L. 536.  >
À Charles Spon,
le 6 septembre 1658

< Monsieur, > [a][1]

En continuant de vous donner des nouvelles depuis ma dernière du 27e d’août, je vous dirai que les augustins sont toujours prisonniers. [2] Le prieur a mérité une punition exemplaire pour quatre grandes fautes qu’il a commises en toute cette grande affaire. On imprime au Louvre [3] Procopii historiarum sui temporis libri viii[4] grec et latin, en deux tomes in‑fo, avec la version et les notes d’un jésuite de Toulouse [5] nommé le P. Maltret, [6] que l’on dit être fort savant en grec. [1]

Il y a ici de bonnes gens qui ne sont pas contents et qui grondent contre l’Éminence, [7] de ce que l’on donne entrée et des villes aux Anglais dans la Flandre, [8] disant que c’est perdre la religion catholique de laisser entrer en France l’ancien ennemi de ce royaume ; mais ils ont beau dire, il s’en faut moquer. Ces gens-là n’entendent pas la politique comme notre Éminentissime qui fait en ce cas-là fort bien car ses ennemis mêmes avouent que depuis la mort du feu roi, [9] il n’a jamais fait une meilleure affaire pour le bien de la France que de s’accorder avec Cromwell ; [10] car si nous ne l’eussions amené de notre parti, les Espagnols n’eussent jamais manqué de nous faire bien du mal. [2]

Les Portugais font de grands efforts à Rome pour avoir des évêques, mais je pense qu’ils n’en pourront jamais venir à bout tandis que le roi d’Espagne [11] ne le voudra point, car le pape [12] n’oserait entreprendre une telle affaire absque consensu monarchæ potentissimi[3] Les Portugais ont pris Badajoz [13] sur le roi d’Espagne au troisième assaut et ont tout fait passer au fil de l’épée. [4] Le duc de Modène [14] a pris Mortare [15] dans le Milanais, [16] et pour aller par ce moyen jusqu’aux portes de Milan. Les Espagnols avaient pensé surprendre Valence, [17] mais leurs échelles y sont demeurées. [5] La femme du gouverneur y a fait des merveilles en l’absence de son mari, dont la duchesse de Savoie [18] l’a complimentée avec de beaux présents qu’elle lui a envoyés, et entre autres d’une belle épée, etc. Le maréchal d’Aumont [19] est véritablement en liberté puisqu’il est dans Boulogne, [20] mais il n’a terme que de 20 jours ; après lesquels il doit retourner, et en a donné sa parole, à moins que d’avoir tiré du roi [21] permission de demeurer ici et de renvoyer en sa place le gouverneur d’Anvers, [22] qui est un Milanais, et trois hommes qui sont à M. le Prince, savoir Bouteville, [23] Coligny [24] et Guitaut. [25] S’il ne peut obtenir ces quatre hommes-là pour échange de sa personne, il a promis à don Juan [26] de retourner en Flandres et s’y rendre prisonnier.

Les augustins ne veulent point répondre au Parlement, ils disent qu’ils ne relèvent que du pape, et refusent d’obéir. Voilà le commencement de la querelle des Vénitiens avec le pape Paul v[27] l’an 1606, pour un abbé et un chanoine de Vicence [28] qui avaient été trouvés enfermés dans un monastère de religieuses, où en furent trouvées plus de 30 qui avaient passé les piques, [6] de quo vide Thuanum sub finem tomi quinti, editionis Genevensis[7][29][30]

