de Rieux, lequel en fut délivré le lendemain à la prière du même prince de Condé. [43] Que dites-vous de nos comédies et de nos tragédies, ne sont-elles pas étranges ? Et encore va de par Dieu, [44] pourvu qu’à la fin nous n’ayons rien de pis que de voir des princes s’entretuer et se battre. Le roi est toujours à Pontoise. [45] M. de Bouillon-Sedan [82] y est fort malade de ses gouttes, [83] qui sont arrêtées ; [46] le sieur Béda des Fougerais, [84] qui a coutume de le panser, y est allé tout exprès. On dit qu’il a eu tous ses sacrements, hormis celui de la paix, [47] que l’on dit qu’il a puissamment empêchée tant il était mazarin et attaché aux intérêts de ce bonnet rouge, dans le dessein qu’il avait de rentrer, par son moyen, dans sa principauté de Sedan. Je vous baise les mains de tout mon cœur, à mademoiselle votre femme, à MM. Gras, Falconet et Garnier, avec protestation d’être toute ma vie, Monsieur, votre très humble et très obéissant serviteur,
Guy Patin.
De Paris, ce vendredi 2d d’août.
Je vous prie de me transcrire du manuscrit de notre ancien ami G. Hofmann, [85] ce fameux éloge de Fernel [86] que je vous ai prié d’effacer du dit manuscrit afin qu’il ne soit jamais imprimé, [48] et de me l’envoyer quelque jour dans une de vos lettres afin que je voie ce que c’est. Si vous ne recevez de moi que des lettres, n’en accusez que la guerre, laquelle empêche le commerce. Rien ne passe de part ni d’autre, votre paquet est encore céans, comme tout ce qui était en chemin de Lyon n’est point arrivé. On nous apprend que M. de Guitaut, [87] premier capitaine des gardes de la reine, est bien malade à Pontoise, et M. le comte de Brienne [88][89] aussi. [49] On dit même que le Mazarin [90] a été saigné [91] deux fois pour la fièvre. Si les médecins de cour lui pouvaient donner quelques prises d’antimoine [92] de la préparation de Vautier, [93] ils nous obligeraient fort, et toute la France. Je dirais volontiers en ce cas-là de Vallot, [94] ce que l’on disait à Rome il y a plus de 116 ans du médecin de Clément vii : [95][96][97] Ecce Agnus Dei, ecce qui tollit peccata mundi. [50][98] Adieu Monsieur.
Ce vendredi 2d d’août. Avant qu’il soit huit jours, tout Paris sera bloqué s’il ne vient du secours aux princes, on parle des troupes de l’Archiduc, sed lentum est negotium. [51] Tous les fruitiers et chasse-marées [99] qui apportaient ici des provisions du côté de Pontoise et de Saint-Denis ont été arrêtés, volés, pillés, leurs chevaux pris, et même la plupart des hommes tués. O rem miseram ! o mores, o tempora ! [52][100]
Ms BnF Baluze no 148, fos 42‑43 « À Monsieur/ Monsieur Spon,/ Docteur en médecine,/ À Lyon » ; Jestaz no 75 (tome ii, pages 938‑951). Note de Charles Spon au revers de l’enveloppe : « 1652./ Paris, 2 août./ Lyon 7 dud./ Risp. adi 9 ditto ».
« Jusques à quand, Seigneur, jusques à quand ? » : « Je dis “ Jusques à quand, Seigneur ? ” Il me répondit “ Jusqu’à ce que les villes soient dévastées et inhabitées, les maisons sans personne, la campagne déserte, et que Yahvé en chasse les gens ” » (Isaïe, 6:11).
L’émeute de l’Hôtel-de-Ville avait eu lieu dans l’après-midi et la soirée du 4 juillet.
Dans cette phrase, Guy Patin ne distinguait pas clairement les blessés et les morts. Aux victimes de l’émeute du 4 juillet à l’Hôtel de Ville déjà citées (v. note [43], lettre 291), s’ajoutait ici un Le Boulanger, auditeur des comptes, qui, s’il n’avait été que blessé, pouvait être Jean Le Boulanger : frère cadet de Macé Le Boulanger, prévôt des marchands (v. note [16], lettre 55), il était maître en la Chambre des comptes et mourut en mars 1655 (Popoff, no 696).
V. la fin de la note [41], lettre précédente, pour les multiples blessures du greffier Martin Le Maire.
« ce premier jour de nos malheurs » ; Virgile (Énéide, chant iv, vers 169-170) :
Ille dies primus leti primusque malorum
[Ce jour-là fut le premier qui causa sa mort et ses malheurs].
Causa fuit.
V. note [7], lettre 160, pour les barricades de Paris, le 27 août 1648.
Au cours de l’émeute de l’Hôtel de Ville (Journal de la Fronde, volume ii, fos 108 ro, 5 juillet 1652) :
« le maréchal de L’Hospital {a} et le prévôt des marchands s’étaient enfermés, chacun dans une chambre, pour s’y défendre. Mademoiselle ayant demandé à leur parler, ce maréchal le refusa, ne pouvant plus se fier à personne. Le prévôt des marchands lui dit qu’il voyait bien qu’il n’y avait plus de sûreté pour lui, qu’elle était venue là pour tâcher de lui sauver la vie, mais qu’il ne pouvait pas espérer ni de pouvoir faire davantage la fonction de sa charge, ni même paraître dans Paris, et qu’il fallait qu’il se retirât ; à quoi il ajouta qu’il était bien obligé à la bonté de Son A. {b} Sur cela, elle le fit sortir par une porte de derrière et est sorti ce matin de Paris après avoir envoyé à S.A.R. {c} la démission de sa charge de prévôt des marchands. Elle promit au peuple de lui faire donner un gouverneur et un prévôt des marchands qui ne lui seraient pas suspects ; et parce qu’on lui demandait M. de Beaufort pour gouverneur et M. de Broussel pour prévôt des marchands, elle fut obligée de les leur promettre aussi ; en suite de quoi, s’en étant allé, le maréchal de L’Hospital est sorti de cet hôtel, déguisé, vers les quatre heures du matin par la même porte de derrière, et puis de la ville, étant allé droit à Saint-Denis. {d} »
- Gouverneur de Paris.
- Son Altesse, le prince de Condé.
- Son Altesse Royale, Gaston d’Orléans, agissant alors comme s’il était lieutenant général du royaume (v. note [33], lettre 292).
- V. note [27], lettre 166.
Dubuisson-Aubenay (Journal des guerres civiles, tome ii, page 251, 6 juillet) :
« Ce jour dès le matin, tous les échevins, conseillers, quarteniers, dizainiers et cinquanteniers de la Ville étant assemblés en l’Hôtel de ladite Ville, le vieux conseiller Broussel y a été élu prévôt des marchands, avec la démission du sieur Le Fèvre qui s’est retiré près du roi avec son fils, et le duc de Beaufort s’est chargé du gouvernement de la ville ; le prince de Condé présent. Puis ils ont mené ledit Broussel au palais d’Orléans prêter le serment entre les mains de Son Altesse Royale, et delà {a} ramené à l’Hôtel susdit y prendre possession de sa place, sur les sept heures du soir.
L’élection du prévôt des marchands et des échevins ne se fait à Paris que le 16 août et avec participation, ordre et lettre du cachet du roi. » {b}
- Ensuite.
- Il fallut deux arrêts royaux, rendus le 8 juillet (v. note [40], lettre 292) puis le 19 août suivants, pour casser cette élection.
La cour était à Saint-Denis (v. note [27], lettre 166) depuis le 28 juin et y demeura jusqu’au 17 juillet pour se rendre à Pontoise (Levantal).
