L. 449.  >
À Hugues II de Salins,
le 31 octobre 1656

Monsieur, [a][1]

Je fais enfin réponse à votre lettre que M. de La Ville [2] m’a rendue, et laquelle a été longtemps en chemin. Je vous remercie de la peine qu’avez eue de faire tenir la mienne à M. Forests. Pour le cahier de mes leçons, [3] on l’avait transcrit pour moi, mais il y a tant de fautes qu’il me faut du temps pour le relire et l’amender. Argenterius [4] est un bon auteur et vous avez là fait une bonne acquisition, mais il n’approche point de Fernel, [5] joint qu’il avait trop envie de draper et de mordre Galien. [1][6] Mentagra [7] est une vilaine dartre qui venait au menton dont le grand Pline [8] a parlé comme d’une maladie nouvelle. Cela est aujourd’hui fort rare. [2] Quelques-uns ont voulu dire que c’était la vérole, [9] sed inde non constat ; [3] trop bien peut-on bien assurer que la vérole n’est point une maladie nouvelle. Je pense que David [10] et Salomon [11] l’ont eue ; elle est aussi dans les Anciens, Hippocrate [12] et Galien, dans Cicéron, [13] dans Martial, [14] dans Apulée. [4][15] Vous faites fort bien de lire Fernel avec les commentaires du père Riolan, [5][16] et ne se peut faire mieux. Mais il faut poursuivre et venir à la Pathologie, divinum opus, auro contra charum, et Persicis omnibus gazis præferendum : [6] ce livre, après les quatre évangélistes, est le meilleur livre du monde. On n’a pas encore réimprimé pour la troisième fois le livre de M. Vander Linden de Scriptis medicis ; on ne le réimprimera que dans deux ans. [17] On vend ici Selecta Medica de cet auteur, qui est un très bon livre, et très utile ; [7] j’en attends un que l’auteur m’envoie de Hollande, il est en chemin ; je l’ai néanmoins tout parcouru, liber est optimæ frugis plenissimus[8] votre argent n’y sera pas mal employé, il est de haute gamme et digne d’être lu, mirabilis bonitatem libri et polymathiam authoris[9][18] Il a plus de cent feuilles in‑4o et est fort bien imprimé. Ils l’ont vendu 6 livres en blanc ; peut-être qu’il ramendera de quelque chose, mais ce n’est point la peine d’attendre. Ce même auteur s’en va faire imprimer un Cornelius Celsus [19] in‑4o avec ses notes ; et puis après, il fera imprimer l’Arétée [20] grec latin, qui est optimus medicinæ scriptor qui vixit ante Galenum ; [10] ce sera un fort bon ouvrage. Je me souviendrai des deux livres que désirez, savoir Smetii Miscellanea et Fr. Porti Decas Medica[11][21][22] s’ils se rencontrent à acheter. Pour les topiques [23] dans les gouttes, [24] je ne les improuve pas, mais il faut saigner [25] hardiment pour en arrêter la fluxion et apaiser la douleur ; ce que tous les topiques du monde ne peuvent faire si tôt, si aisément ni si sûrement. Je sais bien que l’on y peut mêler des narcotiques, mais cela ne vaut rien, cela n’appartient qu’aux chimistes [26] et empiriques : [27] narcotica isthæc sunt venena quæ gangrænosim et necrosim inducunt[12] Les topiques ne doivent donc être que légers, ex oxycrato tepido, aut ex ipsius ægrotantis urina tepida : ibi enim utramque paginam facit venæ sectio sæpius etiam repetita, ratione plenitudinis vasorum, putredinis, rheumatismi, doloris, imo et latentis cuiusdam virulentiæ, huic morbo familiari[13][28] Quand la fluxion est arrêtée et la douleur apaisée, locus est blanda purgationi, ex foliis et medulla, tandem etiam addito syrupo diarhodon[14][29]

Cancri fluviatiles male destinantur ad analepsim ; quia habent succum viscidum et glutinosum, et tamen parum nutriunt. Ad legitimam analepsim requiruntur ea quæ multum nutriunt, qualia sunt ova sorbilia, iuscula ex optimis carnibus, gelatina, vinum optimum illudque vetum, aqua multa iugulatum : paucæ carnes in prandio, somnus multus, et similia[15][30]

Que l’eau qui passe par des canaux de plomb [31] fasse la dysenterie, [32] cela se dit, et même quelques médecins l’ont écrit ; mais l’expérience y est au contraire car il y a plusieurs villes en France où l’on ne boit que de telles eaux, et néanmoins on n’y voit point de dysenterie. Nous en avons une forte expérience dans Paris : plus de la moitié de la ville y boit de cette eau qui y est dérivée par des canaux de plomb, nihilominus tamen dysenteria hic est affectus rarissimus[16] Nous ne voyons ici guère de tel mal, si ce n’est en quelques provinciaux, principalement de Guyenne, [33] Languedoc ou Provence : isti homines abundant atra bile, ideoque tali morbo sunt ut plurimum obnoxii[17][34]

Medicamenta purgantia agunt per irritationem, tractionem et expulsionem : itaque malim sentire cum Riolano Patre quàm cum Fernelio. Similitudo substantiæ est principium fictum et suppositum a Galeno, quia rem ipsam natura sua difficillimam non intelligebat : eadem causa ductus eum sequutus est Fernelius. Vide Gulielmum Puteanum, et Erastum de occultis pharmac. potestatibus, et lege utrumque integrum, et Aristotelem in problematis, cum comm. Septalii[18][35][36][37][38][39]

