L. latine reçue 14.  >
De Christiaen Utenbogard,
le 21 août 1656

[Collège de France, Ms Montaiglon, page 185 | LAT ]

Je salue [1] le très illustre M. Guy Patin, docteur et professeur royal.

Très illustre Monsieur, [a][1][2]

Votre jeune compatriote m’a remis à Leyde, le 26/16 août, [2] la simple lettre que vous m’avez écrite le 2d de juillet. [3] S’il y avait joint un mot de lui m’indiquant son nom ou son adresse, je vous aurais répondu par son intermédiaire et transmis un petit paquet ; mais j’ignore toujours où il demeure et comment il s’appelle. Je vous envoie donc celle-ci avec mon colis par la voie du très distingué M. Vander Linden. [3] Par cette lettre que m’a remise ce jeune homme, vous me demandez de répondre à tout ce que vous désirez savoir ; ce que j’avais déjà fait dans ma lettre du 13e de janvier, que vous m’avez dit avoir reçue le 5e de juillet, dans la vôtre du 7e de juillet ; j’y ai fait réponse le 22e, aux bons soins du très distingué M. Vander Linden, et je suis certain que vous l’aurez reçue. [4]

Ledit théologien, Voetius[5][4] est en vie et jouit d’une belle santé, au grand dam de notre République et de la Religion car c’est un insatiable semeur de calomnies, de mensonges et de zizanies, un créateur de nouveautés qui ne sont guère éloignées du parjure, un perpétuel docteur et dictateur. [6] Pour lui et ses disciples, les fêtes, non pas celles des saints, mais celles du Sauveur lui-même (Noël, Circoncision, Passion, Résurrection, Ascension, Pentecôte) vont contre la foi révélée ; ses adeptes les suppriment dans les prédications et catéchismes publics avec tant de rigueur qu’ils déclarent partout à grands cris que l’observance de ces fêtes, outre qu’elle est puérile ou ridicule, est bestiale et diabolique. Et pourquoi donc ? Parce que ce sont les inventions des papistes, avec lesquels ces déformateurs ne veulent rien avoir de commun. [7] Ils veulent faire croire, comme en des oracles descendus du trépied d’Apollon, [8][5][6] que quiconque aura mangé, même en petite quantité, des crêpes qu’on fait au temps du Carnaval avec de la fleur de farine et des œufs, [7] doit être accusé de détestable superstition papimanesque. À nous qui sommes chrétiens, ils prescrivent d’observer le jour du Seigneur avec plus de rigueur que ne faisait Moïse [8] au peuple juif pour le sabbat ; et même certains de nos Turbo [9][9] se sont laissé aller jusqu’à un tel point de sévérité pharisaïque que leurs hypocrisies pharisiennes[10][10] sur lesquelles le Christ a tant de fois jeté l’anathème, surpassent de loin le précisisme de Voetius. [10] En vérité, prenant à témoin les propres paroles du Sauveur, on se demande s’ils auraient tiré du puits le bœuf qui y était tombé un jour de sabbat. [11][11] Certains d’entre eux n’autorisent aucun chrétien à travailler le dimanche et ne peuvent y tolérer d’exception, même quand il y a péril de mort ; certains proclament que tous les maux de notre patrie proviennent de la seule profanation du sabbat ; d’autres plus criards braillent que de très grands malheurs menacent le pays en punition de cette seule ignorance bestiale qui nous attache, nous pseudo-chrétiens voués aux flammes éternelles, au respect des jours fériés. Et voilà comment cette race de vipères épouvante le peuple tremblant sous ses menaces. Ô ferment plus que pharisaïque ! Les innovations des pharisiens sont contraires non seulement aux règles de tous les chrétiens, mais surtout au Synode national de Dordrecht, [12][12] auquel tous les prédicateurs publics de nos Provinces [13] se sont liés par un serment d’obéissance. Secouée par les nouveautés de nos amis des ténèbres, la Nation tout entière tremble. Dans la plupart des villes de Hollande, les pasteurs s’opposent diamétralement à nos novateurs ; qui plus est, en cette province, dans la ville d’Amersfoort, [14] tous sont hostiles aux prêches des nôtres. Qui plus est, dans cette même cité, trois pieux ministres (qui

Mirantur Patriæ patres tolerare nefanda[13]

se sont souvent opposés avec bon sens aux autres dans les assemblées ; mais ceux qui font la loi, agissant entre eux en coulisse, vainquent toujours ces docteurs évangéliques. Bien des gens craignent que cela n’aboutisse à un nouveau schisme. Dieu est le maître de ces tempêtes ; nous lui demandons d’inspirer à nos saints hommes, ses ambassadeurs sur la terre, et à ceux qui observent fidèlement les deux Testaments [Collège de France, Ms Montaiglon, page 186 | LAT ] le courage de ficeler et enchaîner ces Turbo. Voilà peu de semaines, le Synode de Hollande-Méridionale a décidé qu’avant d’être admis à prêcher, tous les postulants qui s’y présentent soient très rigoureusement examinés pour savoir s’ils ne couvent pas en leur sein les nouveautés de ceux d’Utrecht : si tel est le cas, ils sont frappés de répudiation par autorité des Ordres de Hollande, auxquels nous devons gloire et honneur pour cette résolution ; et je leur souhaite la perpétuité de la République de Venise pour leur extrême vigilance à éviter qu’une nouvelle papauté ne se développe plus avant. [14][15]

On m’a dit que les imprimeurs ont sous leur presse le troisième tome des Disputationes Theologicæ, mais qu’elles ne seront pas achevées avant le printemps prochain ; un quatrième puis un cinquième suivront. [15] J’apprends qu’on imprime à Leyde, in‑4o, les Epistolæ de votre incomparable Saumaise, et que l’édition en est presque terminée. [16][16] Comme je n’ai pas pu trouver ici l’Oratio de Freitag, je l’ai demandé à Groningue (comme je vous l’écrivis le 22e de juillet), [4][17] mais MM. les professeurs m’y ont répondu qu’elle n’est plus en vente. Étant à Amsterdam la semaine passée, je l’y ai cherchée avec soin sans la trouver ; mais en m’en enquerrant auprès du très illustre M Schoock, [18] je lui ai en même temps demandé s’il vous tenait pour digne de quelque fruit de ses veilles (vous qu’il a pris l’habitude d’appeler τον υπερμεγιστον et juste après τον πανυ M. Patin), à m’expédier très rapidement [17] car le très distingué M. Vander Linden devait sous peu vous adresser un petit paquet. Il m’a donc envoyé ce qu’il avait sous la main : ses Disputationes, ses Orationes et son livre de Scepticismo[18] avec la réponse que le très célèbre M. Desmarets, théologien français, a opposée à la Theologia naturalis reformata[19][19] et avec, bien entendu, sa lettre ci-jointe. [20] Ce M. Schoock est mon compatriote, il est né et a été élevé dans mon voisinage ; il fut jadis l’élève, l’intime ami, le secrétaire et même le garde du corps de notre Ismaël. [21][20] Dans l’ardeur de l’imprévoyante jeunesse, il fit résolument serment d’allégeance à son maître, défendant très souvent cet homme abominable contre tout le monde, même aux dépens de sa propre réputation. Enfin, sous l’impulsion de son précepteur, il a écrit contre la philosophie de Descartes ; puis de Groningue, [21] il a envoyé ce livre à son maître pour qu’il fût imprimé à Utrecht. Ce dernier y a attaché le nom de son disciple (à l’insu et même contre le gré de Schoock) et lui a donné pour titre Admiranda methodus Philosophiæ Cartesianæ, après que sa main scélérate y eut fait quantité d’additions sur l’impiété et même l’athéisme de Descartes, le comparant à Vanini et le dépeignant comme un Caïn errant. [22][22][23][24] Ébranlé par ces très atroces calomnies, Descartes s’est plaint d’insulte inacceptable devant le tribunal de Groningue. Voyant que son précepteur l’avait mis dans une situation extrêmement critique, inquiet de sa propre réputation et comme enfin réveillé d’une profonde léthargie, [25] Schoock fut enfin contraint d’abandonner ce maître impie qui (crime vraiment insigne !), entre autres, lui a écrit ces mots le 21 janvier 1645 :

Ante hac ad te scripsi, et consilium suggesti : non dubito quin scriptio illa jam reddita sit. Inter cetera consului, ni fallor, ut quæsitores tuos ableges ad testimonium tuum, quod traditum fuit senatui Ultrajectino, et sub manibus ejusdem etiamnum asservatur. Non poteris tecum et cum testimonio tuo, nec etiam mecum committi, si ex rei veritate nihil aliud respondeas quam nunc scripto testimonio tuo declarasti. Summa huc redit : Te ex te consilium cepisse et statuisse ; teque opus illud quod ad materiam, formam, methodum, stylum, inchoasse, absolvisse ; chartas et schedas à me tibi nullas suppeditatas, aut submissas, nec ullam vel minimam pagellam præformatam, quam tu describendo tuam feceris. Nam semper hoc falsum præsupponunt, aut ex malitia præsupponere volunt, te scilicet juniorem, tantum tuo ingenio et studio non posse (quia scilicet de suo ingenio hoc sperare non ausint) itaque aliena vitula tibi arandum. Quod si quærant, an ego conscius fuerim illius consilii, scriptionis et editionis ? respondendum est : sic opinor, quia Ultrajecti promiscue [Collège de France, Ms Montaiglon, page 187 | LAT ] quivis conscii erant, cum in angulo gesta non sint, sed in officina typographica et libraria, quam professores, advocati, studiosi quotidie frequentant. Si quærant an ego correctioni ad prælo præfuerim ? responde te de eo nihil posse testari tanquam testem oculatum, quippe qui Ultrajecti non fueris. Hoc scire te, provinciam illam a te demandatam D. Waterlaet, qui una cum typographo testetur, non a V. (cui tantum otii non est) sed ab ipso D. Waterlaet fuisse correctionem illam susceptam et procuratam[23][26]

