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Ana de Guy Patin :
Borboniana 8 manuscrit  >

Ms BnF Fr 9730 [page 54] [1]


1.

« qui mesuraient et examinaient tout selon les règles de la raison humaine […]. Pour bien entendre la religion chrétienne ».

Je n’ai pas trouvé ces assertions latines dans saint Paul. Leur soulignement dans le manuscrit y est probablement (comme ailleurs) une trace laissée par les éditeurs du Borbonina imprimé de 1751. À l’instar de maints autres, cet article, quoique fort éloquent en faveur de la foi chrétienne, n’a pas été conservé dans leur ouvrage.

2.

Cinq citations du Nouveau Testament se succèdent ici (avec de très minimes altérations par rapport au texte de la Vulgate).

  1. Conclusion de l’Évangile de Jean (20:30) :

    « Jésus a accompli encore bien d’autres signes en présence de ses disciples, qui ne sont pas écrits dans ce livre. Ceux-là l’ont été pour que vous croyiez que Jésus est le Fils de Dieu ; et qu’en croyant, vous ayez la vie en son nom. »

  2. Dernier verset de l’appendice du même Évangile (21:25) :

    « Jésus a accompli encore bien d’autres actions : si on les relatait en détail, le monde même ne suffirait pas, je pense, à contenir les livres qu’on en écrirait. »

  3. Épître de Paul aux Romains (12:3) :

    « on ne doit pas s’estimer plus qu’il ne faut s’estimer, mais s’estimer avec modestie. »

  4. Première Épître de Paul aux Corinthiens (1:18‑19, 21:23 et 27) :

    « Le langage de la croix est en effet folie pour ceux qui se perdent ; mais pour ceux qui se sauvent, pour nous, il est puissance de Dieu. Car il est écrit : “ Je réprouverai la sagesse des sages, et l’intelligence des intelligents ”, {a} etc.

    C’est par la folie du message qu’il a plu à Dieu de sauver les croyants. Oui, tandis que les Juifs demandent des signes et que les Grecs sont en quête de sagesse, nous prêchons, nous, un Christ crucifié, scandale pour les Juifs et folie pour les païens, etc.

    Mais ce qu’il y a de fou dans le monde, voilà ce que Dieu a choisi, pour confondre les esprits forts. » {b}


    1. Isaïe 29:14.

    2. V. seconde notule {a}, note [1] du Faux Patiniana II‑4.

  5. Ibid. (2:6‑8) :

    « C’est bien de sagesse que nous parlons parmi les parfaits, et non d’une sagesse de ce temps ni des princes de ce temps, qui sont voués à la destruction ; mais nous parlons de la sagesse de Dieu, qui est enfouie dans le mystère, celle que dès avant les siècles, Dieu a par avance destinée pour notre gloire, celle qu’aucun des princes de ce temps n’a connue car, s’ils l’avaient connue, ils n’auraient pas crucifié le Seigneur de la gloire. »

3.

En 1638, « deux cents ans » renvoyaient à la prise de Constantinople par les Ottomans (le « diable »), en 1453 (v. note [3], lettre 929) ; et non pas à la Réforme luthérienne (Confession d’Augsbourg en 1530, v. note [20], lettre 77).

4.

La ville épiscopale de Lisieux, en Normandie (Calvados), est à distinguer du collège de Paris qui portait son nom, parce qu’un de ses évêques l’avait fondé (v. note [46], lettre 176).

Le Borboniana résumait la carrière de Paul Boudot (vers 1571-1635), prélat servant la Couronne d’Espagne : natif de Poligny, petite ville de Franche-Comté (dans l’actuel département du Jura), entre Arbois et Lons-le-Saunier (mais d’autres sources le disent natif de Morteau, à 90 kilomètres à l’est de Poligny), il fut successivement évêque de deux villes appartenant alors à l’Artois espagnol, Saint-Omer (v. note [8], lettre 55) en 1619, et Arras (v. note [1], lettre 49) en 1626. Docteur en théologie de Sorbonne, gradué en 1604, il avait précédemment été recteur de l’Université (v. note [3], lettre 595), sans doute après son baccalauréat, obtenu en 1601.

V. notes :

5.

V. note [51] du Borboniana 6 manuscrit pour Nicolas i Potier, seigneur de Blancmesnil, président au mortier du Parlement de Paris (reçu en 1578).

Nicolas i de Neufville (Paris 1543-Rouen 1617), sieur de Villeroy, de confession catholique, fut fidèle à la Couronne de France. Il a occupé divers secrétariats d’État (finances, affaires étrangères, guerre), de 1559 à 1611, avant de devenir principal ministre de la régente Marie de Médicis, à la suite de Sully, dont il avait favorisé la disgrâce. V. notes [6], lettre 104, pour son fils unique, Charles, et [5], lettre 133, pour son petit-fils, Nicolas ii.

Nicolas i est auteur des :

Mémoires servant à l’Histoire de notre temps, par messire Nicolas de Neufville, seigneur de Villeroy, conseiller d’État et secrétaire des commandements des rois Charles ix, Henri iii, Henri iv et de Louis xiii, à présent régnant. {a}

L’épisode relaté à la page 143 dans l’Apologie et Discours de Monsieur de Villeroy, pour montrer la peine qu’il a prise de faire la paix entre le roi et Monsieur de Mayenne, {b} et de sa continuelle poursuite à la pacification de nos misérables troubles. À M. de Bellièvre. {c} Il s’est déroulé en 1590, au plus fort des combats entre Henri iv, roi calviniste, mais légitime, de France depuis août 1589 (assassinat de Henri iii), et la Ligue catholique, qui occupait Paris et venait d’essuyer la défaite d’Ivry (14 mars) :

« Voyant donc que ledit légat {d} nous était si contraire, je dis au sieur cardinal de Gondi, {e} lequel je visitais souvent, que je m’en voulais aller ; et de fait, je ne voulus accepter une proposition dudit duc, {b} qui me fut alors envoyée, ni faire le serment d’icelui, que M. de Lyon, {f} lequel avait accepté la garde des sceaux, faisait prêter à tous ceux que ledit duc avait choisis et retenus du Conseil général de l’union, {g} lequel il avait été conseillé de supprimer ; et fusse parti à l’heure même, sans la prise de Monsieur le président de Blancmesnil, {h} lequel je ne voulais abandonner en cette nécessité, qui était certes très périlleuse. Dieu me fit cette grâce que si je n’eus le crédit de garantir sa bourse, je ne fus du tout inutile à sa vie, laquelle était fort menacée de plusieurs, {i} qui avaient lors plus de puissance et autorité en ladite ville que n’avait la justice, ni mes continuelles sollicitations et supplications, lesquelles durèrent deux à trois mois ; que si le président n’eût mis la main à la bourse, et payé sept ou huit mil écus, qui tournèrent au profit d’un particulier, comme il se résolut de faire à la fin, il n’en fût pas sorti autrement. »


  1. Paris, Pierre Chevalier, 1622, in‑4o de 514 pages.

  2. Charles de Lorraine, duc de Mayenne et comte du Maine (v. note [6], lettre 445), alors chef de la Ligue.

  3. Le chancelier Pomponne i de Bellièvre (v. note [32], lettre 236).

  4. Enrico Caetani (1550-1599), cardinal en 1585, légat du pape Sixte v en France (septembre 1589-août 1590), avait pour mission d’y favoriser (avec l’aide de l’Espagne) la désignation d’un souverain catholique.

  5. Pierre de Gondi (1532-1616), évêque de Paris en 1569, cardinal en 1587.

  6. Ardent ligueur, Pierre de Saint-Priest d’Épinac (1540-1599), archevêque de Lyon en 1574, portait alors le titre usurpé de garde des sceaux de France.

  7. La Ligue.

  8. Nicolas i Potier de Blancmesnil (v. note [51] du Borboniana 6 manuscrit), président au Parlement de Paris et intimement attaché au parti de Henri iv, s’était montré plus gai que de coutume au lendemain de la bataille d’Ivry, ce qui avait suffi à le faire arrêter. Après la dissolution de la Ligue, il reprit sa brillante et très longue carrière de magistrat.

  9. Passage cité par le Borboniana.

6.

Auratius Poeta Regius, « Dorat, poète du roi » (ou « de Sa Majesté »), était la signature de Jean Daurat. {a} Aux côtés de Joseph Scaliger ou de Joachim Du Bellay, {b} Pierre Ronsard {c} fut son plus célèbre élève. Son maître l’inspira et l’épaula pour fonder, vers 1550, la Brigade, ensuite devenue la Pléiade, qui revigora l’art poétique en France.

7.

V. note [7] du Naudæna 1 pour Lodovico Castelvetro, son édition de la Poétique d’Aristote (en italien, Vienne, 1570), où il a rudement critiqué Virgile (v. note [40] du Borboniana 7 manuscrit), son mépris du latin qui le menait à ne publier qu’en italien et en grec, et ses querelles littéraires, avec Annibal Caro, et religieuses, avec l’Inquisition ; mais tous ses biographes le disent mort (en 1571) à Chiavenna (Chiavenne), qui appartenait alors à la fédération calviniste des Grisons, et non pas à Genève (sur l’autre versant du massif alpin).

8.

Catherine d’Aragon (Alcala de Henares 1485-Kimbolton 1536), infante de Castille et d’Aragon, était la fille cadette des souverains catholiques, Ferdinand ii, roi d’Aragon, et d’Isabelle ire, reine de Castille (v. infra note [18]). Elle eut une vie conjugale tourmentée :

Né en 1537 du 3e mariage d’Henri viii avec Jeanne Seymour, le roi Édouard vi, premier souverain calviniste d’Angleterre, a régné de 1547 à sa mort, en 1553, plus probablement par tuberculose que « par empoisonnement », ex veneno.

La catholique Marie Tudor (morte en 1558) lui succéda sur le trône anglais et se maria, en 1554, avec le fils aîné de Charles Quint, qui devint le roi Philippe ii d’Espagne en 1556 par l’abdication (et non le décès) de son père. Les « hérétiques » anglais (anglicans et calvinistes, v. note [42] du Borboniana 10 manuscrit) ont donné à Marie Tudor le surnom de Bloody Mary [Marie la Sanglante] à cause de son acharnement à les persécuter.

V. infra note [22] pour un retour du Borboniana 8 manuscrit sur les unions des couronnes espagnoles et britanniques au xvie s.

9.

Poemata [Poèmes] de George Buchanan (Saumur, 1621, v. note [25] du Borboniana 2 manuscrit), Epigramma, livre ii, page 152 :

« Je suis Marie, née d’un père désagréable, épouse d’un homme disgracieux, détestée du ciel et atroce peste de ma patrie. Nul fléau ne m’a épargnée et, pour seule consolation, ma laideur a fidèlement garanti la protection de ma vertu. »

10.

Joseph Scaliger, Ép. lat. livre i, début de la longue lettre iii, adressée à Mamert Patisson, {a} datée du 12 avril [1582], sans lieu (Leyde, 1627, pages 69‑86) : {b}

« [Voici de nouveau que vous me pressez en réclamant mes sept livres de Emendatione temporum : {c} cet ouvrage est déjà presque achevé, et attend que vous y appliquiez bientôt tout votre soin. Je me consacre désormais tout entier à en établir la copie définitive ; mais pendant une heure et demie, mon élan a été interrompu par cette Apologia de je ne sais quel misérable petit homme, {d} que vous m’avez envoyée. Grands dieux, comme ce libelle, que vous avez, bien entendu, transmis à votre ami, est étonnant et saint ! Dans cette boulangerie, {e} maints hauts personnages ont rogné mon nom ; mais jusqu’à ce jour, nul n’en était sorti à qui répondre eût moins importé à mon honneur et à mon rang.] Si on m’avait ordonné de me pendre, j’aurais < vraiment > déploré apo axiou xulou. {f} Tel qu’il se présente aujourd’hui, je n’ai certes pas à me plaindre de mon destin : hormis cet ignorant, je n’ai pas d’ennemi, et celui-là tombe à point ; {g} mais je me demande s’il est plus digne de raillerie que de pitié. Du reste, je serais étonné qu’à lui tout seul, ce modeste esprit parvînt à troubler la république des lettres, etc. » {h}


  1. Mamert Patisson (Mamertus Patissonius), imprimeur parisien natif d’Orléans, mort en 1600 ou 1602, était lié à la famille des Estienne : il avait débuté (de 1569 à 1574) comme correcteur dans l’imprimerie de Robert ii Estienne, frère aîné de Henri ii, le Grand Estienne (v. note [31], lettre 406), qui portait le même prénom que leur père (v. note [37], lettre 659) ; trois ans après la mort de son patron (1571), Patisson avait épousé sa veuve, Denise Barbé, et dirigé l’imprimerie familiale. Fin connaisseur des lettres grecques et latines, il a mis au jour plusieurs ouvrages de Scaliger.

