L. 384.  >
À Charles Spon,
le 15 décembre 1654

Monsieur mon cher ami, [a][1]

Ce 9e de décembre. Je vous envoyai ma dernière le mardi 8e de décembre, incluse dans celle que j’écrivais à M. Huguetan [2] pour réponse. Dans cette dernière, je vous mandais des nouvelles de la convalescence de M. Gassendi [3] et de la maladie de M. Riolan, [4] aujourd’hui je vous dirai où nous en sommes. M. Riolan a fort mal passé la nuit, il est un peu mieux ce matin et hors de fièvre, soulagé seulement de ce qu’il a peu dormi. Je voudrais bien qu’il pût encore vivre six ou sept ans pour les bons desseins qu’il a dans la tête. [1][5] Nouvelles sont ici arrivées que le signor Pietro Mazzarini, [6] père du cardinal, est mort à Rome, fort âgé. En même temps, l’on nous apprend que le P. de Gondi, [7] prêtre de l’Oratoire [8] et père de M. le cardinal de Retz, [9] est mort à Clermont en Auvergne [10] où il avait été envoyé en exil. [2] Je ne sais de quel compliment se serviront l’un à l’autre ces deux pères en l’autre monde s’ils s’y rencontrent, à cause des inimitiés qui sont entre leurs deux enfants, tous deux cardinaux de Sainte Mère Église romaine.

Ce jourd’hui, jeudi 10e de décembre, mon deuxième fils Carolus [11] a répondu de sa première quodlibétaire [12] dans nos Écoles, fort bien et au grand contentement de tous ses auditeurs, dont je suis fort réjoui. [3] Je vous enverrai de ses thèses dans le premier paquet avec le livre de M. Perreau, [13] à la fin duquel vous verrez un beau sonnet sur la mort de M. Guérin [14] l’avocat, gendre de Guénault [15] qui l’a tué avec son antimoine ; [4][16] mais il en court un autre sous la cape, que je n’ai point encore, je ne l’ai ouï que réciter, il est sanglant et furieux contre Guénault même, je vous en ferai part dès que je l’aurai. Ce dernier sonnet fera bien enrager Guénault qui est un homme fier, méchant et orgueilleux. M. Gassendi est, Dieu merci, si bien que je lui dirai adieu dès que je l’aurai purgé [17] encore une fois. Pour M. Riolan, il est un peu mieux et a trêve de respirer. [5] Il pourra aller plus avant s’il ménage bien sa santé et s’il se peut garder du grand froid qui est l’ennemi juré de ses poumons. Mais ce bonhomme est manifestement intempestus et immodicus : [6] dès qu’il se porte bien, il entreprend trop nec se respicit[7] ou à être dans son étude durant le grand froid trop longtemps, ou à sortir et aller en ville mal à propos voir quelqu’un de ses amis. Quoi qu’il en soit, ce serait grand dommage qu’il nous manquât, il a encore de bons desseins dans la tête, et même il y en a de commencés et de bien avancés en son étude. [1]

Nouvelles sont ici venues que les Moscovites ont remporté une grande victoire sur les Polonais, dont il en est demeuré 40 000 sur la place, et le roi de Pologne [18] même tué, qui tâchait de faire lever le siège de Smolensk [19] en Lituanie [20] que ces Moscovites tenaient assiégée et qui se sera infailliblement rendue à eux après telle victoire. [8] Le petit Tartare, [21] l’empereur de Vienne [22][23] et le Grand Turc [24] même se trouveront obligés d’armer à bon escient et de s’opposer à ces nouveaux conquérants qui viennent du Nord, de peur qu’ils n’entrent dans leurs états, alléchés par la douceur du climat, comme firent autrefois les Français dans leurs premières irruptions en Italie, au rapport de Tite Live. [9][25] Je ne m’étonne point si les peuples ont bien du mal, tandis que les princes ont tant d’ambition et qu’ils n’ont pitié de personne ni amour pour la vertu, ni soin de leur réputation pour l’avenir. Tout ceci est fort incertain, imo falsum ; [10] mais il est vrai que la ville de Smolensk s’est rendue, faute d’être secourue, aux Moscovites, mais à conditions raisonnables et honorables. [26]

Toute la noblesse de la cour se met en deuil pour la mort du signor Pietro Mazzarini, pour faire tant plus d’honneur à Son Éminence. [27] On dit qu’il en est si affligé que le roi [28] et la reine [29] mêmes ont de la peine de le consoler.

Ce 14e de décembre. Pour votre lettre datée du 8e de décembre, laquelle je viens de recevoir présentement, je vous remercie de l’affection qu’avez eue de visiter M. Moreau [30] mon hôte, lequel est arrivé il n’y a qu’une heure et que je n’ai point encore vu. M. Gassendi est guéri, Dieu merci. Il se lève dans la chambre et l’ai aujourd’hui entretenu une grosse demi-heure au coin de son feu. Je me doutais bien que seriez de mon avis touchant la correction du livre de M. Gassendi. Demeurez ferme là-dessus s’il vous plaît, ce n’est pas viande prête pour qui que ce soit, il faut travailler à préparer la copie. Un marchand hollandais le presse de donner sa parole aussi bien que M. Barbier, [31] ce qu’il ne fera pas encore pour personne. Il me dit hier qu’il y aurait tout au moins huit volumes in‑fo[32]