Est-ce là autre chose que prescrire un faux serment ? Que cette vertu est donc digne d’un éminent théologien ! La lettre est très longue et je n’en ai extrait que ce petit fragment. J’en détiens l’autographe depuis déjà plus d’un an. Dans la crainte qu’elle ne soit interceptée, notre très astucieux théologien ne l’a pas signée autrement que par Tuus quem nosti ; [24] mais devant les juges, il a reconnu cette lettre pour sienne quand, traîné par lui en justice, Schoock l’a montrée au tribunal pour l’une des preuves de son innocence. Qui donc, en lisant de telles formules de parjure, dictées et prescrites à son élève par un théologien d’âge mûr, prédicateur et professeur, qui donc, dis-je, ne le tiendrait pour un homme impie, indigne de l’honorabilité théologique ? Tant s’en est fallu qu’au contraire, grâce aux juges qui lui étaient affidés, Voetius l’a emporté sur Schoock, qui a fait appel de cette sentence devant le tribunal de la Province. Le précepteur ignorait absolument s’il aurait là autant de juges qui lui seraient favorables ; mais grâce à un membre de ce tribunal, notre très habile théologien a pourtant su jusqu’à ce jour mener l’affaire pour que ce procès indécis soit suspendu pendant quelques années, nonobstant les requêtes quotidiennes des défenseurs de Schoock. Il est toutefois intolérable que depuis lors le fils du précepteur ait par deux fois faussement accusé Schoock de parjure (comme vous lirez à la page 371 de la Dissertatio de bonis vulgo ecclesiasticis, que je vous envoie), [25][27] pour l’unique raison qu’il n’a pas voulu parjurer en faveur de son précepteur, lui dont il avait tant de fois assumé le patronage, non sans déshonneur pour sa propre réputation ; comme si Schoock était entièrement bâti de bois ou enveloppé de cuir d’éléphant. Je vous en écrirais bien plus sur cet extraordinaire théologien ; mais qu’avez-vous à faire de notre Babel [28] et de la haine théologique de ceux qui judaïsent ici ? [26] Puisse Dieu nous en délivrer et nous défendre contre les crissements infernaux des pieds couverts de fange. [27] Je vous envoie le Thersites que vous avez demandé, avec la Confutatio insulsi et maledici libri[28][29] J’y ajoute l’Examen accuratum Disputationis primæ, avec ses Corrolaria repetita ex Disputatione prima[29] J’y aurais très volontiers joint la Disputatio prima, mais je n’ai pu la trouver, bien que je l’aie cherchée avec la plus grande application. Je me suis depuis rendu compte que deux livres ont jadis été écrits (par l’Academia et par le Gymnasium d’Utrecht) sur cette matière, à savoir contre la Disputatio prima et contre le médisant Thersites ; j’y ai employé toute ma diligence, mais n’ai trouvé que celui du Gymnasium[30] Lisez-en la Præfatio ; mais je voudrais vous prévenir qu’on y dit bien des choses contre le très distingué M. Schoock, et non sans qu’il l’eût mérité : [31] c’était contre Schoock tel qu’il fut jadis, quand avec une ardeur juvénile, il agissait en champion de son précepteur, et non tel qu’il est désormais, en antagoniste de ce théologien ; étant un enfant, il parlait alors comme un enfant, mais maintenant qu’il est devenu adulte, il parle comme il convient à un homme adulte. La thrasonique Disputatio prima, que j’ai longtemps recherchée, vient immédiatement après cette Præfatio ; suit le Gymnasium Ultrajectinum, c’est-à-dire l’accuratum Examen[32] Lisez-le à loisir. J’ajoute la fort érudite Epistola du très distingué M. Schoock au très distingué M. Jo. Hoornbeeck, tirée d’une intime connaissance de l’Antiquité. [33][30] Quand l’auteur parle des Auteurs du manuscrit, il entend l’Avis théologique de Voetius (qu’il appelle l’Adversaire, car le procès que Schoock a engagé pour injures contre lui est suspendu). C’est Voetius en personne qui l’a rédigé en flamand et seuls quelques-uns de ses collègues l’ont contresigné ; le tribunal l’a donc réfuté comme étant un avis parfaitement schismatique, dans la mesure où tous les collègues n’y ont pas souscrit. Voetius a distribué de nombreuses copies de son schismatique Avis[34] [Collège de France, Ms Montaiglon, page 188 | LAT ] Ce fameux Avis a fini par être publié, à l’insu de Voetius (prétend-il). Le tenant pour une pasquinade [31] et pour un libelle diffamant, l’Assemblée de la Ville en a interdit la diffusion, comme étant très mensonger et non seulement injurieux envers de très nombreux citoyens honnêtes, mais surtout blasphématoire à l’encontre de Dieu et de nos dirigeants ; [35] mais ils n’ont rien entrepris contre l’auteur (qu’ils savaient être Voetius, et lui-même n’en était pas disconvenu). Il résulte de cette interdiction sans effet qu’on le trouve en vente chez tous les libraires, sans le moindre scrupule. Voyant qu’il avait impunément craché des charretées d’injures contre tout le monde et contre les gouvernants eux-mêmes, l’auteur a publié ce mois-ci, en flamand, la seconde partie de cet Avis outrageant et séditieux. [36] Sans plus cacher son nom, il l’a encore bien plus rempli d’invectives que la première fois (car la liberté sans frein nous rend tous pires), puisque ces audacieux docteurs sont ceux que saint Pierre nous a prédits dans le chapitre 2 de sa Deuxième Épître, qui per avaritiam fictis sermonibus nos negotiaturi, carnem sequentes in impura cupiditate incedunt, et dominatum despiciunt, audaces et sibi placentes, non horrent dignitates convitiis incessere, ipso Lucifero pejores[37][32] En 1641 (si j’ai bonne mémoire), au début des désordres britanniques, un quelconque philosophâtre a disputé ici une thèse politique de Tyrannis qui, entre autres horreurs et abominations pour tout homme chrétien, permettait au magistrat d’attaquer un roi tyrannique, en tant que voleur public, et même à tout particulier de tuer un magistrat tyrannique. [38] Notre Ismaël, ledit théologien, [21] a envoyé quelques centaines d’exemplaires de cette thèse criminelle à ses conjurati fratres d’Angleterre.

(En conjuratos cœlum rescindere fratres ![39][33]

En Angleterre, il eût alors été sacrilège pour les affaires du roi de disputer sur de tels sujets, comme ce l’est encore maintenant qu’elles sont assez bien établies. [40][34] Mais pour ne pas vous laisser croire que je vous raconte des sornettes, j’ai vu et lu une lettre autographe que ledit théologien a alors écrite à Schoock sur ce sujet ; je me rappelle qu’il y disait avoir envoyé en Grande-Bretagne 300 exemplaires de la Disputatio de Tyranno, et les Britanniques lui avaient répondu qu’ils avaient reçu cette thèse et sa lettre avec immense joie, et que plusieurs de ceux à qui ils les avaient distribuées manifestaient le désir d’être dirigés par l’homme d’Utrecht. Jugez donc si ce chef doit être compté au nombre des parricides et des tueurs de rois. J’ajoute l’Ultima Patientia a Voetio expugnata du très distingué Desmarets, [41] ainsi que le liber Grallarum, qui vaut de l’or, imo ne auro quidem contra carum[42][35][36] auquel on a adjoint la Bombomachia Vlissingana et le Grallator furens[43][37] Je me doute assez qu’ils seront à votre goût. Ils ont paru au début de mon voyage ; de retour chez moi, complet silence à leur sujet, ces disputes semblaient si assoupies que je n’ai presque jamais entendu dire un mot des Grallæ ; mais comme l’an passé s’est accomplie la prophétie de l’auteur (qu’ils veulent être Petrus Lansbergius : avant que la hiérarchie n’ait été solidement établie à Walcheren, il fut distingué par la dignité de bourgmestre à Middelbourg ; à présent exilé à La Haye par la haine des théologiens, il exerce ici la médecine avec bonheur), [44][38][39][40] comme on voit à la page 17, où il dit ces mots : Nec incertum est alibi quoque similia insecta latere, sed torpida et quasi intra testam hærentia, quorum tamen nemo tam ignavos spiritus fovet, quin si felicem successum invenerit Walachrus pullatus, brevi similium Zelotarum magna ubique adfutura sit copia[45] Nous avons vu cela se produire cette année et y avons grandement pris part en éprouvant le joug papiste chez nos frères de sang, contre qui les nouveaux papistes judaïsants de notre ville (dont ledit théologien est le pape) brandissent leurs foudres.

Ange Politien :

Sed qui nos damnant, histriones sunt maxumi,
Nam Curios simulant, vivunt Bachanalia
Hi sunt præcipue quidam clamosi, leves,
Superciliosum, incurvicervicum pecus
Qui quod ab aliis habitu, et cultu dissentiunt,
Tristesque vultu vendunt sanctimonias
Censuram sibi quandam, et tyrannidem occupant
Pavidamque plebem territant minaciis
[46][41][42]

Chez vous les fratres fraterrimi jouent depuis longtemps leur vieille comédie, et voilà que chez nous, les patres paterrimi entament le même refrain. [47][43] Fabula vetus, actores novi[44] mais si chez vous, ils se sont présentés en couleurs blanches, noires, grises et mêlées, chez nous elle est unique, c’est un noir semblable à la poix et au charbon ; et il nous arrive véritablement ce que dit le proverbe : canis reversus ad proprium vomitum et sus lota ad volutabrum cæni ; [48] tant et si bien que beaucoup craignent [Collège de France, Ms Montaiglon, page 189 | LAT ] qu’une fois chassé cet immonde esprit de papauté désespérée, il ne revienne, amenant avec lui sept autres esprits pires que lui, comme il est dit dans l’Évangile ; [49][45] mais puisse Dieu nous épargner ce malheur. Tandis qu’ici les choses en sont là et qu’avec moi bien des gens se lamentent sur ces temps et sur leurs mœurs (quel tourment, hélas !), plusieurs m’ont recommandé ces Grallæ ; et après les avoir lues, j’ai mis toute ma diligence à chercher cet exemplaire pour vous. Si d’aventure vous ne les avez pas encore lues, feuilletez-les donc je vous prie, si du moins le souci de nos affaires vous émeut ; car celle que cet auteur a composée contre ceux de Walcheren, [42]

Nostris prælusit fabula rebus[50]

J’ajoute les Magni Cartesii manes, comme un inconnu me les a envoyées hier ; vous y verrez dévoilés technæ, calumniæ, mendacia, falsorum testimoniorum fabricæ etc. Voetiorum et Dematii[51][46] Vous pourrez y lire, page 19, l’extrait que j’ai ci-dessus tiré d’une lettre du 21 janvier 1645 sur la formule de parjure que le vieux théologien a prescrite à son disciple. [52] Mais pourquoi donc m’emporter ? Quand il s’agit de deviser avec un ami soucieux de l’état présent de mes affaires, voilà que je relâche les fibres intérieures de mon esprit et que je répands dans le secret de son cœur ce que je ne voudrais pas que sût notre pape (lui qui règne ici en maître), sauf à vouloir être couronné pour martyre, tant cette hydre est une farouche bête infernale. [53][47] Dirais-je d’elle que c’est un monstre ou un prodige ? Les actions en dommage qu’elle poursuit avec la plus grande furie contre tous, sont pour elle nectar et ambroisie ; [48] la pure religion consiste pour elle à ne supporter personne, à poursuivre tout le monde, foulant des pieds les lois, humaines comme divines, [54] corrompant la pure religion de son haleine empoisonnée, semant le désordre dans tout gouvernement avec ses sifflements infects. Tandis que je vous écris ces mots, me vient cette épigramme :

Voetius est exlex, fidei contortor acerbus,
Enervans leges ; juratos despicit actus
Quod + Synodus patriæ quondam contexit in unum
Dordraci : physicæ deceptans diffidet arti,
Implorans monachum ; negat hoc quærente senatu :
Convictus scripto, fidum supplantat Achatem.
Dissidium refovens, crimen dignoscere non vult.
Nec fratres se odisse putat, conjurgia tractans ;
Prostituens cænam Domini derepsit ovile.
Subtrahit imperium Patribus, coetumque ministris :
Christo dissimilis, fulmen papale resumit :
Pontificis fratri populus servire tenetur.