C’est chose certaine que l’on peut purger [40] des femmes grosses tous les mois de leur grossesse, præsertim post tertium, quum firmiter adhæret fœtus, si diffluunt impura aliqua plenitudine primæ regionis : [41] sed ad hoc vitanda sunt acria medicamenta, transigendumque negotium cum foliis Orient. paucis, et medulla dissoluta ; forte etiam adhibendum erit aliquantulum rhei ad robur conciliandum. Dabo exemplum pro muliere nec admodum forti, nec infirma : [19][42]

℞ decoct. cichorar. ℥ vj. in quib. infunde per noctem fol. Orient. ʒ ijß. vel ʒ iij. rhei electi in minutas partes dissecti ʒ ß. in colat. cras mane dissolv. med. cassiæ recens extractæ ʒ iij. vel confect. universalis  ß. fiat potio, sumenda summo mane, trib. horis ante iusculum, et superdormiat. Si valider fuerit mulier, pauloque fortiori medicamento indigeat, adde syr. de chicorio compos. cum rheo  j. vel rosar. solutivi veteris : quum enim unum vel alterum annum attigit, minus ipse purgat et blandius : sed roborat et est cardiacus[20][43][44]

M. de La Curne [45] est un mélancolique [46] échauffé qui a la berlue. [21][47] Je lui ai fait voir dans Freigius [48] sur les Oraisons de Cicéron, page 159, tome i, le passage où il est dit que Rabelais [49] en mourant prononça ces paroles : Tirez le rideau, la farce est jouée[22] Pour le livre de tribus Impostoribus, il n’a jamais été imprimé. [23][50] M. Grotius [51] in Evangelia l’a fort bien dit page 84 appendicis ad commentationem de Antichristo[24] De ces trois bons compagnons, plusieurs en ont parlé, et il y a déjà longtemps : Matthieu Paris [52] l’a dit de Frédéric Barberousse [53] qui vivait il y a 500 ans ; [25] les moines, [54] pestilentissimum hominum genus[26] inventèrent cela contre lui afin de le rendre odieux à cause qu’il faisait la guerre au pape ; Lipsius in Monitis Politicis, et alii infiniti[27][55] Phrygius, comme vous l’écrivez, est le nom de deux médecins de Pavie, [56] père et fils, dont l’un a fait un commentaire sur le Pronostic d’Hippocrate [57] et l’autre, savoir le fils, sur les Histoires épidémiques, in‑4o, fort bon livre imprimé à Lyon chez M. Huguetan l’an 1643. [28][58][59] Mais Freigius est le nom d’un jurisconsulte et professeur allemand qui a travaillé sur les Pandectes et qui régentait à Paris au Collège de Presles, [60] d’où Ramus [61] était principal et qui y fut tué comme huguenot [62] à la Saint-Barthélemy ; [29][63] Freigius n’y fut pas tué, d’autant qu’il se cacha si bien que les massacreurs ne le purent trouver. Et voilà pour votre lettre, mais voici bien d’autres nouvelles. Nous avons perdu en six jours trois de nos anciens : M. Moreau [64] le bonhomme est ici mort le 17e d’octobre, âgé de 72 ans ; M. Guillemeau, [65] le 20e d’octobre, âgé de 68 ans ; et M. Le Clerc, [66] le 21e d’octobre, âgé de 74 ans, c’est avoir longtemps vécu pour un ivrogne. Ce dernier est mort d’apoplexie, [67] en trois heures de temps ; les deux autres ont été longtemps malades. La reine de Suède [68] est à Turin ; [69] sa pérégrination n’est point tout à fait vaine, elle est venue pour traiter quelque chose dont la réussite est incertaine. Le roi [70] est ici. La princesse de Conti [71] est accouchée à sept mois d’une fille morte. Je baise les mains à mademoiselle votre femme, à Messieurs vos père et frère, et suis, Monsieur,

Totus tuus aere et libra, Guido Patinus[30]

De Paris, ce dernier d’octobre 1656.


a.

Ms BnF no 9357, fos 219‑220, « À Monsieur/ Monsieur de Salins le puîné,/ Docteur en médecine,/ À Beaune » ; Chéreau no viii (21‑22).

1.

M. Forests est un correspondant bourguignon de Guy Patin dont il n’a pas reparlé ailleurs. V. note [1], lettre 439, pour le peu qu’on sache de l’avocat La Ville.

V. note [1], lettre 437, pour la transcription des leçons de Guy Patin au Collège de France par un de ses élèves. Sans le redire ici, il comptait sur les talents de Hugues ii de Salins pour les recopier et les corriger : v. note [1], lettre 437.

Les Opera [Œuvres] (Hanau, 1610, v. note [3], lettre 9) de Giovanni Argenterio (Jean Argentier, mort en 1572) commencent par un surprenant Oratio… habita in initio suarum lectionum anno 1555. quarta Novemb. [Discours… prononcé au début de ses leçons, le 4 novembre 1555], où, sans prôner le paracelsisme (v. note [7], lettre 7), il éreinte rudement les vénérés auteurs médicaux de l’Antiquité. Ce paragraphe donne un aperçu du mépris où il recommandait de les tenir (page †† 4) :

Nam Hippocrates dumtaxat exigua quædam, et illa quidem rudia et inculta Medicinæ semina nobis reliquit, Galenus dum infinitam librorum multitudinem conscripsit, quorum minimam partem, in tot tantisque voluminibus quæ adhuc extant habemus, et illi vix intra multos annos legi possunt, fateturque se non omnia digenter scripsisse, sed quædam in Adolescentia, ad sui exercitationem, alia adversus suos æmulos, ad contentionem et victoriam potius quam ad veri investigationem, alia amicorum quorundam gratia, nullum unquam opus, ut facile ostendere possem, rescripserit, omnia sparsim, et in locis incertis tradat, ac in singulis ubertate illa Asiatica redundet, nobis profecto nisi omnia ociosi, et plus æquo aliis addicti esse velimus, multa reliquit excogitanda.