Je vous supplie de faire mes recommandations à M. Duhan [33] et de lui dire que je le supplie de faire en sorte que notre Botal [34][35] soit imprimé pour le mois de février prochain, afin qu’on puisse le débiter à la foire de Saint-Germain. [11][36] Je vous renvoie la lettre du sieur Courtaud. [37] C’est un bon garçon, il fait le prud’homme en ses lettres et est fou en ses livres. [12][38] Il ressemble aux pharisiens vers le Messie, labiis me honorant, cor autem eorum longe est a me[13][39][40] ou à ceux qui cachent le bras ayant jeté la pierre. Il dit qu’il veut être mon ami après avoir tant dit de mal de moi, il faut que cet homme soit fou et que tout ce qu’on m’en a dit soit vrai. Il m’accuse d’avoir fait la Légende[41][42] à quoi j’ai aussi peu contribué que vous : M. Merlet [43] en est l’auteur. Il me blâme de ce que le Médecin charitable [44] latin est intitulé Medicus officiosus ; je n’improuve pas cette épithète, mais je n’y ai rien mis du mien, c’est un libraire hollandais nommé Vlacq [45] qui l’a fait faire et qui en a payé la façon à M. Sauvageon, [46] quem nosti, quique ex ea versione per aliquot menses huic sibi victum comparavit [14] durant le mauvais temps. On voit bien par là que Courtaud est bien ignorant et qu’il n’entend rien à critiquer un livre, vu que là-dedans il y a bien des fautes dont il ne parle point et par conséquent, qu’il n’a pas reconnues et qui n’auraient jamais passé si j’en eusse été averti. Tout le reste qu’il dit contre moi est ridicule, comme lui-même l’est en tout. Ceux qui ont lu son livre se moquent de lui et de ses injures, lesquelles je méprise de grand cœur. Aussi fait M. Riolan, [47][48] qui est au-dessus de toutes ses atteintes, qui se moque de cet impertinent écrivain et de toutes ses médisances. Il dit qu’il fera réponse à M. Guillemeau, [49] et celui-ci lui fera encore d’autres réponses quæ verborum et rerum acerbitate non carebunt : sic faciendi plures libros, et comitiorum spargendorum nullus erit finis[15][50] Il faut bien dire que Courtaud a la tête mal faite : il veut dire du mal de notre bonhomme M. Riolan qui est estimé par toute l’Europe, et va recevoir des mémoires que lui font donner Guénault, le Gazetier [51] et autres tels imposteurs antimoniaux. Je vous jure que tout le monde s’est ici moqué de son livre, tant amis qu’ennemis, le tout étant fort mal fagoté. M. Riolan est au-dessus de toutes ses médisances, et moi aussi. Nous vivons à Paris d’un air qui fera toujours passer Courtaud pour un médisant et un imposteur, comme ses livres et ses médisances le feront passer dans la postérité pour un chétif, misérable et impudent écrivain, en cas que son livre aille jusque-là ; nec auctor deferatur in vicum vendentem thus et odores, et piper, et quidquid chartis amicitur ineptis[16][52] J’oubliais à vous dire que celui qui m’a dédié la version des Aphorismes d’Hippocrate [53] en vers français est M. de Fontenettes, [54] médecin de Poitiers, [55] où il a daubé les charlatans et les chimistes : [56] inde illæ lacrymæ ; [17][57] mais c’est celui que je ne vis jamais. Courtaud n’a qu’à lui demander pourquoi il m’aime et pourquoi il m’a fort loué en ses autres œuvres, vu que antea nescebiam natum hominem[18] Cet homme est bien sot et bien impertinent, malhabile et peu charitable, de ne pouvoir souffrir que l’on dise du bien d’un homme qu’il n’a jamais vu et qui ne l’a jamais offensé. Et à tout du bonhomme Courtaud ! qui fera comme il l’entendra, soit qu’il se taise ou non, nihil moror [19] car, s’il n’écrit mieux et plus raisonnablement, il est assuré qu’on s’en moquera ; et je crois qu’il y a encore plus d’honneur d’être blâmé de cet homme que d’en être loué. Néanmoins, je vous avoue que je vous ai très grande obligation de la bonté qu’avez eue de lui écrire en ma faveur et vous en rends grâces de tout mon cœur. Si Courtaud répond à M. Guillemeau, il aura bientôt après son fait : celui-ci s’en va faire imprimer un livret latin contre l’antimoine. Pour votre thèse de Sanctorum Communione [20] de Zurich, [58][59] n’y a-t-il pas moyen d’en avoir une, à quelque prix que ce soit ? Pour le petit traité intitulé Observatio therapeutica de recto usu aquarum mineralium, præsertim subacidarum, etc., [21][60] obligez-moi de me le faire transcrire, qui soit lisible et correct, et j’en paierai tout ce qu’il vous plaira. J’ai grande envie de le voir et vous m’obligerez très particulièrement si vous faites que j’en aie une copie que je puisse bien lire. Je pense que cela n’est pas long et qu’il y a peu de chapitres. Je vous prie encore une fois de vous en souvenir, aussi bien que de la thèse de Zurich. Je vous ferai rendre l’argent que vous avez rendu à MM. Huguetan et Ravaud pour mon ballot, par ordre de M. Moreau mon hôte. Il y a là-dedans un article de 40 sols pour le port depuis Gênes [61] jusqu’à Marseille, que M. Musnier avait déjà payé, à ce qu’il m’a mandé. Pour les livres que vous y avez ajoutés, je vous en rends grâces, mettez-les sur mon compte afin que je vous les paie. Mais dites-moi, je vous prie, qui est ce fils de Mlle Buisson [62] de Genève, qui n’a point voulu d’argent de son livre. [22] Si c’est à cause de moi, je vous prie de me le mander afin que je sache à qui j’en ai l’obligation et que je lui envoie autre chose en échange. Pour les cinq autres, mettez leur prix sur mon compte. Il y a là-dedans un Christianus que je serai ravi d’avoir, et de voir si ce père l’aura habillé comme un jésuite d’aujourd’hui, [23] que M. Tarin, [63] très savant homme, méprise fort : il dit qu’un jésuite qui vient de Rome, et qui nous prêche les grains bénits et les indulgences du pape, comme ils font tous, non ideo Christianus debet censeri[24] mais que c’est seulement un païen baptisé, fort éloigné des mœurs d’un bon chrétien. Pour les défets d’Albert le Grand [64] que vous avez recouvrés pour M. Moreau, [25][65] je ne manquerai pas de les lui délivrer. Lui et Monsieur son fils [66] me firent l’honneur de dîner céans jeudi dernier après l’acte de mon deuxième fils, [67] avec quelques autres docteurs, où nous rîmes bien. [26] J’avais le meilleur vin de Paris, sorti du clos des chartreux de Dijon. [27][68][69][70] Le livre de M. Perreau [71] est enfin achevé, [28] on en a délivré aujourd’hui seulement au relieur pour en relier quelque quantité en veau et en parchemin, [72] afin que l’auteur en fasse ses présents. Il y a ici un jeune homme, marchand de Lyon, nommé M. Ferrus, [29][73] avec lequel je dînai hier chez de ses parents qui sont mes bons amis. Je lui parlai fort de vous, il vous estime très fort et connaît fort MM. Ravaud, Rigaud et Borde. Nous bûmes à votre santé, il vous honore fort particulièrement et vous verra à Lyon à cause de moi, comme il m’a promis. S’il peut y avoir place dans sa valise pour un des livres de M. Perreau, je lui donnerai pour vous. Nos autres amis du deuxième rang recevront les leurs par quelque autre voie. J’oubliais à vous dire que Courtaud est bien plaisant de citer M. Riolan comme un homme qui aurait dit du mal de moi dans ses Recherches[74] lui qui est mon meilleur ami. Ne lui en déplaise, cela est très faux, et lui très mal conseillé d’écrire tant de sottes injures sur la foi de plusieurs honnêtes hommes, comme il dit. [30] Il nous devait citer quelqu’un de ces honnêtes gens-là. Pour ce qu’il dit de ma raillerie, il a tort : hélas, qui pourrait s’empêcher de rire parmi tant de folies du siècle et de si méchants livres que ceux de Courtaud, quis tam ferreus, ut teneat se ? [31][75] N’est-il pas fou après de si chétifs livrets qu’il a produits, dire encore qu’il veut répondre à M. Guillemeau, qui n’est point homme à en demeurer là ni à lui pardonner ? Il ferait fort bien de se taire, de ne plus rien écrire ; [32] mais ce n’est point à moi à faire, à lui donner conseil, j’ai même peur qu’il n’en soit point capable.