+ et ipse istis synodi membrum fuit, tanto pejus[55]

Mais mon épigramme est si mal écrite que je peine moi-même à en bien discerner le sens. Quand les théologiens de Leyde ont prononcé leur opinion sur les sociniens, [56][49] ils l’ont exposée aux États de Hollande [50] par un décret public mettant en garde contre ces Polonais et leur doctrine ; mais quand un gentilhomme de Pologne a écrit une Apologia contre ce conseil de théologiens et contre le décret des États, qu’il a intitulée pro Veritate accusata[57][51] un nouveau décret a été prononcé contre son livre et a été observé avec extrême sévérité ; si bien qu’on n’a nulle part pu trouver son apologie, et ceux qui l’avaient reçue en cachette n’avaient osé la montrer à personne ; jusqu’à ce qu’enfin, tout récemment, paraisse, en flamand et en latin, l’examen de cette Apologia pro Veritate accusata par Cocceius, professeur de Leyde. [58][52] Protégé par ce bouclier comme par l’Égide, [59][53] le livre, qu’on a si strictement interdit sans cet écu, [Collège de France, Ms Montaiglon, page 190 | LAT ] se trouve désormais partout ; parce qu’il vient de paraître et qu’il contient des références nouvelles et anciennes, j’ai voulu le soumettre à votre curiosité et à votre très mûr jugement (auquel je me soumets volontiers), tant sur l’Apologia elle-même que sur l’avis de ceux de Leyde concernant les erreurs ou les blasphèmes (comme ils disent) des Polonais ou sociniens. Les mains de tous feuillettent maintenant à l’envi la Satyra Menippea de Cunæus, [60][54] qu’il a jadis écrite contre les hommes sottement savants de son siècle, qui sont en quête de pouvoir sur tous les esprits et leur apprennent à devenir les esclaves de la caste la plus noble, la seule à qui n’est pas conféré le devoir de soumission ; j’ai donc voulu l’ajouter, si par hasard vous ne l’aviez pas déjà, pour que vous lisiez cette fable antique qui décrit parfaitement nos Turbo. [7] J’en termine par la seule et unique supplication de mettre tous vos soins pour que le pape qui règne ici n’apprenne pas que je vous ai écrit tout cela, car il possède un esprit inflexible et intransigeant, et il est très attentif à la règle impie qu’on applique chez les théologiens : Chi piu pecca, manco perdona[61] Je vous ai très abondamment parlé de ce saint homme que vous feriez mieux d’oublier ; mais, très célèbre et très irréprochable ami, parce que de præsenti rerum mearum statu valde anxius es, vivamne nimirùm an valeam[62] j’ai jugé nécessaire de vous écrire force détails sur ce personnage, que je dirai plutôt être la Furie infernale ? [63][55] Car outre qu’il sème le désordre dans toute notre République, il écrase des pieds les membres de notre famille, un à un. [64] Mais comme nos aïeuls et bisaïeuls furent les premiers dans ces Provinces à secouer le joug d’une papauté sans espérance, pour que nous ne paraissions pas dégénérés, nous nous opposerons courageusement, avec l’aide du Bon Dieu, à cette engeance pharisaïque de vipères ; jamais nous ne tolérerons qu’on nous mette à nouveau autour du cou ce joug que ni nous-mêmes ni nos pères n’avons pu supporter. [65][56] S’il a semblé bon à nos potentats de s’incliner en toutes choses devant les papes (ce qu’ont fait, et bien avant eux, tant d’empereurs et de rois émasculés), il faudra succomber ou se retirer, comme bien des gens le prévoient (Dieu veuille nous soustraire à ce funeste présage) ; et si mes parents décrépits, à qui je dois tout après Dieu, ne s’y étaient opposés, vous m’auriez même déjà vu revenir dans votre pays. Pour ne rien vous cacher, je préférerais en effet être n’importe où ailleurs qu’à Utrecht ; ou du moins en l’état présent des affaires, pour que nous n’alliez pas dire

Patriæ inimicum suæ, nolo amicum mihi[66]

Je ne suis pas ennemi de la patrie, mais très amoureux de la liberté qu’ont chérie mes aïeux ; cane pejus et angue odi [67][57][58] la hiérarchie qui s’y insinue. Vale, très illustre Monsieur, et continuez d’aimer celui que vous avez toujours entouré de votre immense affection, lui que vous connaissez comme vous honorant avec sincérité et dévotion,

À Utrecht, le jeudi 26e d’août 1656.

Christiaen Utenbogard, médecin d’Utrecht.

Lettre que j’ai reçue le mercredi 24e de janvier 1657 et à laquelle j’ai répondu le vendredi 2d de février suivant. [68]


a.

Coll. Fr. ms Montaiglon, pages 185-190 : autographe de la seule lettre que nous ayons de Christiaen Utenbogard à Guy Patin, consistant en trois feuillets (six pages) couverts d’une écriture serrée (mais bien lisible, en dépit d’un jeu d’abréviations inaccoutumées que j’ai développées dans la transcription) ; marques de pliage, sans signature de l’expéditeur (en raison du contenu fulminant à l’encontre de Voetius et de ses adeptes) et sans adresse ni traces de cachet.

Trois annotations manuscrites de Patin (mises en italique dans la transcription et dans la traduction, où elles sont aussi signalées dans les notes) attestent qu’il a lu cette lettre avec toute l’attention qu’elle méritait.

Pour l’ordre chronologique des lettres, j’ai conservé la date du 21 août, bien qu’il s’agît probablement du 31 dans le calendrier grégorien (nouveau style, v. note [12], lettre 440).

1.

S.D., Salutem Do [Je salue]. V. note [3], lettre latine 54, pour mes supputations sur la mention du titre de professeur royal à la fin de la suscription.

2.

Double datation, grégorienne (nouveau style en vigueur en France), et julienne (ancien style alors encore en vigueur dans les Provinces-Unies protestantes), v. supra note [a].

3.

Au début de sa lettre du 2 juillet précédent, Guy Patin avait fait un chaleureux éloge de Gisbertius Voetius et de ses Disputationes theologicæ [Discussions théologiques] (v. infra note [15]). Christiaen Utenbogard le tenait au contraire pour un fanatique extrêmement nocif et, comme on va voir, sa réponse voulait très franchement mettre Patin en garde contre le dangereux théologien d’Utrecht.

4.

Au début de sa lettre du 7 juillet 1656 à Christiaen Utenbogard, Guy Patin accusait réception de celle qu’il lui avait écrite le 13 janvier (reçue le 5 juillet) et s’engageait à ne plus lui parler de Gisbertus Voetius (dont Utenbogard avait déjà dû lui dire le mal qu’il pensait).

La suivante de Patin à Utenbogard dont on ait le brouillon est datée du 24 novembre 1656 : il n’avait toujours pas reçu la présente et ne parlait pas de celle qu’Utenbogard lui avait envoyée le 22 juillet.

5.

La plume de Guy Patin a ajouté le mot Voetius dans la marge de la lettre.

6.

Au sens premier, zizanie est synonyme d’ivraie (zizanion en grec), mauvaise graine qui vient parmi le bon grain. Le mot « se dit figurément en morale, et signifie discorde, division, mésintelligence. Malheureux sont ceux qui sèment la zizanie dans une famille, dans une communauté, parmi les peuples » (Furetière). Guy Patin n’a jamais employé ce mot dans ses lettres. Christiaen Utenbogard a ici usé de son génitif pluriel latin (zizaniarum).

Docteur (doctor) est à prendre en mauvaise part, dans le sens de « donneur de leçons » ; ou pire, comme remarquait Furetière : « On dit ironiquement et à contresens des ignorants, c’est un grand docteur, un docteur en soupe salée. »

7.

Avec le néologisme déformateurs, j’ai cherché à traduire le néolatinisme de Christiaen Utenbogard, deformatores, qu’il voulait opposer à reformatores (réformateurs).

8.

Dans la mythologie grecque, Xénoclée, prêtresse d’Apollon (v. note [8], lettre 997) et pythie de Delphes, prononçait ses oracles assise sur un trépied. Hercule (v. note [3], lettre de Reiner von Neuhaus, datée du 21 octobre 1663) le lui enleva parce qu’elle ne voulait pas répondre à ses interrogations. Furieux de l’affront, Apollon descendit de l’Olympe et engagea un combat avec Hercule ; Zeus sépara les deux lutteurs, il les força à se serrer la main et Hercule rendit son trépied à la devineresse (féminin de devin attesté par Furetière).

9.

Antonomase de Quintus Marcius Turbo, général romain du iie s., préfet du prétoire de l’empereur Hadrien (v. note [40], lettre 99), qui est resté le symbole du zèle acharné : jamais il ne se reposait, poussant son dévouement jusqu’à venir voir le souverain au milieu de la nuit ; quand Hadrien lui conseilla de prendre un peu de tranquillité, il lui répondit que le préfet du prétoire doit mourir debout.

En latin, le nom commun turbo a le sens de « tourbillon », et le verbe turbare, celui de « semer le désordre ».

10.

