L. latine 447.  >
À Johann Paul Felwinger,
le 29 décembre 1667

[Ms BIU Santé no 2007, fo 221 vo | LAT | IMG]

Au très distingué M. Johann Paul Felwinger, professeur de philosophie à Altdorf. [a][1]

Je vous remercie tout particulièrement pour ce que vous m’avez envoyé. Aussitôt que j’ai eu le livre et la lettre destinés au très distingué M. Chapelain, [2] je les lui ai portés et lui ai tenu bien des brillants propos à votre sujet ; j’espère qu’ils seront utiles et avantageux pour votre affaire ; en tout cas, il ne tiendra jamais à moi qu’un si beau dessein ne vous soit favorable. Bien des gens cherchent les bonnes faveurs de la cour, mais bien peu les obtiennent ; les courtisans les engagent tous à avoir bon espoir, mais ces obligeantes promesses aboutissent rarement. L’espérance du gain étreint quantité de gens, mais ceux qui approchent la cour, de si près que ce soit, ne parviennent pas même à toucher cette toison d’or du bout des doigts. Tous la convoitent, la recherchent avidement et l’appellent souvent en vain de leurs vœux insensés, quand ils ne la verront même jamais. [1][3] Cependant, M. Chapelain est un vieillard, il est travaillé par un calcul de la vessie et n’ose se faire tailler. [4] Puisse Dieu le délivrer de sa maladie et vous conserver, très distingué Monsieur, en bonne santé. Vale.

De Paris, le 29e de décembre 1667.

Vôtre, G.P.


a.

Brouillon autographe d’une lettre que Guy Patin a écrite à Johann Paul Felwinger, ms BIU Santé no 2007, fo 221 vo.

1.

Dans sa précédente lettre à Johann Paul Felwinger, le 4 novembre 1666, Guy Patin lui avait dit avoir bien fait de ne pas dédier à Louis xiv son livre contre les photiniens (Altdorf, 1664, v. note [2], lettre latine 410). Dans la demi-douzaine de thèses et de traités, politiques, théologiques ou philosophiques, qu’il a publiés en 1666 et 1667, je n’en ai trouvé aucun qu’il ait ouvertement dédié au roi de France ou à l’écrivain Jean Chapelain, alors âgé de 72 ans, mais membre influent de l’Académie française depuis sa fondation en 1634 (v. note [15], lettre 349).

Il est néanmoins permis de penser que, par l’intermédiaire de Patin, Felwinger envoyait l’un de ses livres récents à Chapelain avec une lettre de compliments, dans l’espoir d’obtenir une pension royale ; à l’instar d’Hermann Conring, qui y était précédemment parvenu en dédiant à Chapelain la 3e édition de son livre de Habitus corporum Germanicorum causis [sur les raisons de la Conformation du corps chez les Allemands] (Helmstedt, 1666, v. note [3] de sa lettre datée du 14 mai 1666).

Dans le violent orage provoqué par les déboires de Carolus, et plus que jamais sceptique sur les intrigues des courtisans, Guy Patin ne cachait pas à son ami les faibles chances qu’il avait d’obtenir quelque faveur que ce fût, venant du roi ou de son ministre académicien, Jean-Baptiste Colbert.

s.

Ms BIU Santé no 2007, fo 221 vo.

Cl. viro D. Io. Paulo Felwingero, Philosophiæ Prof. Altorphium.

Pro ijs quæ ad me misisti gratias ago singulares. Librum et Epistolam
quamprimum habui statim detuli ad Cl. virum D. Chapelain, apud quem de Te
præclara multa protuli : quæ utinam fructuosum et utile aliquid pariant,
in rem tuam : nec unquam per me stabit quin tale consilium Tibi succedat :
Aulæ fortunam quærunt quammulti, sed eam paucissimi assequuntur : aulici
ipsi jubent omnes bene sperare, sed rarò succedunt gratiosæ istæ pollicitationes :
quamplurimi spe lucri capiuntur, qui ad eos accedunt etiam proximè, qui tamen
nequidem summis digitis attingunt vellus istud aureum, ab omnibus concupitum,
expetitum et sæpe frustra inanibusque votis expectatum, imò nec vident. Sed Dominus Chape-
lain senex est, calculo vesicæ laborat, ad cujus sectionem non audet agitare. sese accingere.
Deus Te servet, Vir Cl. et eum à morbo liberet. Vale. Paris. 29. Dec. 1667. Tuus G.P.


Correspondance complète de Guy Patin et autres écrits, édités par Loïc Capron. – Paris : Bibliothèque interuniversitaire de santé, 2018. – À Johann Paul Felwinger, le 29 décembre 1667

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(Consulté le 19/04/2024)

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