  2. J’ai ajouté le début de la lettre (entre crochets) pour éclairer l’extrait transcrit dans le Borboniana :

    Ecce iterum urges me, et libros meos septem de Emendatione temporum flagitas : quod opus jam affectum propediem diligentiam tuam exspectat. Itaque adeo totus nunc sum in describendo. Sed impetum meum sesquihora repressit Apologia homuncionis nescio cujus, quam ad me misisti. Dii magni, horribilem et sacrum libellum, quem tu scilicet ad tuum sodalem misisti ! Multi in eo pistrino alti meum nomen arroserunt. Nemo tamen hactenus exstitit, cui respondere minus intersit et existimationis et loci mei.

  3. Ouvrage chronologique de Joseph Scaliger « sur la Correction des temps » (Paris, Mamert Patisson, 1583, v. note [53] du Borboniana 3 manuscrit), dont le nombre final n’a pas été de sept, mais de huit livres (achevé d’imprimer daté du 1er août 1583).

  4. Mathematica pro Lucano Apologia adversus Iosephum Scaligerum. Francisco Insulano Authore. Ad Renatum Biragum cardinalem illustrissimum Galliarum cancellarium.

    [Apologie mathématique {i} pour Lucain {ii} contre Joseph Scaliger. Par Franciscus Insulanus. Adressée au cardinal René de Birague, {iii} illustrissime chancelier de France]. {iv}

    François de l’Isle (Franciscus Insulanus) n’est connu que pour sa querelle avec Scaliger. Je n’ai trouvé d’autres renseignements sur lui que dans le court article que lui ont consacré Les Bibliothèques françaises de La Croix du Maine… {v} (tome premier, pages 227‑228), avec cette note de Bernard de La Monnoye : {vi}

    « Lorsqu’en 1579, le commentaire de Joseph Scaliger sur Manile vint à paraître, {vii} et où il relève avec hauteur l’ignorance de Lucain {vii} en astronomie, François de l’Isle, procureur au Parlement de Paris, homme qu’on n’aurait cru ni poète ni astronome, entreprit de se montrer l’un et l’autre dans une Apologie en vers latins, qu’en 1582 il publia pour Lucain contre Scaliger. La vérité est que les vers en étaient misérables, que les fautes contre la quantité {ix} et la diction y fourmillaient. Les intelligents néanmoins prétendent que, du côté de l’astronomie, Scaliger y était fortement poussé ; {x} ce qui est si vrai que celui-ci, nonobstant la réponse méprisante qu’il y fit dans son épître à Mamert Patisson, ne laissa pas sur la fin de passer condamnation {xi} en quelques endroits. »

    1. C’est-à-dire astronomique (et astrologique).

    2. Auteur du poème historique intitulé La Pharsale, sur la guerre civile entre César et Pompée (v. note [33], lettre 104).

    3. V. note [35], lettre 327.

    4. Paris, Ioannes Richerius, 1582, in‑4o de 25 pages, texte entièrement rédigé en vers latins.

    5. Paris, 1772, v. notule {e}, note [56] du Borboniana 2 manuscrit.

    6. V. notule {b}, note [7], lettre 977.

    7. Paris, 1579, v. note [39] du Borboniana 3 manuscrit.

    8. Insulanus a exposé (en prose) ses griefs contre Scaliger au début de son Apologia pour Lucain :

      1. Scaliger commentariorum in Manilium pag. 48. Lucanum adeo Mathematices expertem fuisse scripsit, ut sub Tropico perpetuum meridiem, ac proinde illic umbras nunquam converti putavit [À la page 48 de ses commentaires sur Manilius, Scaliger a écrit que l’ignorance de Lucain en mathématiques allait jusqu’à penser que l’heure de midi est perpétuelle sous les tropiques, et que donc la nuit n’y tombe jamais] ;

        Scaliger, à ladite page 48 de son commentaire sur les Astronomiques de Manilius, a en effet étayé sa virulente critique de plusieurs citations tirées de Lucain ;

      2. affingit Lucano Tropicos illum circulos, reliquasque Zodiaci partes ita mobiles fecisse, ut eas ad Planetam, non Planetam ad eas promoverit [il attribue à Lucain d’avoir tenu les tropiques pour tournants et les autres parties du zodiaque pour immobiles, en sorte qu’il les faisait se déplacer vers la planète, et non l’inverse] ;

      3. Lucanum mixta aliquatenus puncta Signorum (ut vel manifestissime sunt) dicentem non perfert, atque inde colligit illum unum eundemque solstitialem diem continuasse per duo Signa, Cancri puta et Leonis [il conteste Lucain disant que les points du zodiaque se chevauchent quelque peu (comme ils le font très manifestement), pour en déduire qu’un seul et même jour solsticial est placé sous deux signes, par exemple ceux du Cancer et du Lion] ;

      4. Lucanum incusat, uno eodemque tempore, in Cancro simul, et Capricorno Solstitium, ac rursus sub utroque puncto Cancri et Capricorni, fontes Nili statuisse [il accuse Lucain d’avoir établi que le solstice est à la fois dans le Cancer et dans le Capricorne, et en même temps que les sources du Nil se situent sous les deux points du Cancer et du Capricorne] ;

      5. Lucanum, stationem aliumque habitum Planetarum solaribus imputantem radiis, irrisit [il se moque de Lucain imputant aux rayons du Soleil l’immobilité et tout autre comportement des planètes] ;

      6. Sextum caput est de conviciis, quibus […] toto commentariorum decursu Scaliger indignius tantæ maiestatis viro insultat [le sixième chapitre touche aux insultes dont Scaliger, tout au long de son discours (…), accable fort indignement un homme d’un si grand renom].

    9. Métrique poétique.

    10. Malmené.

    11. De corriger ses livres de Emendatione temporum.

  5. Au sens de boutique où on pétrit du pain, mais ici avec la farine et le fiel de la jalousie et de la médisance : soit, dans l’esprit vindicatif et mordant de Scaliger, le monde académique et savant qui critiquait amèrement les ouvrages des plus talentueux qu’eux.

  6. Grec pour « le défaut d’arbre qui en fût digne », à rapprocher de l’adage no 921 d’Érasme, Supspendio deligenda arbor [Je dois choisir un arbre pour me pendre], prononcé par qui se trouve dans une situation révoltante et intolérable.

    J’ai ajouté entre chevrons l’adverbe sane [vraiment] qui manque à la transcription du Borboniana. Scaliger feignait bien sûr d’outrer son désespoir.

  7. Volupté du carnassier qui flaire une proie facile à dépecer.

  8. V. infra note [11], pour des informations complémentaires sur Insulanus et ses ouvrages.

Guy Patin a mentionné cette épître de Scaliger et sa querelle avec Insulanus dans sa lettre du 8 décembre 1637 à Claude ii Belin (v. sa note [6]) ; c’est-à-dire sans doute au moment où Nicolas Bourbon lui en a raconté l’histoire.

Scaliger prit la peine de répondre par une Epistola adversus barbarum, ineptum et indoctum poema Insulani, patroniclientis Lucani [Lettre contre le poème barbare, inepte et ignare d’Insulanus, avocat de Lucain] (Paris, Mamertus Patissonius, 1582, in‑8o de 20 pages) et en a parlé dans ses Lettres françaises.

11.

Francisci Insulani ad Josephi Scaligeri Epistolam Responsio. Atque interea de exacta anni emendatione. Ad illustrissimum virum Philippum Huraltium Chevernium Franciæ procancellarium,

[Réponse de Franciscus Insulanus à la lettre de Joseph Scaliger. Avec, au passage, ce qu’il en est de l’exacte correction de l’année. {a} Adressée à l’illustrissime M. Philippe Hurault de Chiverny, {b} chancelier de France] : {c}

« Le ciel, dit la rumeur, a attaqué les gigantesques Scaliger, et te voici, le plus jeune, qui t’élèves contre le ciel. Je ne me glorifie que d’une chose : c’est que le ciel, c’est que ma piété aient fait de moi ton ennemi. » {d}


  1. Les cinq dernières pages du poème sont consacrées à la dispute sur la durée exacte de l’année : Insulanus y justifie la réforme grégorienne du calendrier que critiquait Scaliger, calviniste fort attaché au calendrier julien (vieux style, v. note [12], lettre 440) ; je n’y ai pas vu d’attaque directe contre sa conversion à la Réforme (en 1567, v. note [2] du Grotiana 1).

  2. V. note [4], lettre 589.

  3. Paris, Ioannes Richerius, 1583, in‑4o de 22 pages, texte à nouveau entièrement rédigé en vers latins ; le « commentaire de Joseph Scaliger sur Lucain » est son Epistola aversus barbarum ineptum et indoctum poema Insulani… [Lettre contre le poème barbare, inepte et ignare d’Insulanus…] (Paris, 1682), qui est citée dans la dernière section de la note [10] supra.

  4. Outre sa conversion au calvinisme, Insulanus reprochait à Scaliger son incompétence en mathématiques, avec cette strophe particulièrement rude (page 8) :

    Totus in aucupiis vocum nil Scaliger extra
    Limen Grammaticum spiras : De nomine nomen
    Rimari, de litterula tentare volumen,
    Et quoquoversum scholiis perfundere chartas,
    Hæ tibi erunt artes : Cœlum et mysteria tanti
    Arcani, Josephe, tibi interdicta memento
    .

    « Te consacrant tout entier à pourchasser les mots, Scaliger, tu n’aspires à rien qui outrepasse les frontières de la grammaire. Fouiller un nom pour comprendre son sens, consacrer tout un volume à examiner une lettre minuscule, couvrir des pages entières de scolies en tous sens : voilà ton métier. Souviens-toi, Joseph, que le ciel et les mystères d’un si grand secret te sont interdits ! »


Dans la marge, Nicolas Bourbon (ou son transcripteur) a ajouté : « J’ai ces deux petits livres en ma possession ». Aujourd’hui, la Bibliothèque interuniversitaire numérique de la Sorbonne (NuBIS) (consultée le 26 janvier 2020) satisfait généreusement la curiosité de tous : outre les deux libelles d’Insulanus contre Scaliger, elle met en ligne ses vers intitulés In urbem Reditus [Retour en ville (à Paris)] (1583), et ses Poemata [Poèmes] (1576).

12.

V. note [2], lettre 16, pour Pierre iv Séguier, chancelier de France en charge depuis 1635. Il appartenait à la noblesse de robe, mais le Borboniana prenait un malin plaisir à rappeler sa souche roturière, et voulait détacher sa famille des plus aristocratiques Séguier dont a parlé le Grand Dictionnaire historique de Louis Moréri : {a}

« Noble et ancienne famille originaire du pays de Quercy, < qui > a été divisée en plusieurs branches établies à Cahors, à Toulouse et à Paris. Celle de Cahors a eu des sénéchaux du pays de Quercy et des chanceliers d’Armagnac. Celle de Toulouse a produit des juges-mages de cette ville et des présidents à mortier au parlement de Languedoc. {b}

Celle de Paris a été la plus féconde en grands magistrats et en personnes illustres, et a donné un chancelier à la France, cinq présidents à mortier, onze conseillers et deux avocats généraux au Parlement de Paris, et sept maîtres des requêtes.

  1. Gérard Séguier, fils d’Artaud, seigneur de Saint-Geniez, est le premier qui, sous le règne de Louis xi, vint s’établir à Paris, où il fut conseiller au Parlement en 1469. Il mourut en 1489 et laissa à Marguerite de Vaudetar, son épouse, quatre fils et trois filles.

  2. Louis Séguier l’aîné, avocat du roi en la Chambre des comptes, et puis conseiller au Parlement, mourut vers l’an 1533.

  3. Barthélemy, le troisième, lieutenant général du bailliage de Chartres, a fait la branche des seigneurs de la Verrière.

  4. Le dernier, nommé Jacques, contrôleur général des guerres, etc., mourut en 1535 et a fait la tige des seigneurs de Charmoye et de Gloise de Brie.

  5. Nicolas Séguier, le second des fils de Gérard, continua la postérité des aînés et mourut le 22 septembre 1533, ayant eu de Marie Le Blanc trois fils et deux filles. […]

  6. Nicolas Séguier, second fils de Nicolas, a fait la branche des seigneurs de Saint-Cyr et du Plessis, féconde en doctes magistrats.

  7. L’aîné des trois, Pierre Séguier, premier du nom, fut président à mortier au Parlement de Paris, et l’une des plus brillantes lumières du temple des lois, comme l’appelle Scévole de Sainte-Marthe dans l’éloge qu’il lui a consacré parmi ceux des doctes Français. » {c}


    1. Édition de Paris, 1707, tome iv, pages 587‑588 (v. note [1] du Faux Patiniana II‑7), dont j’ai clarifié la mise en page.