M. Riolan est en bon état, Dieu merci, mais je ne sais combien durera cette bonace, car il est du nombre de ceux qui, quand ils sont bien, ne s’y peuvent tenir. Je vous prie d’assurer tous nos bons amis que je suis leur très humble serviteur et que je leur baise les mains. J’entends MM. Gras, Garnier, Falconet, Huguetan et Ravaud, lesquels je remercie aussi du livre italien nommé hoggidi qu’ils ont mis dans notre ballot[33][76] Pour M. Gassendi, je tiens qu’il est en bon état. Je ne l’ai point vu d’aujourd’hui, je tâcherai de le voir demain matin. Je me recommande à vos bonnes grâces (mais voilà M. Huguetan [77] l’avocat qui entre et qui me charge de pareille commission, comme aussi d’une lettre que je vous adresse pour M. le conseiller de Thorel [78] que vous serez peut-être bien aise de connaître et d’entretenir, pour être un fort galant homme, courtois et débonnaire, et fils d’un de nos frères, [34][79] vous aurez s’il vous plaît le soin de la lui faire rendre) et suis de toutes mes forces, Monsieur, votre très humble et très obéissant serviteur,

Guy Patin.

De Paris, ce vendredi 15e de décembre 1654.

M. de Longueville [80] arriva hier ici sans sa femme, [81] laquelle n’a pas eu permission de venir ici. [35] Nos affaires sont mal avec l’Angleterre, on dit que nous allons y avoir guerre ; on dit qu’il y a des lettres de représailles scellées. [36][82]


a.

Ms BnF Baluze no 148, fos 98‑99, « À Monsieur/ Monsieur Spon,/ Docteur en médecine,/ À Lyon » ; Jestaz no 141 (tome ii, pages 1312‑1319) ; fort abrégée dans Du Four (édition princeps, 1683), no lvi (pages 182‑184), Bulderen, no xciv (tome i, pages 249‑250), et Reveillé-Parise, no ccccxxxi (tome iii, pages 43‑44, mais adressée à André Falconet).

Note de Charles Spon au revers de l’enveloppe : « 1654./ Paris, 15 décemb./ Lyon, 21 dud./ Rispost./ Adi 1er janv. 1655. »

1.

Cela ressemble tout de même à une pieuse hypocrisie de Guy Patin qui s’apprêtait à remplir la charge de professeur au Collège de France que Jean ii Riolan lui avait cédée en survivance, c’est-à-dire qu’il ferait les cours, mais sans en percevoir les appointements (v. note [29], lettre 372).

2.

La nouvelle de la mort à Rome, le 14 novembre 1654, de Pietro Mazzarino (v. note [8], lettre 342), le père du cardinal ministre, était exacte cette fois.

Cependant, celle de Philippe-Emmanuel de Gondi (Limoges 1581–Joigny 29 juin 1662) était fort prématurée. Il était le quatrième des dix enfants du maréchal de Retz (Albert de Gondi, v. note [4], lettre 196). Marquis de Belle-Île, comte de Joigny et baron de Montmirail, Philippe-Emmanuel avait été nommé général des galères en 1598. Il avait encouragé les œuvres charitables de Vincent de Paul (v. note [27], lettre 402) qu’il choisit comme précepteur de ses trois fils. Le benjamin, Jean-François-Paul, futur cardinal de Retz, était devenu le coadjuteur de l’archevêque de Paris.