Il y a ici un président à mortier fort malade, qui est M. de Longueil [31] sieur de Maisons, qui est un superbe bâtiment près de Saint-Germain-en-Laye. [8][32] Il est malade d’une fièvre continue [33] et d’un méchant flux de ventre. [34] Il a la réputation d’être un des plus rusés hommes de France, il aime fort la bonne chère. C’est peut-être qu’il a trop mangé de melons [35] que l’on cultive avec beaucoup de soin en sa belle maison. L’évêque d’Agde, [36][37] nommé M. Fouquet, qui est frère du procureur général et surintendant des finances, [38] est aussi fort malade d’une fièvre continue. [9] La Fortune [39] entre dans cette Maison des Fouquet par la porte et les fenêtres : l’un est coadjuteur de Narbonne, [40] l’autre est procureur général et surintendant des finances, le troisième est l’abbé Fouquet [41] qui a plusieurs bons bénéfices, le quatrième est l’évêque d’Agde ; mais la santé leur manque, sic nihil est ex omni parte beatum, nullus ubique potest felici ludere dextra[10][42]

Enfin, Gravelines [43] est rendue à composition, au grand regret des Espagnols. Trois cents soldats en sont sortis et aujourd’hui, dernier d’août, nous en sommes maîtres. Le nouveau maréchal de France, M. de Montdejeu, [44] gouverneur d’Arras, de joie qu’il a de cette nouvelle dignité, a de soi-même entrepris un nouveau siège, qui est Armentières. [11][45]

Voilà six vers que l’on vient de me donner sur la maladie du roi, [46] que je vous envoie. J’apprends qu’il en viendra d’autres, et même un discours de cette maladie où il sera honnêtement parlé de stibiali isto veneno.

Vivis ab epoto cur, rex Lodovice, veneno,
Quid mirum ? stibio plus valuere preces :
Id cœli, non artis opus, sine lege medentum,
Nec datus ante Deo sic potes inde mori :
Civibus illa quidem fuerit medicina feralis,
Nil lædunt unctos viva venena deos
[12]

Outre les deux augustins morts, il y en a deux fort blessés qui sont en danger d’en mourir pour les diverses blessures qu’ils ont. Le prieur ne veut point répondre au Parlement et en appelle à Rome. On a demandé arrêt contre lui, par lequel il est dépouillé de sa charge de prieur et est menacé, s’il ne veut répondre, qu’on lui fera son procès comme à un muet. On a coupé le bras à un des augustins blessés, pour la gangrène [47] qui y était, c’est un jeune moine natif de Tours ; [48] et les cinq séculiers qui furent emprisonnés avec le prieur, par arrêt de la Cour, ont été renvoyés le 2d de septembre, mois courant, au grand Châtelet [49] afin que leur procès leur soit fait par le lieutenant criminel. Il se pourrait bien faire qu’il y en aura quelqu’un de ceux-là pendu, au lieu de moines que l’on ne pendra point car ce serait scandaliser notre sainte Mère la religion et l’abandonner trop lâchement à la risée des libertins [50] politiques, athéistes, [51] hérétiques, maheutres, [13] épicuriens et autres ennemis de notre sainte Mère Église.

Son Éminence a donné le gouvernement de Gravelines [52] à M. de Mancini, [14][53][54] son neveu, sous la direction du sieur La Prune, [55] gouverneur du dit Mancini. On dit qu’il fait bon avoir des gouvernements en ces quartiers-là à cause des grandes contributions que l’on y fait payer, d’où il revient bien du gain. Le duc d’Orléans [56] doit arriver le 10e de ce mois à Fontainebleau [57] où il va saluer le roi et se réjouir avec lui de sa convalescence. [15]