    2. Juge-mage : « titre qu’on donne en plusieurs provinces du royaume, comme à Toulouse, au lieutenant du sénéchal » (Trévoux).

      Voilà pour les « seigneurs de Languedoc et de Guyenne » dont le Borboniana reconnaissait la noblesse.

    3. Popoff (no 150) commence les sept pages de l’article qu’il a consacré au Séguier de Paris avec ce Pierre i : avocat général (1550), puis président au mortier du Parlement de Paris (1554), mort en 1580, âgé de 76 ans. Pour ses modestes ascendances, Popoff les fait remonter à :

      « Étienne Séguier, originaire de Quercy, seigneur de l’Étang-la-Ville près de Saint-Germain-en-Laye, valet de chambre-apothicaire des rois Charles vii et Louis xi, mourut en 1465 et fut enterré dans l’église des Cordeliers de Saint-Pourçain, ville de la généralité de Moulins, élection de Gannat. Il avait épousé Marguerite Guimarde, morte le 5 mars 1483 et enterrée dans le prieuré de ladite ville de Saint-Pourçain. »

      Pour Popoff, Gérard ou Girard Séguier, le premier magistrat parisien de la famille, reçu vers 1469, était fils soit d’Étienne (page 192), soit d’Artaud (page 193, mais introuvable ailleurs).

      Saint-Pourçain-sur-Sioule et Gannat sont deux petites villes du Bourbonnais (actuel département de l’Allier), au sud de Moulins (v. note [20], lettre 223).

      V. note [9], lettre 48, pour Scévole i de Sainte-Marthe et ses Elogia, dont Guillaume Colletet a dédié la traduction française au Chancelier Séguier… L’éloge (Paris, 1644, livre iii, pages 276‑280) de son arrière-grand-père, Pierre i Séguier, n’est qu’une flatteuse expansion de l’original latin (Poitiers, 1606, pages 124‑126), dénuée d’intérêt généalogique.


Il existe une ressemblance frappante entre le présent article du Borboniana et l’historiette de Tallemant des Réaux intitulée Le Chancelier Séguier (tome i, pages 611‑616), dont l’ascendance est ainsi décrite :

« Les Séguier de Paris ne viennent nullement des Séguier de Languedoc : ils viennent d’un procureur qui était grand-père du feu président Séguier. […] Le chancelier fut si étourdi, étant garde des sceaux, que de faire ôter la tombe de ce procureur, qui était à Saint-Séverin ou à Sainte-Opportune, à cause qu’il y avait une inscription. »

Antoine Adam, l’éditeur des Historiettes, convient des incertitudes qui planent sur les premiers Séguier de Paris, mais se hasarde à prénommer Blaise celui qui fut procureur au Châtelet de Paris.

Une note du même A. Adam (page 1218) parle de l’épitaphe du susdit procureur à Saint-Séverin, {a} « que l’on en a fait ôter depuis » :

« Il est très probable que Tallemant […] commet des confusions entre ces divers Séguier ; mais s’il se trompe, c’est avec ses contemporains. Ils ont parlé de cette inscription et de son enlèvement. L’Avertissement à Cohon {b} dit : “ Nous voyons le petit-fils d’un procureur du Châtelet tenir la place d’un chancelier de France. Quoiqu’il ait fait ôter de nos jours l’épitaphe de Pierre Séguier, son grand-père, il n’en est pas plus à estimer. Elle était sous le charnier {c} de Saint-Séverin, à l’entrée de la petite porte, à main gauche. ” On lit aussi dans le Catalogue des partisans, {d} sous le nom de Séguier : “ Son bisaïeul était apothicaire, son aïeul, procureur, a été enterré sous le charnier de Saint-Séverin, où était son épitaphe, qui a été retirée par force. ” »


  1. V. note [11], lettre 96.

  2. Paris, 1649, v. note [10], lettre 165.

  3. « Galerie qui est ordinairement autour des cimetières, au-dessus de laquelle on mettait autrefois les os décharnés des morts […]. Maintenant, les charniers ne servent qu’à donner la communion aux paroissiens aux fêtes de Pâques, et ils sont ordinairement attachés aux églises » (Furetière).

  4. Catalogue des partisans (page 20) :

    « Le chancelier a été partisan des boues, {i} et de tous les partis. Son bisaïeul était apothicaire ; son aïeul, procureur, a été enterré sous les charniers de Saint-Séverin, où était son épitaphe, qui a été tirée par force. » {ii}

    1. Collecteur des taxes imposées aux bourgeois de Paris pour le ramassage des ordures.

    2. Émanant d’une mazarinade publiée en 1649, ces propos ne sont peut-être à tenir pour de pures médisances frondeuses.

Tout cela est assez confus (et sans doute rendu volontairement tel par la volonté qu’avaient les Séguier de ne pas être les descendants d’un vil apothicaire) ; mais la concordance des dates d’activité des uns et des autres m’incite à conclure que le procureur au Châtelet se nommait Blaise Séguier, qu’il n’était pas le frère, mais le fils de l’apothicaire, Étienne ; et ce contrairement à ce qu’écrit Popoff, qui ne dit pas que Blaise était procureur, mais valet de chambre du roi Charles viii, et date sa mort de 1510. Étienne et Blaise auraient alors respectivement devancé le président Pierre i Séguier de quatre et trois générations. Le père de ce dernier, lui aussi prénommé Pierre, aurait de même été reçu président au Parlement en 1554.

Enfin, pour ajouter aux méprises, Moréri et Popoff donnent au père de Pierre i Séguier, le fondateur de la branche des hauts magistrats (après Gérard), le prénom de Nicolas, mais sans le dire frère d’Étienne, l’apothicaire, ni lui attribuer la charge de procureur au Parlement ou au Châtelet de Paris.

On peut tout de même en conclure que les Séguier, qui n’ornèrent jamais leur patronyme d’une particule (de Séguier), appartenaient indubitablement à la haute et ancienne noblesse parisienne, mais celle de robe (les officiers royaux), et non celle d’épée (l’aristocratie proprement dite, dont le devoir était de combattre pour la Couronne de France, si nécessaire jusqu’à y sacrifier leur sang et même leur vie).

13.

Le Borboniana citait ici sept des douze enfants (six garçons et six filles), outre quatre morts en bas âge, nés du mariage de Pierre i Séguier (v. supra note [12], 7e des Séguier énumérés par Moreri) avec Louise Boudet (morte en 1594). La Prosopographie des gens du Parlement de Paris (Popoff, no 150) m’a permis de vérifier et de compléter leur identité et leur descendance éventuelle. Il y manque cinq filles : Madeleine, épouse de Claude Hennequin, maître des requêtes ; Catherine, épouse de Claude Malon, greffier criminel du Parlement de Paris ; Élisabeth, épouse (en premières noces) de Jean Boudet, conseiller au Parlement ; Marguerite et Marie, religieuses au couvent de Longchamp.

  1. François, seigneur de Sorel, etc., fut reçu conseiller en 1564, maître des requêtes en 1567, puis président aux Enquêtes en 1570. Il mourut deux ans plus tard, « ne laissant qu’un fils, mort jeune le 15 décembre 1591 ».

    Le Borboniana diverge ici de Popoff en déclarant François « père de M. de Soret », personnage qui devait être encore en vie au moment de sa rédaction (1638). Cela me semble ne pouvoir s’expliquer qu’en admettant une double erreur du manuscrit : Soret pour « Sorel », et père pour « oncle » ; ce qui mène au titulaire de la seigneurie de Sorel en 1638, c’est-à-dire Pierre iii Séguier, fils de Pierre ii (qui suit).

  2. Pierre ii, seigneur de Sorel à la mort (1591) du fils de son frère aîné (François qui précède), était aussi marquis d’O. Il fut reçu conseiller en 1568, maître des requêtes et lieutenant civil du Châtelet en 1572 (en succession de Gabriel ii Miron, v. note [9], lettre 82), et enfin président au mortier en survivance (1576), puis en succession (1578) de son père, Pierre i. Pierre ii mourut en 1602 (selon Popoff) ou 1603 (selon le Borboniana).

    • Son plus jeune fils, Pierre iii, seigneur de Sorel à la suite de son père, conseiller au Parlement en 1602, puis maître des requêtes, quitta ensuite « la profession de la robe pour celle de l’épée » et mourut en 1638 (comme il est dit plus haut). Sa fille unique, Marie, devint duchesse de Luynes (v. note [8], lettre 273).

    • V. note [19], lettre 464, pour Louis ii, fils puîné de Pierre ii, qui fut prévôt de Paris de 1611 à 1653.

  3. Jérôme ii, sieur de Drancy, grand maître général des Eaux et forêts de France, chevalier de l’Ordre de Saint-Jean-de-Jérusalem, ne laissa qu’un fils prénommé Tanneguy, conseiller au Parlement en 1615, maître des requêtes en 1628, puis président au mortier en 1633. Il mourut en 1642, âgé de 54 ans ; v. seconde notule {a}, note [8], lettre 333, pour son fils unique, Pierre v, prévôt de Paris (1653-1669).

  4. Louis i, conseiller clerc (1573) puis président (1597) aux Enquêtes, doyen du chapitre de Notre-Dame de Paris en 1575, mourut en 1610, âgé de 60 ans, après avoir refusé l’évêché de Laon.

  5. Antoine, seigneur de Villiers et de Fourqueux, fut reçu conseiller au Parlement sous le règne de Charles ix, maître des requêtes en 1577, lieutenant civil du Châtelet en 1580, conseiller d’État ordinaire en 1586, avocat général en 1587, président au mortier en 1597, ambassadeur à Venise en 1598. Il mourut célibataire en 1624 après s’être démis de sa présidence au mortier en faveur de son neveu, Pierre iv.

    Le Testament de feu messire Antoine Séguier, vivant chevalier, conseiller du roi en ses conseils d’État et privé, et second président en sa Cour de Parlement à Paris (sans lieu ni nom ni date, in‑8o de 23 pages) est daté du 17 mai 1624 et « suivi d’un codicille en date du 20 mai, relatif à l’hôpital de la Miséricorde, situé à Paris, au faubourg Saint-Marcel » ; une copie manuscrite est disponible sur Gallica : Recueil des testaments de différents personnages (1501-1700), fos 217 ro‑228 ro. En 1622, Antoine Séguier avait fondé dans le faubourg Saint-Marcel (ou Marceau, v. note [3], lettre 211) un hospice charitable qui portait le nom d’Hôpital des cent filles orphelines de Notre-Dame de la Miséricorde de Jésus. Il a été supprimé en 1790, puis rasé dans les années 1820.

  6. Jean, seigneur d’Autry en Berry, avocat puis conseiller au Parlement, fut maître des requêtes en 1580, lieutenant civil en 1586, mourut de la peste en 1600 dans cette charge. V. note [9], lettre 211, pour François ii Miron qui lui succéda.

    Pierre iv, le fils aîné de Jean, devint chancelier de France en 1635 (v. supra note [12]), et son cadet, Dominique, fut nommé évêque d’Auxerre en 1631, puis de Meaux en 1637 (v. note [22], lettre 564).

  7. Louise épousa Claude de Bérulle, conseiller au Parlement reçu en 1567 (v. la fin de la note [43] du Borboniana 6 manuscrit), se fit carmélite après la mort de son mari, ayant donné naissance à quatre enfants, dont l’aîné, venu au monde en 1575, devint le cardinal Pierre de Bérulle (v. note [10], lettre 205).

V. note [36] du Patiniana I‑3 pour les vers de Dominicus Baudius contre tres juris perversores [trois corrupteurs du droit] identifiés comme étant trois des fils de Pierre i Séguier : Louis i (4 supra), Antoine (5) et Jean (6).

14.

Jérôme i Séguier, sieur des Fontaines, était arrière-petit-fils de Blaise et cousin germain de Pierre i (v. supra note [12], 7e des Séguier énumérés par Moreri). Maître des requêtes en 1599, Jérôme i fut conseiller puis président au Grand Conseil (1601). De son mariage avec Anne Viole naquirent un fils et cinq filles, dont une seule parvint à l’âge adulte. Prénommée Madeleine, elle épousa Pierre des Friches, conseiller au Grand Conseil ; elle se remaria en 1617 avec un trésorier des Bâtiments du roi (Popoff no 150).

Champigny (aujourd’hui Champigny-sur-Marne dans le département du Val-de-Marne) était une bourgade proche de Saint-Maur-des-Fossés (v. note [22], lettre 345).

Le sobriquet de « président aux nourrices » s’entend aisément quand on prend « être en nourrice » dans le sens de vivre aux crochets des autres.

15.

Robert ii Miron (v. note [9], lettre 82) avait épousé Adrienne de La Ferté, fille de Pierre, secrétaire du roi, que le Borboniana disait ici intendant du marquis d’Alincourt, Charles de Neufville de Villeroy (v. note [6], lettre 104).