Journal de la Fronde (volume ii, fo 110 ro, juillet 1652) :
« Tous les présidents au mortier, excepté M. de Bellièvre qui est indisposé depuis longtemps, sont sortis depuis le 8 et quelques conseillers les ont suivis. On assure que la cour en fait sortir le plus qu’elle peut pour en faire un autre Parlement qui puisse contrecarrer celui-ci. Cependant, les députés sont encore retenus à Saint-Denis où on leur promet tous les jours leur réponse, et jamais on ne la leur donne. Le président de Nesmond en eut quelques paroles le 7 avec le garde des sceaux qui lui représentait qu’il ne fallait point violenter les volontés du roi, particulièrement dans une conjoncture si fâcheuse ; et parce qu’ils lui avaient déclaré qu’ils ne pouvaient plus attendre et qu’ils prenaient congé pour s’en revenir, M. Le Tellier les fut visiter de la part du roi pour les adoucir ; et depuis, on les retient autant de force que de gré. »
La même source (fo 112 ro, 12 juillet 1652) dément en partie ce que disait ici Guy Patin :
« Les présidents de Novion et Le Coigneux étant sortis de Paris sur la fin de la semaine passée, allèrent droit à la cour ; mais ils y furent fort mal reçus, quoiqu’ils eussent fait ici tout ce qu’ils avaient pu pour l’intérêt du cardinal Mazarin. Néanmoins, on leur reprocha de n’y avoir pas fait leur devoir. »
« en funeste présage. »
Gaillon (Eure), sur la rive gauche de la Seine se situe entre Évreux et Les Andelys (v. note [60] du Faux Patiniana II‑4). La ville était célèbre pour le beau château qu’y avait fait reconstruire l’archevêque de Rouen, Georges d’Amboise, au début du xvie s.
Journal de la Fronde (volume ii, fo 113 ro, Paris, 12 juillet 1652) :
« Le roi et la reine d’Angleterre {a} sont partis aujourd’hui, pour se retirer à Saint-Germain-en-Laye ; et parce qu’ils sont en fort mauvaise odeur dans l’esprit du peuple, Mademoiselle {b} les a accompagnés hors de Paris, afin qu’ils fussent en sûreté. »
- Henriette-Marie, et son fils, Charles ii.
- La duchesse de Montpensier, fille de Monsieur, Gaston d’Orléans.
Spa (Wallonie, province de Liège) est une ville thermale des Ardennes belges ; ses sources étaient réputées pour leurs eaux ferrugineuses depuis le xvie s. (v. note [13], lettre 332, pour leurs qualités et leur lien improbable avec la description que Pline a donné des eaux de Tongres).
Le roi du Danemark et de Norvège était Frédéric iii, petit-fils de Frédéric ii.
En 1589, la deuxième fille de Frédéric ii, la princesse Anne de Danemark (1574-1619), avait épousé le roi d’Angleterre, Jacques ier (v. note [17], lettre 287) ; v. note [39] du Patiniana I‑3, pour le tumultueux couple qu’ils ont formé. En avril 1652, les souverains anglais avaient tenté d’accommoder la paix entre la cour et les princes (v. note [18], lettre 286) ; en juin suivant (v. note [22], lettre 290), ils étaient aussi intervenus dans l’accord entre Charles iv de Lorraine et la cour, sans lequel Mazarin et le roi se seraient trouvés en très grand péril face aux princes frondeurs.On appelait en France milord Germain sir Henry Jermyn (vers 1604-1684), premier duc de Saint Albans. Il était très tôt devenu favori de Henriette-Marie de France, épouse du roi Charles ier d’Angleterre. Resté fidèle à la Couronne pendant les guerres civiles, il fut nommé grand chambellan par Charles ii, jouant un rôle de premier plan dans les relations diplomatiques avec la France.
Marranes : « terme injurieux qu’on dit aux Espagnols ou à ceux d’entre eux qu’on ne croit pas bons chrétiens, qui sont descendus des mahométans ou des juifs » (Furetière). Guy Patin n’a employé ce mot que pour dénigrer les juifs d’origine hispano-portugaise convertis au catholicisme.
« On dit qu’on met la nappe quand on reçoit la compagnie chez soi lorsque les autres apportent de quoi manger, et quand on fournit seulement le couvert, le bois, la chandelle et autres menues nécessités. L’hôte qui met la nappe est toujours le plus foulé [incommodé]. On dit aussi d’un pays plein et abondant dans lequel on met des troupes en quartier, que c’est lui qui met la nappe » (Furetière). « On dit en menaçant quelqu’un, qu’il en paiera les pots cassés » (ibid.).
Dubuisson-Aubenay (Journal des guerres civiles, tome ii, page 255, juillet 1652) :
« Vendredi matin 12, on a la réponse faite de la part du roi par écrit aux députés du Parlement qui doivent demeurer en cour jusqu’à ce que les princes aient envoyé les leurs pour régler le licenciement ou éloignement des troupes et arrêter les ordres nécessaires pour rétablir le calme en l’État. Quoi faisant, le cardinal Mazarin se retirera et, dit-on, qu’il ira à Turin ou à Pignerol. »
Guy Patin, toujours attaché à la Fronde malgré l’échauffourée qui lui avait enlevé son ami Robert ii Miron, qualifiait d’escarmouche la défaite de Condé au combat du faubourg Saint-Antoine.
Journal de la Fronde (volume ii, fos 110 vo et 111 ro, Paris, le 9 juillet) :
« Le cardinal Mazarin a fait donner au petit Mancini, son neveu, qui guérira de sa blessure, la charge de capitaine lieutenant des chevau-légers du roi qui a vaqué par la mort du marquis de Saint-Mesgrin, {a} dont la veuve et sa sœur ont fait des grandes plaintes à Leurs Majestés, et des grands reproches à ce cardinal d’avoir eu tant d’ingratitude pour la mémoire d’un homme qui s’était si librement sacrifié pour lui dans une cause si injuste. À quoi il ne leur a su faire autre réponse, sinon que le roi l’avait ainsi voulu et s’était chargé de les récompenser. Mais peu après, un petit remord de conscience l’a porté à faire offrir une assignation de 100 000 livres à cette veuve affligée, au lieu de 459 000 livres que la charge avait coûté au défunt ; ce qu’elle a refusé après lui avoir redoublé ses reproches. Cette ingratitude a tellement touché toute la noblesse qui suit la cour que ce cardinal n’y a presque plus d’amis, et l’on y crie plus hautement que jamais contre lui. Le comte d’Olonne, cornette de la même compagnie, avait demandé la charge et offert de payer entièrement le prix qu’elle avait coûté au défunt ; mais ce cardinal la lui ayant refusé, il lui dit hier des injures si hautes qu’on lui fit peu après commandement de la part du roi de se retirer de la cour, et l’ordre lui en a été porté par M. du Plessis-Guénégaud. Il en partit aussitôt et s’en vint ici. »
À la mort de Mancini on eut la décence de conserver la compagnie des chevau-légers de la reine à la sœur de Saint-Mesgrin, avec idée « qu’elle la vendra 25 ou 30 000 écus » (ibid. fo 112 vo).
Béziers (Hérault), évêché du Languedoc, sur l’Orb et le canal du Midi, se situe à 70 kilomètres au sud-ouest de Montpellier.
Le vaillant est « le bien d’une personne, tout ce qu’elle possède » (Furetière).
Jean-André Esprit, natif de Béziers, mort en 1678, était issu d’une famille juive originaire du diocèse d’Embrun ; il était un des fils de Judith Sanche et d’Esprit André. Son père, docteur en médecine de Montpellier avait inversé son nom et son prénom en venant s’installer à Béziers. Le patronyme familial devint alors, selon Guy Patin (v. note [1], lettre 582), Esprit, avec André pour surnom. Jean-André avait lui-même été reçu docteur en médecine de Montpellier en 1626. Monté à Paris, il était devenu médecin du cardinal de La Valette en 1637, puis médecin par quartier du roi. Il allait obtenir en mars 1653, à la suite de François Vautier, la charge de médecin du duc Philippe d’Anjou, frère cadet de Louis xiv, en récompense des soins prodigués à l’enfant quand il avait trois ans (1643-1644).
Molière a caricaturé Esprit dans L’Amour médecin (v. note [1], lettre 835), sous le nom de Bahys.
Médecin de la cour et chaud partisan de l’antimoine, Esprit fut de ceux qui allèrent à Mardyck en 1658 au chevet de Louis xiv. Il vint en juin 1670 au chevet de Madame, Henriette d’Angleterre, mourante ; mais il diagnostiqua de vulgaires coliques et déclara que tout allait s’arranger, elle en mourut pourtant promptement. Jean-André Esprit avait épousé Catherine Paniquini (morte 10 jours avant lui), fille de l’apothicaire de Marie de Médicis (Dulieu, Jestaz, Adam et P. Delaunay).