En 1625, la mort de son épouse, Marguerite de Silly, avait plongé Gondi dans un profond désarroi : il s’était démis de sa charge de général des galères en faveur de son fils aîné, Pierre (futur duc de Retz, v. note [4], lettre 728), et était entré en 1627 dans la congrégation de l’Oratoire, où le cardinal Bérulle l’avait accueilli les bras ouverts. En 1643, le P. de Gondi avait refusé l’offre que lui faisait Anne d’Autriche de prendre la tête du gouvernement après les décès de Richelieu puis de Louis xiii. En 1652, quand Jean-François-Paul fut arrêté, son père fut exilé dans sa terre de Villepreux ; et en 1654, après l’évasion du cardinal de Retz, dont il approuvait la résistance, il avait été arrêté et renvoyé en exil à Clermont-Ferrand. En 1660, avec le retour en grâce de son fils, Gondi put se retirer dans sa terre de Joigny où il vécut jusqu’à sa mort (Dictionnaire de Port-Royal, pages 468‑469).

3.

La première des deux thèses quodlibétaires de Charles Patin, soutenue le 10 décembre 1654, portait sur la question An actio a forma ? [L’action vient-elle de la forme ?] (conclusion affirmative), sous la présidence de Jacques Perreau ; v. note [7], lettre 396, pour un commentaire de Guy Patin sur cette matière.

4.

À la toute dernière page du Rabat-joie de l’Antimoine triomphant de Jacques Perreau (v. note [3], lettre 380), après l’index et l’errata, on lit cet épilogue :

« Comme on achevait cette feuille, il m’est tombé entre les mains ce sonnet sur la mort, tout fraîchement arrivée, d’un célèbre avocat en Parlement, {a} après une prise de vin émétique ; que j’ai mis ici pour employer ce papier vide et pour détromper ceux qui croient qu’il ne faut que cette drogue pour guérir tous les malades.

Sonnet

L’antimoine a perdu son crédit et sa gloire,
Cette si prompte mort va son loz étouffant, {b}
Il n’est plus un vainqueur, il n’est plus triomphant,
On va biffer son nom du milieu de l’histoire.

Gouverné de la main d’un savant médecin,
Au lieu d’être sauveur, il s’est fait assassin.
Cieux, détournez de nous ce ministre infidèle

Il n’a plus de lauriers témoins de sa victoire,
Ce géant des métaux est moindre qu’un enfant,
Il s’est fait moucheron de superbe éléphant,
Et cette triste mort fait mourir sa mémoire.

Qu’on publie partout pour remède bénin,
Et fait dans nos maisons une guerre mortelle,
Nos amis, nos enfants éprouvant son venin !

Fin. »


  1. Jean (ou Antoine) Guérin (v. note [46], lettre 279), gendre de François Guénault.

  2. Loz : « vieux mot qui signifiait autrefois louange, il est abrégé du latin laus » (Furetière).

5.

Trêve « se dit en matière de douleurs quand on y sent quelque allègement, quelque relâche. Sa goutte lui a donné quelque trêve dans la belle saison » (Furetière) ; pour dire que Jean ii Riolan, fort asthmatique (dyspnéique), avait moins à lutter pour respirer.

6.

« ombrageux et excessif ».

7.

« et ne se ménage pas ».

8.

Jadis grand-duché indépendant, la Lituanie était rattachée à la Pologne depuis 1569 pour former ce qu’on appelait la République des Deux Nations. « Cependant, quoique la Lituanie ne fasse qu’un même corps de république avec les autres états du roi de Pologne et qu’il ne se puisse rien conduire dans les diètes sans sa participation, elle ne laisse pas de conserver ses lois, ses privilèges, ses grands officiers, civils et militaires, et son armée particulière et distinguée de celle de Pologne. Les gentilshommes y sont de petits rois, dont les paysans sont les esclaves. On y suit la religion catholique, la protestante [luthérienne] et la réformée [calviniste] ; on y trouve aussi des Grecs schismatiques, des unitaires et des juifs » (Trévoux).

9.

Allusion à l’invasion gauloise de 391 av. J.‑C. (Tite-Live, Histoire de Rome, livre v, chapitre xxxiii, § 2) :

Eam gentem traditur fama dulcedine frugum maximeque vini nova tum voluptate captam Alpes transisse agrosque ab Etruscis ante cultos possedisse.

[Cette nation, dit la tradition, fut séduite par la douceur de nos fruits et surtout de notre vin, volupté qui lui était nouvelle ; alors, elle traversa les Alpes et s’empara des terres que les Étrusques avaient précédemment cultivées].

10.

« et même faux » (Guy Patin a ajouté toute cette phrase dans la marge). Une fois de plus (v. note [26], lettre 308), la nouvelle du décès du roi de Pologne avait circulé à Paris : Jean ii Casimir Vasa ne mourut qu’en 1672.

Smolensk (Russie occidentale, sur le Dniepr, près de l’actuelle frontière de Biélorussie), place russe qui était entre les mains des Polono-Lituaniens depuis 1611, avait en effet été le premier grand enjeu de la guerre de Treize Ans (v. note [7], lettre 374). Les nouvelles que donnait ici Guy Patin n’étaient pas inexactes, mais dataient de plus de deux mois : les troupes du tsar Alexis avaient pris Smolensk le 23 septembre après un siège de trois mois, mais sans avoir eu à mener la grande bataille que Patin avait rapportée avant de se reprendre. Les Tartares (de Crimée, ou petite Tartarie, v. note [3], lettre 193) s’étaient alliés aux Polonais et aux Lituaniens, contre les Ukrainiens et les Moscovites soutenus par les Suédois. Les Turcs avaient refusé d’aider les Cosaques d’Ukraine et se tenaient alors à l’écart du conflit, tout comme leurs héréditaires ennemis, les Autrichiens.