Plus je regarde les Io. Heurnii Opera omnia in‑fo de M. Huguetan, [58] et plus il me déplaît et me dégoûte. [16] Il est plein de fautes. Comment se peut faire cela, vu que la copie était imprimée et bien correcte ? Il y a ici un gros procès pendant au Conseil entre le Parlement et Messieurs les maîtres des requêtes : c’est que le lieutenant général de Chaumont-en-Bassigny [59][60] a contrefait le seing de M. le chancelier [61] en une pièce authentique ; [17] la fausseté a été découverte et le faussaire mis prisonnier dans le For l’Évêque, [62] où les maîtres des requêtes prétendaient lui faire son procès ; lui présente requête au Parlement, laquelle est reçue ; le Parlement ordonne qu’il sera mené dans la Conciergerie [63] du Palais qui est la prison du Parlement ; les huissiers du Parlement vont au For l’Évêque, font tout ouvrir, et même par force, et enlèvent et emmènent ledit prisonnier au Palais. M. le chancelier est fort contre le Parlement et, ce n’est que sa coutume, avec les maîtres des requêtes ; mais on dit que le cardinal est pour le Parlement, lequel se soutient aussi par sa propre grandeur. Bellum undique et undique bellum[18][64] La princesse de Conti, [65] à quatre heures du matin du 4e de ce mois de septembre, a accouché d’un fils ; [66] voilà un prince du sang de la famille mazarine. [19] On apprête ici, près de Minimes [67] de Nigeon, [20][68] une grande salle pour y faire voir au peuple de Paris et aux curieux la peau et le squelette d’une baleine [69] que l’on a ici amenés, et qui a été prise entre Nantes [70] et La Rochelle ; [71] chacun y aura place pour un écu. Je vous baise très humblement les mains et suis de toute mon affection, Monsieur, votre, etc.

De Paris, ce 6e de septembre 1658.


a.

Reveillé-Parise, no cccxxxvi (tome ii, pages 426‑430).

1.

Προκοπιου Καισαρεωσ των κατ αυτον ιστοριων βιβλια οκτω. Procopii Cæsariensis historiarum sui temporis libri viii. Interprete Claudio Maltreto Aniciensi, Societatis Jesu presbytero : A quo supplementis aucti sunt Vaticanis, et in locis aliquot emendati.

[Huit livres de Procope de Césarée {a} sur les Histoires de son temps, par Claude Maltret, natif du Puy-en-Velay, prêtre de la Compagnie de Jésus, {b} qui les a augmentés de suppléments du Vatican et en a corrigé quelques passages]. {c}


  1. V. note [29], lettre 401.

  2. Claude Maltret (Le Puy-en-Velay 1621-Toulouse 1674), était recteur du collège jésuite de Montauban.

  3. Paris, Imprimerie royale, 1662, in‑fo, latin et grec de 672 pages, réédité en 1663 (2 tomes).

Outre cette Histoire, qui contient le récit des guerres de Justinien (v. note [22], lettre 224), le P. Maltret a publié Προκοπιου Καισαρεωσ περι του δεσποτου Ιουστινιανου κτισματων λογοι εξ. Procopii Cæsariensis de ædificiis Dn. Justiniani Libri sex… [Six livres de Procope de Césarée sur les édifices de l’empereur Justinien…] (Paris, Imprimerie royale, 1663, in‑fo, latin et grec), énumération des monuments construits ou réparés sous les auspices de l’empereur Justinien le Grand (v. note [22], lettre 224).

V. note [59] du Patiniana I‑2 pour le 9e livre des Histoires (intitulé Anecdotes ou Histoire secrète), mis au jour et publié par Nicolaus Alemannus en 1623, ouvrage posthume où Procope épanche ses colères contre les grands de son époque, terrible correctif aux éloges dont il a couvert Justinien dans ses autres livres. Le travail de Maltret sur ce livre n’a paru qu’en 1729, à Venise.

2.

« Denique tandem [Enfin], Guy Patin rend justice à la politique du cardinal de Mazarin. C’est la seule et première fois, que je sache » (Reveillé-Parise) : il y en a d’autres dans les lettres, mais elles sont en effet rares. Le fait est aussi que dans les villes de France les noms des places, rues, avenues ou boulevards ont bien moins souvent honoré le nom de Richelieu que celui de Mazarin. À Paris, par exemple, la rue Mazarine (ancienne rue Nesle) célèbre sa bibliothèque, mais non son personnage historique.

3.