J’ai ici traduit le mot de Christiaen Utenbogard, præcisitas, par précisisme, qui était une forme de rigorisme religieux outrancier. Le mot ne se lit que dans les écrits théologiques de l’époque, tels ceux de Gisbertus Voetius ou de Marten Schoock (v. 6e référence citée dans la note [2] de sa lettre, datée du 12 août 1656). Il dérive de l’anglais precisianism qui servait depuis les années 1570 à qualifier la doctrine des precisians, genre de puritains qui prônaient la plus stricte observance de leurs préceptes religieux (Oxford English Dictionary). Littré (DLF) en a tiré les substantifs précisien et précisiste pour désigner un « membre d’une secte calviniste anglaise, qui est rigoriste ».

V. note [14], lettre 83, pour les pharisiens et le pharisaïsme.

11.

Évangile de Luc (14:1‑6), sur un miracle de Jésus :

« Or, il était entré un sabbat chez l’un des notables pharisiens {a} pour y prendre son repas, et eux l’observaient. Justement, un hydropique {b} se trouvait devant lui. Prenant la parole, Jésus dit aux légistes et aux pharisiens : “ Est-il permis, le sabbat, de guérir ou non ? ” Et ils se tinrent cois. Il prit alors le malade, le guérit et le renvoya. Puis il leur dit : “ Lequel d’entre vous, si son fils ou son bœuf vient à tomber dans un puits, ne l’en tirera aussitôt, le jour du sabbat ? ” Et à cela ils furent incapables de rien répliquer. »


  1. V. supra note [10].

  2. V. note [12], lettre 8.

12.

Le Synode de Dordrecht, assemblée ecclésiastique néerlandaise réformée, s’était réuni en 1618-1619 pour condamner l’arminianisme (v. notes [7], lettre 100, et [65] infra) et confirmer son attachement indéfectible aux canons du calvinisme.

13.

« S’étonnent que les pères de la patrie tolèrent les crimes ».

J’ai respecté la mise en page du manuscrit en plaçant cette parenthèse entre deux alinéas, pour en faire une citation. La source de ce latin me semble tortueusement issue de la page 538 de la Lusitania liberata ab Injusto Castellanorum dominio… Per D. Antonium de Sousa de Macedo Lusitanum, Aulæ Generosum, Regii Ordinis Christi Equitem, ac Commendatorium ; in supremo Lusitaniæ Senatu Senatorem, Expeditoremque gravaminum, atque appellationum… [Lusitanie libérée de l’injuste domination des Castillans… par M. Antonio de Sousa de Macedo, gentilhomme portugais, chevalier et commandeur de l’Ordre du Christ-Roi ; conseiller en la Cour suprême de Portugal, et commissaire des requêtes et des appels…] (Londres, Richardus Heron, 1645, in‑4o) :

Noverunt Lusitani, libelli finem esse, legitimam fingere eorum servitutem ; et gravius, quam servitutem, videbant sævissime calumniatos Principes quos non solum recordabuntur Reges, sed patres ; mirabantut Castellanum Philippum 4. tolerare nefanda scripta, infamantia splendorem nationis, dignitatem Regni, et honorem illorum quos avos agnoscebat ; unde inferebant animum ejus qui, ut illos perderet, injurias proprias non recusabat.

[Les Portugais savaient que le libelle {a} avait dessein de légitimer leur servitude ; et pire que leur servitude, ils voyaient très cruellement calomniés leurs princes dont ils se souvenaient non seulement comme de leur rois, mais comme de leurs pères, en s’étonnant que le Castillan Philippe iv {b} tolérât des écrits criminels, {c} infamants pour la splendeur de leur Nation, la dignité de leur royaume et l’honneur de ceux qu’il reconnaissait pour aïeux ; d’où ils déduisaient l’esprit ce celui qui, pour les perdre, ne refusait pas de les injurier proprement].


  1. Philippus prudens Caroli v. Imp. Filius Lusitaniæ, Algarbiæ, Indiæ, Brasiliæ legitimus Rex demonstratus. A D. Ioanne Caramuel Lobkowitz Religioso Dunensi Ord. Cister. S.T. Doctore Lovaniensi et Melrosensi Abbate [Le sage Philippe, {i} fils de l’empereur Charles Quint, est prouvé être le roi légitime de Lusitanie, d’Algarve, d’Inde, de Brésil. Par don Juan Caramuel y Lobkowitz, {ii} religieux de l’Ordre de Cîteaux en l’abbaye des Dunes, {iii} docteur en théologie sacrée de Louvain et abbé de Melrose] {iv} (Anvers, Balthasar Moretus, 1639, in‑4o). {v}

    1. Philippe ii, roi d’Espagne en 1556, fut aussi roi du Portugal de de 1580 à sa mort en 1598.

    2. Madrid 1606-Vigevano 1682.

    3. Près de Furnes (Flandre-Occidentale).

    4. En Écosse.

    5. Avec un frontispice fort éloquent.

  2. Roi d’Espagne de 1621 à 1665.

  3. Mise en exergue du passage que Christiaen Utenbogard me semble avoir emprunté, dont il aurait altéré le sens, la ponctuation, la syntaxe {i} et le contexte. {ii}

    1. En passant de l’adjectif nefandus [criminel] au substantif nefandum [crime].

    2. En glissant audacieusement des revendications espagnoles sur la Couronne de Portugal sous le règne de Jean iv (1640-1656, v. note [27], lettre 86) aux querelles religieuses hollandaises de 1656, où sévissait une tout autre forme de despotisme.

Amersfoort est une ville de la province d’Utrecht, située à 17 kilomètres au nord-est de sa capitale. Ses pasteurs résistaient au fanatisme de ceux d’Utrecht.

14.

V. note [6], lettre 25, pour l’interdit (excommunication) prononcé en 1605 par le pape Paul v contre la République de Venise, qui refusait de se soumettre à son autorité.

15.

V. note [8], lettre 534, pour les « Discussions théologiques » de Gisbertus Voetius dont le 3e tome a paru en 1659, et les deux suivants en 1667 et 1669.

16.

V. note [12], lettre 392, pour le Claudii Salmasii epistolarum liber primus… [Premier livre des lettres de Claude i Saumaise…] (Leyde, 1656).

17.

Le superlatif adverbial latin oxyssime est un hellénisme dérivé d’oxus (οξυς, rapide). Marten Schoock (v. note [4] de sa lettre datée du 12 août 1656) employait deux adjectifs grecs pour qualifier Guy Patin de « très grand… très fameux ».

V. note [12], lettre latine 43, pour l’Oratio panegyrica de persona et officio Pharmacopæi… [Discours panégyrique sur le rôle et la fonction du pharmacien…] de Johann Freitag (Groningue, 1633), que Guy Patin cherchait inlassablement à se procurer.

18.

Marten Schoock offrait à Guy Patin deux des nombreux ouvrages qu’il avait alors publiés (en les accompagnant de sa lettre datée du 12 août 1656) :

19.

La « Théologie naturelle réformée » de Gisbertus Voetius et de ses adeptes était celle que défendait alors la :

Pauli Voet, Iuris in Academia Ultrajectina Antecessoris, Theologia naturalis reformata. Cui subjecta Brevis De Anima Separata Disquisitio.

[Théologie naturelle réformée de Paulus Voet, professeur de droit en l’Université d’Utrecht, {a} à laquelle est jointe une brève dissertation sur l’Âme séparée]. {b}


  1. V. infra note [25], notule {b}.

  2. Utrecht, Johannes a Waesberge [Jan Jansson], 1656, in‑4o ; ouvrage dont il sera question dans la suite de la lettre.

    La Brevis Disquisitio (pages 575‑614, et dernière) traite de l’indépendance de l’âme par rapport au corps.


Samuel Desmarets, théologien calviniste français de Groningue, {a} était au cœur de cette querelle, mais ne pouvait bien sûr pas avoir déjà répondu à ce livre. Il avait alors récemment publié deux ouvrages sur le sujet la :

20.

Lettre de Marten Schoock à Guy Patin, datée du 12 août 1656.

21.

Christiaen Utenbogard utilisait ici le nom d’Ismaël, fils aîné d’Abraham que son père chassa afin de favoriser son cadet, Isaac, pour désigner Gisbertus Voetius, le schismatique de l’orthodoxie calviniste néerlandaise.

La tradition biblique et coranique désigne Ismaël comme le fondateur du peuple arabe.

22.

Admiranda Methodus Novæ Philosophiæ Renati des Cartes.

[Admirable méthode de la nouvelle philosophie de René Descartes]. {a}


  1. Utrecht, Joannes a Waesberge, 1643, in‑12, sans nom d’auteur sur la page de titre.

    On y trouve une longue préface de Marten Schoock, qui dénonce l’athéisme et l’incompétence médicale de Descartes, mais sans mentionner le nom de Gisbertus Voetius.

    Suit une dédicace en vers latins signée VW. [Lambertus Vanden Waterlaet (v. infra notule {c}, note [23])] et intitulée In Methodum Philosophiæ R.D.C. Per Clarissimum, Celeberrimum, ac Subtilissimum Virum, D. Martinum Schoockium, in alma Groningo-Omlandica Academia Philosophiæ Ordinarium Professorem etc. Luci datam [Contre la méthode de philosophie de R.D.C., ouvrage publié par le très brillant, très célèbre et très pénétrant M. Marten Schoock, professeur ordinaire de philosophie en la vénérable Université de Groningue et Ommenlanden, etc.].

    L’exposé critique sur la Philosophia Cartesiana [Philosophie cartésienne] est long de 273 pages.


Dieu chassa Caïn du Paradis terrestre : fils d’Adam et Ève, il avait tué son frère Abel et fut condamné à l’errance perpétuelle.

V. note [21], lettre 94, pour le philosophe athée italien Giulio Cesare Vanini.

23.