Bourg (Gironde), à une trentaine de kilomètres au nord de Bordeaux, se situe sur la rive droite de la Dordogne, tout près de son confluent avec la Garonne.
Le geste du roi Philippe ii en faveur du duc de Guise, qu’il tenait prisonnier depuis son expédition malheureuse à Naples en 1648 (v. note [40], lettre 155), annonçait un événement politique de toute première importance : le passage du prince de Condé au service de la Couronne espagnole.
Journal de la Fronde (volume ii, fos 114 vo et 116 ro, 16 et 19 juillet 1652) :
« Un courrier qui arriva ici hier au soir, porte nouvelles que M. de Guise {a} avait été mis en liberté sans rançon et était arrivé à Bourg, proche Bordeaux, pour s’aboucher avec le baron de Vateville. {b} Le même courrier, ayant descendu chez M. le Prince, lui rendit une lettre que le roi d’Espagne lui écrit en français sur ce sujet, laquelle est conçue en termes fort obligeants, dont la substance est qu’il fait tant d’estime de sa personne qu’il a bien voulu lui accorder la liberté de M. de Guise, à sa seule prière. Il le nomme son cousin. Aussitôt que M. le Prince eut lu cette lettre, il l’envoya à Son Altesse Royale qui témoigna grande joie de cette nouvelle. […]
Outre la lettre que M. le Prince a reçue du roi d’Espagne touchant la liberté de M. de Guise, il en a reçu une autre du même roi par laquelle il lui remet entre les mains toute la conduite de la paix ou de la guerre pour en faire tout ce qu’il jugera à propos, et le fait le chef et maître absolu de toutes ses troupes en Flandres, auxquelles il a envoyé ordre de lui obéir aveuglément. »
La Rochefoucauld (Mémoires, page 293) :
« Les Espagnols se vengeaient, par une rude et longue prison, de l’entreprise que le duc de Guise avait faite sur le royaume de Naples et se montraient depuis longtemps inexorables à toutes les instances qu’on leur faisait pour sa liberté ; ils l’accordèrent facilement néanmoins à M. le Prince et renoncèrent en cette occasion à l’une de leurs principales maximes pour le lier encore plus étroitement à leur parti par une déférence qui leur est si peu ordinaire. Le duc de Guise se vit donc en liberté lorsqu’il l’espérait le moins, et il sortit de prison engagé par reconnaissance et par sa parole dans les intérêts de M. le Prince. Il le vint trouver à Paris, et croyant peut-être avoir satisfait à ses obligations par quelques compliments et par quelques visites, il s’en alla bientôt après au-devant de la cour pour offrir au roi ce qu’il devait à M. le Prince. »
Travers : « droit domanial qui se lève au passage des ponts et bacs des rivières sur les personnes, denrées et marchandises qui traversent de province en province, sur lequel on prenait l’entretien des ponts, planches et passages » (Furetière).
Dubuisson-Aubenay (Journal des guerres civiles, tome ii, page 255, le 11 juillet 1652) :
« Neuf foncets, qui sont très grands bateaux, venant à contremont de l’eau et de devers Normandie, chargés de seize à dix-huit mille muids de blé, arrêtés vis-à-vis de Saint-Denis depuis quelques jours, sont permis de monter à Paris pour secourir la ville ; mais on dit qu’il y en a encore sept à venir avec quelques petits bateaux de compagnie, outre ceux qui sont déjà venus avec les neuf grands susdits. On pose des moulins à bras, pour la commodité publique, à moudre les blés des bourgeois qui en ont provision, ainsi que l’on fit du temps du blocus de Paris en 1649, comme au cimetière Saint-Jean, etc., dans l’enclos des Petits-Augustins du faubourg Saint-Germain où un cheval fait moudre un setier de blé par heure et gratis, etc. Il y a des moulins à bras en plusieurs maisons particulières, et la plupart de la bourgeoisie use du pain ainsi moulu et de sa propre cuisson, qui est un peu pesant à ceux qui n’y ont pas l’estomac fait. »
D’une lettre fabriquée à André Falconet qu’on trouve dans les éditions Bulderen et Reveillé-Parise, datée du 14 mai 1649 (v. note [a], lettre 176), il ne subsiste qu’un paragraphe « orphelin » (et tout à fait anachronique) relatif au sac de la maison de Cormeilles dont parlait ici Guy Patin :
« Ceux qui le veulent excuser {a} disent qu’il ne les a faites {b} que par nécessité et qu’il n’en veut qu’à la bourse. J’y ai perdu deux mille écus en un article, {c} sans peut-être qu’il le sache et sans savoir à qui m’en prendre. Ma maison des champs a été dévalisée par ses soldats. Ma femme qui en faisait ses délices voudrait que le cardinal Mazarin n’eût jamais passé Casal {d} et que sa belle maison de Cormeilles n’eût pas été pillée. »
- Mazarin.
- Ses cruautés contre le peuple de Paris.
- « Quand un homme s’est ruiné en peu de temps, on dit qu’il a mangé tout son bien en un article » (Furetière).
- V. note [6], lettre 53, pour la bravoure de Mazarin qui mit fin au siège de Casal, en octobre 1630, et qui fit sa première célèbrité.
« dont je puisse tenir grief à la vieillesse même ».
« cette lie des siècles pour laquelle Dieu nous a réservés ».
« Lorsque le mauvais sort emporte les hommes de bien, etc. » ; Ovide (Les Amours, livre iii, élégie ix, vers 35) :
Cum rapiunt mala fata bonos – ignoscite fasso ! –
[Lorsque le mauvais sort emporte les hommes de bien – pardonnez-moi cet aveu ! – je suis enclin à penser que nul dieu n’existe].
Sollicitor nullos esse putare deos.
Vite lu, l’« etc. » de Guy Patin pourrait passer pour un honteux aveu d’athéisme (v. note [38], lettre 477), mais ce serait ignorer que son trouble lui a, dit-il, « presque fait touner la tête ».
« et de texture fort délicate. »
« mais qu’y aurais-je pu faire ? Il était écrit qu’il partirait avant moi, qui enfin le suivrai. »
Journal de la Fronde (volume ii, fo 116 ro et vo, 19 juillet 1652) :
« Hier au matin, S.A.R. {a} et M. le Prince se rendirent à l’assemblée du Parlement avec M. de Beaufort et quelques autres ; mais M. le Chancelier ne s’y trouva pas. Aussitôt qu’on eut commencé, un courrier y arriva avec une lettre de Messieurs les députés {b} pour S.A.R., une pour M. le Prince et une troisième pour le Parlement, par lesquelles ils mandaient que M. de Saintot venait de leur rendre une lettre de cachet du roi portant que, depuis son départ, il lui était survenu des affaires importantes qui l’obligent à leur mander de se rendre auprès de sa personne pour les leur communiquer ; laquelle lettre était accompagnée d’une autre de M. du Plessis-Guénégaud qui leur mandait que Sa Majesté lui avait commandé de leur faire entendre que, si les conseillers députés voulaient retourner à Paris, elle ne leur en refusait pas la permission pourvu que les présidents suivissent la cour ; ce à quoi les députés n’avaient pas à faire réponse sans prendre avis du Parlement, auquel ils témoignaient souhaiter de revenir, n’ayant donné parole de demeurer à Saint-Denis que jusqu’à trois heures après midi. Sur cela, il fut arrêté tout d’une voix qu’ils reviendraient ; et S.A.R. ayant été priée de leur envoyer une escorte, elle s’offrit de les aller quérir elle-même ; ce que la Compagnie ayant accepté, Sadite Altesse partit pour cet effet à midi accompagnée de M. le Prince et de M. de Beaufort, avec cinq à six cents chevaux, autant de fantassins et deux pièces de canon, et y amenèrent le soir les députés, dont une partie eut peine de se résoudre à revenir. »
- Son Altesse Royale, Gaston d’Orléans.
- Du Parlement à Saint-Denis, auprès du roi.
