L. latine 390.  >
À Johann Daniel Horst,
le 10 février 1666

[Ms BIU Santé no 2007, fo 204 ro | LAT | IMG]

Au très distingué M. Johan Daniel Horst, à Francfort.

Très distingué Monsieur, [a][1]

J’ai reçu votre dernière, et y réponds brièvement et à la hâte. Qu’il me présente ou non de l’argent, je suis disposé à remettre à qui me le réclamera le privilège que j’ai ici en mains pour votre Zacchias : [2] votre seule loyauté me suffit. J’ai enfin reçu avec joie les exemplaires du Schenckius ; [3] la raison pour laquelle ils ne me sont pas parvenus plus vite est l’insouciance d’un libraire de Lyon, nommé Comba, chez qui le paquet a longtemps traîné ; [4][5] pourtant, je me réjouis et remercie M. Beyer. [1][6] Les exemplaires qu’on m’a remis sont pour le roi, [7] pour M. le chancelier[8] et pour mon Robert. [9] Je salue M. votre fils et me réjouis fort qu’il se souvienne de moi. [10] Pour en venir aux livres que vous me nommez, ils n’ont pas été publiés à Paris : la Pharmacopœia Augustana, in‑8o, est de Hollande, je n’en ai vu aucune de Lyon ; [11] j’ai néanmoins vu l’Armamentarium Chirurgicorum de Scultetus, [12] mais dans une édition flamande in‑4o[2] Je n’ai pas encore vu le Sennertus qu’on a tout récemment achevé à Lyon, [13] il viendra pourtant ; il m’est dédié pour la troisième fois. [3] Il paraîtra sans aucun doute et ne doutez pas qu’il sera mis en vente à Francfort par M. Widerholdt, [14] très honnête imprimeur genevois qui avait reçu, il y a un an, les exemplaires du Schenckius que M. Beyer devait me délivrer et qui m’ont enfin été remis. [1] Il se rend en effet tous les ans à vos foires [15] et y présentera ce nouveau Sennertus que lui auront expédié MM. Huguetan et Ravaud, [16][17] libraires lyonnais dont il a coutume d’être l’agent aux foires de chez vous. Si vous préférez vous le faire acheter à Paris, mais à prix plus élevé, il vous faudra m’indiquer par quelle voie vous le faire livrer. Je salue notre ami Scheffer, [18] j’attends de lui une lettre que m’apportera Sebastian Switzer, [19] dont j’apprends qu’il viendra bientôt ici ; je souhaite que sa sœur guérisse. [4] Si ample que puisse être la rumeur publique d’une prochaine guerre avec les Anglais, on ne pense pas qu’elle durera longtemps : [20] il y a trois jours, notre roi a envoyé au leur 200 muids d’excellent vin français, [21][22] qu’ils boiront gaiement et pacifiquement, ainsi que vos électeurs ; [5] mais on ignore encore quel parti prendront les Suédois. Je souhaite que nos princes vivent et se portent bien, et trinquent amicalement ; et nous tous aussi, suivant leur exemple, sous leur ombrage et leur protection. Que les dieux exaucent nos vœux ! Vive, vale et aimez-moi.

De Paris, le 10e de février 1666.

Vôtre de tout cœur, Guy Patin.


a.

Brouillon autographe d’une lettre que Guy Patin a écrite à Johann Daniel Horst, ms BIU Santé no 2007, fo 204 ro.

1.

François Comba, natif de Lyon vers 1633 s’y était établi libraire en 1656, après un double apprentissage, parisien et lyonnais. Il est mort après 1700.

V. notes :

2.
Χειροπλοθηκη, seu D. Johannis Sculteti, Physici et Chirurgi apud Ulmenses olim felicissimi, Armamentarium Chirurgicum xliii. tabulis æræi elegantissime incisis, nec antehac visis, exornatum. Opus posthumum, Medicinæ pariter ac Chirurgiæ Studiosis perutile et necessarium, in quo tot, tam veterum ac recentiorum instrumenta ab Authore correcta, quam noviter ab ipso inventa, quot fere hodie ad usitatas operationes manuales feliciter peragendas requiruntur, justa et hactenus semper desiderata magnitudine et applicandi modo, depicta reperiuntur, cum annexa brevi Tabularum descriptione, et sequentibus cautionibus ac curationibus Chirurgico-Medicis per omnes fere corporis humani partes externas observatis. Nunc primum in lucem editum, studio et opera Joannis Sculteti, Authoris ex fratre Nepotis, Philosophiæ et Medicinæ Doctoris. Cum triplici Instrumentorum, Curationum, rerumque memorabilium Indice.

[Kheiroplothêkê, ou l’Arsenal chirurgical de M. Johannes Scultetus, {a} médecin et chirurgien d’Ulm, jadis très célèbre, orné de 43 figures très élégamment gravées et jusqu’ici inédites. Ouvrage posthume, fort utile et nécessaire à ceux qui étudient la médecine comme la chirurgie. On y trouve non seulement la description tant des instruments des anciens et modernes, améliorés par l’auteur, que de ceux qu’il a lui-même inventés, mais aussi celle de presque tous ceux dont on a aujourd’hui besoin pour accomplir heureusement les opérations manuelles courantes ; dessinés à l’échelle qui convient et qu’on a toujours désirée jusqu’ici, avec la manière de les appliquer ; avec une brève description des figures, et avec les précautions et les soins médico-chirurgicaux postopératoires qu’il faut observer pour presque toutes les parties externes du corps humain. Mis pour la première fois en lumière par le travail et les soins de Johannes Scultetus, docteur en médecine et philosophie, neveu paternel de l’auteur. Avec un triple index des instruments, des traitements et des faits remarquables]. {b}