Extrait d’une lettre latine que Gisbertus Voetius avait écrite le 21 janvier 1645 à Marten Schoock pour le conseiller sur son témoignage devant le tribunal d’Utrecht :

« Je vous ai précédemment écrit et vous ai suggéré un conseil, sans douter que cette lettre vous aura déjà été remise. Entre autres choses, si j’ai bonne mémoire, je vous y ai conseillé de renvoyer vos examinateurs au témoignage que vous avez remis au tribunal d’Utrecht, et qu’il a gardé en mains jusqu’à ce jour. Vous ne pourrez pas vous accorder avec vous-même et avec votre témoignage, ni même avec moi, si, conformément à la vérité de l’affaire, vous ne répondez rien d’autre que ce que vous aviez alors déclaré dans votre attestation écrite. En voici le résumé : vous avez de vous-même conçu et décidé votre projet ; vous avez entrepris et achevé cet ouvrage quant à sa matière, sa forme, sa méthode et son écriture ; je n’ai fourni ou proposé aucun cahier ni aucune feuille, ni l’esquisse du moindre billet que vous auriez fait vôtre en le recopiant. Ils préjugent en effet toujours, ou veulent présumer par malice cette fausseté qu’étant bien entendu encore très jeune, {a} vous ne pouviez donc, par votre seul savoir et propre intelligence (puisqu’ils n’oseraient évidemment espérer cela de la leur), avoir labouré ce champ sans la génisse d’un autre. {b} Quand ils vous demanderont si j’ai eu connaissance de votre dessein, de votre rédaction et de votre édition, il faut répondre : je pense que oui, car absolument tout le monde à Utrecht était au courant, étant donné qu’on n’y agit pas seul dans son coin, mais dans une imprimerie et une librairie que fréquentent tous les jours les professeurs, les avocats, les étudiants. Quand ils vous demanderont si j’ai moi-même été présent à côté de la presse pour la correction des épreuves, répondez que vous ne pouvez pas certifier cela par un témoignage oculaire puisque vous n’étiez pas à Utrecht. Ce que vous savez, c’est que vous avez confié cette tâche à M. Vanden Waterlaet, {c} qui attestera avec l’imprimeur que ce n’est pas V. {d} (qui n’en a pas seulement pas le loisir), mais M. Vanden Waterlaet lui-même qui a exécuté cette correction de bout en bout. » {e}


  1. En 1645, date de parution de l’anonyme Admiranda Methodus… [Admirable méthode…] contre René Descartes (v. supra note [22]), Marten Schoock était âgé de 31 ans, et Gisbertus Voetius en avait 21 de plus.

  2. Référence au Livre des Juges, v. note [15], lettre latine 148.

  3. Lambertus Vanden Waterlaet (vers 1619-1678), théologien hollandais, disciple de Gisbertus Voetius, qui se déchargeait sur lui de toute resposnsabilité dans la critique de Descartes.

  4. Voetius.

  5. V. infra note [52] pour une référence qui donne le texte complet de cette lettre.

24.

« Votre qui vous savez ».

25.

Le Martini Schoockii Ultrajectini Liber des bonis vulgo Ecclesiasticis dictis ; item de Canonicis : atque speciatim de Canonicis Ultrajectinis ; Horumque occasione, de Officio ministrorum Ecclesiæ erga Magistratus. Amplius Partim Sect. i. partim Sect. iii. breviter proponitur successio Ecclesiæ in Belgio, simulque specimen majoris operis, quod prolixe exhibebit Historiam Reformationis Ecclesiasticæ per provincias Blegicas…,

[Livre de Marten Schoock, natif d’Utrecht, sur les biens qu’on appelle vulgairement ecclésiastiques, ainsi que sur les chanoines, et spécialement ceux d’Utrecht et à cette occasion sur les devoirs des ministres de l’Église envers les magistrats. Dans les sections i et iii est en outre brièvement proposée la transformation de l’Église, en même temps que l’exemple d’une grande entreprise qui montrera en détail l’histoire de la Réforme ecclésiastique dans les Provinces-Unies…], {a}

avait été suivi de l’anonyme apologie de Schoock intitulée Dissertatio Politico-Historica de Bonis, vulgo Ecclesiasticis dictis in genere : sive Apologia pro Persona Martini Schoockii, ejusque libro ejusdem argumenti, opposita nupero libello cujusdam tenebrionis, qui, dum latitare vult sub literis S.C. prodit se esse Scelestissimum Calumniatorem,

[Dissertation politico-historique sur les biens qu’on appelle vulgairement ecclésiastiques, ou Apologie de la personne de Marten Schoock et de son livre sur le même sujet ; opposée au récent petit livre d’un ami des ténèbres qui, voulant se cacher sous les initiales de S.C., {b} se montre être le plus scélérat des calomniateurs]. {c}


  1. Groningue, Johannes Nicolaus, 1650, in‑4o de 758 pages.

  2. L’introduction du livre (page 4) ne donne pas le titre de ce libelle, qui était signé « S .C. ». L’anonyme qui lui répondait (peut-être Schoock lui-même) traduisait ces initiales par Scelestum [scélérat], Scurrilem [bouffon] ou Sacerrrimum Calumniatorem [très sacré calomniateur], ou même par summum Copreum [grosse crotte (par hellénisme)].

    Elle accuse nommément Paulus Voet (1619-1667), fils de Gisbertus Voetius, d’en être l’auteur : philosophe, juriste et hélléniste, le jeune Votius avait été nommé professeur de droit à Utrecht en 1654 ; en 1656, il publiait la « Théologie naturelle réformée » (v. supra note [19]).

  3. Ibid. Johann Cöllen, 1651, in‑12 de 384 pages.

Les pages 371 (numérotée 471) et 372 du second titre contiennent la défense de Schoock que Christiaen Utenbogard signalait à Guy Patin :

Omnia perpeti Schoockius potest, qui in tolerandis injuriis a Voetio sibi illatis, animum Christianum hactenus prodidit : Hoc unum intolerandum, quod per Voetii filium bis insimuletur perjurii : quæ cum sit diabolica calumnia, Schoockium atque omnem ejus posteritatem infamans, rogat ipse per me Voetios, vadimonium non deserant, sed extra tribunalia Ultrajectina, itemque Groningo-Omandica (ne suspectari queant faventes judices) compromittant una secum in judicem extra partes hactenus consistentem, coram quo, post diligens examen si fons ipse deprehendatur, non renuit, quin capite luat, quod divinam Majestatem temeraverit : Atsi Voetii formula exciderint, contentus erit, à Carnifice publice, ignito ferro, tanquam tantæ calumniæ architectis, uniuscujusque lingua maledica transfodiatur.

[Schoock peut tout endurer, lui qui a jusqu’ici fait preuve de courage chrétien en supportant les injures que Voetius a proférées contre lui. La seule chose qu’il ne peut tolérer est que le fils de Voetius l’ait par deux fois faussement accusé de parjure. Puisque cette calomnie diabolique ternit sa réputation et celle de toute sa descendance, Schoock me charge de demander aux voétiens qu’ils ne lui fassent pas défaut en justice ; mais que, hors des tribunaux d’Utrecht et même de la Province de Groningue (pour qu’ils ne puissent être suspectés d’y obtenir la faveur des magistrats), ils s’entendent avec lui sur le choix d’un juge qui se soit jusqu’ici tenu à l’écart des parties. Devant lui, après enquête, on déterminera s’il s’avère qu’à l’origine de l’affaire, Schoock n’a pas consenti à être puni de mort s’il a outragé la Majesté divine ; mais si les voétiens perdent le procès, Schoock se contentera que le bourreau transperce publiquement, avec un fer rouge, la médisante langue de chacun d’eux, pour avoir été les inventeurs d’une si énorme calomnie].

26.

La tour de Babel est dans la Bible (Genèse) le symbole de l’arrogance des hommes, que Dieu a punie en leur donnant diverses langues pour qu’ils ne se comprennent pas entre eux.

Judaïser, c’est appliquer rigoureusement les préceptes de la religion juive, tel le respect du sabbat dont il a été question plus haut dans la lettre.

27.

L’écriture en plus grandes lettres du mot pedum [pieds], pes au cas génitif pluriel, dans le manuscrit est une référence ironique de Christiaen Utenbogard au sens néerlandais du nom de Voetius : voet, le pied.

28.

Confutatio insulsi et maledici libri, quem adversus Remonstrantes edidit Gisbertius Voetius Theologiæ in Academia Ultrajectina Professor, titulo Therisitis Heautontimorumeni.

[Réfutation du sot et médisant livre que, sous le titre de Thersites Heautontimoroumenos {a} et contre les remontrants, {b} a publié Gisbertus Voetius, professeur de théologie en l’Université d’Utrecht]. {c}


  1. Troisième référence (Utrecht, 1635) citée dans la note [1], lettre latine 39.

  2. Autre nom des arminiens, v. notes [28] supra et [65] infra.

  3. Libelle anonyme, sans lieu ni nom, 1637, in‑4o de 48 pages.

29.

Examen accuratum Disputationis primæ et quasi inauguralis D. Gisberti Voetii quam proposuit in Illustri Gymnasio Ultrajectino die 3. Sept. stylo vet. Anno 1634. Ad Pastores totius Provinciæ, et quoscumq. Theologiæ studiosos, quibus id utile et gratum futurum, si pietatem amant, dubitari non potest.

[Examen soigneux de la première Disputation, quasi inaugurale, que M. Gisbertus Voetius a présentée devant le Collège d’Utrecht le 3 septembre vieux style {a} de l’an 1634. À l’intention des pasteurs de toute la Province et de tous ceux qui étudient la théologie, auxquels on ne peut douter qu’il sera utile et agréable, s’ils aiment la piété].


  1. Le 13 septembre nouveau style, v. supra note [a].

  2. Sans lieu ni nom, 1634 , in‑4o.

    Le livre se termine (pages 64‑66) sur deux « Corollaires repris de la première Disputation » : Corollaria theologica [Corollaires théologiques] en 22 points et Corollaria Voetiana [Corollaires voétiens] en 4 points.


30.

Gymnasium Ultrajectinum, seu Disputationis Theologicæ, quæ omnium prima Ultrajecti publice in Illustri tunc Gymnasio, nunc Academia, proposita fuit, Examen Accuratum et eiusdem a capite ad calcem usque Defensio : Opus vario argumento, et his temporibus utillissimum : in quo refellentur omnes rationes adversus Remonstrantes prolatæ in toto illo opere, cui titulus est Thersites Heautontimorumenos, autore Gisberto Voetio Theologiæ Doctore et Professore in Academia Ultrajectina.

[Le Collège d’Utrecht, ou l’Examen soigneux, de la première à la dernière page, et Défense de la Discussion théologique qui fut la toute première à être proposée publiquement en l’illustre Collège d’Utrecht, qui est depuis devenu Université. Ouvrage très utile en ces temps et pour la diversité de son propos, où sont réfutés, de la première à la dernière page, les arguments qui sont présentées contre les remontrants dans le livre intitulé Thersites Heautontimorumenos {a} par Gisbertus Voetius, docteur et professeur de théologie en l’Université d’Utrecht]. {b}


  1. V. supra note [28], notules {a} et {b}.

  2. Utrecht, sans nom, 1638, in‑4o. Le contenu de cet ouvrage est en partie détaillé dans les notes [32] et [33] infra. Son auteur serait Jacob Batelier (1593-1672), théologien arminien de La Haye.