Retz (Mémoires, pages 1014‑1015) :
« Je vous expliquerai en peu de paroles tout ce qui s’y passa {a} depuis le 4 de juillet jusqu’au 13. La face en fut très mélancolique : tous les présidents au mortier s’étant retirés, et beaucoup des conseillers même s’étant aussi absentés, par la frayeur des séditions que le feu et le massacre de l’Hôtel de Ville n’avaient pas diminuée, cette solitude obligea ceux qui restaient à donner arrêt qui portait défense de désemparer ; {b} en quoi ils furent mal obéis. Il se trouvait par la même raison fort peu de monde aux assemblées de l’Hôtel de Ville. Le prévôt des marchands, {c} qui ne s’était sauvé de la mort que par un miracle le jour de l’incendie, n’y assistait plus. M. le maréchal de L’Hospital demeurait clos et couvert {d} dans sa maison. Monsieur fit établir en sa place, par une assemblée peu nombreuse, M. de Beaufort pour gouverneur et M. de Broussel pour prévôt des marchands. Le Parlement ordonna à ses députés qui étaient à Saint-Denis de presser leur réponse et en cas qu’ils ne la pussent obtenir, de revenir dans trois jours prendre leurs places. Le 13, les députés écrivirent à la Compagnie et ils lui envoyèrent la réponse du roi par écrit. En voici la substance :
“ Que bien que Sa Majesté eût tout sujet de croire que l’instance que l’on faisait pour obtenir l’éloignement de M. le cardinal Mazarin ne fût qu’un prétexte, elle voulait bien lui permettre de se retirer de la cour après que les choses nécessaires pour établir le calme dans le royaume auraient été réglées, et avec les députés du Parlement, qui étaient déjà présents à la cour, et avec ceux qu’il plairait à Messieurs les princes d’y envoyer. ”
Messieurs les princes, qui avaient connu que M. le cardinal ne proposait jamais de conférence que pour les décrier dans les esprits des peuples, se récrièrent de cette proposition ; et Monsieur dit avec chaleur qu’elle n’était qu’un piège que l’on leur tendait, et que lui ni Monsieur son cousin {e} n’avaient aucun besoin d’envoyer des députés en leur nom puisqu’ils avaient toute confiance à ceux du Parlement. L’arrêt qui suivit fut conforme au discours de Monsieur et ordonna aux députés de continuer leurs instances pour l’éloignement du cardinal. Messieurs les princes écrivirent aussi au président de Nesmond pour l’assurer qu’ils continuaient dans la résolution de poser les armes aussitôt que le cardinal serait effectivement éloigné. Le 17, les députés mandèrent que le roi était parti de Saint-Denis pour aller à Pontoise ; qu’il leur avait commandé de le suivre ; que, sur la difficulté qu’ils en avaient faite, il leur avait ordonné de demeurer à Saint-Denis. Le 18, ils écrivirent qu’ils avaient reçu un nouvel ordre de Sa Majesté de se rendre incessamment à Pontoise. La Compagnie s’émut beaucoup et donna arrêt par lequel il fut dit que les députés retourneraient à Paris incessamment. Monsieur, M. le Prince et M. de Beaufort sortirent eux-mêmes, avec 800 hommes de pied et 1 200 chevaux, pour les ramener et pour faire croire au peuple que l’on les tirait d’un fort grand péril. La cour ne s’endormait pas de son côté : elle lâchait à tous moments des arrêts du Conseil qui cassaient ceux du Parlement ; elle déclara nul tout ce qui s’était fait et tout ce qui se ferait dans les assemblées de l’Hôtel de Ville ; et elle ordonna même que les deniers destinés au paiement de ses rentes ne seraient portés dorénavant qu’au lieu où Sa Majesté ferait sa résidence. »
- Au Parlement.
- Partir.
- Le Fèvre.
- Caché.
- Condé.
« ou du moins fait semblant de l’être. »
Journal de la Fronde (volume ii, fo 122 ro, 30 juillet 1652) :
« Le 27 du courant, S.A.R. {a} fit choix avec M. le Prince de la plupart des personnes qui doivent composer son Conseil, dont M. le Chancelier {b} est le chef. Les autres sont MM. de Beaufort, de Nemours, le comte de Rieux, le prince de Tarente, les ducs de Sully, de Rohan et de Brissac, M. de Chavigny, les présidents de Nesmond, {c} de Maisons, {d} de Thou {e} et Violle, MM. de Goulas et Fromont qui feront la charge de secrétaires d’État. Le président de Maisons accepta la commission de surintendant des finances sous l’autorité de S.A.R., qui donna aussi celle de trésorier de l’Épargne à M. Pinette, trésorier de sa Maison, celle de contrôleur des finances à M. Passart et celle de grand maître de l’Artillerie au comte Fiesque. »
- Son Altesse Royale, le duc d’Orléans.
- Pierre iv Séguier.
- François-Théodore de Nesmond.
- René de Longueil, marquis de Maisons.
- Jacques-Auguste ii de Thou.
Patin a ici rayé « n’ont été que deux jours », pour le remplacer par « sont encore » ; après « Pontoise », il a rayé « ils sont allés à Mantes ». De Pontoise, la cour partit à Compiègne le 21 août, où elle séjourna jusqu’au 23 septembre (Levantal).
Journal de la Fronde (volume ii, fos 117 ro et 118 ro) :
« On écrit de Rouen {a} que le comte de Quincé {b} y était arrivé avec des lettres du roi adressées au parlement et au duc de Longueville portant avis que Sa Majesté y va, et qu’elle désire que la noblesse de cette province-là s’assemble et se mette en devoir d’aller repousser les ennemis de l’État qui sont entrés en France ; sur quoi le parlement avait ordonné qu’il serait fait une assemblée générale de ville sur ce sujet. […]
La cour n’est pas encore partie {c} de Pontoise pour aller à Mantes et l’on assure que les habitants ont refusé de recevoir le cardinal Mazarin. Ceux de Rouen ayant fait grand bruit de ce que la cour voulait les aller visiter et étant disposés à résoudre, dans leur assemblée générale de ville et dans le parlement même, de supplier le roi de n’y mener ni le cardinal Mazarin, ni aucunes troupes, M. de Longueville en donna promptement avis à la cour, laquelle lui envoya aussitôt un gentilhomme nommé Gouville pour lui représenter qu’ils ne devaient point s’alarmer là-dessus et que la cour n’avait aucun dessein d’y aller avec des troupes, les ayant toutes envoyées au-devant des Espagnols. Sur quoi, M. de Longueville empêcha que l’on ne prît aucune résolution ; et parce qu’il ne pouvait aussi empêcher que l’on ne prît les armes pour faire garde aux portes de la ville, il donna ses ordres pour y mettre quatre ou cinq hommes seulement à chacune, mais on ne laissa pas d’y en mettre trois ou quatre cents. Depuis, la cour parle de venir aujourd’hui à Saint-Germain-en-Laye, et on assure qu’elle a envoyé un gentilhomme à Tours pour y pressentir {d} les esprits et voir si elle y sera reçue avec ce cardinal, la plupart des villes étant résolues de le refuser. Sinon, elle passera en Bretagne où l’on croit que ce cardinal sera reçu partout dans la province. »
- Le 19 juillet 1652.
- Joachim de Quincé, lieutenant général demeuré fidèle à la cour.
- Le 23 juillet.
- Sonder.
Guy Patin a ajouté ce correctif dans la marge.
Journal de la Fronde (volume ii, fo 116 ro, 19 juillet 1652) :
« Le petit Mancini n’étant pas encore mort le 16, la cour différa son départ de Saint-Denis jusqu’au 17, auquel jour elle partit dès six heures du matin ; et le cardinal Mazarin fit emmener son neveu sur un brancard, tout moribond qu’il était ; et de fait, il mourut en chemin. Delà {a} à Pontoise, où la cour arriva le même jour et devait partir ce matin pour aller à Mantes. »
- Ensuite, on partit.
Les esquilles sont les petits fragments d’un os fracturé. La présence de vers était alors un signe commun de putréfaction et de purulence dans une plaie.
« Celui » pour « du corps ». Guy Patin évoquait ici le triste sort que le peuple de Paris avait réservé à la dépouille du marquis d’Ancre, Concino Concini, en 1617 (v. note [8], lettre 89).
« Ce que ne prend l’Église [le Christ], le fisc ravit » (emblème d’André Alciat, v. note [5], lettre 198).