« sans le consentement du tout-puissant monarque. »

4.

Badajoz (Estrémadure), alors puissamment fortifiée, est encore une ville frontière entre l’Espagne et le Portugal, située sous la même latitude que Lisbonne.

5.

Le marquisat de Mortara (province de Pavie dans le Milanais) était placé sous gouvernement espagnol depuis 1535. Sa prise par l’armée franco-piémontaise le 15 août 1658, a été la dernière action militaire de François ier, duc de Modène, qui mourut le 14 octobre suivant. Les Espagnols avaient vainement attaqué Valence (Valenza, v. note [5], lettre 26) : les défenseurs les avaient obligés à lever précipitamment le siège en abandonnant leur matériel d’assaut (échelles et sans doute le reste).

6.

« On dit proverbialement, qu’un homme a passé par les piques, lorsqu’il s’est trouvé en plusieurs occasions qu’il a essuyé plusieurs dangers ; et figurément, lorsqu’il a souffert quelque perte ou dommage en des affaires qu’il a eues » (Furetière). Dans le contexte, le sens est nettement plus cru.

Vicence (Vicenza) est une ville de Vénétie, à 30 kilomètres au nord-ouest de Padoue, qui faisait alors partie de la République de Venise. V. note [6], lettre 25, pour la guerre de l’interdit qui opposa Venise à la papauté.

7.

« sur ce sujet, voyez de Thou, vers la fin du tome cinq de l’édition de Genève » : édition genevoise (chez Pierre de La Rovière, 1620-1626, en 5 volumes in‑fo) des Historiarum sui temporis de Jacques-Auguste i de Thou.

Guy Patin renvoyait Charles Spon au livre cxxxvii, règne de Henri iv, année 1607 (Thou fr, volume 14, pages 560‑561), Causes du démêlé de Paul v avec la République de Venise :

« Un moine de l’Ordre de saint Augustin avait porté sa brutalité jusqu’à violer une fille de douze ans. Pour cacher ce crime par un plus grand encore, il l’avait inhumainement massacrée. Les supérieurs de son Ordre s’étant contentés de le condamner aux galères, le Sénat, indigné de leur indulgence, fit arracher le moine de son monastère, instruisit son procès à la rigueur et le condamna à être coupé en quatre quartiers. Ce jugement fut suivi d’un autre moins rigoureux à la vérité, mais aussi triste. Un dominicain nommé Antoine ayant eu l’insolence d’accompagner en habit de deuil son frère condamné au bannissement, le Sénat le bannit lui-même à perpétuité. Depuis peu le Conseil des dix avait fait arrêter et jeter dans les cachots deux prêtres convaincus de crimes énormes. Le premier, nommé Scipion Saraceno, chanoine de Vicence, déjà déshonoré par ses débauches, avait longtemps sollicité une dame de ses parentes ; irrité de ses refus, il avait osé, au mépris de l’honnêteté et de la sûreté publique, aller chez elle comme chez une courtisane et lui faire les dernières insultes. Le second de ces prêtres se nommait Brandolin-Valdemarin, natif de Forli et abbé de Nervéze. Il était atteint et convaincu d’avoir exercé plusieurs brigandages dans le territoire de Venise, d’avoir empoisonné plusieurs personnes, entre autres un prêtre complice de ses crimes, d’avoir fait assassiner son père et son frère, d’avoir abusé de sa propre sœur, et d’avoir employé la magie et le sortilège pour satisfaire ses passions brutales. À ces exemples de sévérité, il faut ajouter ce décret du Sénat, porté trois ans auparavant : il enjoignit à tous les gouverneurs des villes et places de la Seigneurie de prendre garde que les religieux et les prêtres, les collèges et les communautés, les laïcs mêmes, n’entreprissent de bâtir églises, monastères ou hôpitaux dans l’étendue de leur gouvernement ; il menaçait de bannissement tous ceux qui contreviendraient à la défense, et confisquait au profit du Domaine l’édifice et le fonds sur lequel il se trouverait bâti. Le Sénat ne se montra pas plus favorable aux ecclésiastiques en 1605 […], < avec > un décret qui défendait aux religieux et à tous les ecclésiastiques de s’autoriser jamais < du > prétendu droit de retrait ni de tout autre titre, quel qu’il pût être, pour s’attribuer la propriété des terres que les laïcs voulaient aliéner. […] Clément viii, ce pape si recommandable par sa modération et par sa sagesse, avait toujours cru devoir dissimuler tous ces actes de juridiction, que le Sénat cependant faisait à ses yeux. Paul v son successeur pensa tout autrement. À peine fut-il assis sur le trône de saint Pierre qu’il en fit des plaintes secrètes à l’ambassadeur de la République. »