Je n’ai pas eu accès à l’Aretologia, sive aurea et Christiana disticha, e Floridorum libro Hier. Seguieri Pæt. Pres. [Arétologie, {a} ou les Distiques dorés et chrétiens tirés du livre des Florides de Jérôme Séguier, président au Conseil]. {b} Les deux distiques transcrits par le Borboniana se lisent à l’identique dans le Borboniana imprimé ; en voici une traduction française :

16.

« dans les Éloges des hommes illustres pour leur gloire guerrière » de Paul Jove (Bâle, 1596), {a} les deux pages mentionnées appartiennent à celui de Ioannes Vitellius Cornetanus Patriarcha et Cardinalis {b} (livre ii, pages 60‑63). J’ai mis en exergue, mais aussi allongé les citations du Borboniana pour les rendre plus compréhensibles.

17.

Deux références concluent l’article sur Ludovicus Patavinus.

  1. Dans son éloge de Vitellius, {a} Paul Jove a conté la mort du comte palatin italien Antonio da Pontedera, dit Antonio Pisano, condottiere qui a maintes fois changé de camp dans les guerres entre la papauté et les souverains d’Italie au début du xve s. ( livre ii, pages 61‑62, avec mise en exergue du passage cité) :

    Antoniumque deinde Pisanum ab Etruriæ oppido Pontaderam appellatum, virum militia clarum, et multis literarum ornamentis insignem, quod Privernum in Volscis occupasset, tumultuario prælio fusum captumque, indigno miserabilique supplicio ad oleam suspenderat. Qua necis atrocitate, vel ob id magnam invidiam subiit, quod Antonio id mortis genus, tanquam honestissimo viro, et diu cum laude militiæ versato indignum, deprehensisque tantum latronibus meritum, suppliciter deprecanti, non modo non indulserit ; verum crudeli usus Ironia in carnificem versus dixerit, Lege ergo age et æqua postulanti, viro forti præclaroque geminum innecte laqueum, altioremque ramum delige, ut honestius ac splendidius pendeat ; atque ita miserabiliter duplici capistro, vir alioqui tam fœdo supplicio indignus, in arbore stangulatus pependit.

    [Il y eut enfin Pisano, appelé Pontadera, d’après la ville de Toscane qui porte ce nom, {b} homme célèbre pour sa bravoure et remarquable pour ses talents littéraires : pour s’être emparé de Priverno chez les Volsques, {c} il fut vaincu et fait prisonnier après une bataille confuse, puis soumis à l’indigne et misérable supplice d’être pendu à un olivier. Cette exécution était atroce, car inspirée par une vive haine ; mais Vitellius ne montra aucune indulgence envers d’Antonio qui le suppliait à genoux de n’être pas soumis à ce genre de mort, qui n’est mérité que par les voleurs qu’on a attrapés, mais qui est indigne d’un homme parfaitement intègre, qui s’est longtemps consacré avec honneur au métier des armes. Par cruelle ironie, il se tourna alors vers le bourreau et dit : « Attrape et exécute cet homme courageux et éminent qui réclame d’être équitablement traité ; mais attache-lui donc deux cordes au cou et choisis la plus haute branche, pour qu’il soit plus noblement et glorieusement pendu. » {d} Voilà comment Antonio, qui ne méritait pas une si ignoble exécution, fut pendu à un arbre, misérablement étranglé par une double corde].


    1. V. supra note [16].

    2. Pontadera ou Pontedera est une cité de la province de Pise.

    3. Priverno est une ville du Latium (ancien pays des Volsques), entre Rome et Naples.

    4. J’ai traduit ce propos comme étant proféré par Vitellius, mais la syntaxe permet aussi de le prêter au condamné, en passant de la troisième à la première personne du singulier.

  2. « On raconte que Verres en a fait de même en Sicile ».

    Cette conclusion renvoie à Caius Licinius Verres (120-43 av. J.‑C), préteur romain de Sicile qui avait si ignominieusement abusé de son pouvoir que les habitants de cette province lui intentèrent un procès en choisissant d’y être défendus par Cicéron. Nous en sont restées ses Plaidoiries contre Verres, ou Verrines. On y lit (chapitre xxiii) ce passage sur les atrocités commises non par Verres, mais par Quintus Apronius, son décimateur (percepteur des impôts) :

    Postea cum ad eum Nymphodorus venisset Ætnam et oraret ut sibi sua restituerentur, hominem corripi ac suspendi iussit in oleastro quodam, quæ est arbor, iudices, Ætnæ in foro. Tam diu pependit in arbore socius amicusque populi Romani in sociorum urbe ac foro, colonus aratorque vester, quam diu voluntas Aproni tulit.

    [Plus tard, Nymphodore étant venu le trouver à Ætna, {a} et le priant de lui restituer ce qui lui appartenait, il le fit saisir et ordonna aux juges de le suspendre à la branche d’un olivier sur le forum d’Ætna. Ainsi, au milieu d’une ville, en plein forum de nos alliés, un ami et collaborateur du peuple romain, son fermier et son laboureur, resta accroché à un arbre tout le temps qu’Apronius en a eu la volonté].


    1. Ville sicilienne, autrement nommée Inessa par Strabon, située au pied de l’Etna, dans les environs de l’actuelle Paterno.

18.

Le pli de reliure, au bord droit de la page manuscrite, m’a empêché de lire la référence complète donnée par le Borboniana ; mais dans l’Histoire des guerres d’Italie de François Guichardin, {a} le livre sixième (année 1504, tome premier pages 233 vo‑234 ro) décrit la succession de la couronne d’Espagne à la mort d’Isabelle, reine de Castille, douze ans avant son époux, Ferdinand, roi d’Aragon. {b} Souhaitée par de nombreux souverains d’Europe, la désunion de leur double couronne catholique était en jeu :

« Le titre de roi d’Espagne était commun, les ambassadeurs se dépêchaient en commun, les armées s’ordonnaient en commun, et les guerres s’administraient en commun ; et l’un ne s’appropriait rien plus que l’autre en autorité et gouvernement du royaume. Mais par la mort d’Isabelle, {c} sans enfants mâles, la succession de Castille, par les lois du royaume (lesquelles, regardant plus à la proximité qu’au sexe, n’excluent < pas > les femmes) appartenait à Jeanne, {d} fille commune de Ferdinand et d’elle, femme de l’archiduc, {e} parce que la fille aînée, qui avait été mariée à Emmanuel, roi de Portugal, et un petit fils né d’elle étaient morts longtemps auparavant : {f} à raison de quoi, l’administration du royaume dotal, {g} le mariage fini, n’appartenant plus à Ferdinand, il devait retourner en son petit royaume d’Aragon, petit à comparaison du royaume de Castille, pour l’étroitesse du pays et petitesse des revenus, et parce que les rois d’Aragon n’ayant absolue autorité royale en toutes choses, sont, en plusieurs, sujets aux constitutions et aux coutumes d’icelles provinces, lesquelles limitent fort la puissance des rois. Mais Isabelle {c} étant proche de la mort, ordonna par son testament que Ferdinand, pendant qu’il vivrait, serait gouverneur de Castille, tant pource qu’elle désirait qu’il fût conservé en sa première grandeur, pour la bonne amitié en laquelle elle avait toujours vécu avec lui, que (ainsi comme elle disait) pource qu’elle connaissait bien que c’était le profit de ses peuples de continuer sous le sage gouvernement de Ferdinand, et non moins le profit de son gendre {e} et de sa fille, {d} lesquels, puisqu’à la fin ils devaient pareillement succéder à Ferdinand, devaient estimer un grand bien pour eux que, jusques à temps que Philippe, né et nourri en Flandres, où les affaires se gouvernaient diversement, eût atteint un grand âge et pris plus grande connaissance des lois, des coutumes, de la nature et des mœurs d’Espagne, tous les royaumes leur fussent conservés sous un pacifique et bien ordonné gouvernement, les pays de Castille et d’Aragon se maintenant cependant comme un même corps. La mort de la reine engendra de nouveaux accidents en Espagne ; mais les affaires d’Italie, comme nous dirons ci-après, s’en trouvèrent mieux disposées à une nouvelle paix. »


  1. Traduite de l’italien, sans lieu, 1593, v. note [3], lettre 961.

  2. V. note [4], lettre 692.

  3. Je ne suis pas parvenu à comprendre pourquoi François de La Noue (v. note [4], lettre 653), le traducteur de Guichardin, a donné à la reine Isabelle le nom d’Élizabeth : je l’ai corrigé pour la clarté de la lecture.

  4. Jeanne d’Aragon, dite la Folle (née en 1479, v. note [4], lettre 692), dont il sera beaucoup question dans la suite du présent article, devint reine de Castille à la mort de sa mère, Isabelle (1504), et reine d’Aragon à la mort de son père, Ferdinand (1516), mais elle ne fut jamais mentalement apte à régner.

  5. En 1496, Jeanne avait épousé Philippe de Habsbourg (Bruges en Flandre 1478-Burgos en Espagne 1506), dit Philippe le Beau, fils aîné de l’empereur Maximilien ier (mort en 1519, v. note [4], lettre 692) et de Marie de Bourgogne (v. note [19], lettre 312), fille de Charles le Téméraire (dernier duc de Bourgogne autonome, v. note [5], lettre 869).

    Héritier putatif de l’Empire germanique, Philippe pouvait porter le titre d’archiduc d’Autriche, mais était duc de Bourgogne (devenue terre impériale). V. note [17], chapitre ii du Traité de la Conservation de santé pour l’empereur Frédéric iii, père de Maximilien.

    Ce mariage fondait la branche des Habsbourg d’Espagne, et leur étroite et durable alliance avec ceux d’Autriche : double dynastie catholique qui eut une si puissante influence sur les équilibres politiques européens. Philippe devint roi consort d’Espagne, sous le titre de Philippe ier en juillet 1506, mais mourut deux mois plus tard, après avoir donné six enfants à son épouse, dont le futur Charles Quint (leur premier fils, né en 1500). Étant donné l’aliénation mentale de Jeanne, son père assura la régence de Castille jusqu’à sa mort. Son petit-fils lui succéda alors sous le nom de Charles ier, scellant définitivement l’union des couronnes de Castille et d’Aragon, et temporairement celle des Habsbourg hispano-germaniques.

  6. Isabelle d’Aragon (1470-1498), sœur aînée de Jeanne, avait épousé Manuel ou Emmanuel ier, roi du Portugal (mort en 1521, sans droit héréditaire sur la couronne d’Espagne). Leur fils unique, prénommé Michel de la Paix, était mort en 1500, âgé de deux ans.

  7. Dotal signifie lié à la dot versée par l’épouse au mari qui, devenu veuf, n’en a pas la pleine et indépendante jouissance, car elle devient propriété des enfants nés du mariage.

19.

« Voyez Mariana de Rebus Hispaniæ, tome ii page 606, [2e colonne,] lignes 6‑16, et page 613, lignes 6‑v » : référence ajoutée dans la marge, que ma traduction a corrigée et clarifiée, mais sans comprendre ce qu’y signifie exactement le v final.

20.

Référence inutilement ajoutée dans la marge, car déjà citée précédemment (v. la fin de la note [19] supra).

Dernière des six enfants de la reine Jeanne, Catherine de Castille, était née le 12 février 1507, cinq mois après la mort de son père, Philippe de Habsbourg, roi consort d’Espagne (v. supra notule {c}, note [18]). Elle devint reine du Portugal en épousant, en 1525, le roi Jean iii (1502-1557, couronné en 1521). Catherine mourut à Lisbonne en 1578. Sa fille Marie-Manuelle (1527-1545) devint la première épouse de Philippe ii d’Espagne, son cousin germain, et fut mère de Charles d’Autriche (Don Carlos, v. note [25] du Patiniana I‑2).

V. note [29], lettre 477, pour le destin romanesque de Sébastien ier, roi du Portugal, petit-fils de Jean iii et de Catherine.

21.

22.

Cet article, sur l’union des Habsbourg à la fin du xve s., en insistant sur la folie de la reine Jeanne, est certes mal construit ; mais il a le charme de refléter la conversation qui a servi à le rédiger : ses méandres, ses redites et ses quelques inexactitudes sont la rançon de son authenticité. Il se clôt sur trois références.