  1. Johannes Scultetus (Johann Schultes ou Jean Scultet ; Ulm 1595-Stuttgart 1645), chirurgien et docteur en médecine de Padoue en 1621, y avait été l’élève de Fabrice d’Aquapendente {i} et le préparateur d’Adriann van de Spiegel. {ii} Il s’était ensuite installé à Ulm, pour devenir le plus célèbre chirurgien d’Allemagne. Il n’avait pas de lien de parenté avec l’autre Scultetus, Andreas Schulze, médecin de Hambourg. {iii}

    1. Mort en 1619, v. note [10], lettre 86.

    2. V. note [5], lettre 115.

    3. V. note [14], lettre 504.

  2. Ulm, Balthasar Kühnen, 1655, in‑4o très richement illustré de 131 pages, pour la deuxième de très nombreuses éditions ; la flamande, in‑8o et non in‑4o, est celle de La Haye, Adriaan Vlacq, 1656, 328 pages ; traduit en français (Lyon, Antoine Cellier, 1675, in‑4o de 385 pages).

V. note [2], lettre 312, pour la « Pharmacopée d’Augsbourg » (Augsbourg, 1643, 1652), dont je n’ai pas trouvé d’édition hollandaise in‑8o (probable contrefaçon).

3.

V. notes [3], lettre 819, et [6], lettre 827, pour les Opera de Daniel Sennert (édition de Lyon, 1666 et 1676), avec dédicace des libraires, Jean-Antoine ii et Marc-Antoine Ravaud, à Guy Patin, qui se termine sur les vers latins de Charles Spon (v. note [38], lettre 224).

4.

Ni la construction de la phrase latine ni les autres lettres ne permettent de savoir de quel Sebastian, Scheffer ou Switzer, cette malade était la sœur.

5.

V. le dernier paragraphe de la lettre 856, pour la provenance de ces quelque 540 hectolitres de vins ; mais ils n’eurent guère sur les têtes couronnées l’effet que Guy Patin espérait : déclarée le 26 janvier 1666, la guerre de la France contre le Royaume-Uni dura jusqu’à la paix de Breda le 31 juillet 1667. Le cadeau de Louis xiv à son cousin Charles ii n’a pas laissé de trace dans les autres mémoires du temps.

s.

Ms BIU Santé no 2007, fo 204 ro.

Cl. viro D. Io. Dan. Horstio, Francofurtum.

Ultimam tuam accepi, Vir Cl. cui sic paucis et raptim respondeo. Privile-
gium quod hîc habeo in manibus, pro Zacchia, tradere paratus sum ei qui illud
à me repetet, sive pecuniam repræsentet, sive non : sola fides tua mihi sufficit.
Exemplaria Schenkij lætus accepi tandem : quod citiùs non acceperim, in causa
est ignavus quidam Bibliopola Lugdunensis, dictus Comba, apud quem diu hæsit
ipse fasciculus : de eo tamen accepto lætor et gratias ago D. Beyero. Exemplaria
tradita sunt pro Rege, pro D. Cancellario, et Roberto meo. D. Filium tuum
saluto ; gaudeo certè quod mei meminerit : quod spectat ad libros à Te nominatos,
non fuerunt editi Parisijs : Pharmacopœa Augustana in 8. est Hollandica, nec
ullam vidi Lugdunensem : Armamentarium Sculteti Chirurgicorum vidi tamen, sed
editionis Belgicæ, in 4. Sennertum nuperrimè perfectum Lugduni nondum vidi,
veniet tamen, est enim pro tertia Editione vice, Nomini meo consecratus : sed haud dubiè veniet :
sed ne dubita, statim prostabit Francofurti, per D. Widerholdt, Typo-
graphum Genevensem, et virum optimum, qui ante annum à D. Beyero
Schenckij Exemplaria
mihi reddenda, et tandem reddita acceperat : quotannis
enim proficiscitur ad vestras nundinas, estque secum transvecturus novum
ipsum Sennertum, quem Lugduni accipiet à DD. Huguetan et Ravaud,
Librarijs Lugdunensibus, pro quibus agere solet in vestris nundinis. Quod
si malis ea Tibi comparare, et habere empta Lutetiæ, sed majore pretio, tuum
erit mihi indicare per quam viam cupias ut transmittantur. Schefferum
nostrum saluto ; ejus literas per Sebast. Switzer proximè, ut audio, venturum,
expecto : cujus Soror utinam convalescat. Qualescumque sint publici
rumores belli cum Anglis futuri, diuturnum fore non putatur : Rex noster
à triduo misit Londinum, ad ipsum Regem, vini optimi Gallici modios LX. 200.
bibant ipsi cum gaudio, et pacificè, ut et Electores vestri. Sueci v. nescitur
adhuc quarum sint partium : utinam vivant et valeant Principes nostri,
pacificéque bibant : nos quoque singuli, ad eorum exemplum, ut et sub umbra
eorum atque tutela. Votis nostris annuant Superi. Vive, vale, et me ama. Parisijs,
x. Febr. 1666.

Tuus ex animo, Guido Patin.


Correspondance complète de Guy Patin et autres écrits, édités par Loïc Capron. – Paris : Bibliothèque interuniversitaire de santé, 2018. – À Johann Daniel Horst, le 10 février 1666

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(Consulté le 29/03/2024)

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