8.

Construit par René de Longueil, marquis de Maisons, de 1642 à 1650 sur les plans de l’architecte François Mansart, le château de Maisons, aujourd’hui Maisons-Lafitte (Yvelines) à 10 kilomètres au nord-est de Saint-Germain-en-Laye, a été racheté en 1818 par le banquier Jacques Lafitte (1767-1844).

9.

Louis Fouquet (Paris 1633-1702), cinquième fils de François i et de Marie de Maupeou (v. note [5], lettre 800), était le filleul de son frère Nicolas, le surintendant des finances. Docteur en droit civil et canonique, Nicolas avait été, durant la Fronde, allié de Mazarin et ennemi de Retz qui l’appelait « le petit Fouquet ». Il avait été nommé évêque d’Agde en 1657, quand son frère aîné François ii (v. note [52], lettre 280) rendit cet évêché vacant pour devenir coadjuteur de Narbonne. Favorable à Port-Royal, Louis fonda en 1675 une sorte de gazette de l’épiscopat français qui porta successivement les noms de Nouvelles ecclésiastiques et à partir de 1689, de Mémoires ecclésiastiques (Dictionnaire de Port-Royal, pages 421‑422).

10.

« ainsi rien n’est heureux en toute partie, nul ne peut partout jouer et gagner. » Le début est d’Horace, nihil est ab omni parte beatum (Odes, livre ii, xvi, vers 27‑28) ; la fin, devenue proverbiale, est attribuée Vomanus, poète scolastique latin du vie s.

11.

Gravelines avait été prise le 27 août.

Armentières (Nord), sur les rives de la Lys, est une ville frontalière entre la France et la Flandre (aujourd’hui la Belgique), ce qui l’a exposée pendant plusieurs siècles à toutes les calamités de la guerre : elle avait été prise et incendiée par les Anglais en 1339, pillée par les Français en 1382, détruite par les calvinistes en 1566, occupée par les maréchaux de Gassion et de Rantzau en 1645, par l’archiduc Léopold en 1647, par les Français en 1667, pour leur demeurer par suite du traité d’Aix-la-Chapelle en 1668 (G.D.U. xixe s.).

12.

« de ce poison antimonial.

“ Pourquoi s’étonner, roi Louis, que tu aies survécu au poison que tu as bu ? Les prières valent mieux que l’antimoine : ce qui soigne hors de la règle est l’œuvre du ciel et non de l’art, et sans la protection de Dieu, tu aurais pu en mourir. Cette médecine aurait certes été funeste pour tes sujets ordinaires, mais les poisons vifs ne font aucun mal aux dieux qui ont été bénis. ” »

V. note [8], lettre 539, pour quelques autres vers sur le même sujet.

13.

Maheutre : « vieux mot qui signifiait un soldat, et qui s’entendait particulièrement, chez les ligueurs, d’un soldat protestant » (Littré DLF).

14.

V. note [10], lettre 372, pour Philippe-Julien Mancini, futur duc de Nevers.

15.

