L. latine 415.  >
À Vopiscus Fortunatus Plempius,
le 12 novembre 1666

[Ms BIU Santé no 2007, fo 212 ro | LAT | IMG]

Au très distingué M. Vopiscus Fortunatus Plempius, à Louvain.

Très distingué Monsieur, [a][1]

Je me suis souvent inquiété de vous et de votre santé, et j’y pense encore, car un sage théologien m’a remis votre lettre, dont je vous remercie beaucoup ; il m’a avisé que vous étiez alité, mais j’espère que vous guérirez vite. Pour moi, je me porte bien, en dépit de mes 65 ans, mais sans savoir combien il m’en reste à vivre. Seul Dieu tout-puissant, lui qui est le suprême arbitre des affaires, connaît le terme de cette implacable vie. J’ai facilement surmonté l’année climatérique et elle ne m’a pas effrayé car je ne suis pas à ce point timoré : [2] je méprise avec assurance et nie farouchement les délires des platoniciens [3] et les rêveries de Pythagore. [1][4] Le livre du très distingué M. Bochart de Paradiso terrestri n’a pas encore été publié. [5] Bénis soient les mânes du très savant M. Sinnich, mais je peine à accepter que son si remarquable ouvrage demeure inachevé. [2][6] Ô que le sort réservé aux savants hommes est fâcheux et cruel ! Notre Pierre Petit vit et se porte bien, [7] je le saluerai de votre part. Que Dieu protège l’excellent M. Senguerdius. [8] Nous avons ici la nouvelle édition du Sennertus[9] enrichie d’un cinquième tome à Lyon, où est mort Pierre Ravaud, [10] l’imprimeur que vous connûtes jadis. Il est ici question d’imprimer certains manuscrits du très distingué Caspar Hofmann, [11] mais nos Parisiens travaillent si lentement et avec tant d’indolence qu’il me semble n’y avoir rien à espérer de tels grippe-sous. [3][12] Vale, très distingué Monsieur, et prenez bien soin de votre santé. Vale, dis-je, continuez de vivre et de m’aimer.

De Paris, le 12e de novembre 1666.

Vôtre de tout cœur, G.P.


a.

Brouillon autographe d’une lettre que Guy Patin a écrite à Vopiscus Fortunatus Plempius, ms BIU Santé no 2007, fo 212 ro.

1.

Né le 23 décembre 1601, soit quatre mois après Guy Patin, Vopiscus Fortunatus Plempius avait lui aussi dépassé de deux ans sa « grande climatérique » (63e année de la vie) ; il avait pourtant dû en parler dans sa lettre à Patin, qui tenait pour de sottes fables ces supputations platoniciennes héritées de Pythagore (v. note [3], lettre latine 408).

2.
V. notes :

3.

La réédition lyonnaise des œuvres de Daniel Sennert a paru en deux temps : 1666 pour les quatre premiers tomes (v. note [3], lettre 819), et 1676 pour les deux derniers (v. note [6], lettre 827).

V. note [5], lettre 883, pour la mort de Marc-Antoine Ravaud en octobre 1666, mais Guy Patin lui donnait ici par erreur le prénom de son père (Pierre, mort en 1651, v. note [9], lettre 97).

V. notes [18] des Déboires de Carolus pour la contrebande et la saisie de livres du 15 septembre 1666 qui avait soumis Guy Patin à l’étroite surveillance des libraires de Paris, et [14], lettre 150, pour les Opuscula medica [Opuscules médicaux] de Caspar Hofmann, parus à Francfort en 1667, édités par Sebastian Scheffer.

s.

Ms BIU Santé no 2007, fo 212 ro.

Cl. Viro D. V. Fort. Plempio, Lovanium.

Sæpius de Te tuáq. valetudine anxius cogitavi, et adhuc cogito,
Vir Cl. tuam enim mihi reddidit sapiens quidam Theologus, qui Te decumbere
mihi narravit, sed utinam citò convalescas. Pro tua gratias ago amplis-
simas : Ego quidem valeo, cum anno æt. 65. sed quid ultra sim habiturus,
nescio : ejusmodi vitæ necessariæ terminum solus ille novit summus rerum arbiter,
Deus Opt. Maximus. Climatericum annum facilè superavi, nec me
terruit ille, nec enim sum adeo meticulosus : Platonicorum deliria, et
Pythagoræ somnia certa mente contemno, et fortiter negligo. Non dum
editus est liber Viri Cl. D. Bochard, de paradiso terrestri. Bene sit Manibus
viri doctissimi D. Sinnichij : sed ægrè fero tantum opus imperfectum
remanere : ô molesta et acerba fata viris eruditis ! Petrus Petitus noster
vivit et valet : eum salutabo tuo nomine. Servet Deus optimum virum D.
Senguerdium.
Hîc habemus Sennertum novæ editionis, quinto tomo locuple-
tatæ Lugduni, ubi obijt Petrus Ravaud, quem olim nosti, Typogr. Lugd. Hîc
agitur de Editione quorumdam MS. Cl. viri Casp. Hofmanni : sed adeo lentè,
et tanta socordia agunt nostri Parisini, ut vix ab istis lucrionibus sperandum
aliquid mihi videatur. Vale, Vir Cl. et valetudinem tuam cura diligenter :
vive inquam, vale, et me ama. Parisijs, 12. Nov. 1666.

Tuus ex animo, G.P.


Correspondance complète de Guy Patin et autres écrits, édités par Loïc Capron. – Paris : Bibliothèque interuniversitaire de santé, 2018. – À Vopiscus Fortunatus Plempius, le 12 novembre 1666

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(Consulté le 18/04/2024)

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