La Rochefoucauld (Mémoires, page 289) :
« On proposa ensuite de créer un Conseil, composé de Monsieur, de M. le Prince, du chancelier de France, {a} des princes, ducs et pairs, maréchaux de France et officiers généraux du parti qui se trouvaient à Paris. Deux présidents au mortier devaient aussi y assister de la part du Parlement, et le prévôt des marchands de la part de la Ville, pour juger définitivement de tout ce qui concernait la guerre et la police. Ce Conseil augmenta le désordre au lieu de le diminuer, à cause des prétentions du rang qu’on y devait tenir, et il eut, comme avait eu l’assemblée de l’Hôtel de Ville, des suites funestes. »
- Pierre iv Séguier.
Selon Retz (Mémoires, pages 1016‑1017 ; v. infra note [35]), les parlements :
« ne déférèrent point à la prière car, à la réserve de celui de Bordeaux, il n’y en eut aucun qui en délibérât seulement ; et bien au contraire, celui de Bretagne avait mis surséance à ceux {a} qu’il avait donnés auparavant jusqu’à ce que les troupes espagnoles qui étaient entrées en France fussent tout à fait hors du royaume. Monsieur ne fut pas mieux obéi sur ce qu’il écrivit de sa nouvelle dignité à tous les gouverneurs de provinces et il m’avoua de bonne foi, quelque temps après, que < pas > un seul, à l’exception de M. de Sourdis, ne lui avait fait réponse. La cour les avait avertis de leur devoir par un arrêt solennel que le Conseil donna en cassation de celui du Parlement qui établissait la lieutenance générale. {b} Son autorité n’était pas même établie, au moins en la manière qu’elle le devait être dans Paris, car deux misérables ayant été condamnés à être pendus le 23 pour avoir mis le feu à l’Hôtel de Ville, les compagnies de bourgeois qui furent commandées pour tenir la main à l’exécution refusèrent d’obéir. »
- Aux arrêts contre Mazarin.
- Pour Gaston d’Orléans.
Dubuisson-Aubenay (Journal des guerres civiles, tome ii, pages 259‑260, juillet 1652) :
« Vendredi matin 19, le Parlement y étant assemblé et la relation par les députés faite, quelques-uns ont trouvé à redire qu’ils s’en fussent revenus {a} nonobstant la lettre que le roi leur avait écrite, et celle de M. du Plessis, secrétaire d’État, portant qu’il y avait une affaire de très grande conséquence à leur communiquer, pour laquelle le roi désirait qu’ils se rendissent dans Pontoise où le roi attendait pour cela.
Sur le sujet de l’assemblée, au fond, le vieux conseiller Broussel a opiné à {b} déclarer M. le duc d’Orléans régent. Lallemand, conseiller aux requêtes, quoique prince de faction, {c} a soutenu hautement que l’on ne pouvait point faire de régent ni de lieutenant général de l’État. Sur quoi, plusieurs de cette faction se sont écriés contre lui et aucuns {d} jusqu’à dire qu’il le fallait jeter par les fenêtres. Meunier-Lartige, qui était l’un des députés de Saint-Denis, a opiné qu’il fallait écrire au roi. Samedi matin 20, l’assemblée du Parlement a fini par un arrêt de ce jour portant, après le récit fait dès le jour d’hier, par M. le président de Nesmond, de ce qui s’est passé en sa députation, et de M. le président de Longueil et des conseillers de la cour vers le roi, le roi n’être < pas > en liberté et être sa personne détenue par le cardinal Mazarin ; et que M. le duc d’Orléans sera prié de la part de ladite Cour d’employer l’autorité dudit seigneur roi et la sienne pour mettre la personne du roi en pleine liberté, et de se servir pour cet effet de tous les moyens justes et légitimes, etc. ; prendre la qualité de lieutenant général du roi dans l’étendue du royaume, terres et seigneuries de son obéissance, et en faire toutes les fonctions ; ordonne qu’il sera reconnu en ladite qualité par tous les sujets de Sa Majesté, tant et si longuement que ledit cardinal sera en France, et jusqu’à ce que la déclaration dudit seigneur roi contre lui soit exécutée ; et le sieur prince de Condé aussi prié d’accepter, sous l’autorité dudit sieur duc d’Orléans, le commandement et conduite des armées, etc. […] Cet arrêt imprimé et débité dès le soir même par les imprimeurs ordinaires du roi avec privilège de Sa Majesté. »
- De Saint-Denis.
- Été d’avis de.
- Du parti des princes.
- Certains.
Journal de la Fronde (volume ii, fo 118 ro, 23 juillet 1652) :
« Le 20 au matin, le Parlement ayant continué sa délibération du jour précédent, et S.A.R. {a} y étant avec M. le Prince, MM. de Beaufort, de Sully, de Rohan, le maréchal d’Étampes et autres, l’on donna l’arrêt que je vous envoie imprimé, lequel passa de huit voix seulement ; et depuis, l’on y a ajouté, du consentement de la plupart des conseillers, que l’on prendrait, par ordre de S.A.R., tous les deniers du roi qui se trouveront entre les mains des receveurs et de leurs commis, qui seront contraints par toutes les voies au paiement de toutes les sommes qu’ils devront. Pour cet effet, l’on travaille ici à faire un Conseil de finances et S.A.R. fut avant hier, pour se sujet, dîner chez M. Tubeuf. L’on doit examiner aujourd’hui les autres moyens d’avoir de l’argent en faisant contribuer Paris ; et l’on doit bientôt aviser aux moyens d’ôter au cardinal Mazarin la distribution des bénéfices et de toutes les autres grâces que Son Altesse Royale donnera. »
- Son Altesse Royale, le duc d’Orléans.
« On dit de ce qu’on fait avec justice et raison, que c’est le droit du jeu » (Furetière).
Dubuisson-Aubenay (Journal des guerres civiles, tome ii, pages 260‑261, juillet 1652) :
« Mardi 23, sur les trois heures de relevée, en une potence double en la cour du Palais, fermée et gardée, ont été pendus le nommé Guelphe, de race de perruquiers, jeune homme hardi qui s’est fort débattu et défendu du bourreau, disant qu’il était innocent et n’avait < pas > assisté à l’incendie, mais que Jean Michel et autres l’avaient prié de monter chez M. de Verthamon, conseiller en la première des Enquêtes, tandis qu’iceux autres étaient en bas à la porte, pour lui demander l’argent qu’il leur avait promis pour le sauver de la chambre où il était caché avec d’autres en l’Hôtel de Ville, le mardi 2e du mois ; la déposition du sieur Verthamon conforme. Après lui, a été exécuté Jean Michel, aide de cuisine chez le prince de Condé, confessant son crime et fort repentant. »
« selon la coutume, en présence des chanoines de Notre-Dame et de nos collègues. »
Guy Patin a relaté dans tous ses détails la cérémonie de cette licence qui marquait l’apogée de son décanat : v. les Décrets et assemblées dans ses Commentaires de la Faculté, en date des dimanches 21 et 28, et du lundi 29 juillet 1652.
La vespérie de Charles Baralis eut lieu le 19 août 1652, et son doctorat dix jours plus tard ; les actes de ses quatre compagnons de licence se succédèrent ensuite pour s’achever le 6 mars 1653 avec le doctorat de François Landrieu.
Première Décade de Sermons. Par Pierre Du Moulin, {a} Ministre de la Parole de Dieu à Sedan, et Professeur de Théologie. {b}
- Pierre i Du Moulin, V. note [9], lettre 29.
- Genève, Pierre Chouët, 1653, in‑8o, réimprimée en même temps que les quatre décades suivantes, pour un total de 1 263 pages.
Moïse Amyraut (Bourgueil, Anjou 1596-8 janvier 1664) était pasteur et professeur à l’Université de Saumur. Député par sa province au synode de Charenton (1631), il avait été chargé de réclamer auprès de la cour contre les infractions faites aux édits de pacification, et obtenu la suppression de l’humiliante obligation où étaient les députés protestants de ne parler au roi qu’à genoux. Il essaya de concilier les diverses sectes du protestantisme et composa un traité à ce sujet. Plusieurs fois soupçonné d’arminianisme (v. note [7], lettre 100), Amyraut dut soutenir maintes controverses, dont une avec Pierre i Du Moulin (G.D.U. xixe s.).