La Grande Mademoiselle a conté dans ses Mémoires (chapitre xxxii) la manière dont la cour accueillit son père à Fontainebleau en 1658, où elle-même était arrivée le 28 août :

« Son Altesse Royale y vint. {a} J’allai au-devant d’elle, j’en reçus un bon visage : il mit pied à terre dans la forêt dès qu’il me vit et fut un quart d’heure à m’entretenir ; puis il remonta en carrosse, et moi aussi. Je m’en allai devant, ayant curiosité de voir comme on le recevrait. Comme l’on dit “ Voici M. le duc d’Orléans ”, le roi jouait, et la reine ; à peine se levèrent-ils pour le saluer, et continuèrent leur jeu. Je crois que cela ne lui plut pas. Tout le monde fut surpris du peu de cas que l’on en fit. Leurs Majestés s’allèrent promener comme à l’ordinaire ; Son Altesse Royale n’y fut point. » {b}


  1. Le 31 août.

  2. Le duc d’Orléans quitta Fontainebleau le 12 septembre pour rentrer à Blois.

16.

V. note [12], lettre 446, pour les Œuvres complètes de Jan i van Heurne.

17.

Le Bassigny est un pays de la Champagne. Chaumont-en-Bassigny, aujourd’hui préfecture de la Haute-Marne, porte depuis 1971 le nom simplifié de Chaumont. Dans une lettre suivante, Guy Patin a donné le nom de Palliot à ce lieutenant général faussaire

18.

« La guerre de toutes parts, de toutes parts la guerre » ; pléonasme poétique Johann Förster : {a}

Undique terribilem sonitum tonat aere canoro
Buccina et assensu conspirant tympana rauco,
Crebrescitque virum vox, atque hinnitus equorum
Undique per campos, bellum undique et undique bellum
.

[De toutes parts la trompette d’airain fait entendre un fracas terrible, et les tambours s’y joignent en un concert rauque, et la voix des hommes s’intensifie, et le hennissement des chevaux, de toutes parts dans les plaines, de toutes parts la guerre et la guerre de toutes parts]. {b}


  1. Théologien et pasteur luthérien natif d’Auerbach (Saxe) qui professa à Wittenberg.

  2. Livre iv, page 109, du :

    Ioanni-Fridericidos, id est : de Rebus pie fortiter et præclare tum pro Patriæ libertate, tum pro Religionis Lutheranæ sinceritate gestis a Ioanne Friderico, Electore a Constante Pii, et a pia constantia Constantis cognomen adepto ; Libri quinque… a M. Ioanne Forstero Aurobachio, Poëta Cæsario, SS. Th. Candidato, et iam scholæ Schnebergensis Rectore.

    [Ioannes-Fridéricide : {i} cinq livres sur les courageuses et brillantes actions accomplies, tant pour la liberté de la patrie que pour la sincérité de la religion luthérienne, par Johann Friedrich, électeur à qui on a donné le surnom de Pieux, pour sa constante piété, et de Constant, pour sa pieuse constance… Par Ioannes Forsterus Aurobachius, poète impérial, étudiant en sainte théologie, déjà recteur de l’école de Schneeberg]. {ii}

    1. Mot forgé sur le modèle de l’Énéide pour chanter l’épopée et la gloire de Johann Friedrich ii (1529-1598), grand électeur de Saxe.

    2. Leipzig, Michael Lantzenberger, 1602, in‑8o de 182 pages.

19.

Ce premier fils du prince de Conti et de la princesse, née Anne-Marie Martinozzi, prénommé Louis, mourut le 14 septembre suivant.

20.

Couvent des minimes (bonshommes) de Nigeon, village voisin de Chaillot (v. note [1], lettre 720).


Correspondance complète de Guy Patin et autres écrits, édités par Loïc Capron. – Paris : Bibliothèque interuniversitaire de santé, 2018. – À Charles Spon, le 6 septembre 1658

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(Consulté le 19/03/2024)

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