Auicenna (ut optime nouistis) morte præventus opus suum expolire absolvereque non potuit, Oribasius vero, Paulus, Aetius, Trallianus, et alii universi Græci, qui Galenum sunt sequuti, si audeo dicere quod sentio, aut Medici non fuerunt, quippe cum integra capita, et etiam libros integros, ex aliis transcribant, aut certe tales sunt authores, ut ab illis Medicinam discere possimus, quando quidem nulla ponunt principia, nullas adhibent probationes, et multas Medicinæ partes intactas prætermittunt.

[De fait, Hippocrate ne nous a laissé que quelques maigres graines de médecine, qui sont assurément à tenir pour grossières et incultes. Galien a ensuite rédigé une infinie multitude de livres, et nous n’avons qu’une infime partie de l’immense amas qu’il a produit, mais on peinerait déjà à la lire en y consacrant nombre d’années. Il avoue lui-même ne pas avoir bien soigneusement écrit tous ses volumes : certains l’ont été dans sa jeunesse, pour son apprentissage ; d’autres, contre ses rivaux, pour disputer et triompher, plutôt que pour explorer le vrai ; d’autres encore, pour l’agrément de certains amis. Je pourrais aisément démontrer qu’il n’en a revu aucun, car il relate tout sans ordre et il est par endroits confus, particulièrement quand il abuse de sa redondance asiatique. {a} Si nous n’avons pas le loisir d’en lire absolument tout et ne voulons pas nous y consacrer plus qu’il n’est raisonnable, il a néanmoins laissé à réfléchir sur bien des sujets.

La mort (comme vous savez parfaitement) a empêché Avicenne de polir et d’achever entièrement son œuvre. {b} Quant à Oribase, Paul, Aétius, Trallianus {c} et à tous les autres Grecs qui ont suivi Galien, si j’ose dire ce que je pense, soit ils n’étaient pas médecins, étant donné qu’ils ont recopié des chapitres, voire des livres entiers venant d’autres auteurs, soit ils l’étaient certainement, à en juger sur leurs écrits où nous pouvons apprendre la médecine, bien qu’ils n’y établissent aucun principe, n’y fournissent aucune démonstration et y omettent maintes parties de cette science sans même y toucher].


  1. Propre à l’Asie Mineure : Galien (iie s. de notre ère) était originaire de Pergame, près d’Izmir (v. note [6], lettre 6).

  2. Avicenne (v. note [7], lettre 6) a été l’un des grands interprètes persans de Galien au xie s.

  3. V. note :

    • [9], lettre latine 61, pour Oribase de Sardes (ive s.) ;

    • [13], lettre 153, pour Paul (Paulus) Éginète (viie s.) ;

    • [4], lettre de Charles Spon datée du  21 novembre 1656, pour Aétius d’Amide (ve s.) ;

    • [10], lettre 488, première notule {a}, pour Alexandre de Tralles, (Trallianus, iie s.).

2.

La mentagra (mot latin que Littré a adapté en mentagre) est une maladie aujourd’hui énigmatique de la peau.

D. J., L’Encyclopédie, dit du mentagra que c’était :

« une espèce de dartre {a} lépreuse de mauvaise qualité, qui selon le rapport de Pline (livre xxvi, § j) parut pour la première fois à Rome sous le règne de Claude ; {b} elle commençait par le menton, d’où elle prit son nom, s’étendait successivement aux autres parties du visage, ne laissait que les yeux de libres et descendait ensuite sur le cou, sur la poitrine et sur les mains. Cette maladie ne faisait pas craindre pour la vie, mais elle était extrêmement hideuse ; Pline, de qui nous tenons ce récit, ajoute que les femmes, le menu peuple et les esclaves n’en furent point atteints, mais seulement les hommes de la première qualité. On fit venir, continue cet auteur, des médecins d’Égypte qui est un pays fertile en semblables maux. La méthode qu’on suivait généralement pour la cure était de brûler ou de cautériser en quelques endroits jusqu’aux os pour éviter le retour de la maladie ; mais ce traitement faisait des cicatrices aussi difformes que le mal était laid. Galien parle d’un Pamphile qui guérissait cette dartre sans employer les cautères et qui gagna beaucoup d’argent par ses remèdes. Manilius Cornutus, gouverneur d’Aquitaine, composa avec le médecin qui entreprit de le guérir pour une somme marquée dans Pline de cette manière, H‑S , cette ligne mise au-dessus de deux C, {c} indiquerait qu’il faut entendre 200 000 grands sesterces qui font environ deux millions de livres. Mais comme cette somme paraît follement excessive pour avoir été le salaire de la guérison d’une simple maladie, où d’ailleurs la vie ne se trouvait point en danger, le P. Hardouin a sans doute raison de croire qu’il faut entendre seulement 200 sesterces, c’est-à-dire environ 20 000 livres, ce qui est toujours une récompense magnifique. On prétend que sous le pontificat de Pélage ii, {d} dans un été qui suivit l’inondation du Tibre, il parut à Rome une espèce de dartre épidémique que les médecins n’avaient jamais vue et qui tenait des caractères de la mentagra dont Pline a donné la description ; mais il ne faut pas s’y tromper, la maladie qui ravagea Rome sous le pape Pélage, et dont lui-même périt, était une peste si violente que souvent on expirait en éternuant ou en baillant ; c’est de là qu’est venue, selon quelques historiens, la coutume de dire à celui qui éternue Dieu vous bénisse, et celle de faire le signe de la croix sur la bouche lorsqu’on baille, coutume qui subsiste encore parmi le petit peuple ».


