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Consultations et mémorandums (ms BIU Santé  2007) : 2  >

[Ms BIU Santé no 2007, fo 236 ro | LAT | IMG]

Flux de ventre mésentérique
[consultation, 1644] [a][1][2]

Ce flux de ventre, qui a indisposé le malade jusqu’à ce jour, est sans doute mésentérique, c’est-à-dire que le siège d’une humeur qui s’écoule tous les jours est le mésentère. [3] Voilà où, depuis longtemps, s’est accumulée une ordure dont la nature est certes diverse, étant un mélange d’humeurs apparentées, bilieuse, [4] pituiteuse [5] et mélancolique. [6] Écrasée par l’abondance de cette impureté, la nature s’en est débarrassée par l’intestin, d’où provient la diarrhée. La pesanteur prolongée de cette impureté en a jusqu’à ce jour entretenu le flux ; la chaleur s’est augmentée de la putréfaction de l’ordure, et il est devenu purulent ; embrasés par la puanteur de cette mauvaise humeur, les aliments se sont gâtés et, étant pourris, ils ont nourri à profusion la diarrhée ; de sorte qu’elle ne peut être réprimée tant que cette intempérie chaude n’aura pas été complètement écartée et tempérée par le mésentère et les autres viscères nutritifs ; et ce, aussi longtemps qu’on n’aura pas cessé d’en laisser croître l’ardeur. La manière de remédier doit viser l’un et l’autre objectifs, et les médicaments qu’on emploiera désormais doivent aussi viser ce but. Il faut donc saigner des deux bras une fois, une autre, une troisième, et peut-être plus souvent encore, en tenant compte des forces du malade. [7] Les intestins doivent être nettoyés : non seulement par le lavement, [8] qui doit être doux, uniquement composé tantôt d’une décoction d’orge sans miel, [9][10] tantôt de deux onces de miel rosat ; [1][11] mais aussi en faisant boire une potion préparée avec balle, [12] rhubarbe, [13] moelle de casse ; [14] laquelle est à répéter à l’identique jusqu’à ce que les intestins aient été entièrement purgés[15] Il faut fuir les cathartiques plus puissants, [16] principalement les métalliques, car ne sont-ce pas des remèdes abominables ? [2][17] Leur emploi augmenterait cette chaleur qui est responsable de la diarrhée. Si s’ajoute à tout cela un régime alimentaire conforme à la maladie, [18] réfrigérant et humidifiant, prescrivant au malade qu’il s’abstienne d’aliments bouillis, mais qu’il se nourrisse plutôt de bouillons de viande assaisonnés avec de la chicorée blanche et de l’oseille, [19][20] nous ne doutons pas que son mal s’apaisera et qu’il sera délivré de ce pénible flux de ventre, [21] surtout si Dieu se montre favorable aux efforts déployés pour remédier. Voilà ce que nous souhaitons, et que l’issue soit heureuse et conforme à nos vœux. Si vous nous écoutez, le malade se passera de tous ces analeptiques et cardiaques, [22][23] de quelque façon qu’on les ait préparés, car ils n’ont d’aucun intérêt pour traiter sa maladie et en augmenteront, au contraire, la cause. Les aliments renforceront la nature et une fois fortifiée, elle libérera des symptômes et du mal.

Le 18e de janvier 1644. [3]

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a.

Manuscrit autographe de Guy Patin ; Pimpaud, Document 2, pages 16‑18.

1.

« Il y a ordinairement deux sortes de miel dans les boutiques ; savoir, le miel commun et le miel mixtionné ou médicinal. Celui-ci est de quatre sortes : savoir, le violat [mêlé à des violettes], l’anthosat [à du romarin], le rosat [à des roses] et le mercurial [à des mercuriales]. Il s’en trouve bien d’autres encore dans les antidotaires, lesquels se doivent préparer sur-le-champ, si la nécessité le requiert » (Chomel).

Jean-Baptiste Rivet (Dictionnaire raisonné de pharmacie chimique, théorique et pratique, 1803-1805) a donné la composition du miel rosat : roses rouges onglées (égratignées) et séchées (500 grammes), calices de roses récentes (250 grammes), eau bouillante (2 litres) et miel blanc (3 kilogrammes). Le sirop résultant était clarifié avec du blanc d’œuf et filtré. « Détersif, légèrement astringent, on l’emploie dans les gargarismes, dans les injections et dans les lavements, lorsqu’il est besoin de resserrer un peu le ventre. »

2.

L’abomination métallique qu’anathématisait Guy Patin visait bien sûr, en tout premier, l’antimoine sous toutes ses formes.

3.

Texte autographe non signé, où rien ne permet de douter qu’il s’agisse bien d’une consultation de Guy Patin, dont le destinataire est inconnu.

Quant au diagnostic, v. note [4], lettre 69, pour les nombreuses inflammations abdominales auxquelles pouvait correspondre ce qu’on appelait alors un flux mésentérique.

s.

Ms BIU Santé 2007, fo 236 ro.

Alvi ille fluor qui malè habet in hunc usq. diem ægrotantem, haud
dubiè mesentericus est, id est, humoris qui effluit quoq. sedes die, sedes,
mesenterium est ; in quo jamdudum congesta illuvies, et illa quidem
varia, conflata scilicet ex congrege humore, bilioso, pituitoso et
melancholico : Natura oppressa copiâ impuritatis istius sese expedivit
per alvum, unde profluvium istud : perennis gravatio istius impuritatis
hactenus profluvium fovit : ex putredine illuviei accensus calor,
et ille σηπεδονωδης ; nidore cacochymiæ istius afflata edulia cor-
rumpuntur, corrupta suppeditant pabulum isti profluvio : ut illud
non antè possit compesci quàm intemperies ista calida mesenterio,
ceterisq. nutritijs viscerib. altè reposta, temperata fuerit, et illius
fomes subductus. Medendi ratio utrumque scopum spectare debet :
et remedia quæ in posterum usurpabuntur, eò etiam dirigi debent.
Propterea semel, iterum, tertiò, sæpius fortassis detrahendus sanguis
ex utroq. brachio, habita ratione virium : eluenda alvus non tamen
enemate, eóq. blando, quandoq. parato dumtaxat ex decocto hordei
sine melle, quandoq. mellis rosacei uncijs duabus : sed et potio
quoq. exhibenda, medicata folliculis, rheo, medulla cassiæ :
repetenda et illa identidem usquedum prorsus alvus fuerit expur-
gata. Cathartica vehementiora fugienda, præcipuè metallica,
remediáne an piacula ? sanè, eorum usu accederetur calor ille
istius profluvij auctor. His remedijs si accesserit victus ratio
consentanea morbo, refrigerans et humectans, ut abstemius sit
æger, et elixis potiùs vescatur cibis, jusculis carnium saporatis
cichorio albo et oxalide, non dubitamus quin lenetur æger
tandem et liberetur molesto hoc alvi profluvio, maximè si
medendi labori Deus aspiret : atq. id quidem optamus : optatis
succedat eventus. Si nos auditis, carebit æger analepticis istis
cardiacisq. omnibus quovis modo paratis : etenim hæc nullius sunt momenti
ad curationem morbi ; sed et morbi causam adaugent ; alimento natura
firmabitur, firmata seipsa liberabit et symptomata et morbo.

18. Ianu. 1644.


Correspondance complète de Guy Patin et autres écrits, édités par Loïc Capron. – Paris : Bibliothèque interuniversitaire de santé, 2018. – Autres écrits. Consultations et mémorandums (ms BIU Santé 2007) : 2

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(Consulté le 18/04/2024)

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