11.

V. note [18], lettre 360, pour la nouvelle édition de Botal, De Curatione per sanguinis missionem, liber… [Livre sur le Traitement par la saignée…], en cours d’impression (Lyon, 1655).

12.

Prud’homme : « ce mot signifiait autrefois homme sage, prudent et expérimenté. Maintenant on ne le dit qu’odieusement en parlant d’un vieillard, d’un bonhomme qui vit à l’ancienne mode. Ce mot vient du latin probus [honnête] » (Furetière).

Le ms BIU Santé no 2190 (pages 200‑206) conserve la copie de cette lettre que Siméon Courtaud avait envoyée à son ami Charles Spon. Elle est datée de Montpellier, le 17 septembre 1654. Spon l’avait communiquée à Patin dans le vain espoir de le réconcilier avec Courtaud :

« Votre première m’apprenait comment vous avez recouvré un exemplaire de ma Seconde Apologie et se plaignait de ce que, sans sujet, j’avais pris M. Patin en butte, et encore de la mauvaise impression du livre. {a} Je fus bien fâché quand vous en reçûtes d’autre main que la mienne, mais je n’en avais point encore en mon pouvoir aucune pour vous l’envoyer. Je suis avec vous touchant la mauvaise impression, et particulièrement pour les énormes et nombreuses fautes qu’on y a commises, et lesquelles seront cause d’une seconde impression à laquelle j’ai quelque chose pour ajouter, et ensuite la défense de M. Héroard contre le libelle de l’ingrat Guillemeau. {b} Pour ce qui regarde M. Patin, je n’ai rien dit que je n’aie appris d’autrui et sur la foi de plusieurs honnêtes hommes. {c} M. Riolan même en avoue quelque chose dans son livre des Recherches, disant que ledit sieur Patin pensait plus à railler qu’à répondre sérieusement, et c’est la cause qu’on l’a jugé être l’auteur de tout le reste, pour ce que c’est une suite de même génie, railleur et moqueur. {d} C’est pourquoi quelque médecin de Poitiers, d’humeur semblable à la sienne, lui a dédié la version qu’il a faite du plus auguste livre de notre Hippocrate en vers burlesques français ; {e} chose honteuse, et que M. Patin ne devrait ni souffrir ni recevoir, car qu’y aura-t-il dorénavant de sacré ? Il ne manque à présent si ce n’est de traduire les Saints Évangiles en semblables vers profanes. En ce temps où tout est dépravé on ne manque point de sujet de raillerie et de burlerie à ces burleurs, vu que tout est plein de fourberie et qu’on entend dans ce pauvre État que ces deux mots étrangers de burles {f} et de fourbes {g} qui s’y promènent hardiment, et avec applaudissement de peuples hébétés et ne prenant point garde d’où ils viennent ni à ce qu’ils portent dans leur sein, sans qu’on s’en prenne à ce qui est sacré. Mais nonobstant tout ce que je puis avoir dit de M. Patin, sachez que je l’estime et honore suivant son mérite, comme étant homme fort savant et votre ami particulier, et pour ce que sur tous les autres il rabat et résiste à l’insolence des pharmaciens. Pour toutes lesquelles considérations le duel entre ces deux académies ayant pris fin, comme je pense, je ne parlerai de lui dorénavant (comme je l’ai toujours fait en particulier) qu’avec beaucoup d’honneur, comme désirant de lui être ami ouvert à l’avenir pour ce que j’ai de la vénération pour la vertu, où qu’elle se trouve […]. »


  1. Par le possessif ma, le doyen Courtaud déclarait-il vraiment être l’auteur de la Seconde Apologie (Paris, 1653, v. note [54], lettre 348) qu’on attribue ordinairement à Isaac Cattier (l’un de ses disciples) ?

  2. Cani miuro… de Charles Guillemeau (juin 1654, v. note [14], lettre 358).

  3. V. infra note [30], pour le commentaire hérissé de Patin sur ce propos de Courtaud.

  4. V. note [13], lettre 177, pour les Curieuses recherches sur les Écoles en médecine de Paris et de Montpellier… de Jean ii Riolan (mais dont Guy Patin a pu être le principal auteur).

  5. Louis de Fontenettes, v. note [13], lettre 376.

  6. Moqueries, de burla, bourde en italien.

  7. Tromperies.

13.

Isaïe, 29:13 (Vulgate) :

Appropinquat populus iste ore suo et labiis suis glorificat me, cor autem eius longe est a me.

[Ce peuple est près de moi en paroles et me glorifie de ses lèvres, mais son cœur est loin de moi]. {a}


  1. Citation reprise par le Christ dans les Évangiles de Marc (7:6) et de Matthieu (15:8).

14.

« dont quelqu’un m’a appris qu’il avait échangé cette traduction contre de quoi manger pour quelques mois ».

V. notes [11], lettre 333, et [55], lettre 348, pour la Légende de l’antimoine (1653) dont ceux de Montpellier et les antimoniaux de Paris accusaient Patin d’être l’auteur, et [13], lettre 207, pour la traduction en latin du Médecin charitable de Philibert Guybert par Guillaume Sauvageon durant le siège de Paris en 1649.