  1. « Voyez Paul Jove sur la folie de Jeanne, dans la Vie d’Adrien vi, page 238 » : v. note [27] du Borboniana 7 manuscrit pour la vie de ce pape flamand, écrite par Paul Jove dans le tome ii de ses Vitæ virorum illustrium [Vies des hommes illustres] (Bâle, 1577). La folie de Jeanne est mentionnée à la page 107 de cette édition, à l’occasion de la visite que Charles Quint fit à Tordesillas (v. seconde notule {d}, note [21] supra), dans la période où ce futur pape était son principal conseiller en Espagne :

    Hæc olim fuit Segisma Iulia, ubi regina Cæsaris mater a Philippi coniugis interitu mente commota, in lachrymis, desperatis medicinæ remediis, miserabilem vitam ducebat. Igitur eam uti reginam salutant, suadent ut munia reipublicæ suscipiat, et sese adversus externos præsides uti Ferdinandi regis filiam deceat, cuncta gubernet. Hæc omnia quum ipsa alacri animo se facturam diceret, et ex intervallo atræ bilis nonnunquam opportuna loqueretur, utpote quæ se Cæsaris matrem ac Ferdinandi filiam tenacissime meminisset, nequaquam tamen adduci potuit, ut libellis, et codicillis subscriberet, ita ut ea vecordi detrectatione, popularium consiliis magnum incommodum afferre crederetur.

    [C’était dans cette ville, jadis appelée Segisma Julia, que la reine, mère de l’empereur, l’esprit troublé par la mort de Philippe, son époux, traînait une misérable vie, dans les larmes, après avoir mis en échec les secours de la médecine. Saluant donc cette reine, ils lui conseillent de prendre en mains les rênes de l’État et de se mettre elle-même à la tête toutes les affaires, comme devrait faire la fille du roi Ferdinand, contre les souverains étrangers. Avec empressement, car il lui arrivait de tenir des propos raisonnables dans les rémissions de sa mélancolie, elle s’était dite disposée à faire tout cela, n’ayant en rien oublié qu’elle était la mère de l’empereur et la fille de Ferdinand. Néanmoins, elle ne put rien accomplir de cet engagement : quand elle avait signé des arrêts et des requêtes, elle les reniait bientôt de manière insensée, tant et si bien que les conseils des États {a} la tenaient pour une source de profond embarras].

  2. « voyez Mariana page 606 » : v. supra la première citation de la note [19].

  3. « voyez de Thou page 506 », Histoire universelle de Jacques-Auguste i de Thou, livre xvi, règne de Henri iii, année 1555 (Thou fr, volume 2, page 661), Mort de Jeanne d’Aragon, mère de Charles v :

    « Peu de temps auparavant, Jeanne d’Aragon, mère de l’empereur et de Ferdinand, était morte à Madrid. Après avoir autrefois contracté, depuis la mort de Philippe son époux, une maladie d’esprit causée par une jalousie, elle devint absolument folle. Depuis ce temps-là, ayant été renfermée dans une tour, où elle passait son temps à courir après des chats, elle parvint à une extrême vieillesse. Cette princesse conserva toujours les titres que lui donnaient les royaumes d’Espagne ; et pendant sa vie, elle les prit toujours conjointement avec son fils, dans tous les actes publics, soit de sa propre volonté, soit par une résolution des États. {a} L’empereur fit faire ses funérailles à Bruxelles, et Ferdinand à Augsbourg. Ce fut alors que l’empereur, ou touché de la mort de sa mère, ou dégoûté du monde par ses mauvais succès, voyant d’ailleurs ses infirmités augmenter de jour en jour, songea sérieusement à se retirer en Espagne. Philippe son fils l’était venu trouver d’Angleterre, après avoir été déchiré de toutes manières dans le royaume de la reine son épouse, par des libelles satiriques et injurieux qui tendaient à animer la nation contre les Espagnols, et à mettre la mésintelligence entre la reine et son mari. On fit une exacte recherche des auteurs de ces écrits, mais on ne put rien découvrir. » {b}


    1. Sans parler de leurs annexes (en Europe et aux Amériques), trois États principaux formaient alors les royaumes d’Espagne : l’Espagne elle-même (Castille et Aragon), les Pays-Bas, Naples.

    2. Son mariage avec Marie Tudor avait fait de Philippe, fils aîné de Charles Quint, le roi consort d’Angleterre, avant de devenir le roi Philippe ii d’Espagne (v. supra note [8]).

      V. note [39] du Grotiana 2 pour la double abdication de Charles Quint à Bruxelles en octobre 1555.

Je n’ai trouvé trace d’aucun prince de Tarente que la reine Jeanne de Castille eût désiré épouser : peut-être le Borboniana l’a-t-il ici confondue avec Jeanne ire, reine de Naples au xive s., dont le deuxième des quatre maris fut Louis, prince de Tarente. Guy Patin a néanmoins fait une remarque similaire dans sa lettre à André Falconet du 4 juin 1666, en disant que Charles Quint, « assez jeune encore, fit arrêter prisonnière sa propre mère de peur qu’elle ne se remariât et ce, par le conseil du plus rusé des princes de son temps, Henri vii, roi d’Angleterre » (v. sa note [8]).

V. note [8] supra pour Catherine d’Aragon, sœur de Jeanne et première épouse (en 1509) du roi Henri viii, après avoir été (en 1501) celle de son frère aîné, Artus ou Arthur Tudor, prince de Galles (mort à 15 ans en 1502, sans descendance). Le roi Henri vii fut ainsi le père des deux époux successifs de Catherine.

23.

V. note [38] du Borboniana 1 manuscrit pour L’Onosandre de Guillaume i de Bautru, {a} publié dans le Cabinet satirique (Paris, 1620) et dirigé contre Hercule de Rohan, duc de Montbazon, {b} dont le nom est ici (peut-être volontairement) écorché en Montbazay.

L’Ambigu est une autre satire en vers de sept pages, attribuée à Bautru. Elle a été imprimée, suivie de la Réponse à l’Ambigu. {c} Elle était dirigée contre Jean Davy Duperron (ou Du Perron, Vire vers 1565-Montauban 1621), sieur de La Guette, frère cadet du cardinal Jacques Duperron, {d} archevêque de Sens de 1608 à 1618. Jean avait été son coadjuteur et lui avait succédé après sa mort. Attaché au cardinal de Richelieu, il l’avait accompagné au siège de Montauban {e} et y était mort de maladie.


  1. V. note [15], lettre 198.

  2. V. note [14], lettre 313.

  3. sans lieu ni nom, 1617, une feuille de huit pages.

  4. V. note [20], lettre 146.

  5. V. note [6], lettre 173.

Tallemant des Réaux a parlé des satires de Bautru dans deux de ses historiettes.

24.

Après sa conversion au calvinisme en 1560, Odet de Coligny, cardinal de Châtillon {a} avait épousé Isabelle d’Hauteville, dame de Loré-le-Bocage, morte en 1615.

V. notes [57] et [58] du Borboniana 5 manuscrit pour les trahisons de Jacques Duperron au détriment du cardinal de Vendôme et de son tiers parti.

Angélique d’Estrées (vers 1570-1634) était une des sœurs de Gabrielle, duchesse de Vendôme, {b} principale maîtresse du roi Henri iv et mère de César de Vendôme. {c} Angélique a connu un destin particulièrement romanesque : novice chez les dominicaines de Poissy en 1580, vers l’âge de dix ans, elle devint maîtresse du roi Henri iii (mort en 1589) durant sa prime adolescence ; elle fut nommée abbesse de l’abbaye bénédictine de Berteaucourt (Picardie) en 1586, puis de l’abbaye cistercienne de Maubuisson, près de Pontoise ; en 1618, les mœurs dissolues de ce couvent scandalisant la cour, la sévère et janséniste mère Angélique Arnaud {d} vint remplacer la mère Angélique d’Estrées qui fut arrêtée et incarcérée ; après s’être évadée, elle fut emprisonnée au Châtelet pendant plus de dix ans et finit ses jours dans la misère.

Le Recueil des Poésies de Monsieur Du Perron, depuis évêque d’Évreux, et après cardinal, archevêque de Sens, et grand aumônier de France forme la seconde partie (118 pages) de ses Diverses Œuvres… {e} Il est composé de pièces tant pieuses que profanes. On y lit maints vers amoureux que le cardinal aurait pu avoir écrits pour Henri iv à l’intention de Gabrielle (notamment pour déplorer sa mort), mais je n’ai rien lu qui puisse évoquer clairement la naissance de César de Vendôme.


  1. V. notule {d}, note [64] du Borboniana 4 manuscrit.

  2. Née elle aussi vers 1570, v. note [7], lettre 957.

  3. V. note [54], lettre 54.

  4. Fille d’Antoine i, v. note [17], lettre 433.

  5. Paris, Pierre Chaudière, 1633, troisième édition augmentée, in‑fo de 1 104 pages, pour la première des deux parties.

25.

« Il a été victime du sort, quand il en redoutait les méfaits » : sans source que j’aie su identifier.

26.

Accusés et convaincus de complicité avec les ennemis de la Couronne, ces deux maréchaux de France furent décapités pour crime de lèse-majesté. V. notes :

V. note [2], lettre 187, pour le maréchal de Bouillon, Henri de la Tour d’Auvergne, prince de Sedan, qui avait conspiré contre Henri iv, mais sans subir le même sort que les deux précédents.

Le Procès-verbal de ce qui s’est passé au sujet de l’exécution à mort du maréchal de Biron, décapité en la cour de la Bastille le 31 juillet 1602, transcrit dans le Bulletin de la Société de l’histoire de France (1834, volume 1, numéro 2, pages 33‑36) décrit les circonstances de sa mort :

« Voisin, {a} greffier, lui ayant prononcé son arrêt, on lui donna M. Garnier, docteur en théologie, prédicateur ordinaire du roi, et M. Meyna, aussi docteur et curé de Saint-Nicolas-des-Champs, {b} pour le conseiller et confesser. Il pria qu’on ne le liât point, ce qui lui fut accordé. Il alla volontairement au supplice, conduit seulement par six huissiers de la Cour et le greffier ; et étant au pied de l’échafaud, il se mit à genoux sur le premier degré, où il fit sa prière. Ensuite, il monta sur l’échafaud, où il se dépouilla lui-même de son pourpoint ; et en l’ôtant par-dessus sa tête, il fit tomber son chapeau, lequel ne lui avait point été ôté. Il se banda lui-même sans vouloir permettre que le bourreau le touchât, et le bandeau lui servit en même temps à retrousser ses cheveux par derrière, ne voulant pas que le bourreau les coupât ; et s’étant ensuite mis à genoux, il eut la tête tranchée dans le moment. » {c}


  1. Daniel i Voisin, v. note [17], lettre 604.

  2. V. note [28], lettre 380.

  3. Nettement moins à la gloire du condamné, le récit de Pierre de L’Estoile (v. note [16], lettre 604) relate ses tergiversations et ses menaces d’étrangler le bourreau.

27.

V. notes :

Les autres magistrats du Parlement qui instruisirent le procès de la maréchale et opinèrent sur sa condamnation étaient :

Les deux Fiesque étaient :

Dans son historiette intitulée Le Maréchal d’Ancre (tome i, page 78), Tallemant des Réaux écrit : « Il avait un fils d’environ treize ans, qu’on laissa aller Italie, où il est mort jeune. Il y pouvait avoir quinze ou seize mille livres de rente, de ce que son père et sa mère y avaient envoyé durant leur faveur. » Une note d’Antoine Adam (page 772) identifie ce jeune homme à Henri Concini (1603-1631), dont d’autres sources confirment le titre de comte de La Penne (Concino Concini, son père était comte de Penna, avant d’être marquis d’Ancre) :

« Marie de Médicis avait été sa marraine. Il avait donc quatorze ans quand son père fut tué. La Relation exacte {a} donne une image dramatique des mauvais traitements qu’il subit alors. Le comte de Fiesque eut la générosité d’intervenir, et se chargea de la garde de l’enfant. Le Parlement le déclara “ ignoble et incapable de tenir en état, office et dignité ”. Le Père Griffet nous apprend (i, p. 196) {b} que l’enfant fut conduit au château de Nantes, qu’il y resta cinq ans prisonnier, que la reine mère n’obtint sa liberté que sur la fin de 1622. Il sortit alors de France et vint se fixer à Florence. Il y mourut de la peste en 1631. Il avait sauvé du naufrage de la fortune familiale une rente de 14 000 écus. »


  1. La Relation exacte de tout ce qui s’est passé à la mort du Maréchal d’Ancre {i} (plutôt favorable au défunt), d’abord attribuée à Michel i de Marillac, {ii} l’est désormais à Honoré d’Albert (ci-devant Ancre), futur duc de Chaulnes, {iii} qui n’était alors que seigneur de Cadenet.

    1. Le texte en a été imprimé en six chapitres aux pages 14‑67 de l’Assassinat du maréchal d’Ancre… (Paris, L. Hachette, 1853, in‑8o de 83 pages.

    2. V. note [45], lettre 216.

    3. V. note [41], lettre 176.

  2. Tome premier, page 196, de l’Histoire du règne de Louis xiii, roi de France et de Navarre. Par le Père H. Griffet, de la Compagnie de Jésus (Paris, Libraires associés, 1758, 2 tomes in‑4o).

28.