31.

La « Préface » du Gymnasium Ultrajectinum (v. supra note [30]) est intitulée Christiano Lectori S. [Salut au lecteur chrétien]. Longue de 21 pages et composée de 22 paragraphes numérotés, elle est étonnamment écrite par un anonyme qui se déclare être l’auteur (lui même anonyme) de la Confutatio [Réfutation] (sans lieu, 1637, v. supra note [28]) qui attaquait les opinions de Voetius contre les arminiens. Marten Schoock y est entre autres nommément égratigné à l’article 8 :

Anno 1635. mense Iunio theses ad disputandum propositæ fuerunt in Ultrajectino Gymnasio, quibus asserebatur Magistratui Christiano incumbere, ut hæreticos blasphemos vel et igne, vel gladio de medio tollat, si aliter cohiberi non possint. Præses erat Voetius ; Respondens Martinus Schoock, iuratus uterque Remonstrantium communis hostis, meusque privatus, qui me jam publice duobus Latine editis scriptis pro blasphemo in Deum, ac mendace et calumniatore in populi Principes ebuccinarunt, horribiles illos titulos in ipsis librorum frontispiciis, tanquam hederam pro tabernæ vinariæ foribus suspendentes.

[Au mois de juin 1635, furent soumises à la dispute dans le Collège d’Utrecht des thèses qui enjoignaient la magistrature chrétienne de s’appliquer à faire disparaître les blasphèmes hérétiques, ou par le feu ou par le glaive, s’ils ne pouvaient être autrement empêchés. Le président en était Voetius et Marten Schoock, le répondant ; tous deux ennemis jurés communs des remontrants, et les miens personnels. {a} Ils m’avaient déjà sonné du cor publiquement dans deux livres publiés en latin, et pour blasphème contre Dieu, et pour mensonge et calomnie contre les dirigeants du pays, en accrochant ces inscriptions aux titres de leurs livres, comme un lierre au fronton d’une taverne à vin]. {b}


  1. Il s’agirait de Jacob Batelier (v. supra notule {b}, note [30]).

  2. Dans ses lettres ultérieures à Christiaen Utenbogard, Guy Patin n’est pas revenu sur les méandres de ces âpres disputes hollandaises entre calvinistes, arminiens, jansénistes et cartésiens, dirigées par et contre Voetius. Je pense qu’il a, comme moi, renoncé à en pénétrer tous les ressorts.

32.

Thrasonique est un adjectf dérivé de Thrason, personnage de l’Eunuque de Térence, qui est un modèle du soldat fanfaron.

La Disputatio prima est en effet entièrement reproduite en tête du Gymnasium Ultrajectinum (v. supra note [30]), pages 3‑22, juste après la « Préface » ; son titre complet est :

Assertiones Theologicæ de Præiudiciis Veræ Religionis quas cum annexis Corolariis Favente Deo Opt. Max. in Illustri Gymnasio Ultrajectino ad diem 3. Septemb. stylo vet. [Anno 1634] ab hora matutina 10. usque 12. et rursus a 2. promeridiana usque ad 4. ventilandas proponit Gisbertus Voetius Heusdanus sacrarum literarum ibidem Professor. Respondente Davide van Boxtel.

[Affirmations théologiques sur les préjugés de la vraie Religion, proposées au débat, avec leurs Corollaires annexes, {a} par la faveur de Dieu qui est très grand et très bon, dans l’illustre Collège d’Utrecht par Gisbertus Voet, natif de Heuden, {b} professeur de littérature sacrée de ce même Collège, le 3 septembre (1634), vieux style, {c} de 10 heures du matin à midi, puis de nouveau de 2 à 4 heures de l’après-midi. Répondant, David van Boxtel].


  1. V. supra note [29].

  2. Brabant-Septentrional.

  3. Julien, 13 septembre nouveau style, grégorien.

Le « Collège d’Utrecht », c’est-à-dire l’« Examen soigneux » (de la thèse) proprement dit occupe presque toute la suite du livre (pages 33‑479).

33.

M. Schoockii Epistola ad Reverendum, clarissimumque virum, Dominum Johannem Hoornbeeck, S. Th. Doct. et Professorem celeberrimum in Academia Ultrajectina : qua vindicat ab hujus censura acri suam et variorum orthodoxorum Theologorum sententiam de Bonis, vulgo Ecclesiasticis dictis.

[Lettre de M. Schoock au révérend et très distingué M. Johannes Hoornbeeck, {a} docteur et professeur de théologie sacrée en l’Université de Groningue, pour défendre, contre la rude censure de cet homme, le jugement qu’il a porté, ainsi que divers théologiens orthodoxes, sur les biens qu’on appelle vulgairement ecclésiastiques]. {b}


  1. Disciple de Voetius, v. note [5] de la lettre d’Eberhard Vorst, datée du 7 février 1664.

  2. Groningue, Henricus Lussinck, 1653, in‑16. V. supra note [25], pour ce diverticule pécuniaire qui s’ajoutait aux autres motifs, théologiques, de querelle. Schoock y soutient que les biens ecclésiastiques saisis par Voetius et ses sectateurs, tenus pour non orthodoxes, ne l’ont pas été légitimement et ne peuvent plus être destinés à des usages authentiquement sacrés.

34.

Theologisch Advys Over’t Gebruyck van Kerckelijke Goederen, van canonisyen, vicayren, etc. Eerste Deel.

[Avis théologique sur l’utilisation des biens de l’Église, des chanoines, des vicaires, etc. Première partie]. {a}


  1. Amsterdam, Jodocus Hondius, 1653, in‑4o ; avec de profonds remerciements pour la traduction du flamand à M. Michel Linder et au Dr Marie-Paule Van Craynest, qui m’ont aussi fait généreusement bénéficier de leur aide précieuse pour les notes [35] et [40] infra.

35.

Soucieux du dogme chrétien, j’ai remplacé le pluriel du manuscrit, contra Deos [contre les dieux] par un singulier.

V. note [5], lettre 127, pour Pasquin et ses pasquinades (libelles romains souvent dirigés contre la papauté).

36.

Wolcke der Getuygen, Ofte het Tweede Deel, van het Theologisch Advys Over’t gebruyck van Kerckelijke Goederen. Hier by komt een kort Verhael van den Oorspronck, Ordre, Ampt, en Staet der Canonicken, als oock een wederlegginge van eenige objectien, uytvluchten ende exeptien. Door Gisbertus Voetius, Dienaer Goddelicken woorts, ende Professor der Theologie tot Utrecht.

[Ensemble des références, ou seconde partie de l’Avis théologique sur l’utilisation des biens de l’Église. Avec une brève description de l’origine, du rôle, du ministère et du statut des chanoines, {a} ainsi qu’une réponse à quelques objections, dispenses et exceptions. Par Gisbertus Voetius, serviteur de la Parole divine et professeur de théologie à Utrecht]. {b}


  1. V. notes [13], lettre 234, et [1], lettre latine 202, pour les cinq chapitres d’Utrecht.

  2. Utrecht, Jan Jansson van Waesberge, 1656, in‑4o ; v. supra note [343], pour l’aide à la diligente traduction du flamand.

37.

Libre adaptation de la Deuxième épître de Pierre (2:10) ; en bon calviniste, Christiaen Utenbogard n’a pas puisé dans la Vulgate (v. note [6], lettre 183), mais dans le Nouveau Testament de Théodore de Bèze :

« par cupidité, nous corrompront de leurs discours frelatés ; qui, dans un appétit de souillure, recherchent les plaisirs charnels et méprisent l’autorité du Seigneur ; qui, présomptueux et arrogants, ne craignent pas d’injurier ; pires que Lucifer en personne. »

38.

Disputatio politica de tyranno quam… sub præsidio… Danielis Berckringeri… publice defendere conabitur, Ianus Guillielmus Freitagh… ad diem 31. Martij, horis locoque solitis… [Disputation politique sur le tyran que… Janus Guillielmus Freitagh… entreprendra de défendre publiquement sous la présidence de Daniel Beckringer… le 31 mars aux heures et lieu habituels…] (Utrecht, Ægidius Roman, 1641).

39.

« Voilà les frères qui avaient juré de déchirer le ciel ! » (Virgile, Géorgiques, livre i, vers 280). Par leurs excès rigoristes, les puritains anglais extrémistes (precisians, v. supra note [10]) étaient ces « frères conjurés » des voétiens.

40.

Dans son latin (tunc rebus regis etiamnum, sat bene stantibus), Christiaen Utenbogard semblait estimer que la situation politique de Charles ii, roi d’Angleterre en exil, s’améliorait. Cela paraissait fort optimiste car le Lord Protector, Oliver Cromwell, ne mourut qu’en 1658 et le roi ne retrouva son trône qu’en 1660 ; mais sans doute Utenbogard voulait-il parler du calme relatif, politique et religieux, que connaissait la Grande-Bretagne en 1656 (par comparaison avec ce qu’elle avait connu depuis le début de ses guerres civiles, en 1639).

41.

Samuelis Maresii Theologi, Ultima Patientia tandem expugnata, a D. G. Voetio, Ultrajectino Professore et quibusdam illius asseclis ; sive modesta et necessaria Defensio tripertita tum sui-ipsius, tum ea occasione causæ Procerum Sylvæducensium et Decretorum Synodicorum circa illam ; ipsi exorta varia et longa contumeliarum serie, ac præsertim nupero libello famoso Belgice edito et inscripto Hort ende oprecht nerhael nau het oprichten ende inhoeren der nieume Broedershcap etc.

[L’ultime Patience de Samuel Desmarets finalement anéantie par M. G. Voetius et certains de ses suppôts ; ou la sobre et nécessaire Défense en trois parties, tantôt de lui-même, tantôt, à cette occasion, de la cause des seigneurs de Bois-le-Duc et des décrets synodiaux ; il l’a lui-même tirée d’une longue et riche suite d’injures, et particulièrement du libelle infamant qu’on a récemment publié en flamand sous le titre d’Histoire brève et véridique de la fondation et du lancement de la nouvelle Communauté, etc.]. {a}


  1. Groningue, Johannes Nicolaus, 1645, in‑8o ; v. supra note [33], pour l’aimable aide à la traduction de la partie flamande du titre.