  1. L’empereur Claude a régné sur Rome de 41 à 54 (v. note [6], lettre 215).

  2. V. la triade 74 du Borboniana manuscrit (notule {c}, note [39]), pour la définition de la dartre ou lichen.

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  4. Pape de 579 à 590.

Le passage de Pline sur la mentagra est au début du livre xxvi (chapitres i‑iii) de l’Histoire naturelle (Littré Pli, volume 2, page 196) :

Sensit et facies hominum novos, omnique ævo priore incognitos, non Italiæ modo, verum etiam universæ prope Europæ, morbos : tunc quoque non tota Italia, nec per Illyricum, Galliasve, aut Hispanias magno opere vagatos, aut alibi, quam Romæ, circaque : sine dolore quidem illos, ac sine pernicie vitæ : sed tanta fœditate, ut quæcumque mors præferenda esset.

Gravissimum ex his lichenas appellavere Græco nomine : Latine, quoniam a mento fere oriebatur, joculari primum lascivia (ut est procax natura multorum in alienis miseriis), mox et usurpato vocabulo, mentagram : occupantem in multis totos utique vultus, oculis tantum inmunibus, descendentem vero et in colla pectusque ac manus, fœdo cutis furfure.

Non fuerat hæc lues apud majores patresque nostros. Et primum Tiberii Claudii Cæsaris principatu medio irrepsit in Italiam, quodam Perusino equite Romano quæstorio scriba, quum in Asia apparuisset, inde contagionem ejus importante. Nec sensere id malum feminæ, aut servitia, plebesque humilis, aut media, sed proceres veloci transitu osculi maxime : fœdiore multorum qui perpeti medicinam toleraverant, cicatrice, quam morbo. Causticis namque curabatur ; ni usque in ossa corpus exustum esset, rebellante tædio : adveneruntque ex Ægypto, genetrice talium vitiorum medici, hanc solam operam afferentes, magna sua præda. Siquidem certum est, Manilium Cornutum e prætoriis legatum Aquitanicæ provinciæ, H‑S  elocasse in eo morbo curandum sese
.

« Le visage même de l’homme a éprouvé des maladies nouvelles et inconnues à toute l’Antiquité, non seulement en Italie, mais presque dans l’Europe entière et alors même ces maladies ne se sont guère répandues dans l’Italie, l’Illyrie, les Gaules et l’Espagne, ni ailleurs ; mais elles ont sévi à Rome et dans les environs. Elles n’étaient ni dangereuses our la vie ni douloureuses ; mais elles étaient si dégoûtantes, qu’on eût préféré la mort, sous quelque forme qu’elle se fût présentée.

La plus insupportable de toutes fut celle qu’on appelle d’un nom grec, lichen ; comme elle commençait généralement par le menton, les Latins, par plaisanterie d’abord (tant le commun des hommes est porté à plaisanter des maux d’autrui) lui donnèrent le nom de mantagre, dénomination qui est restée. Chez beaucoup de malades, elle occupait le visage entier à l’exception seulement des yeux ; mais elle descendait aussi sur le cou, la poitrine et les mains, en laissant sur la peau de sales croûtes farineuses.

Ce fléau n’était point connu de nos aïeux ni de nos pères ; c’est vers le milieu du règne de l’empereur Tibère qu’il se glissa pour la première fois en Italie. Il fut apporté d’Asie par un certain chevalier romain de Pérouse, greffier du questeur. Cet homme en fut l’introducteur. Le mal gagna, par les femmes, les esclaves, le bas peuple ou même la classe moyenne ; mais il attaqua les grands, se propageant surtout par le contact rapide d’un simple baiser. Plusieurs de ceux qui avaient pu se résoudre à souffrir l’application des remèdes en conservaient des cicatrices plus hideuses que le mal. On le traitait en effet par les caustiques ; et si l’on ne cautérisait pas jusqu’aux os, le mal repullulait. Il vint alors d’Égypte, mère d’affections semblables, des médecins qui n’avaient que cette spécialité, et qui en firent bonne curée. Il est certain que Manulius Cornutus, personnage prétorien, lieutenant de la province d’Aquitaine, s’engagea à payer pour le traitement deux cent mille sesterces. »

L’herpès du visage (v. note [16], lettre 524) semblerait être le diagnostic moderne le plus probable de la mentagra.

3.

« mais il n’y a pas d’accord là-dessus ».

V. note [20], lettre 211, pour le point de vue catégorique de Jean de Renou (repris par Patin en 1628) sur l’éclosion de la syphilis en Europe, après que Christophe Colomb et ses équipages furent revenus d’Amérique en 1493 (v. note [41] de Guy Patin éditeur des Opera omnia d’André Du Laurens en 1628).

4.

V. notes [6] et [9], lettre 482, pour la syphilis dans Martial et dans Apulée.

5.

V. note [35], lettre 104, pour les commentaires de Jean i Riolan sur les deux livres de Jean Fernel De abditis rerum Causis [Des Causes cachées des choses]. Il a aussi abondamment disserté sur d’autres œuvres fernéliennes :

Ces huit traités ont été repris dans les Ioannis Riolani Opera omnia [Œuvres complètes de Jean Riolan] (Paris, 1610, v. note [9], lettre 22).

6.

« œuvre divine, qui vaut son pesant d’or [v. note [5], lettre 76], et qui doit être préférée à tous les trésors de la Perse » : v. note [1], lettre 36, pour la Pathologie de Jean Fernel.

7.

V. notes :

8.

« c’est un livre tout rempli du meilleur fruit ».

9.