Bayle, note (H) :« Sa Morale chrétienne en six volumes in‑8o, dont le premier fut imprimé l’an 1652, {a} est le fruit de conversations qu’il avait souvent avec M. de Villarnoul, seigneur d’un mérite extraordinaire et l’un des plus grands gentilshommes de l’Europe, héritier en cela aussi de son aïeul maternel, M. Duplessis-Mornay. » {b}
- La Morale chrétienne à Monsieur de Villarnoul. Première partie. Par Moïse Amayraut (Saumur, Isaac Desbordes, 1652, in‑8o de 653 pages) ; la sixième a paru en 1660.
- Par sa mère, Philippe de Jaucourt, sieur de Villarnoul, baron de La Forêt-sur-Sèvre, était petit-fils de Philippe Duplessis-Mornay (v. note [19], lettre 81), surnommé le pape des huguenots. Il mourut en 1669 (La France protestante, tome vi, page 46).
Journal de la Fronde (volume ii, fo 120 ro, Paris, 26 juillet 1652) :
« On écrit de Rouen, du 24, que le jour précédent le procureur général apporta […] un arrêt du Conseil du 18 qui casse l’élection faite de M. de Broussel pour être prévôt des marchands, et lui défend d’en faire l’exercice sur peine de la vie et ordonne qu’il sera informé de l’attentat horrible fait à l’Hôtel de Ville de Paris ; sur quoi l’on n’avait rien délibéré. Les mêmes lettres ont été envoyées à tous les parlements. »
Cette mazarinade (Paris, sans nom, 1652, 26 pages in‑4o) est attribuée au P. François Faure, confesseur de la reine, évêque de Glandèves et futur évêque d’Amiens, ou à Robert Arnauld d’Andilly (v. note [4], lettre 845).
Sous forme d’un prêche respectueux adressé au roi et à la reine, c’est une analyse politique très détaillée de la situation du royaume depuis les barricades d’août 1648 jusqu’à la fin de juin 1652, principalement en faveur de la légitimité royale et contre Mazarin, les financiers, le prince de Condé (mais mollement) et surtout les horreurs de la guerre civile.
Trois extraits en donnent la substance et le ton (pages 17‑23).
À peine imprimée, la Vérité toute nue… fut interdite par arrêt du 18 juillet.
Les témoignages abondent sur ce combat qui fut fatal au duc de Nemours.
« Le duc de Nemours, depuis le différend qu’il avait eu avec le duc de Beaufort, son beau-frère, lorsqu’ils avaient tous deux le commandement, l’un des troupes qu’il avait amenées de Flandre, et l’autre de celles qui étaient au duc d’Orléans, avait toujours conservé une haine et un mépris étrange pour lui et l’avait attaqué plusieurs fois de paroles pour l’obliger à se battre ; de quoi le duc de Beaufort s’éloignait toujours, tant parce qu’il aimait beaucoup la duchesse de Nemours, sa sœur dont il était aussi fort aimé, et ainsi il ne voulait pas lui donner ce déplaisir (car, bien que son mari ne vécût pas fort bien avec elle et que ses galanteries avec la duchesse de Châtillon l’empêchassent de lui témoigner une ardente passion, elle ne laissait pas d’en avoir une extraordinaire pour lui) que parce qu’il n’était pas en réputation d’aimer trop à se porter sur le pré. On a cru même qu’il {a} ne s’y serait pas résolu cette fois-ci sans le décri {b} où il était pour avoir esquivé de se battre contre le duc de Candale, le marquis de Jarzé, etc. Depuis quelque temps, il {c} faisait paraître une telle passion contre le duc de Beaufort qu’il était aisé de juger qu’elle ne pourrait cesser que par un combat. Néanmoins, comme il avait été blessé à la main au combat du faubourg Saint-Antoine et qu’il n’était pas encore capable de tenir son épée, on crut qu’il ne se hâterait pas tant de faire appeler le duc de Beaufort. M. le Prince même lui disait, toutes les fois qu’il en parlait, qu’il fallait qu’il se fortifiât avant que de penser à se battre, et que lorsqu’il serait en état de le pouvoir faire, non seulement il ne l’en détournerait pas, mais qu’il le voulait servir. Cependant, la violence de cette animosité l’aveugla de telle sorte que, tout faible et tout incommodé qu’il était encore, il se découvrit au marquis de Villars {d} qui s’était entièrement attaché à lui et l’obligea d’aller appeler le duc de Beaufort, ce qu’il fit. Et parce qu’il ne pouvait pas se battre à l’épée seule, il lui fit proposer que ce fût au pistolet et à pied. Le duc de Beaufort accepta ce parti et il convint avec Villars du lieu et du jour, lequel étant venu (ce fut le 30 juillet), chacun alla de son côté vers l’hôtel de Vendôme afin que l’on ne se doutât de rien. Ils mirent pied à terre dans le marché aux chevaux derrière le jardin de l’hôtel de Vendôme {e} et ils se battirent cinq contre cinq : le duc de Nemours, Villars et trois gentilshommes ; le duc de Beaufort, le comte de Bury, fils du marquis de Rostaing, et trois gentilshommes. Le duc de Nemours avait fait porter dans son carrosse deux pistolets chargés de cinq balles chacun. Il en donna un au duc de Beaufort et retint l’autre, qu’il tira d’abord avec précipitation. Il donna dans les cheveux du duc de Beaufort, lequel voyant qu’il avait évité le coup, dit au duc de Nemours qu’il se devait contenter et qu’il lui donnerait la vie s’il la demandait. Le duc de Nemours répondit qu’il ne la lui demanderait jamais ; et ayant mis l’épée à la main à l’instant qu’il eut tiré son pistolet, il se mit en devoir de porter un coup au duc de Beaufort qui en eut la main un peu blessée, et à l’instant même il tira son pistolet dont il donna droit dans l’estomac du duc de Nemours et lui perça le cœur au-dessous de la mamelle droite. Villars et Bury se blessèrent tous deux et ayant vu tomber le duc de Nemours, ils y accoururent et les six autres gentilshommes aussi. Dès que le combat commença, Mme de Rambouillet, religieuse, qui se promenait avec l’abbé de Saint-Spire dans le jardin de l’hôtel de Vendôme, sortirent par une porte de derrière et y coururent, mais ils ne purent arriver assez à temps pour les empêcher. Tous deux approchèrent du duc de Nemours pour l’exhorter à penser à Dieu et l’abbé de Saint-Spire lui donna l’absolution ; mais on croit qu’il n’entendait déjà plus car il serra étrangement la main de Mme de Rambouillet sans donner pourtant aucun signe d’entendre ce qu’elle lui disait. On le mit dans un carrosse pour l’emporter et il y expira incontinent. Le duc de Beaufort voulait qu’on le portât à l’hôtel de Vendôme, ce que les siens ne voulurent pas. Il y était aussi accouru des augustins déchaussés dont l’église est fort proche de ce lieu-là ; {f} mais ils y vinrent trop tard, comme les autres. Comme le carrosse était proche de cette église, M. le Prince, qui accourait sur le bruit qu’il avait eu de ce combat, apprit que M. de Nemours était mort ; et ayant demandé où il était, on lui dit qu’il était dans ce carrosse qu’on lui montrait. Sur quoi, il ordonna qu’on menât le corps chez lui, {g} ce qui fut fait. Il en témoigna beaucoup d’affliction et sur-le-champ, il jura, se prit aux cheveux, et fit enfin toutes les actions d’un homme transporté et outré de douleur ; et depuis, témoigna qu’il n’en pouvait ouïr parler sans lui faire de nouvelles plaies dans le cœur. L’abbé de Saint-Spire, songeant à l’angoisse que cette nouvelle devait donner à la duchesse de Nemours qui, étant très pieuse et aimant chèrement son mari, devait avoir des ressentiments inconcevables de sa perte et de la manière dont elle le perdait, alla tout courant chercher l’évêque de Grasse, {h} prélat savant et pieux, pour lui en adoucir l’amertume en la lui apprenant. Il y alla du même pas et la trouva dans une inquiétude non pareille parce qu’elle avait déjà découvert, par les cris et les gémissements de ses domestiques, que son mari s’était battu et qu’il avait été fort blessé. Voyant donc entrer cet évêque, elle ne douta plus de son malheur et demeura quelque temps comme une statue ; puis, comme se réveillant tout à coup, elle versa un torrent de larmes sur Mme de Brienne et Mme *** qui étaient auprès d’elle, et s’écria : “ Mon mari mort ! et sans parler ! et par mon frère ! ” M. le Prince y arriva un peu après et ayant ouï dire qu’il venait, elle pria instamment qu’on ne laissât point entrer et qu’il était impossible qu’elle en pût supporter la vue parce que c’était pour lui que son mari avait péri. Il entra dans la chambre et parla à l’évêque de Grasse et à plusieurs autres, mais non pas à elle ; on le visita comme s’il eût perdu un de ses plus proches et il avouait à tout le monde que rien ne l’avait jamais tant touché que ce malheur. La duchesse de Nemours se retira le lendemain aux Filles de Sainte-Marie de la rue Saint-Antoine où elle fut fort longtemps et ne se laissait voir qu’à l’évêque de Grasse, qui l’allait visiter presque tous les jours, et à quelques autres personnes de piété dont l’entretien la pouvait consoler. Elle avait une telle passion pour son mari qu’elle faisait avec joie tout ce qu’il désirait d’elle ; et par ce motif, elle s’était obligée avec lui pour plus de 400 000 livres ; de sorte que la Maison étant fort obérée, elle aura grand-peine à retirer assez de son bien pour satisfaire seulement aux dettes auxquelles elle est obligée et ne pourra demeurer qu’incommodée avec ses deux filles. »
- Beaufort.