42.

« même s’il ne vaut bien sûr pas son pesant d’or » (v. note [5], lettre 76, pour auro contra carus).

Ce « livre des Échasses » est un ouvrage anonyme de 438 pages intitulé :

Grallæ seu vere puerilis Cothurnus Sapientiæ, quo se jactat apud imperitos Guillelmus Apollonii Minister Ecclesiæ Mittelburgensis Vereanus in centionibus, quos edidit de Jure Majestatis circa Sacra, Contra libellum Clarissimi Doctoris Nicolai Vedelii, de Episcopatu Constantini Magni.

[Les Échasses ou le vraiment enfantin Cothurne {a} de la sagesse, où se lance, parmi les ignorants, Guilelmus Apollonius, natif de Veer, {b} ministre de l’Église de Middelbourg, dans les censures qu’il a publiés de Jure Majestatis circa Sacra, contre le petit livre du très brillant docteur Nicolas Vedelius {c} de Episcopatu Constantini Magni]. {d}


  1. Texte tragique (pompeux).

  2. Guilelmus (Willem) Apollonius ou Apollonii (vers 1602-1657), pasteur et théologien presbytérien originaire de Zélande.

  3. Nicolaus Vedelius (Vedel), professeur de théologie à Genève puis à Franeker surtout connu pour ses attaques contre les arminiens. Mort en 1642, il avait publié la même année De Episcopatu Constantini Magni, seu de Potestate Magistratuum Reformatorum, circa res Ecclesiasticas [L’Épiscopat de Constantin le Grand, ou le pouvoir des magistrats réformés sur les affaires ecclésiastiques] (Leuwarde, Gisbertus Subonius, in‑12), qui prenait en exemple le double pouvoir, temporel et spirituel, exercé par l’empereur Constantin (v. note [24] du Naudæana 3).

    Apollonius lui avait répondu par le Jus Maiestatis circa Sacra, sive Tractatus Theologicus, de jure Magistratus circa res ecclesiasticas… [Droit de majesté en matière sacrée, ou Traité théologique sur le droit de la magistrature sur les affaires ecclésiastiques…] (Middelbourg, Iacobus Fierensius, 1642, in‑8o).

  4. Franeker, sans nom, 1646, in‑8o : défense du défunt Vedelius contre Apollonius ; la page de titre est ornée d’une tiare papale près de laquelle volent deux bourdons à têtes humaines portant l’un une bulle (pouvoir spirituel) et l’autre une bourse d’argent (pouvoir temporel) ; la dispute portait moins sur l’autorité pontificale en matière séculière, chez les catholiques, que sur celle des gouvernants (magistrature) flamand en matière ecclésiastique, chez les calvinistes, assimilée au papisticum jugum [joug papiste] dont Christiaen Utenbogard a parlé un peu plus loin.

43.

Ces deux ouvrages sont reliés aux Gralliæ (Franeker, 1646, v. supra note [42]) et portent le même emblème (tiare papale et bourdons) sur leur page de titre :

44.

Middelbourg (v. note [35], lettre 246) est la principale ville de l’île (aujourd’hui presqu’île) de Walcheren en Zélande.

Petrus Lansbergius (Peter Lansbergen ou Van Lansberghe, 1587-1661), natif de Goes (sur l’île de Zuyd-Beverland, voisine de celle de Walcheren, qui sont aujourd’hui toutes deux rattachées au continent), fut d’abord pasteur dans sa ville natale, puis se consacra à la médecine, mais il n’a mis au jour que quelques ouvrages d’histoire, de théologie et de philosophie ; Christiaen Utenbogard le dit ici avoir été l’auteur des Grallæ.

Il avait publié à visage découvert la Naerder Apologie Petri Lansbergij op de Calumnien van M. Willem Apollonius, Predikant der Stadt Middelburgh [Nouvelle Apologie de Petrus Lansbergius contre les calomnies de M. Willem Apollonius (v. supra notule {b}, note [42]), pasteur de la ville de Middelbourg] (Middelbourg, Anthoni de Later, 1647, in‑8o).

45.

Extrait du premier paragraphe, page 17 des Grallæ (Franeker, 1646, v. supra note [42]) :

« Il n’est pas douteux que de semblables insectes se cachent aussi ailleurs, mais engourdis et comme s’attachant à leur alvéole, dont pourtant aucun ne couve les esprits dans une telle indolence que, si le petit peuple de Walcheren parvient à ses fins, il y aura très bientôt partout grande abondance de zélotes de leur espèce. »

46.

Ange Politien, Prologus in Plauti comœdiam Menoechmos [Prologue aux Ménechmes de Plaute] (v. note [40], lettre 1019, où ces vers sont commentés) :

« Mais ceux qui nous blâment sont de parfaits bouffons. Ils feignent d’être des Curius, mais mènent une vie de débauche. Ce sont surtout des braillards, inconsistants, {a} un troupeau renfrogné qui va la tête courbée. Comme ils se distinguent des autres par l’habit et la manière de faire, sinistres de mine, ils vendent des indulgences, ils s’arrogent le droit de censurer et de tyranniser, et ils terrifient le peuple avec leurs menaces. »


  1. Christiaen Utenbogard a ici omis un vers désignant les moines, qui étaient étrangers à son propos :

    Cucullati, lignipedes, cincti funibus.

    [encapuchonnés, portant galoches, ceinturés de cordes].


47.

V. la fin de la note [11], lettre 65, pour l’explication sémantique, par Gilles Ménage, du titre des Fratres fraterrimi [Frères très fraternels], satire anticléricale de George Buchanan dont Christiaen Utenbogard parodiait le titre en le dirigeant contre ses ennemis, les patres paterrimi [pères très paternels] : Voetius et ses zélotes, les voétiens.

48.

« le chien est retourné à son vomi et la truie, à peine lavée, se vautre dans le bourbier », nouvelle citation de la Deuxième épitre de saint Pierre (2:22) :

contigit enim eis illud veri proverbii canis reversus ad suum vomitum et sus lota in volutabro luti.

[il leur est arrivé ce que dit à juste titre le proverbe : le chien…].

Christiaen Utenbogard a plus haut emprunté son latin au titre d’un libelle anti-voetien anonyme qui venait de paraître : Fabula vetus Actores novi. Dat is, De oude Paep onder een nieuwe Kap… [Vielle comédie, nouveaux acteurs, ou Le vieux pape sous un nouveau chapeau…] (sans lieu ni nom, 1656, in‑4o), attribué au diplomate hollandais Adriaen Paets (Leyde 1631-Rotterdam 1686), protecteur de Pierre Bayle en 1681.

49.

Allusion au Retour offensif de l’esprit immonde, qu’on trouve à l’identique dans les Évangiles de Matthieu (12:43-45) et de Luc (11:24-26) ; ce sont les paroles de Jésus :

Cum immundus spiritus exierit de homine, ambulat per loca inaquosa, quærens requiem : et non inveniens dicit : Revertar in domum meam unde exivi. Tunc vadit, et assumit septem alios spiritus secum, nequiores se, et ingressi habitant ibi. Et fiunt novissima hominis illius pejora prioribus.

[Lorsque l’esprit immonde est sorti d’un homme, il erre par des lieux arides en quête de repos. N’en trouvant pas, il dit : “ Je vais retourner dans ma maison, d’où je suis sorti. ” À son arrivée, il la trouve balayée, bien en ordre. Alors il s’en va prendre sept autres esprits plus méchants que lui ; ils reviennent et s’y installent. Et l’état final de cet homme devient pire que le premier. Ainsi en sera-t-il également dans cette génération mauvaise].

50.

« est la fable qui a préludé à nos affaires » (sans source latine identifiée). Christiaen Utenbogard signifiait ici clairement que les ouvrages parus en 1646 et 1647, sur la dépendance les pouvoirs ecclésiastiques et politiques (v. supra note [43] et [43]), avaient amorcé les disputes qui aboutissaient, en 1656, aux excès despotiques de Gisbertus Voetius et des voétiens.

51.

Cet autre livre que Christiaen Utenbogard envoyait à Guy Patin éclaire utilement la dispute entre Gisbertus Voetius et René Descartes. Il portait le titre complet de :

Magni Cartesii manes ab ipsomet defensi ; sive N.V. Renati Des-Cartes Querela Apologetica ad Amplissimum Magistratum Ultrajectinum, qua technæ, calumniæ, mendacia, falsorum testimoniorum fabricæ, aliaque crimina Voetiorum et Dematii, plenè reteguntur. Opusculum antea ineditum, nunc vero opponendum quotidianis Voetii et Voetianorum criminationibus, iis nominatim quas sub Theologiæ Naturalis Reformatæ titulo haud ita pridem emiserunt.

[Les Mânes du grand Descartes {a} défendues par lui-même, ou la Plainte apologétique du noble M. René Descartes adressée à très éminent magistrat d’Utrecht, qui dévoile entièrement les fourberies, les calomnies, les mensonges, les fabrications de faux témoignages et les autres méfaits des voétiens et de Dematius. {b} Opuscule inédit, mais qu’il faut maintenant opposer aux accusations malveillantes et quotidiennes de Voetius et des voétiens, et nommément à celles contenues dans la Théologie naturelle réformée {c} qu’ils ont récemment publiées]. {d}


  1. Mort à Stockholm en février 1650.

  2. Carolus Dematius (De Maets, Leyde 1597-Utrecht 1651), théologien protestant, pasteur et professeur de théologie à Utrecht, formait avec Gisbertus Voetius et Meinardus Schotanus (v. note [5], lettre latine 300) le groupe théologique des voétiens.

  3. Utrecht, 1656, v. supra note [19].

  4. Vristadii, {i} Lancellotus Misopodes, {ii} 1661, in‑4o. {iii}

    1. Sans doute la localité fictive de Vrijstad en flamand [Ville de la liberté] (pour Groningue ?), plutôt que le nom latinisé de Fristaden Christiana, quartier de Copenhague.

    2. Néo-latino-hellénisme signifiant « qui n’aime pas les pieds » (pour le libraire Johannes Nicolaus ?), c’est-à-dire Voet (v. supra note [27]) et ses affidés.

    3. L’ouvrage est une lettre de 28 pages que René Descartes a écrite aux magistrats d’Utrecht pour sa défense contre ses adversaires utltracalvinistes.