« pour la qualité d’un livre remarquable et l’érudition de l’auteur ». Guy Patin a omis l’adverbe (propter) qui devrait précéder cette assertion latine.

10.

« qui est le meilleur auteur de médecine qui ait vécu avant Galien ».

Au début de 1661, Johannes Antonides Vander Linden abandonna son projet de donner une édition d’Arétée (v. note [3], lettre 407), quand il eut compris que Pierre Petit s’était attelé à la même tâche et avait pris de l’avance sur lui car il disposait à Paris de meilleures sources et de plus solides appuis que lui-même à Leyde. Néanmoins, l’ouvrage de Petit ne parut qu’incomplètement et longtemps après sa mort (Londres, 1726, v. note [3], lettre 731).

V. note [20], lettre de Charles Spon, le 28 août 1657, pour l’édition de Celse par le même Vander Linden (Leyde, 1657).

11.

« la Décade médicale de François Duport [Paris, 1613, v. note [2], lettre 359] et les Mélanges médicaux d’Heinrick Smet [Francfort, 1611, v. note [17], lettre 181] ».

12.

« ces narcotiques sont des poisons qui provoquent la gangrène et la nécrose. »

13.

« composés d’oxycrat {a} tiède, ou de l’urine refroidie du malade lui-même ; la saignée fait ici plus souvent la pluie et le beau temps, {b} plus encore si elle est répétée, en raison de la plénitude des vaisseaux, de la putréfaction, du rhumatisme, de la douleur, et surtout d’une sorte de virulence qui est coutumière dans cette maladie. »


  1. V. note [2], lettre 427.

  2. Pline l’Ancien parlant de la déesse Fortune, v. note [2], lettre 626.

14.

« il y a place pour la purgation douce, en employant les feuilles [de séné] et la moelle [de casse], et même en y ajoutant à la fin du sirop de roses pâles. »

Un alcaloïde d’origine végétale, la colchicine extraite (en 1820) des colchiques, sert encore communément à traiter la crise de goutte.

15.

« Les écrevisses de rivière sont peu propices à l’analepsie, parce qu’elles ont un suc visqueux et glutineux, et pourtant nourrissent fort peu. Une analepsie de bon aloi requiert ce qui nourrit beaucoup, comme sont les œufs gobés, les bouillons des meilleures viandes, la gelée, le meilleur vin et celui qui est vieux, coupé de beaucoup d’eau, peu de viandes au cours du repas, beaucoup de sommeil et autres choses semblables. »

L’analepsie est le rétablissement des forces après une maladie ; v. note [4], lettre latine 212, pour les remèdes analeptiques. La chair des écrevisses n’en faisaient pas partie, mais leurs « yeux » (pierres) étaient censés posséder des vertus thérapeutiques (v. note [2], lettre 810).

16.

« pourtant la dysenterie est ici une affection extrêmement rare. »

Le saturnisme, ou intoxication chronique par le plomb, a pour l’un de ses grands symptômes la colique saturnine. Guy Patin, bon observateur, avait rétrospectivement raison de ne pas croire que le plomb provoque une dysenterie : la colique saturnine occasionne des douleurs très vives, mais guère de dysenterie (au sens de diarrhée sanglante) ; en outre, les canalisations d’eau en plomb ne sont qu’exceptionnellement la cause d’un saturnisme.

17.

« ces hommes débordent d’atrabile, c’est pourquoi ils sont si fort sujets à une telle maladie. »

18.

« Les médicaments purgatifs agissent par irritation, traction et expulsion : c’est pourquoi je préfère l’opinion de Riolan le père à celle de Fernel. La similitude de la substance est un principe fabriqué et supposé par Galien, parce qu’il ne comprenait pas bien la difficulté de cette affaire, qui incombe à sa nature même ; conduit par le même motif, Fernel l’a suivi. Voyez Puteanus Blangyacus et Éraste sur les pouvoirs occultes des médicaments, {a} et lisez-les tous deux entièrement, et Aristote dans ses Problèmes avec les commentaires de Septalius. » {b}


  1. V. notes [29], lettre 277, et [11], lettre 140.

  2. V. note [9], lettre 8.

19.

« surtout après le troisième mois, quand le fœtus est solidement accroché, si certaines impuretés s’écoulent par la plénitude de la première région ; {a} mais à cette fin les médicaments puissants sont à éviter, et l’affaire doit être menée à bonne fin avec peu de feuilles et de la moelle de séné dissoute ; et même le cas échéant, il faudra employer un peu de rhubarbe pour ménager la force. Je donnerai en exemple ce qui convient pour une femme qui n’est ni parfaitement vigoureuse ni très affaiblie ».


  1. La première région était la tête, mais pouvait aussi désigner la partie haute et postérieure, dite sus-mésocolique, de l’abdomen : v. note [1], lettre 151.

20.

« Prenez 6 onces de décoction de chicorée, dans lesquelles faites infuser pendant une nuit 2,5 gros de feuilles orientales {a} ou 3 gros de rhubarbe de qualité supérieure coupée en petites parties d’un demi-gros ; dans le résidu, le lendemain matin, dissolvez 3 gros de moelle de casse récemment extraite ou une demi-once de confection universelle ; {b} faites-en une potion à prendre au petit matin, trois heures avant le bouillon et refaites dormir là-dessus. Quand la femme sera plus robuste et aura besoin d’un médicament un peu plus énergique, ajoutez du sirop de chicorée mêlé avec une once de rhubarbe ou de soluté de rose : en effet quand cela a été accompli une fois tous les ans ou tous les deux ans, elle aura à se purger moins souvent et plus doucement, mais elle se fortifiera car c’est un remède cardiaque. » {c}


  1. Séné.

  2. Catholicon, v. note [13], lettre 95.

  3. Fortifiant.

21.