- Décri : mauvaise réputation.
- Nemours.
- V. note [1], lettre 936.
- Aujourd’hui entre la place de l’Opéra et la place Vendôme, dans le iie arrondissement de Paris (v. note [2], lettre 920).
- Les augustins déchaussés ou Petits Pères avaient Notre-Dame-des-Victoires pour église.
- Sur la rive gauche de la Seine, près du palais du Luxembourg (emplacement actuel du théâtre de l’Odéon).
- Antoine Godeau, v. note [10], lettre 133.
« Ce jour, on sait par le sieur Des Fougerais, {a} célèbre médecin et ordinaire chez M. de Nemours, qu’il fut tué sur-le-champ, de trois balles perçant sous la mamelle gauche et trouvées dans les lombes. Ils se battaient à pied avec le pistolet et l’épée ; les marquis de Villars, Flisk {b} et deux autres, et pour M. de Beaufort, le comte de Bury, Héricourt, jadis capitaine ou lieutenant de ses gardes, etc. qui ont été blessés. Son corps fut porté à l’hôtel de Condé, et le lendemain, 31, en son hôtel de Nemours, où il fut visité et embaumé pour être porté à Annecy-en-Genevois. »
- Élie Béda Des Fougerais.
- Sic pour Du Ris ou de Ri.
« Comme ils furent en présence, M. de Beaufort et lui, le premier lui dit : “ Ah ! mon frère, quelle honte ! oublions le passé, soyons bons amis. ” M. de Nemours lui cria : “ Ah ! coquin, il faut que tu me tues ou que je te tue. ” Il tira son pistolet, qui manqua, et vint à M. de Beaufort l’épée à la main ; de sorte qu’il fut obligé de se défendre ; il tira, et le tua tout roidet de trois balles qui étaient dans le pistolet. »
« S.A.R {a}. ayant fait son Conseil, il y a eu différend pour la préséance entre MM. de Beaufort et de Nemours, et de Rieux, dont pas un n’a voulu céder à l’autre ; et l’affaire s’est si fort échauffée entre les deux premiers que le ressentiment de la dispute qu’ils eurent naguère à Orléans les a portés à se donner aujourd’hui le défi. Pour cet effet, M. de Nemours a envoyé, cette après-dînée, M. de Villars, de la Maison de Chavaignac, à M. de Beaufort, pour l’appeler en duel, dont celui-ci s’étant défendu honnêtement, et se voyant néanmoins fort pressé de se battre, s’y est enfin résolu ; et ils se sont battus ce soir, à six heures, dans le Marché aux chevaux, cinq contre cinq, savoir, du côté de M. de Nemours, Villars, Compans, le baron de La Chaise et son capitaine des gardes, et du côté de M. de Beaufort, le comte de Bury et ses trois gentilshommes, nommés Brillet, Héricourt, et Du Ris. Tous les seconds s’étant battus avec l’épée seulement, Brillet et Du Ris y ont été blessés ; et MM. de Beaufort et de Nemours se sont battus, l’épée à une main et le pistolet à l’autre. M. de Nemours ayant tiré le premier son coup de pistolet et ayant blessé M. de Beaufort à la main, celui-ci lui a dit qu’il lui demandât la vie et qu’il ne l’obligeât pas de le tuer ; ce que M. de Nemours n’ayant pas voulu faire et ayant répondu qu’il fallait mourir l’un ou l’autre, M. de Beaufort lui a tiré son coup de pistolet dans le cœur et l’a tué sur la place ; après quoi il a séparé les seconds, qui n’ont pas eu loisir de se faire beaucoup de mal. Le corps de M. de Nemours a été porté à l’hôtel de Condé, où M. le Prince a témoigné un regret si grand qu’on ne l’en peut consoler ; non plus que Mme de Nemours, qui est tombée évanouie, en apprenant cette nouvelle. Il est universellement regretté. »
- Son Altesse Royale, le duc d’Orléans.
François de Lorraine, comte de Rieux et d’Harcourt (1623-1694), était le troisième fils de Charles ii de Lorraine, duc d’Elbeuf, et de Catherine-Henriette de Bourbon, sœur du duc de Vendôme (César Monsieur, tous deux enfants naturels de Henri iv). V. note [44], lettre 226, pour Henri-Charles de La Trémoille, prince de Tarente, cousin de Condé.
Journal de la Fronde (volume ii, fo 124 ro et vo, 2 août 1652) :
« Le 31 à midi, M. le prince de Tarente et le comte de Rieux s’étant rencontrés dans la galerie du palais d’Orléans, celui-ci, qui voulait précéder le premier dans le Conseil de S.A.R., {a} lui en parla avec beaucoup de passion ; dont M. le Prince s’en étant aperçu, en avertit S.A.R. et lui fit remarquer l’importance qu’il y avait d’éviter un malheur qui en eût pu arriver, semblable à celui du jour précédent. Aussitôt, S.A.R. obligea le comte de Rieux à lui donner sa parole ; et M. le Prince prit celle du prince de Tarente après lui avoir dit qu’il ne fallait plus parler de ce différend et qu’il fallait s’en tenir à ce qui avait été arrêté le matin du jour même, savoir qu’un chacun se mettrait où il se trouverait. {b} M. le Prince même dit qu’il se mettrait le dernier pour montrer le chemin aux autres ; et M. le prince de Tarente était demeuré d’accord avec M. de Sully que le < premier qui > y arriverait aurait la première place. Enfin, les paroles étant données et S.A.R. étant retournée au bout de la galerie, M. le comte de Rieux murmura de ce qu’on l’obligeait à donner sa parole sur un sujet de cette nature, disant qu’il n’y avait point de rang à régler entre M. le prince de Tarente et lui ; ce qu’ayant répété deux ou trois fois, celui-ci lui répondit qu’il n’y avait rien de réglé entre eux. M. le Prince s’étant alors adressé à M. le comte de Rieux, lui dit qu’il manquait de respect pour S.A.R. après la parole qu’il lui avait donnée ; à quoi ce comte ayant répondu qu’il savait bien à qui il devait du respect, M. le Prince lui dit : “ Je ne vois pas que vous le sachiez ” (voulant dire qu’il n’en avait point pour lui). Alors ce comte lui répliqua : “ Je ne vous choisirai pas pour juge de mon affaire avec M. le prince de Tarente, à cause que vous êtes pour lui ”. M. le Prince repartit : “ Puisque vous m’obligez à vous le dire, il est vrai que je suis pour lui et c’est avec raison, parce qu’il est mon proche parent et mon ami, et que je lui ai obligation, et non point à vous ”. Sur quoi, ce comte ayant dit à M. le Prince qu’il ne serait jamais son serviteur ni son ami et qu’il se souciait fort peu de lui, M. le Prince lui donna un soufflet. Aussitôt, le comte de Rieux rendit un coup de poing à M. le Prince ; et lui ayant arraché ses glands, {c} tira son épée à demi ; mais M. le Prince, qui n’en avait point, lui sauta d’abord sur la garde et le maltraita encore davantage, assisté de trois ou quatre personnes de sa suite, entre autres le président Viole et le sieur Guitaut ; mais pour éviter un plus grand malheur, on le jeta sur la terrasse qui regarde la rue Tournon et l’on ferma la porte de la galerie, où M. le Prince ayant surpris l’épée du baron de Migène, retourna à la porte pour s’aller battre contre le comte de Rieux ; mais le duc de Rohan se mit devant la porte et dit à M. le Prince : “ Monseigneur, vous me pouvez tuer, mais vous ne passerez point ”. Et S.A.R. étant survenue, fit arrêter prisonnier ce comte qui fut conduit dans la Bastille, où l’on croit qu’il demeurera longtemps. »
- Son Altesse Royale, le duc d’Orléans.