« à la louange de la médecine. “ Voyez Swertius dans l’Athenæ Belgicæ, au bas de la page 501. ” {a} Quand Lipse fit ses harangues, il enseignait les belles-lettres à Iéna en Allemagne. {b} “ La religion n’était alors pas encore devenue son métier. ” » {c}


  1. Le passage mis entre guillemets anglais est une addition marginale du manuscrit.

    L’avant-dernière ligne de la rubrique consacrée à Juste Lipse (Iustus Lipsius, page 501) dans l’« Athènes belge », {i} donne cette indication :

    Orationes, quas Ienenses Lipsii nomine vulgarunt, sunt supposititiæ et confictæ.

    [Les Discours d’Iéna, qu’on a publiés sous le nom de Lipse, sont supposés et forgés de toutes pièces].

    Cela conduit à un ouvrage rare (qu’il m’aurait été difficile de trouver autrement) intitulé :

    Justi Lipsii Orationes octo Jenæ potissimum habitæ, e tenebris erutæ, et in gratiam studiosæ juventutis foras productæ.

    [Huit Discours de Juste Lipse, principalement prononcés à Iéna, sortis de l’oubli et publiés pour le profit de la jeunesse studieuse]. {ii}

    La préface de Lipse, adressée à Dorothée-Suzanne von Simmern, princesse palatine du Rhin (morte en 1592), est datée du 3 juin 1583 : soit huit ans avant la conversion de Lipse au catholicisme, et dix ans après son séjour à Iéna (1572-1574). {iii}

    Rien dans cette analyse ne met franchement en doute l’authenticité des huit discours ; quant au style latin si controversé de Lipse, le Borboniana incite à en regarder les titres :

    1. Oratio de Obitu illustrissimi principis Johannis Guilielmis Ducis Saxoniæ [Discours sur la mort de l’illustrissime prince Jean Guillaume de Saxe-Weimar] ; {iv}

    2. Oratio Iusti Lipsii Iscani, habita Jenæ anno 1572. cum inciperet publice interpretari Cornelium Tacitum [Discours de Juste Lipse, natif d’Isca, {v} prononcé à Iéna l’an 1572 quand il commençait à commenter Tacite] ;

    3. Oratio habita Jenæ, cum inciperet publice interpretari Epistolas ad Atticum Ciceronis. De ratione interpretandi Ciceronis [Discours prononcé à Iéna quand il commençait à commenter les Lettres à Atticus de Cicéron. La manière d’interpréter Cicéron] ;

    4. Oratio de Concordia, habita Jenæ xxiix. Julii, Hora Octava, Anno 1573 ; In promotione vii. Magistrorum [Discours sur la Concorde, prononcé le 28 juillet 1573 à huit heures du matin, pour la promotion de huit maîtres] ; avec deux annexes, Responsio Iusti Lipsii ad petitionem M. Ægidii Salii pro Candidatis [Réponse de Juste Lipse à la harangue que M. Ægidius Salius a prononcée au nom des postulants], et Leges juramenti. Ceremoniæ [Articles du serment. {vi} Cérémonies] ; {vii}

    5. Oratio pro defendendo Cicerone in criminibus ei objectis [Discours pour défendre Cicéron des accusations portées contre lui] ;

    6. Oratio utrum a solo Cicerone petenda sit eloquentia [Discours sur la question : l’éloquence n’est-elle à chercher que dans Cicéron ?]

    7. Oratio Utrum duæ illæ adversariæ Orationes, quæ nuper in his Scholis, Ciceronis et Salustii esse adsertæ sunt ; revera sint Salustii aut Ciceronis [Discours sur la question : les deux discours contradictoires qu’on a récemment attribués dans ces Écoles à Cicéron et à Salluste, ne devraient-ils pas, au contraire, être attribués à Salluste et à Cicéron ?]

    8. Oratio utrum Jurisprudentia, an Medicina plus boni hominibus attulerit [Discours sur la question : les hommes tirent-ils plus de bienfaits de la jurisprudence ou de la médecine ?] {viii}

      1. Répertoire bio-bibliographique établi par Franz Sweerts (Anvers, 1628, quatrième référence citée dans la note [3], lettre 584).

      2. Darmbstadt [Darmbstadii, sic pour Darmstadt, transcrit Hemstadis dans le manuscrit du Borboniana] Balthasar Hofmann, aux frais de Johannes-Jacobus Porsius, 1607, in‑8o de 118 pages.

      3. V. note [8], lettre 36.

      4. Mort, survenue en 1573, de l’époux de la susnommée Dorothée-Suzanne.

      5. Dans le Brabant.

      6. Au nombre de quatre.

      7. Ce discours polémique est discuté et échantillonné dans la notule {b‑i} infra.

      8. Discours que signalait le Borboniana.

  2. Une annotation manuscrite anonyme sur la dernière page de l’édition des Orationes que j’ai consultée (Google Livres) donne tout son sel à la remarque du Borboniana :

    « Juste Lipse nia avoir fait l’oraison de duplici Concordia qui est dans ce livre p. 46, {i} dans une épître adressée au bourgmestre et au Sénat de Francfort le 2 octobre 1603 ; {ii} mais Thomas Sagittarius soutint que Lipse n’avait pas dit la vérité, et il le prouve par les archives de l’Académie d’Iéna dans le livre intitulé Lipsius Proteus. {iii} M. Bayle prétend que Goldast était l’auteur de cette oraison. » {iv}

    1. Oratio iv (pages 46‑62) où, devant un auditoire d’étudiants luthériens, à peine un an après les massacres inaugurés par la Saint-Barthélemy parisienne (24 août 1572), Lipse a frontalement incriminé l’Église de Rome (pages 58‑59) :

      Vosne libertatem una cum relligione amittatis, non providebitis ? Nisi forte periculum Germaniæ nullum esse putatis a Pontificiis qui imminent profecto cervicibus nostris, qui adjiciunt oculos sæpe ad hanc patriam ; quam semel e faucibus ereptam dolent : qui vexillum Romanæ purpuratæ belluæ (ô Deus immortalis, averte quæso, et detestare hoc omen !) in media Saxonia defixuros se minitantur : qui non prædam nostram sed vitam ; non servitutem : sed sanguinem concupiscunt : quibus nullus ludus jucundior est, quam cruor, quam cædes, quam ante oculos trucidatio innocentium. An vero animi causa fingi putatis illa, quæ de Gallia nuper certissimis nunciis audivistis ? cum Pontifico instinctu fœdum illud, et immane facinus patratum est, quod nulla barbaria velit agnoscere ; cujus labem nullus Oceanus possit eluere. O rem cum visu crudelem ; tum auditu nefariam ! quam si non gestam : sed picturam videremus, non factam, sed confictam legeremus : tamen omnia muta, atque inanima tanta atrocitate rerum commoveri necesse sit. Jacebant in viis mediis tot insepultorum acervi corporum, senes cum pueris, viri cum fœminis promiscua cæde trucidati : quorum aliis abscissa membra, aliis amputata capita, ad Pontificem Romanum, tanquam in triumphum, mittebantur. Qua quidem in strage tot viri interfecti sunt, ut gladii ipsi et mucrones militum contremuisse mihi videantur, cum in tam augustis corporibus defigerentur.

      [N’avez-vous pas prévu qu’avec la religion c’est votre liberté que vous abandonnerez ? À moins peut-être que vous ne pensiez que l’Allemagne n’a rien à craindre des pontifes quand ils menacent sérieusement nos têtes, quand ils tournent souvent les yeux vers cette patrie : eux qui sont peinés qu’elle se soit un jour soustraite à leur giron ; eux qui menacent d’y replanter bientôt le pourpre étendard de la bête romaine au beau milieu de la Saxe (puisses-tu, Dieu immortel, je t’en supplie, écarter et détourner cet oracle !) ; eux qui convoitent non pas le butin, mais la vie, non pas l’asservissement, mais le sang ; eux pour qui aucun jeu n’est plus plaisant que le carnage, que l’assassinat, que le spectacle des innocents trucidés. Pensez-vous vraiment que ces très certaines nouvelles que vous avez récemment entendues soient imaginaires ? C’est sur l’instigation pontificale qu’a été perpétré ce massacre épouvantable et monstrueux, dont nul océan ne pourra jamais laver la souillure. Que cette affaire est donc cruelle à voir, tout autant qu’horrible à entendre ! Si elle ne s’est pas produite, c’est que nous aurions vu un fantôme ! Si elle n’a pas eu lieu, c’est que nous aurions lu un roman ! Il faudrait pourtant que des événements d’une telle atrocité dissipassent tout mutisme et toute torpeur. Des monceaux de corps sans sépulture gisaient au travers des rues : vieillards comme enfants, hommes comme femmes, tous trucidés par ce massacre indistinct ; et pour marque de triomphe, on avait envoyé au pontife romain des membres arrachés à quelques-uns et les têtes coupées à quelques autres. Cette boucherie a tant tué d’hommes que les soldats eux-mêmes me semblent avoir dû trembler en enfonçant leurs poignards et leurs épées dans de si augustes corps].

      Catholiques et protestants ne se sont bien sûr pas privés de reprocher ces propos « cicéroniens » à Lipse quand, huit ans après les avoir tenus publiquement, il a abandonné le calvinisme pour se convertir à la religion romaine.

    2. V. notule {c}, note [22] du Grotiana 1 pour cette lettre, plus exactement datée de Louvain le 29 septembre 1600. Il y en a une autre aux mêmes sur le même sujet datée du 29 septembre 1600 (lettre lxviii, édition de 1609) ; mais sur cette controverse, je n’en ai pas retrouvé une qui soit datée du 2 octobre 1603.

    3. Thomas Sagittarius (1577-1621, professeur de grec et de philosophie à Iéna) : Lipsius Proteus ex Antro Neptuni protractus et claro soli expositus : ex Oratione cumprimis de Duplici Concordia, quam ipse Lipsius, anno 1573, Academiæ Ienensis Decanus et Professor publicus, adeoque Ienæ publice habuit… [Lipse, le Protée (v. note [8], lettre de Jean de Nully, datée du 21 janvier 1656), tiré de l’antre de Neptune et exposé à la clarté du soleil : d’après le Discours sur la Double Concorde que Lipse en personne, professeur et doyen de l’Université d’Iéna, y a publiquement prononcé pour la première fois en 1573] (Francfort, J.J. Porsius, 1614, in‑8o de 58 pages).

    4. Note I de l’article de Bayle sur Melchior Goldast (v. note [6] du Patiniana I‑2) : le livre dont on accusait Goldast d’être l’auteur est le Iusti Lipsii de Duplici Concordia Oratio, non prius edita [Discours de Juste Lipse sur la double Condorde, publié pour la première fois] (Lyon, sans nom, 1600, in‑4o de20 pages) ; le texte en est conforme à celui du discours imprimé en 1607, mais sans ses deux annexes ; le passage que j’ai cité dans la notule {a} supra s’y lit aux pages 14‑15.

  3. Vers de Hugo Grotius, v. infra note [29].

29.

« “ Une page d’écriture serrée consacrée à cet exemple te lasserait : ce qu’elle dirait est évident pour les pieuses gens. Mais, en ce siècle où nous sommes, tourne très souvent les yeux vers les temps anciens, où, grossière et naïve, la religion n’était pas encore devenue un métier, où Mars foudroyant et la funeste passion du sceptre n’étaient pas encore prétextes d’adoration. ” Page v. B. »

V. note [40] du Borboniana 6 manuscrit pour ces vers et leur commentaire. La référence « v. B » désigne le verso de la 5e page, où ils figurent dans la :

Hugonis Grotii Silva. Ad Franciscum Augustum Thuanum, Jac. Augusti F.

[Silve de Hugo Grotius à François-Auguste de Thou, fils de Jacques-Auguste]. {a}


  1. Paris, Robert Estienne, 1621, in‑fo de 2 feuilles sans numérotation des pages ; page 10 de la réimpression de 1622 (ibid. sans nom).

30.

V. notes :

Adrien Baven avait été recteur de l’Université de Paris vers 1596, avant de devenir principal du Collège de Lisieux. Il est cité dans les chroniques pour avoir été, au début des années 1600, l’un des alliés de George Critton (v. note [30], lettre 390) dans son opposition à Edmond Richer (v. note [27], lettre 337), alors censeur de l’Université : la réforme du règlement qu’il mettait en œuvre interdisait à Critton de régenter dans le Collège de Lisieux.

Nicolas d’Angennes, seigneur de Rambouillet, militaire et diplomate mort en 1611, avait épousé Julienne d’Arquenay, morte en 1609, qui avait été dame d’honneur de Catherine de Médicis. Philippe d’Angennes, seigneur du Fargis, frère benjamin de Nicolas, était mort au combat en 1590 ; v. note [4], lettre 20, pour son fils Charles du Fargis, neveu de Nicolas et de Julienne.