L’attaque de Montpellier contre le Médecin charitable se trouve dans la section cxxvii, Pratique des Parisiens (pages 184‑186) de la Seconde Apologie… : {a}

« Quelques-uns d’entre vous {b} passent si avant que de dire que dorénavant ils veulent guérir toutes les maladies avec la seule saignée et le séné. Le sieur Patin n’est guère éloigné de là quand il dit qu’avec la seule saignée et la seule eau, il veut faire mirabilia {c} sur les malades. Je m’étonne qu’il se départe du son car sa présidence {d} fut un jour si hardie que de conclure au bannissement de toutes les drogues et compositions des apothicaires, comme le tout n’étant que bagatelles et de nulle valeur, et qu’il suffit pour toutes les maladies la saignée et le breuvage de l’eau pure ; langage d’une ignorance asinine {e} et d’une impudence de charlatan. Si ledit sieur Patin est cru en sa rêverie, que deviendra votre Charitable ? Ne s’est-il point moqué du monde quand, le faisant parler latin, il l’a fait appeler Officiosum ? Que deviendra votre Codex, l’enfant de quarante ans, quoique fort maigre et défiguré, et lequel le serait encore beaucoup davantage si on en retranchait ce que le sieur Patin n’approuve point ? Aussi ce n’est point ni de son gibier, ni de sa portée. Je crois que le sieur Patin a un grand dessein de faire un coup de maître dans la médecine avant mourir, à savoir de donner une méthode de guérir les malades en les faisant rire à gorge déployée ; véritablement, elle serait belle et fermerait à chaux et à sable la porte des boutiques des chirurgiens et pharmaciens. Si cela est, il aura plus de disciples que Théophraste et rendra l’île de Paris plus renommée que ne fut jamais l’île de Cos ; de sorte qu’on la pourra nommer la Philomide {f} ou la rieuse ; et la fille d’Hippocrate qui rend encore des oracles en son pays, se changera {g} à Paris pour y apprendre ce que son père n’a jamais su, quoiqu’il ait été particulier ami de Democritus ; {h} mais le sieur Patin faisant cela, ne fera rien qu’un âne n’aie déjà fait en mangeant des figues devant le lit de son maître malade. »


  1. Paris, 1653, v. note [54], lettre 348.

  2. Docteurs régents de Paris.

  3. Des merveilles.

  4. De thèse.

  5. D’âne.

  6. φιλομειδης, qui aime les sourires.

  7. Transportera.

  8. Allusion à tout ce qu’Hippocrate a écrit dans ses Lettres sur le philosophe Démocrite d’Abdère (v. note [9], lettre 455), qu’on lui demanda de soigner parce qu’on le tenait pour fou.

15.

« qui ne manqueront pas d’âcreté des mots et des faits : ainsi faire plusieurs livres et disperser les comices est un travail sans fin [L’Ecclésiaste, v. note [13], lettre 283]. »

La réplique de Siméon Courtaud au Cani miuro… de Charles Guillemeau (v. note [14], lettre 358) circulait déjà à Paris sous le titre de Lenonis Guillemei… (Paris, 1654, v. note [2], lettre 380).

16.

« et un auteur digne de ce nom ne s’expose pas publiquement au beau milieu du carrefour, où se vendent l’encens, les parfums, le poivre et tout ce qu’on enveloppe dans de ridicules paperasses » (Horace, Épîtres, v. note [3], lettre 22).

17.

« de là ces larmes » (v. note [32], lettre 197).

Dauber : « battre sur le dos à coups de poings, comme font les petites gens et les écoliers ; signifie figurément médire de quelqu’un, le railler en son absence » (Furetière).

V. notes [12], lettre 372, pour Louis de Fontenettes, docteur en médecine de Montpellier professant à Poitiers (que Guy Patin connaissait mais disait n’avoir jamais vu, bien qu’il eût étudié à Paris), et [13], lettre 376 pour sa traduction des Aphorismes d’Hippocrate en vers français (Paris, 1654). Datée de Poitiers, sa dédicace à Patin exprime son admiration pour l’auteur du Traité de la Conservation de santé, dont il avait adopté bien des préceptes contre les chimistes, les occultistes et les astrologues :

« Faudra-t-il toujours croire que si l’on n’a des sphères, des lunettes de Galilei, {a} des astrolabes {b} et des fourneaux, on ne saurait connaître ou guérir les infirmités humaines ?

La médecine ne consiste-t-elle pas à mettre et à ôter, ce qui se fait par des aliments et des remèdes que la bonté de Dieu a répandus sur la face de la Terre, et que l’abondance devrait rendre à bon marché si l’avarice et la malice des hommes ne les rendaient secrets pour les rendre chers ?

N’y a-t-il pas, au rebours, {c} grande apparence de conjectures que le Diable, qui n’est qu’un singe, n’a inventé que des arts dommageables et dont il a rendu les principes obscurs pour augmenter la curiosité, qui est naturelle à l’homme, et parce qu’il fait parfois de faux miracles, il arrivera que ses inventions profiteront à deux ou trois afin d’en tromper ou d’en perdre un million ? […]

Ces exemples {d} doivent assez excuser mon effort auprès des esprits complaisants et raisonnables ; et cet ouvrage, qui est aujourd’hui feuilleté par les doctes et les indoctes, n’en sera pas moins estimé pour être burlesque, s’il est assez heureux pour être lu et s’il a ce génie qui fait vieillir et approuver les livres.