- Dans le rang de préséances.
- Boutons ornés fermant le collet.
Dubuisson-Aubenay (Journal des guerres civiles, tome ii, page 267) ajoute à cela que le duc d’Orléans
« envoya quérir M. le Chancelier et quelques conseillers du Parlement pour lui faire son procès, le prince de Condé le priant que ce ne fût point ».
Guy Patin sous-estimait la durée de l’emprisonnement (Journal de la Fronde, volume ii, fo 154 vo, 24 septembre 1652) :
« Le comte de Rieux fut mis, hier au soir, hors de la Bastille, son affaire s’étant accommodée avant-hier par l’entremise de M. de Lorraine qui a obtenu sa liberté. »
« Tout cela va comme il plaît à Dieu, c’est-à-dire, en désordre, personne n’en a le soin » (Furetière).
Tenant la « régence » du duc d’Orléans (v. supra note [34]) pour une imposture, le roi maintenait la pression sur les princes et ce qui restait de Parlement à Paris (Journal de la Fronde, volume ii, fos 122 ro et vo, et 127 ro, de Paris, juillet 1652) :
« Le 28 au soir, un gentilhomme fut envoyé de la cour à M. le Chancelier {a} pour lui offrir les sceaux et lui dire qu’on l’attendait à Pontoise pour les < lui > mettre entre les mains ; à quoi il répondit qu’il avait les sceaux et qu’il était à la cour. Sa réponse fut fort remarquée. […]
Il y a eu arrêt du Conseil, donné à Pontoise le 27, portant cassation de celui du Parlement du 20, défenses à Son Altesse Royale de prendre la qualité de lieutenant général du roi et à toutes les personnes de le reconnaître ni lui obéir en cette qualité, avec d’autres circonstances aussi inutiles que l’arrêt. […] Le cardinal Mazarin ayant fait résoudre, la semaine passée, dans le Conseil d’en haut, que le Parlement de Paris serait transféré à Mantes, celui de Rouen, auquel la déclaration en avait été adressée, a sursis à y délibérer jusqu’à ce que les députés qu’il a envoyés à la cour aient été ouïs. En même temps, M. le garde des sceaux {b} dit qu’il avait ordre du roi de leur mander qu’ils quittassent Mantes et allassent à Vernon tenir leurs séances, attendu que le roi voulait établir un parlement à Mantes ; à quoi ils firent réponse qu’ils étaient aussi anciens conseillers du roi que ceux du Parlement, qu’ils ne lui céderaient en rien et qu’ils ne désempareraient point de Mantes. Ils envoyèrent leur avocat et procureur général porter cette réponse à la cour ; qui, depuis, leur a permis d’y demeurer et a envoyé ici la déclaration du roi par laquelle le Parlement de Paris est transféré à Pontoise, où l’ouverture s’en doit faire aujourd’hui par les présidents Le Bailleul, de Novion et Le Coigneux, et par quelques conseillers mazarins qui sont avec le procureur général. » {c}
- Pierre iv Séguier.
- Mathieu Molé.
- Nicolas Fouquet.
Forme la plus grave de la maladie, les gouttes arrêtées étaient la même chose que la goutte supprimée (v. note [30], lettre 99).
« On dit qu’un malade a reçu tous ses sacrements pour dire qu’il a été confessé, communié, et qu’il a eu l’extrême onction, qu’on l’a assisté de tous secours spirituels et corporels » (Furetière). Le sacrement de la paix est à comprendre comme le droit de mourir en paix.
Henri-Auguste de Loménie (1594-3 novembre 1666), comte de Brienne depuis son mariage en 1623, était le fils d’Antoine de Loménie, huguenot converti et secrétaire d’État de Henri iv. Après avoir participé aux négociations préparant les états généraux de 1614 (v. note [28] du Borboniana 3 manuscrit), il avait obtenu en 1617 la charge de maître des cérémonies et de prévôt des Ordres du roi. Ambassadeur en Angleterre, il avait conclu en 1624 le mariage de Henriette de France et du prince de Galles, futur roi Charles ier. Indéfectiblement fidèle à la Couronne durant la Fronde, le comte de Brienne demeura en grand crédit jusqu’à la mort de Mazarin ; puis son étoile pâlit et il perdit le département des Affaires étrangères en 1663. À l’annonce de sa mort, le Chancelier Le Tellier dit en plein Conseil « qu’il n’avait jamais vu un homme plus intelligent dans les affaires, moins ébranlé dans les dangers, moins étonné dans les surprises et plus fertile en expédients pour s’en démêler heureusement ». Louis xiv ajouta : « Je perds aujourd’hui le plus ancien, le plus fidèle et le mieux informé de mes ministres. »
Le comte de Brienne a laissé ses Mémoires contenant les événements les plus remarquables du règne de Louis xiii et ceux du règne de Louis xiv jusqu’à la mort du cardinal de Mazarin (Amsterdam, 1717, 3 volumes in‑12). Sans fortune, il vendit au roi la riche collection de manuscrits commencée par son père et terminée par lui, contenant quantité de traités de paix, négociations, traités d’ambassades, mémoires, etc. (G.D.U. xixe s.).
« Voici l’Agneau de Dieu, voici celui qui enlève les péchés du monde » : paroles de l’Agnus Dei, tirées de l’Évangile de Jean (1:29).
Jules de Médicis (Florence 1478-Rome 1534) était bâtard posthume légitimé de Julien, frère cadet de Laurent de Médicis, dit le Magnifique, grand-duc de Toscane de 1469 à 1492. Oncle de la reine de France Catherine de Médicis, cardinal en 1513, Jules fut élu pape en 1523 sous le nom de Clément vii ; l’acte le plus mémorable de son pontificat fut son objection au divorce du roi Henri viii d’Angleterre qui provoqua le schisme anglican.
V. notes [39] du Traité de la Conservation de santé, chapitre ii, et [28] du Patiniana I‑2 pour les commentaires de ce passage.
« mais la négociation traîne. »
Journal de la Fronde (volume ii, fo 124 vo, Paris, 2 août 1652) :
« Les Espagnols ayant passé la rivière d’Aisne à Pontavert, {a} se sont avancés jusqu’à La Fère, en deçà de Fismes ; {b} et quoiqu’on mande qu’ils soient douze mille chevaux et dix mille fantassins, avec six mille chevaux de bagage, néanmoins, on croit qu’il n’y a en tout que seize mille combattants. Le maréchal de Turenne se posta hier à Beaumont-sur-Oise {c} et a fait avancer quelque cavalerie jusqu’à La Chevrette et aux autres postes des environs de Paris. Le comte de Tavannes est allé ce matin à Poissy pour s’en emparer et rompre le pont. »
- 25 kilomètres au sud-est de Laon.
- V. note [14], lettre 539.
- À mi-chemin entre Pontoise à l’ouest et Chantilly à l’est.
« Ô misérable état des choses ! ô mœurs ! ô temps ! », citation (ici inversée et librement allongée) de Cicéron (De Signis, xxv, 26, et Catilinaires, i, 1), devenue proverbiale : à propos de Catilina, Cicéron s’élevait ainsi énergiquement contre la complicité morale de la société qui permettait d’oser les plus énormes attentats, o tempora ! o mores ! (G.D.U. xixe s.).
Ce second post-scriptum, daté, est écrit verticalement dans la marge, au recto du second fo (no 43) de la lettre.
Chasse-marée : « marchand ou voiturier qui apporte en diligence le poisson de mer dans les villes » (Furetière).
Fruitier « se dit aussi de celui qui vend des fruits » (ibid.).