Né en 1512, François de Foix de Candale mourut à Bordeaux en 1594 (octogénaire et non nonagénaire). Il avait été nommé évêque d’Aire-sur-Adour en 1576, à la suite de son frère Christophe (mort en 1570). Féru de sciences, ce savant prélat a traduit le Pimandre d’Hermès Trismégiste (v. note [9], lettre de Thomas Bartholin, datée du 18 octobre 1662), en 1579, et fondé la chaire de mathématiques de l’Université de Bordeaux, en 1591.

Après la mort de François de Foix-Candale, l’évêché d’Aire fut mis sous la tutelle du cardinal de La Valette (v. note [12], lettre 23) jusqu’en 1606. Ce cardinal était le fils de Jean-Louis de Nogaret de La Valette, duc d’Épernon (v. note [12], lettre 76) et de Marguerite de Foix, comtesse de Candale (1567-1593), nièce de l’évêque. Un lapsus du Borboniana manuscrit (que n’a étonnamment pas corrigé la version imprimée de 1751, page 296) la disait femme au lieu de « mère » du cardinal de La Valette.

31.

Pour préserver la logique du texte, j’ai inversé les noms des deux collèges parisiens avec lesquels joue cette phrase (ce qu’a omis de faire le Borboniana imprimé de 1741, page 297) :

32.

« le cinquième est semblable au premier » (mais sans doute moins bien recommandé).

Les trois docteurs de Sorbonne reçus en 1604, avec Philippe Cospéan et Paul Boudot (v. supra note [4]), ont aussi brillé dans l’Église de leur siècle.

33.

V. notes [30] et [31], lettre 176, pour l’église Saint-Eustache de Paris, au centre du quartier des Halles, le plus populeux de Paris, ce qui valait à sa paroisse d’être la plus importante (et lucrative) de Paris.

Son curé d’alors, Étienne Le Tonnelier, docteur en théologie, était syndic des curés de Paris et mena en vain leur lutte (de pur corporatisme) contre l’installation de la Mission pastorale de Vincent de Paul en 1625-1630 (lazaristes, v. note [27], lettre 402).

34.

V. notes :

Horace Cardon (Horace Folch Cardony, Lucques, Italie vers 1565-Lyon 1641), imprimeur lyonnais, avait débuté comme apprenti de Guillaume Roville (v. note [5], lettre de Charles Spon, datée du 5 mars 1658), puis avait installé sont atelier rue Mercière, avec son frère Jacques.

35.

« Voyez de Thou, sous Henri iv, page 801, {a} et les Elogia de Sainte-Marthe. » {b}


  1. Histoire universelle de Jacques-Auguste i de Thou, livre cxx, année 1598 (Thou fr, volume 13, pages 249‑250) :

    « Henri Estienne, parisien de naissance, fils de Robert, et à qui la littérature a tant d’obligation, mérite encore plus de louanges : il eut la noble ambition de surpasser son père, et employa toute sa vie à corriger et à mettre au jour des auteurs grecs et latins. Il a publié un dictionnaire grec très étendu, dont la postérité doit lui valoir une extrême obligation. Il fit de longs voyages en Allemagne, mais le désir de revoir sa patrie le fit revenir à Lyon. Il mourut au commencement de mars, presque septuagénaire, après des travaux immenses pour le progrès des lettres. »

  2. Les Éloges des hommes illustres de Scévole i de Sainte-Marthe {i} sont plus diserts sur Estienne (livre iv, pages 474‑477) :

    « Certes, la renommée de Henri Estienne fit concevoir d’abord une grande opinion de lui, lorsqu’étant retourné fort jeune d’un voyage d’Italie, d’où il avait rapporté un vieux manuscrit des odes d’Anacréon, qui avaient été si longtemps cachées, il fut le premier qui les fit imprimer à Paris en beaux caractères grecs, avec sa version latine en vers de même mesure : ouvrage si agréable aux habiles hommes de son siècle, {ii} qui aimait non seulement la profonde doctrine, mais encore les douces gaietés de la poésie, qu’il le combla de louanges éternelles. Comme cet homme était pourvu d’un esprit extrêmement fertile, soit qu’il composât en grec ou en latin, il n’y avait personne qui le fît ni avec plus de chaleur, ni avec plus de promptitude. Voire même, comme il aimait son pays, ne pouvant souffrir que les Français demeurassent davantage dans cette folle créance que la langue italienne fût préférable à la française, il composa plusieurs beaux traités en sa langue maternelle, où réfutant avec autant d’aigreur que de railleries et de pointes d’esprit cette erreur invétérée, il montra l’excellence et les beautés de notre langue française, et par même moyen, fit voir l’élégance de son style et la docte fécondité qu’il avait en écrivant. […] Sa demeure ordinaire était en Savoie, où il suivit l’exil volontaire de son père, témoignant toujours pourtant un extrême désir de revoir Paris. Et de fait, il ne se présentait pas une occasion, pour légère qu’elle fût, d’y faire un voyage, qu’il ne l’embrassât avec ardeur, et qu’il ne visitât cette reine des villes, comme il faisait aussi de temps en temps toutes les autres provinces du royaume. Enfin, ayant été obligé, par la nécessité de quelques affaires, de se transporter à Lyon, il y fut surpris d’une maladie mortelle, qui le ravit l’an 1598. […] Henri Estienne laissa quelques enfants, entre lesquels Paul Estienne {iii} se rend extrêmement recommandable, marchant, comme il fait, sur les traces glorieuses de sa famille, et imitant les vertus de ses ancêtres. Il laissa pareillement une fille, qui est mariée à ce docte et fameux personnage, Isaac Casaubon, {iv} que le roi a depuis peu obligé par ses libéralités de venir à Paris pour y cultiver noblement les bonnes lettres, et même pour les y faire fleurir avec plus de splendeur et de gloire qu’auparavant. »

    1. Traduction de Guillaume Colletet, Paris, 1644, v. supra note [12], première notule {b}.

    2. Ανακρεοντος Τηιου μελη. Anacreontis Teii odæ. Ab Henrico Stephano luce et latinitate nunc primum donatæ [Odes d’Anacréon de Téos (v. note [24] du Faux Patiniana II‑1), pour la première fois publiées et traduites en latin] (Paris, Henri ii Estienne, 1554, in‑4o bilingue de 110 pages).

    3. Paul Estienne (1566-1637), fils aîné de Henri ii, reçu imprimeur en 1590, succéda à son père en 1598. Les frères Chouët (v. note [20], lettre 301) reprirent son atelier genevois en 1637.

    4. V. note [49] du Borboniana 2 manuscrit pour Florence Estienne, seconde épouse d’Isaac Casaubon en 1586.

36.

« La Flûte. À Robert Estienne :

Cette flûte qu’on t’a dérobée, toi le Pan français, ne sera jamais minuscule, etc. »

37.

Laurent Bouchel (Crépy-en-Valois 1559-1629), avocat au Parlement, est auteur de plusieurs ouvrages de jurisprudence et d’histoire, dont un Journal historique manuscrit (ms Bnf Fr 5527) couvrant l’ensemble du xvie s. Je n’ai pas éclairci l’alliance qui l’avait rendu beau-frère de l’avocat général Louis Servin (v. supra note [27]).

38.

Michael Vascosanus (Michel Vascosan) est le libraire parisien, apparenté par alliance aux Estienne, qui a imprimé en 1557 les Exotericæ Exercitationes [Essais publics] contre le 15e livre de Jérôme Cardan de Subtilitate [sur la Subtilité] (v. note [5], lettre 9).

Le Borboniana citait l’Exercitatio ci (page 153 vo), De mistione, incremento, misti forma, repetitio subtilior [Redite plus subtile sur le mélange, l’augmentation, la forme mêlée], § 19, Aer, ignis, terra contra te, abs te in mistis [Contre toi, malgré toi, l’air, le feu, la terre sont en mélange], où Scaliger conteste l’interprétation de Cardan sur la nature des différentes sortes de bois :

« Et voilà que tu nous fais référence à Érasme : {a} lui qui ignore tout de l’histoire naturelle, comme nous l’avons démontré dans notre commentaire sur ses Chiliades {b} et bien ailleurs. » {b}


  1. J’ai vainement cherché l’endroit où Cardan a cité Érasme dans ses 21 livres de Subtilitate (Nuremberg, 1550, v. note [30], lettre 6), notamment dans le huitième, sur lequel porte la critique de ce passage par Scaliger.

  2. Les Chiliades [Milliers] sont l’autre titre des Adages (dont le nombre dépasse quatre milliers), mais je n’ai pas trouvé dans lequel de ses livres Jules-César Scaliger les avait critiqués. Il n’a ouvertement attaqué Érasme (pour ensuite le regretter) que dans leur querelle sur le style cicéronien (v. notes [8][12], lettre 584).

  3. V. notule {c}, note [13], lettre 584, pour la reprise de cette citation par Antonio Possevino, obscur jésuite qui a voulu éreinter Érasme en 1593.

39.

V. notes [3], lettre 125, pour Ludovicus Vives (Jean-Louis ou Juan Luis Vivès), et [14], lettre 409 (2e référence citée), pour son édition et ses commentaires de « La Cité de Dieu » de saint Augustin (Bâle, 1542).

40.

La précision sur le collège des jésuites de Périgueux est ajoutée dans la marge du manuscrit. Au début des années 1590, cette institution, fondée une soixantaine d’années plus tôt, fut prise en main par des jésuites chassés de Bordeaux, qui le conservèrent jusqu’en 1778.

V. note [5], lettre 96, pour Pierre de Montmaur, professeur de grec au Collège royal, que nombre de ses contemporains ont ridiculisé sous le surnom de Mamurra.

« On dit proverbialement, au collège, donner la salle, quand on fouette un écolier en public pour donner l’exemple aux autres » (Furetière).

41.

Roger de Choiseul, marquis de Praslin, neveu du maréchal-duc César du Plessis-Praslin, eut une brillante carrière militaire et fut tué à la bataille de la Marfée (1641, v. note [1], lettre 110).

V. supra notes [12][14] pour le Chancelier Pierre iv Séguier et sa famille.

Hésychios (ou Hesychius) d’Alexandrie est un grammairien grec du vie s. qui a laissé un Lexique enrichi des citations de multiples auteurs de l’Antiquité.

Pausanias le Périégète [Guide], géographe grec du iie s., est auteur d’une description de la Grèce à l’époque des Césars, intitulée Périêgêsis [Le Tour de la Grèce].

V. notes [4], lettre 239, pour Hésiode, et [39] du Borboniana 3 manuscrit pour l’édition des Astronomiques de Manilius donnée par Joseph Scaliger (Paris, 1579).

42.

Furetière définit un grimoire comme étant un « livre qu’on n’a jamais vu, où on prétend qu’il y a des conjurations propres pour faire évoquer les démons » ou, par extension, « tout livre ou écrit obscur et en galimatias, où on n’entend rien ».

V. notes :

Germain Habert (Paris vers 1610-ibid. 1654), cousin de Henri Louis Habert de Montmor, était abbé de Cerizy. Homme de cour et de plume, il fut membre de l’Académie française dès sa fondation (1634).

43.

« dans les ordres » (sacerdotaux).

« On dit proverbialement en bailler d’une, en bailler à garder, pour dire : en faire accroire à quelqu’un » (Furetière), c’est-à-dire inventer des histoires pour le tromper, conter des bourdes.

Le prédécesseur de Pierre de Montmaur dans la chaire royale de grec (en 1623, v. note [2], lettre 223) était Jérôme Goulu, dont la généalogie est détaillée dans la note [6] supra.

44.

George Buchanan, élégie intitulée Ad Ptolomæum Luxium Tastæum et Iacobum Tevium, cum articulari morbo laboraret, mdxliv [À Ptolomæus Luxius Tastæus et Jacobus Tevius, {a} tandis qu’il souffrait de la goutte {b} en 1544], pages 68‑69 des Poemata [Poèmes] (Saumur, 1621, v. supra note [9]) :

« Mais vos cœurs, dont je connais la solide amitié pour moi, ne diminuent guère ici l’ardeur de mes douleurs. Souvent, Groscollius {c} m’explique les plantes médicinales, et vient en aide à ma langueur par ses encouragements et ses conseils. Souvent, le prévoyant savoir-faire de Charles Estienne {d} procure un réel secours à mes tristes maux. Turnèbe, la plus exquise gloire des compagnons d’Aonie, {e} ne laisse passer un jour sans venir m’offrir ses services, etc. »


  1. Les premiers vers de l’élégie (page 67) introduisent ces deux intimes amis du poète :

    O animæ Ptolemæe, meæ pars altera, tuque
    Altera pars animæ, Tevi Iacobe, meæ,
    Scire juvat quid agam ? Vivo modo, si modo vivit
    Pondus iners, animæ corpus inane suæ
    .