La berlue est, au sens propre, un « éblouissement de la vue par une trop grande lumière, qui fait voir longtemps après les objets d’une autre couleur qu’ils ne sont. Se dit figurément en choses spirituelles des conceptions de l’esprit : quand vous avez avancé une telle proposition, vous aviez la berlue sans doute » (Furetière).

V. note [23], lettre 407, pour Edme La Curne, avocat de Beaune.

22.

Johann Thomas Freig (ou Freige, Freigius en latin, Fribourg-en-Brisgau 1543-Bâle 1583) étudia les belles-lettres et la philosophie. S’étant attaché à la doctrine de Pierre Ramus, {a} il l’enseigna à Fribourg et à Bâle. Devenu recteur du collège d’Altdorf, il éprouva, à cause de ses idées philosophiques, des ennuis de toute sorte et mourut de la peste à Bâle où il était retourné pour se faire correcteur d’imprimerie. Guy Patin renvoyait ici à un de ses ouvrages où on ne s’attendrait guère à le voir parler François Rabelais, {b} :

M. T. {c} Ciceronis orationes omnes perpetuis notis Logicis, Arithmeticis, Ethicis, Politicis, Historicis, Antiquitatis, illustratæ per Io. Thomam Freigium.

[Tous les discours de Cicéron, éclairés par des notes continues, logiques, arithmétiques, {d} éthiques, politiques, historiques de l’Antiquité, {e} par Johann Thomas Freig]. {f}

Dans l’Oratio pro Quinto Roscio Comœdo [Discours pour Quintus Roscius Comœdus], une note de Freig, page 159, tome premier, porte sur le mot ageres dans le § 24, et si hos quæstus recipere posses, non eodem tempore et gestum et animam ageres ? [et si tu pouvais accéder à ces requêtes, ne rendrais-tu pas dans l’instant et le mouvement et l’âme ?] :

Ambiguitas est in verbo agere, hoc est usque ad extremum spiritum gestum ageres et id diceres quod rabiosum Rabulæsium dixisse ferunt, Tirez les rideaux, la farce est jouée.

[Il y a un double sens au verbe agere : tu jouerais jusqu’au dernier souffle ; et tu dirais, comme on le raconte de Rabelais enragé, {g} Tirez les rideaux, la farce est jouée]. {h}


  1. Pierre de La Ramée, v. note [7], lettre 264.

  2. V. infra note [29].

  3. Marcus Tullius, prénoms de Cicéron.

  4. Chronologiques.

  5. Curieuse, mais seule traduction possible du substantif génitif Antiquitatis.

  6. Bâle, héritiers de Petrus Perna, 1583, 3 gros tomes in‑8o de 776, 774 et 758 pages.

  7. « On dit qu’un homme se bat en enragé pour dire “ en désespéré ” ; on le dit aussi des autres actions qu’on fait avec vigueur et âpreté » (Furetière).
  8. « On dit proverbialement “ Tirez le rideau, la farce est jouée ”, tant au propre qu’au figuré, pour dire qu’une chose est faite et consommée » (ibid.).

23.

De tribus Impostoribus, Des trois Imposteurs, est le titre du livre le plus fantomatique du xvie-xviie s. Le G.D.U. xixe s. (publié de 1863 à 1876) l’a décrit comme étant à la fois :