Vous êtes son parrain et son tuteur. Si vous jugez que ce soit un enfant faible ou difforme, étouffez-le, jetez-le dans l’eau,

dona veneris, Telesine, marito, {e}

employez-le à quelque plus vil usage ; mais si vous y prenez tel goût qu’il soit assez heureux pour vous plaire et pour vous délasser de vos sérieuses occupations, visites, conférences, lettres, tant avec les doctes de France qu’avec les étrangers, et surtout de cet excellent et illustre Docteur Alcide Musnier,

qui panem facit, et facit farinam ; {f}

faites-le lire les soirs au garçon qui suit et gouverne votre bidet, il servira peut-être pour en faire un docteur au Bourg-la-reine, ou à Vanves ; et à mesure que le savantissime en rira, l’ignorant en fera son profit ; mais qu’il ait l’approbation ou qu’il ne l’ait pas, qu’il soit ridicule ou recommandable, qu’il soit fructueux ou inutile, je suis assez accoutumé de n’avoir pas ce que je désire, et me sens assez heureux et assez consolé de votre suffrage, tu mihi mille theatra, et totidem calculi, si valeas et plaudas, valeat et plaudat qui poterit. {g}

Voilà, Monsieur, l’abrégé de mon dessein, et des souhaits que j’ai pour ce petit ouvrage, lequel je vous présente comme à mon meilleur et plus fidèle ami. »


  1. Galilée (v. note [19], lettre 226).

  2. V. note [30] du Faux Patiniana II‑2.

  3. Au contraire.

  4. Fontenettes a vanté les mérites des auteurs qui n’ont pas peur d’amuser leurs lecteurs.

  5. « donne-le, Telesinus, au mari (Vulcain) de Vénus » (Juvénal, Satire vii, vers 25).

  6. « qui fait le pain, et qui fait la farine », Martial (Épigrammes, livre viii, 16, Contre Ciperus) :

    Pistor qui fueras diu, Cypere,
    causas nunc agis et ducena quaeris :
    sed consumis et usque mutuaris.
    A pistore, Cypere, non recedis :
    et panem facis et facis farinam
    .

    [Après avoir été longtemps boulanger, tu plaides maintenant, Ciperus, pour gagner deux cent milles sesterces. Mais en attendant, tu dépenses force argent et tu empruntes sans cesse. Tu n’as pas cessé d’être boulanger, Ciperus : tu fais encore du pain et encore de la farine].

    Fontenettes devait bien connaître Alcide Musnier, ami et correspondant de Patin : il plaisantait trivialement sur son nom en le rapprochant du mot « meunier ».

  7. « vous valez pour moi mille théâtres et tout autant d’approbations ; si vous approuvez et applaudissez, alors qu’approuve et applaudisse aussi qui pourra. »

18.

« avant ça je ne savais pas que cet homme fût même né. » Siméon Courtaud, on l’a vu plus haut, était intime ami de Charles Spon et correspondanit avec lui (v. supra note [12]).

19.

« je ne m’en soucie pas le moins du monde ».

20.

De sanctorum Communione ; Spiritus Sancti κοινωνια opitulante ; Præside Joanne Wirtzio, S. Theologiæ Professore ordinario ; Respondente Casparo Huobero, Verbi divini Ministro ; Assumente Joh. Jacobo Schædlero, S. Theologiæ Studioso ; disputabitur postridie Synodi Autumnalis m dc liv.

[La Communion des saints : à quoi répondra, avec la bienveillante intercession du Saint-Esprit, Casparus Huoberus, ministre de la Parole divine, assisté par Joh. Jacobus Schædlerus, étudiant en théologie, sous la présidence de Joannis Wirtzius, {a} professeur ordinaire de théologie sacrée, le lendemain du synode d’automne 1654]. {b}


  1. Johann Wirtz (1591-1658).

  2. Zurich, Joh. Heinricus Hambergerus, 1654, in‑4o de six feuilles.

21.

« Observation thérapeutique sur le bon usage des eaux minérales, spécialement les aigrelettes, etc. » : manuscrit de Jacques ii Cousinot (v. note [26], lettre 7), composé vers 1647, que ses descendants ont en effet trouvé dans la bibliothèque de Charles Spon, avec pour titre exact Observationes de recto usu aquarum mineralium subacidarum.

22.

Ces Buisson de Genève, mère et fils, étaient amis de Charles Spon. Dans sa lettre du 6 novembre 1657, Guy Patin l’a prié de le rappeler au bon souvenir de « Mlle Buisson, la Genevoise ». Je n’ai pas trouvé d’argument solide pour les lier à Pierre du Buisson, libraire qui avait exercé à Montpellier de 1644 à 1651 (v. note [11], lettre 307).

23.

Allusion à un livre et à un auteur que je ne suis pas parvenu à identifier.

24.

« ne doit pas pour autant être considéré comme un chrétien ».

V. note [18], lettre 172, pour Jean Tarin, professeur royal d’éloquence grecque et latine.

25.

Défets : « exemplaires d’un livre qui restent incomplets et auxquels on a recours pour fournir d’autres exemplaires, auxquels il manque seulement quelque feuille, ou dont quelqu’une a été gâtée. Telle feuille n’est pas propre, il faut en chercher une autre dans les défets. Ce mot vient du latin defectus » (Trévoux).

Charles Spon avait recouvré chez le libraire lyonnais Claude Prost, qui avait imprimé les B. Alberti Magni opera omnia [Œuvres complètes du bienheureux Albert le Grand] en 1651 (v. note [8], lettre 133), quelques défets de ce volumineux ouvrage (21 volumes in‑fo) pour combler ceux que devait présenter l’exemplaire de René Moreau, méticuleux bibliomane.

26.

Le jeudi 10 décembre, Charles Patin avait disputé sa première thèse quodlibétaire (v. note [3], lettre 384) sous la présidence de Jacques Perreau.

27.

Aujourd’hui disparu comme beaucoup d’autres, le clos des chartreux était un vignoble situé dans un faubourg de Dijon. Ce n’est plus aujourd’hui que le nom d’une impasse proche du parc de la Toison d’Or, au nord de la ville.

28.

V. note [3], lettre 380, pour Le Rabat-joie de l’Antimoine triomphant de Jacques Perreau.

29.