    [Ô Ptolomæus, qui es la moitié de mon âme, et toi, Jacobus Tevius, qui en es l’autre ! vous plaît-il de savoir ce que je fais ? Eh bien, je ne fais qu’être en vie, pour autant que vive un fardeau inerte, un corps vidé de son âme].

    Dans la compilation de D.A. Millar intitulée George Buchanan : a Memorial 1506-1906 (Saint Andrews, W.C. Henderson University Press, et Londres, David Nutt, 1907, in‑8o), le chapitre v est intitulé Buchanan à Bordeaux. H. de la Ville de Mirmont, professeur de latin à l’Université de Bordeaux, y cite ces vers (pages 47‑48) et explique qu’il s’agissait de deux amis de Buchanan, qui avaient enseigné avec lui dans le Collège de Guyenne à Bordeaux (entre 1539 et 1544), et qu’il avait quittés pour régenter au Cardinal Lemoine à Paris. Tous deux étaient bordelais : Tastæus n’a pu être plus précisément identifié ; Tevius, qui pouvait être le fils de Tastæus, aurait étudié à la Faculté de médecine de Paris et se nommait Jean La Taste, agrégé au Collège des médecins de Bordeaux en 1554 ; je n’ai toutefois pas trouvé trace de lui dans le catalogue des bacheliers parisiens établi par Baron ; sans doute a-t-il été gradué dans une autre Université (Dulieu ne le cite pas parmi les docteurs de Montpellier).

    L’autobiographie de Buchanan {i} mentionne quatre de ses brillants amis bordelais (page 10) : Nicolaus Gruchius, Guilielmus Garantæus, Jacobus Tevius, Helias Vinetus. {ii}

    1. 1608, réimprimée dans ses Poemata (Amsterdam, 1641), v. note [25] du Borboniana 5 manuscrit.

    2. Élie Vinet, v. note [61] du Borboniana 2 manuscrit ; hormis Tevius, les autres n’ont pas laissé de traces que j’aie su trouver.

  2. L’arthrite (articularis morbus) était alors synonyme de goutte (v. note [30], lettre 99).

  3. Plusieurs érudits buchananistes se sont penchés sur ce personnage, en le disant peut-être médecin de Paris, mais sans avancer d’arguments convaincants. Pensant qu’il pouvait aussi être apothicaire, je n’en ai trouvé aucun dans les familles parisiennes qui répondît aux patronymes de Groscol, Groscolle, Grocol ou Grocolas.

  4. Médecin et imprimeur érudit de la famille des Estienne (v. note [2], lettre 755).

  5. V. notes [5], lettre de Reiner von Neuhaus, datée du 1er juin 1673, pour l’Aonie, nom mythique de la Béotie, patrie des Muses, et [20], lettre 392, pour Adrien Turnèbe.

45.

« il mourut en 1582, fort vieux puisqu’il était né en 1506. »

Érasme, quant à lui, est mort en 1536. V. notes [8], lettre 73, pour ses Colloques familiers (Paris, 1518) et [14], lettre 71, pour ses Épîtres (Bâle, 1558).

V. note [11], lettre 65, pour le Franciscanus [Le Cordelier], le plus célèbre poème satirique de George Buchanan.

46.

V. note [14], lettre 748, pour Philippe Des Portes, abbé de Tiron, et son adhésion à la Ligue, auprès d’André-Baptiste de Brancas, dit l’amiral de Villars (v. note [15] de la même lettre), meneur de la Ligue que le Borboniana confondait ici avec Pierre de Villars (né en 1623, v. note [1], lettre 936), qu’on honorait du titre de marquis, mais qui n’avait pas de lien familial avec l’amiral.

Des Portes répartit les 30 000 écus (90 000 livres tournois) que lui avait donnés Henri iii en : 6 000 écus de meubles, c’est-à-dire en tout « bien qui se peut transporter d’un lieu à un autre, qui se peut cacher ou détourner, qui n’est point attaché au sol, à la terre » (Furetière) ; et 24 000 écus placés au denier douze, c’est-à-dire produisant une rente annuelle de 2 000 écus.

47.

Jean-François de Gondi, évêque puis archevêque de Paris (de 1622 à 1654, v. note [11], lettre 19), était le cinquième des dix enfants du maréchal-duc Albert de Gondi, fondateur de la famille en France, qui avait épousé en 1565 Claude-Catherine de Clermont-Tonnerre (1543-1603), baronne puis duchesse de Retz (v. note [4], lettre 196).

V. note [37] du Borboniana 4 manuscrit pour le court règne polonais de Henri iii, avant son ascension sur le trône de France, et pour son passage par Venise en revenant en France (1574).

Le Borboniana citait trois références à l’appui de ses dires.

  1. « Voyez l’Éloge de Philippe Des Portes dans Sainte-Marthe ». Cet éloge {a} donne un éclairage un peu différent sur la vie courtisane et politique de Des Portes (livre v pages 527‑532) :

    « Entre les seigneurs de la cour, le duc Anne de Joyeuse, beau-frère du roi, était celui qu’il aimait et qu’il honorait davantage ; mais comme il l’aimait, il en était aussi réciproquement aimé, tant pour la beauté de son esprit que pour la douceur de ses mœurs. Et même, ces excellents hommes, quoique différents de naissance et de fortune, étant parvenus en un même degré de faveur et de bienveillance auprès le leur maître, travaillaient tous deux à l’envi à se conserver l’un l’autre dans l’honneur de ses bonnes grâces, et dans la bonne opinion qu’il avait si justement conçue de leur zèle et de leur fidélité. {b} Mais après que le malheur eut voulu que le duc de Joyeuse, qui était lieutenant général de l’armée du roi, eût été tué en la bataille de Coutras, où il rendit mille nobles preuves de valeur et de courage, et que, quelque temps après, le roi même eût été lâchement assassiné par les rebelles de son royaume, {c} Des Portes ayant ainsi perdu son protecteur et son maître, se résolut, dans ce notable et inopiné changement des affaires, de se retirer et de se mettre à l’abri de la tempête auprès de l’amiral de Villars, cousin germain du feu duc de Joyeuse, gouverneur de la province de Normandie, et l’un des principaux chefs du parti de la Ligue. Mais certes, la suite des choses eut un tel succès, et Des Portes fut en cela si heureux que, quatre ans après sa retraite, comme Henri le Grand fut parvenu à la Couronne, il travailla si utilement pour ce prince et pour le repos de sa patrie qu’il fut le principal auteur de la réduction de cette province en l’obéissance du roi. {d} Et par cette action généreuse et digne d’un bon citoyen, il s’acquit les bonnes grâces de ce grand prince, et eut ainsi le moyen d’adoucir l’aigreur de ses ennuis et de se consoler de la perte du roi son maître. »


    1. Traduction française de Paris 1644, v. supra note [12], première notule {b}.

    2. Sans beaucoup lire entre les lignes, on comprend que Des Portes fut l’un des mignons de Henri iii : le duc Anne de Joyeuse (1560-1587) a en effet été l’un des plus célèbres d’entre ces favoris particuliers (v. note [18] du Borboniana 6 manuscrit) ; il avait épousé en 1581 Marguerite de Lorraine-Vaudémont, demi-sœur de Louise, reine de France par son mariage avec Henri iii, et était frère aîné de François (le cardinal de Joyeuse, v. note [17], lettre 88) et de Henri (duc de Joyeuse de 1590 à 1608, v. note [11] du Borboniana 9 manuscrit). Anne de Joyeuse fut amiral de France de 182 à 1587.

    3. La bataille de Coutras, en Guyenne, eut lieu le 20 octobre 1587 : Henri iii roi de Navarre (futur Henri iv, roi de France) y défit l’armée royale commandée par Joyeuse. V. note [16], lettre 551, pour la mort de Henri iii le 2 août 1589, assassiné par le moine Jacques Clément.

    4. Henri iv vint à bout de la Ligue en 1595. Il avait assiégé Rouen sans succès en 1591, mais y fit son entrée triomphale en 1596.

  2. « Voyez de Thou à l’année 1606, page 1247 » : v. note [14], lettre 748, pour cet éloge funèbre de Des Portes dans l’Histoire universelle de Jacques-Auguste i de Thou.

  3. Pierre Matthieu, Histoire de France sous les règnes de François ier…, Louis xiii, {a} parlant des Psaumes de David (tome second, pages 719‑720) :

    « Celui qui les a mis si doctement et si heureusement en vers français mourut au même temps : {b} Philippe Des Portes, que le cardinal Duperron, un autre grand prince en l’Empire de l’Église et en celui des lettres, appelait le Soleil des beaux esprits. Il n’avait pas acquis cette qualité dans les livres et les collèges. Il avait vu tant de cours de princes, tant de différents esprits, tant de sortes de mœurs et d’humeurs, que l’on ne pouvait espérer d’apprendre d’un autre ce qu’il ignorait. Des Yveteaux, {c} en une lettre de consolation sur sa mort, l’appela une Bibliothèque animée de toutes les parties des sciences. Il alla en Pologne où les belles et rares qualités de son esprit furent fort prisées et lui causèrent de grandes faveurs, qui furent les ailes qui donnèrent un vol si haut à sa poésie qu’il parut inimitable. Toutes les parties de sa vie ont été belles, et les dernières fort douces et tranquilles. Sa maison était la cour, et sa table, le refuge des beaux esprits. Il est vrai qu’il aima les délices, aussi bien du corps que de l’esprit, et les voluptés les plus rares lui étaient les plus voluptueuses. Il suivait curieusement toutes les lois d’une nature bien réglée, et évitait toutes ses répugnances. {d} Ses écrits étaient sans contrainte, ses discours sans afféteries ni ostentation, et sa mort fut sans effroi ni tremblement. Il défendit à son frère la publication de quelques écrits de sa façon, défense plus préjudiciable au public qu’à la réputation d’un si grand homme, qui en a assez laissé pour durer tant que la France parlera français. »


    1. Paris, 1631, v. notule {c}, note [59] du Borboniana 4 manuscrit)

    2. Au même temps que René de Beaune, archevêque de Bourges puis de Sens, mort en 1606 (v. note [46] du Borboniana 5 manuscrit.

    3. Philippe Vauquelin Des Yveteaux (1567-1649), poète français qui fut précepteur de César de Vendôme, puis vécut dans le libertinage.

    4. Propos ambigus et même contradictoires, dont les fumées semblent vouloir masquer des vérités alors inavouables.

48.

Reprise abrégée et altérée de l’article xvi des Lettres du pouvoir d’un Espagnol et des effets miraculeux de sa drogue appelée Higuiero d’Infierno, ou autrement Catholicon composé, pages 13‑14 de l’édition critique de la Satire Ménippée (autrement intitulé Le Catholicon d’Espagne) parue en 1882 à Paris (v. note [18], lettre 310) :

« Soyez aussi criminel que La Mothe Serrant, {a} soyez convaincu de fausse monnaie comme Mandreville, {b} sodomite comme Senault, {c} scélérat comme Bussy, {d} athéiste et ingrat comme le poète de l’amirauté : {e} lavez-vous d’eau de Higuiero, vous voilà agneau immaculé et pilier de la foi. »

Ch. de Marcilly, l’éditeur de 1882, a ainsi identifié ces personnages :

  1. Guillaume de Brie, sieur de La Mothe Serrant, gentilhomme angevin ligueur ;

  2. Guillaume Du Bosc, sieur d’Esmandreville, gouverneur de Sainte-Menehould pour la Ligue ;

  3. Pierre Senault, membre du Conseil des Seize (faction ligueuse parisienne qui contrôlait Paris) et greffier du Conseil de la Ligue, père de Jean-François, général des oratoriens (v. note [16], lettre 525) ;

  4. Jean Bussy Le Clerc, procureur de la Cour, membre du Conseil des Seize, gouverneur de la Bastille pour la Ligue ;

  5. Philippe Des Portes, dont le sobriquet tenait à ses relations avec Anne de Joyeuse, amiral de France (v. supra notule {a}, note [47]). Guy Patin s’en est souvenu dans sa lettre du 4 mai 1663 à André Falconet (v. sa note [15]).

Pour l’« eau de Higuiero », Ch. de Marcilly a transcrit à la fin de son édition un Discours de l’imprimeur sur l’explication du mot de Higuiero d’Infierno et d’autres choses qu’il a apprises de l’auteur (pages 323), ajouté à la 2e édition du Catholicon (1594). Il y écrit que le nom de cette curieuse panacée ligueuse se traduit en français par « Figuier de l’Enfer ». L’édition de Ratisbonne, 1664 (v. note [110] des Déboires de Carolus) en procure une longue explication, pages 319‑325.


Correspondance complète de Guy Patin et autres écrits, édités par Loïc Capron. – Paris : Bibliothèque interuniversitaire de santé, 2018. – Autres écrits. Ana de Guy Patin : Borboniana 8 manuscrit

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(Consulté le 19/04/2024)

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