« dirigé contre Moïse, Jésus-Christ et Mahomet. Le singulier est que tout le monde parlait de ce livre et que personne ne pouvait dire qu’il l’avait vu. La reine Christine de Suède offrit inutilement de le payer 30 000 livres. Si bien que les critiques les plus respectables finirent par révoquer en doute l’existence de ce fameux livre et cet avis bizarre a encore aujourd’hui un grand nombre de partisans. Dans ce système, l’édition publiée en 1753, par Straub, libraire de Vienne, serait due à un faussaire qui aurait profité d’une erreur générale pour publier un livre extrêmement hardi. L’exemplaire daté de 1598 que possède la Bibliothèque nationale porterait une fausse date. Tout cela paraît assez difficile à croire et en tout cas, ne nous expliquerait nullement comment le xviie s. a pu avoir l’idée et connaître l’idée d’un livre qui n’existait pas. Quoi qu’il en soit, outre l’édition de Vienne déjà citée, on en possède une autre de 1768 (Amsterdam et Yverdon, in‑8o). D’autres éditions ont paru en 1792, 1833, 1846, 1861. L’exemplaire que nous avons sous les yeux (sans lieu ni date) contient six chapitres et trois paragraphes supplémentaires intitulés : Sentiments sur le traité des trois Imposteurs ; Extrait d’une lettre ou Dissertation de M. de La Monnaye à ce sujet ; Réponse à la dissertation de M. de La Monnaye sur le traité des trois Imposteurs. {a} Quant à l’auteur, il n’est pas mieux connu que la date de la publication. On a successivement attribué le livre des Imposteurs à Averroès, à Boccace, à Campanella, à Guillaume Postel, à Machiavel, à Rabelais, à Étienne Dolet, au Pogge, à l’Arétin, à Muret, sans parler de l’empereur Frédéric ii qui aurait emprunté la plume de son chancelier, Pierre des Vignes. Ce qui est probable, c’est qu’un exemplaire unique et anonyme aura longtemps circulé sous le manteau et que l’auteur n’aura jamais cru prudent de se faire connaître. Ce livre singulier pouvait en effet passer en ce temps-là pour remarquable par l’audace de la pensée et du style, audace qui paraîtrait intolérable de nos jours et qui ne peut s’expliquer que comme une violente réaction contre les persécutions exercées, au temps de l’auteur, contre les impies. Voici un échantillon du genre : “ Tout le monde demeure d’accord que, pour la naissance et les fonctions ordinaires de la vie, ils {b} n’avaient rien qui les distinguât du reste des hommes : ils étaient engendrés par les hommes, ils naissaient des femmes et ils conservaient leur vie de la même façon que nous. Quant à l’esprit, on veut que Dieu animât bien plus celui des prophètes que des autres hommes, qu’il se communiquât à eux d’une façon toute particulière ; on le croit d’aussi bonne foi que si la chose était prouvée ; et sans considérer que tous les hommes se ressemblent et qu’ils ont tous une même origine, on prétend que ces hommes ont été d’une trempe extraordinaire et choisis par la divinité pour annoncer ses oracles. Mais outre qu’ils n’avaient ni plus d’esprit que le vulgaire, ni l’entendement plus parfait, que voit-on dans leurs écrits qui nous oblige à prendre une si haute opinion d’eux ? La plus grande partie des choses qu’ils ont dites est si obscure que l’on n’y entend rien, et en si mauvais ordre qu’il est facile de s’apercevoir qu’ils ne s’entendaient pas eux-mêmes et qu’ils n’étaient que des fourbes ignorants. Leur audace constitue tout leur mérite ; quand on se défaisait d’eux par des supplices, on leur infligeait une peine qui leur était due : Jésus-Christ n’échappa point au juste châtiment qu’il méritait ; il n’avait pas, comme Moïse, une armée à sa suite pour défendre ses opinions. ” L’auteur s’attache à démolir ses trois Imposteurs en se servant contre eux des textes mêmes empruntés aux livres sacrés. Un pareil dessein, qui serait banal aujourd’hui, où la critique a produit tant d’œuvres destinées à combattre les dogmes et les traditions de la Bible, était alors, pour l’époque, une tentative excessivement hardie, et l’on comprend tout le scandale qui s’est fait autrefois autour de ces arguments. L’auteur va plus loin : il s’attaque à l’existence même de Dieu, ou tout au moins aux preuves que l’on a habitude d’en donner et qui lui paraissent ridicules. En résumé, l’argumentation des trois Imposteurs nous paraît aujourd’hui banale et les plaisanteries dont ce livre est plein nous semblent de mauvais goût ; car le genre adopté par la société de nos jours est de ne pas croire à la religion, pas beaucoup à Dieu, mais de ne parler de l’un et de l’autre qu’en termes respectueux. » {c}


  1. Traité des trois imposteurs (Yverdon, de l’Imprimerie du Professeur de Felice, 1778, in‑8o de 95 pages, en français, suivies des pièces citées (pages 97‑143).

  2. Les trois Imposteurs.

  3. V. note [38], lettre 477, pour le Theophrastus redivivus, manuscrit latin athée beaucoup plus volumineux que Les trois imposteurs, et pour son hypothétique attribution à Guy Patin (qui ne m’a pas convaincu).

Sous le pseudonyme de Philomneste Junior, Pierre Gustave Brunet (1805-1896) a donné une édition critique moderne et abrégée de ce livre : De tribus Impostoribus m.d.iic. [1598]. Texte latin, collationné sur l’exemplaire du duc de La Vallière, aujourd’hui à la Bibliothèque impériale, augmenté de variantes de plusieurs manuscrits, etc. et d’une notice philologique et bibliographique (Paris, Jules Gay, 1861, in‑12 de 101 pages, bilingue, latin et français). Les Hypothèses au sujet de l’auteur (volume 1, pages  vii‑xixi, avec cette conclusion :

« Parmi les écrivains connus comme libres penseurs et auxquels on aurait pu encore attribuer le Liber de tribus Impostoribus, nous n’avons pas rencontré Bonaventure Des Périers ; on sait que cet écrivain spirituel se suicida dans l’hiver de 1542 à 1543, après avoir fait imprimer en 1537 le Cymbalum mundi, {a} livre aussitôt poursuivi par le Parlement, comme contenant de grands abus et hérésies. […]

Nous n’avons pas besoin d’insister ; il est évident que si le Liber de tribus Impostoribus a réellement été imprimé en 1538, comme l’affirme Campanella, {b} on pourrait avec quelque vraisemblance le mettre sur le compte de Des Périers, qui y aurait développé avec plus de netteté la thèse qu’il voilait à dessein dans le Cymbalum, lequel pouvait, aux yeux des myopes, passer pour une raillerie dirigée contre le paganisme. »


  1. Cymbalum mundi {i}en français, contenant quatre dialogues poétiques fort antiques joyeux et facétieux. {ii}

    1. La Cymbale du monde.

    2. Sans nom ni lieu 1537, in‑4o de 8 feuilles : « facsimilé de l’exemplaire unique conservé à la Bibliothèque de Versailles », Paris, Société des Anciens Livres, 1914, avec un avant-propos de Pierre-Paul Plan.

    L’épître de ce petit live anonyme est intitulée « Thomas du Clevier à son ami Pierre Tryocan S[alut]. », anagramme de « Thomas l’Incrédule à son ami Pierre Croyant S[alut] ». Son auteur aujourd’hui unanimement reconnu est Bonaventure Des Périers (v. note [21] du Faux Patiniana II‑1). L’athéisme du livre le fit condamner au feu et lui valut la haine de tous les chrétiens.

  2. Tommaso Campanella (v. note [12], lettre 467) prétendait que Marc-Antoine Muret (v. note [30], lettre 97) était l’auteur du livre.

Hugues ii de Salins est le seul de ses correspondants avec qui Guy Patin ait échangé sur les trois Imposteurs. V. notes [47], [48] et [49] du Naudæana 4, [31][36] du Borboniana 5 manuscrit, et [10] du Borboniana 6 manuscrit pour d’autres informations sur ce livre maudit (avis divers, auteurs possibles, autres éditions).