On trouve la trace d’un Barthélemy Ferrus, conseiller du roi, contrôleur des rentes provinciales à Moulins, échevin de Lyon en 1637. Peut-être s’agissait-il ici d’un de ses parents car autrement, Guy Patin n’eût pas manqué de signaler sa dignité. Dans sa lettre du 24 décembre 1655 à Charles Spon (lettre 429), il a signalé que Ferrus était cousin du libraire Marc-Antoine Ravaud.

30.

Guy Patin peinait fort à digérer ce qu’il avait lu dans la lettre que Siméon Courtaud avait écrite à Charles Spon, transcrite dans la note [12] supra (notule {c}).

31.

« qui sera assez cuirassé pour se contenir ? » ; Juvénal (Satire i, vers 30‑32) :

Nam quis iniquæ
Tam patiens urbis, tam ferreus
ut teneat se,
Caussidici nova cum veniat lectica Mathonis
Plena ipso ?

[Qui sera donc assez résigné aux iniquités de Rome, assez cuirassé, pour se contenir quand apparaît la litière neuve de l’avocat Mathon, qui la remplit toute ?]

32.

Guy Patin a barré « et d’en demeurer là » pour le remplacer par « de ne plus rien écrire ».

Ayant répondu au Cani miuro… de Charles Guillemeau (v. note [14], lettre 358) avec son Lenonis Guillemei… (v. note [2], lettre 380), Siméon Courtaud et ses alliés attendaient avec impatience la réplique de leur adversaire pour lui renvoyer une autre balle. Ce fut sa Defensio altera… [Seconde Défense…] (janvier 1655, v. note [3], lettre 390).

33.

L’Hoggidí, overo il Mondo non peggiore ne piu calamitoso del passato. Del P. D. Secondo Lancellotti da Perugia Abate Olivetano… Alla Santita di N.S. Papa Urbano viii. Quarta Impressione.

[L’Aujourd’hui, ou le Monde présent n’est ni pire, ni plus calamiteux que le monde passé. Par le P. Dom Secondo Lancellotti, {a} natif de Pérouse, abbé du Mont-Olivet… {b} À sa Sainteté le pape Urbain viii. Quatrième édition]. {c}


  1. Secondo Lancellotti (Don Lancelot de Pérouse, 1583-1643), moine bénédictin de la congrégation de Notre-Dame du Mont-Olivet à Asciano, s’était lié d’amitié avec Gabriel Naudé durant son long séjour à Rome. Il l’accompagna à Paris quand il y retourna en avril 1642, mais mourut en janvier suivant. Il est curieux qu’une telle liaison n’ait pas attiré l’attention de Guy Patin, intime ami de Naudé.

  2. Venise, Guerigli, 1637, in‑8o de 701 pages : ouvrage qui connut un grand succès, et qui a inspiré à Daniel de Rampalle (v. note [29], lettre 203) son Discours académique en forme d’épître à Timandre, intitulé L’Erreur combattue. Discours académique, où il est curieusement prouvé, que le Monde ne va point de mal en pis (Paris, Augustin Courbé, 1641, in‑8o de 338 pages).

34.

À la page 361 du Recueil des privilèges… de la ville de Lyon (1649, v. note [1], lettre 360) se lit le nom de Gaspard Thorel, « magistrat en la sénéchaussée et siège présidial de Lyon ». Les archives de Lyon (cote CC0158-3, taxes perçues au nom du roi, 1582-1595) mentionnent un Maître Louis Thorel, docteur médecin, citoyen de Lyon, qui pouvait être le frère (confrère) dont Guy Patin évoquait le fils ; il ne se trouve pas dans les listes des docteurs de Paris et de Montpellier dressées par Baron et Dulieu.

35.

Après la défaite de l’Ormée à Bordeaux, Mme de Longueville s’était retirée dans divers couvents auprès d’abbesses amies.

Pendant les dix mois qu’elle avait passés chez les Visitandines de Moulins, en 1653-1654, elle avait un jour éprouvé une sorte d’illumination intérieure : « Il se tira comme un rideau de devant les yeux de mon esprit. Tous les charmes de la vérité, rassemblés sous un seul objet, se présentèrent devant moi. La foi, qui avait demeuré comme morte et ensevelie sous mes passions, se renouvela. » Réconciliée avec son vieux mari et rétablie en Normandie depuis 1654, avec autorisation d’y circuler mais sans la quitter, la duchesse entama alors son rapprochement avec Port-Royal dont elle devint la « parfaite amie et puissante protectrice » (Dictionnaire de Port-Royal, pages 686‑688).

36.

Représailles (Furetière) :

« lettres que les rois accordent à leurs sujets en grande connaissance de cause, pour reprendre sur les premiers biens appartenant à quelqu’un du parti ennemi l’équivalent de ce qu’on leur aura enlevé violemment et dont le roi ennemi ne leur aura point voulu faire justice. Ces lettres s’appellent autrement lettres de marque. {a} Ce marchand a fait saisir des effets appartenant à un Espagnol parce que les Espagnols lui ont enlevé les siens. Les règlements pour les lettres de marque et de représailles, la manière de les obtenir et à quoi les impétrants sont obligés, sont contenus dans le titre x du livre iii de l’Ordonnance de la Marine. Ce mot vient de l’italien represaglia. »


  1. Les lettres de marque étaient ordinairement délivrées aux navires corsaires.


Correspondance complète de Guy Patin et autres écrits, édités par Loïc Capron. – Paris : Bibliothèque interuniversitaire de santé, 2018. – À Charles Spon, le 15 décembre 1654

Adresse permanente : https://www.biusante.parisdescartes.fr/patin/?do=pg&let=0384

(Consulté le 25/04/2024)

Licence Creative Commons "Correspondance complète de Guy Patin et autres écrits, édités par Loïc Capron." est mis à disposition selon les termes de la licence Creative Commons Attribution - Pas d’Utilisation Commerciale 4.0 International.