24.

L’« appendice à la dissertation sur l’Antéchrist » {a} occupe la fin des Annotationes in libros Evangeliorum et varia loca S. Scripturæ [Commentaires sur les livres des Évangiles et divers passages de la Sainte Écriture] de Hugo Grotius ; {b} il y écrit en haut de la colonne de droite, page 84 :

Librum de tribus Impostoribus absit ut aut Papæ tribuam aut Papæ oppugnatoribus. Iam olim inimici Friderici Barbarossæ Imperatoris famam sparserant libri talis, quasi iussu ipsius scripti. Sed ab eo tempore nemo est qui viderit. quare fabulam esse arbitror.

[Loin de moi l’idée d’attribuer le livre des trois Imposteurs ou au pape ou aux ennemis du pape. Autrefois déjà les ennemis de l’empereur Frédéric Barberousse {c} avaient colporté le bruit qu’il avait été écrit sur son ordre ; mais depuis lors il n’y a personne qui l’ait vu, ce qui me fait juger que c’est une fable].


  1. V. note [9], lettre 127.

  2. Amsterdam, 1641, v. note [2], lettre 53.

  3. V. infra note [25].

25.

Frédéric ier Barberousse, empereur germanique, accéda au trône en 1152 et périt en 1190 en Terre sainte après avoir tenté à plusieurs reprises de soumettre l’Italie et les États pontificaux. V. notes [2], lettre 59, pour Mathieu Paris, chroniqueur bénédictin du xiiie s., et [20], lettre 468, pour son commentaire sur l’impiété de Frédéric Barberousse.

26.

« le genre d’humains le plus pestilentiel ».

27.

« Lipse dans ses Conseils politiques, et une infinité d’autres auteurs » :

Iusti Lipsii Monita et Exempla politica. Libri duo, qui Virtutes et Vitia Principum spectant.

[Conseils et exemples politiques de Juste Lipse. Deux livres qui examinent les vertus et les vices des princes]. {a}


  1. Anvers, Plantin, Ioannes Moretus, 1605, in‑4o de 213 pages, pour la première édition ; traduit en français, Les Conseils et les exemples politiques de Juste Lipse. Divisés en deux livres. Touchant les vertus et les vices des princes (Paris, Jean Richer, 1606, in‑8o).

    V. note [49] du Naudæana 4 pour le passage de cet ouvrage qui touche aux trois imposteurs, mais il y parlait de l’empereur Fédéric ii Barberousse (qui régna trente ans après Frédéric ier).

28.
In magni Hippocratis Prognostica Iacobi Antonii Phrygii Ticinensis medici Collegiati, Explanatio. Apposita cuique fere loco ex libris Epidemiorum privata exempla ad confirmandas auctoris sententias, et ad praxim exercendam apprime utilia.

[Explication pronostique du grand Hippocrate, par Jacobus Antonius Phrygius, médecin agrégé au Collège de Pavie. {a} Accompagnée d’exemples personnels portant sur presque tous les passages tirés des livres des Épidémies, extrêmement utiles pour confirmer les sentences de leur auteur et pour exercet la pratique]. {b}


  1. Giacomo Antonio Frigio, mort en 1622, père de Pietro Francisco Frigio, lui-même auteur d’un commentaire sur les Épidémies d’Hippocrate (Lyon, 1643, v. note [11], lettre 78).

  2. Pavie, Marcus Grigius, 1608, in‑8o de 453 pages. Le mot Prognostica du titre a curieusement égaré Guy Patin, qui parlait d’un commentaire sur le Pronostic d’Hippocrate, alors qu’il porte sur ses Épidémies.

29.

Ioannis Thomæ Freigii Quæstiones Iustinianeæ in Institutiones iuris Civilis. Cum, Analysi Logica et Politica aliquot Consiliorum Zasii

[Questions justiniennes de Johann Thomas Freig {a} sur les Institutions du droit civil. {b} Avec une analyse logique et politique de certains Conseils de Zasius]. {c}


  1. V. supra note [22].

  2. V. note [22], lettre 224, pour les Pandectes ou Digeste justinien.

  3. Bâle, Sebastianus Henricpetrus, 1578, in‑8o en deux parties de 319 et 173 pages.

    Ulrich Zasius (Zäsy, Constance 1461-Fribourg-en-Brisgau 1535) est un jurisconsulte et humaniste allemand.


Un clerc, Guy de Laon, trésorier de la Sainte-Chapelle (v. note [38], lettre 342), et un laïc, Raoul de Presles, légiste au service du roi, avaient fondé en 1314 les deux collèges de Presles et de Laon. Installées ensemble au pied de la montagne Sainte-Geneviève, les deux institutions se dissocièrent dix ans plus tard. Situés entre les rues des Carmes et Jean-de-Beauvais, ceux de Presles et de Beauvais (v. note [11], lettre 34) n’étaient séparés que par un mur. Le principal de Presles, Pierre de La Ramée (Ramus), et celui de Beauvais, Omer i Talon, s’étaient entendus pour les réunir en 1597, sous le nom de Presles-Beauvais, en perçant une ouverture dans le mur, qui fut abattu en 1616.

V. note [7], lettre 264, pour Ramus (Pierre La Ramée), massacré en 1572.

30.

« Vôtre en toute franchise [v. note [27], lettre 172], Guy Patin. ».


Correspondance complète de Guy Patin et autres écrits, édités par Loïc Capron. – Paris : Bibliothèque interuniversitaire de santé, 2018. – À Hugues II de Salins, le 31 octobre 1656

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(Consulté le 19/04/2024)

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