La préface Ad Lectorem [Au lecteur], non signée, {a} est datée de Vristadii le 10 août 1656. Elle commence par expliquer la genèse de la Querela Apologetica :

Ut ex Africa semper aliquid novi, ita quotidie aliquid monstri prodit ex officina Voetiana ; adeo pertinax est illud Theologicum Gisberti Voetii odium ut videatur Ætnæ ac Vesuvii perennes flammas superare. Iamdiu noster Heros ad plures Suecia abierat, Schoockio-Voetiana lis post Schoockii appelationem per annos aliquot siluerat, scriptionum polemicarum induciæ Authoritate publica inter Voetium et Maresium, ceu earundem partium Theologos, pactæ fuerant, cùm derepentè apparuit instar spectri horridioris Voetii Theologia naturalis reformata, partim ineptiis ineptissimis referta, partim vero calumniis et conviciis atrocissimis in Maresium, Schoockium, ac τον πανυ Cartesium, Philosophorum Decus et Coryphæum, tota consuta, ut revera pro Theologia naturali reformata, meram diabologiam moralem deformatissimam suo Lectori exhibeat. Displicuit equidem ille liber inficetus prudentioribus omnibus, fuitque ut audimus censurâ notatus à quibusdam Synodis in Belgio ; sed cùm hæc judicia intra privatos parietes maneant, aliquid illi reponi publice debuit, ne de Veritate et Innocentia aliorum ejus author impune triumphet, et sibi de sua maledicentia tanto magis gratuletur, quanto grandius honorarium dicitur à Magistratu Ultrajectino ex illius dedicatione retulisse. Quid fecerint aut facturi sint Groningenses nobis nondum constat, nisi quod fando accepimus Maresium aliquid pro se scripsisse per modum Apendicis ad alium aliquem tractatum Theologicum, quod num sit verum et an Shoockius sit taciturus, dies docebit. Nos vero non putavimus nostrum Heroem melius defendi posse quam à seipso : Profecturus in Sueciam hanc Apologiam quam tibi damus Gallice à se consciptam, Latinè versam ab Amico, reliquerat in oris, cum animo eam evulgandi, si privatim operaretur. Quoniam vero morte præventus, nequivit quod destinaverat perficere, importunitate Adversariorum suorum cogimur nunc eam in lucem emittere, ut quam maledicendo homini mortuo ceperunt voluptatem, vera de seipsis audiendo a imsomet amittant, ac in posterum desinant imbelles lepusculi leonis mortui barbam vellicare.

[De même qu’il nous arrive toujours quelque nouveauté d’Afrique, {b} il nous vient tous les jours quelque monstruosité de l’officine voétienne, car la haine théologique de ce Gisbertus Voetius est si obstinée qu’elle semble surpasser les flammes perpétuelles de l’Etna et du Vésuve. Depuis longtemps déjà, notre héros était mort en Suède, {c} le procès schoockio-voétien, consécutif au recours de Schoock, avait pris fin, l’autorité publique avait établi la trêve des écrits polémiques entre Voetius et Desmarets, ou les théologiens de leurs partis, {d} quand soudain, tel un spectre horrifiant, parut la Theologia naturalis reformata de Voetius, à la fois remplie des inepties les plus ineptes, mais aussi toute cousue des calomnies et des invectives les plus atroces contre Schoock, Desmarets et τον πανυ {e} Descartes, gloire et coryphée des philosophes ; de sorte qu’à vrai dire, au lieu d’une Théologie naturelle réformée, il exhibe à son lecteur une pure diablerie morale des plus déshonorantes. Ce livre grossier a assurément déplu à tous les gens de bon sens et nous avons ouï dire que certains synodes flamands l’ont frappé de censure ; mais comme ces sentences sont restées confinées dans des enceintes privées, on s’est fait un devoir de répondre publiquement à ce livre pour que son auteur n’aille pas triompher impunément de la vérité et de l’innocence des autres, et se féliciter de ses médisances avec d’autant plus d’éclat que, dit-on, sa dédicace a très grandement flatté les magistrats d’Utrecht. {f} Nous ne savons pas encore ce que ceux de Groningue {g} ont fait ou feront, sinon que nous avons ouï dire que Desmarets a écrit quelque chose pour sa défense, sous la forme d’un appendice à quelque autre traité théologique. L’avenir nous dira si cela est vrai et si Schoock restera silencieux ; mais nous, nous avons pensé que notre héros ne pouvait être mieux défendu que par lui-même : comme il allait se rendre en Suède, {h} il a laissé ici cette Apologia, écrite en français, dont nous vous donnons la traduction en latin faite par un ami, sans autre intention particulière que de la divulguer. Comme la mort l’a empêché de parfaire ce qu’il avait entrepris, la cruauté de ses adversaires nous a poussés à la publier maintenant, pour les dispenser de cette volupté qu’ils ont éprouvée à médire d’un homme mort, en entendant les vérités qu’il a lui-même dites à leur sujet, et pour que dorénavant ces lâches levrauts cessent de picoter la barbe du lion défunt].


  1. Sur l’exemplaire que j’ai consulté, venant de la Bibliothèque universitaire d’Amsterdam, un crayon anonyme a ajouté, sous la date, le nom de Sam. Maresius, soit Samuel Desmarets, alors professeur de théologie calviniste à Groningue, qui était en effet étroitement impiqué dans la querelle (v. note [19]).

  2. Adage de Pline l’Ancien commenté par Érasme (v. note [25], lettre 273).

  3. Directement contre Voetius, René Descartes avait publié :

    Epistola Renati Des-Cartes ad celeberrimum Virum D. Gisbertum Voetium. In qua examinantur duo libri, nuper pro Voetio Ultrajecti simul editi, unus de Confraternitate Mariana, alter de Philosophia Cartesiana.

    [Lettre de René Descartes au très célèbre M. Gisbertus Voetius. Y sont examinés deux livres, récemment publiés en même temps à Utrecht, en faveur de Voetius : l’un sur la Confrérie mariale, {i} l’autre sur la Philosophie cartésienne {ii}]. {iii}

    1. Specimen assertionum partim ambiguarum aut lubricarum, partim periculosarum, ex tractatu nuperrime scripto pro Sodalitatibus B. Mariæ inter Reformatos erigendis aut interpolandis, titulo, Defensio pietatis et sinceritatis etc. excerptarum, quod Ecclesiis Belgicis, earumque fidis Pastoribus et Senioribus expendendum offertur a Gisberto Voetio Theologiæ in Acad. Ultrajectina Professore [Preuve des assertions à la fois ambiguës ou glissantes et périlleuses, tirées d’un traité récemment publié pour établir ou rétablir des confréries de sainte Marie parmi les réformés, sous le titre de Défense de la piété et de la sincérité, etc. Offert au jugement des Églises flamandes, et de leurs fidèles pasteurs et doyens, par Gisbertus Voetius, professeur de théologie en l’Université d’Utrecht] (Utrecht, Ioannes van Waesberge, 1643, in‑12 de 511 pages, portant le titre courant de Confraternitas Mariana.

    2. Marten Schoock (Utrecht, 1643), v. supra note [22].

    3. Leyde, Ludovicus Elsevirius , 1643, in‑12 de 282 pages.
  4. Le 31 mai 1649, le tribunal d’Utrecht avait prononcé un jugement visant à clore la querelle théologique opposant d’un côté Marten Schoock et Samuel Desmarets, et de l’autre Gisbertus Voetius et Carolus Dematius.

  5. « le très fameux ».

  6. Paulus Voet (fils de Gisbertus) avait dédié sa Theologia naturalis reformata (v. supra première notule {c}) Nobilissimis et Amplissimis Viris DD. Consulibus et Senatoribus Inclytæ Reipublicæ Ultrajectinæ, Academiæ Curatoribus [À Messieurs les très nobles et éminents conseillers et sénateurs de l’illustre république d’Utrecht, curateurs de l’Université].

  7. Les théologiens opposés aux voétiens.

  8. En septembre 1649.

52.

Au bas de la page 19 de sa Querela Apologetica (v. supra note [51]) Descartes cite un bref extrait de cette lettre où Voetius demandait à Schoock de parjurer en niant toute participation de son maître à l’Admiranda Metodus… [L’admirable Méthode…] cartésienne (Utrecht, 1643, v. supra note [22]), qu’il avait écrit contre le philosophe français (v. supra note [23]).

Descartes ajoute que cette lettre (datée du 21 janvier 1645) avait été intégralement publiée aux pages 35‑38 du :

Bonæ fidei Sacrum ; sive Documenta omni exceptione majora Veracitatis et Innocentiæ Samuelis Maresii Theologi, in causa Schoockio-Voetiana : nec non ejusdem Seria et Christiana επανορθωσις ad C.V. D. Gisbertum Voetium Thelogum Ultrajectinum, super Libello quem haud ita pie Pietatis nomine nuper inscripsit.

[Culte de la bonne foi, ou les Démonstrations irréfutables de l’authenticité et sincérité de Samuel Desmarets, théologien, dans le procès schoockio-voétien, ainsi que l’amendement sérieux et chrétien qu’il a adressé au très distingué M. Gisbertus Voetius, théologien d’Utrecht, sur l’opuscule qu’il a récemment écrit au nom de la Piété, {a} mais sans guère de piété]. {b}


  1. Sans doute le livre de Voetius contre la « Confrérie mariale » (Utrecht, 1643, v. supra note [51], seconde notule {c‑i}).

  2. Anonyme, Groningue, Johannes Nicolaus, 1646, in‑8o de 91 pages.

53.

Gisbertus Voetius est bien sûr la fameuse hydre, « monstre fabuleux que les poètes feignent avoir plusieurs têtes, qui ajoutent qu’à la place de celle qui était coupée il en naissait plusieurs autres », mais aussi « le symbole des procès et de la chicane » (Furetière).

54.

V. supra note [27], pour la mise en petites capitales du mot pieds [pedibus], avec peut-être une allusion, possible sous la plume de Christiaen Utenbogard (calviniste non voétien, v. supra note [51], seconde notule {c‑i}), à la Vierge écrasant du pied la tête du serpent (v. note [5], lettre latine 2).

55.

« Impitoyable bourreau de la bonne foi, Voetius est hors des lois, il éreinte le droit ; il méprise les décrets, ce que + le Synode national de Dordrecht. {a} a jadis promulgué à l’unanimité ; en fourbant, il se défiera de la magie en implorant la solitude. {b} Quand le tribunal enquête, il nie : convaincu par un écrit, il fait un croc-en-jambe à son fidèle Achate. {c} Rallumant la querelle, il ne veut pas reconnaître son méfait. Il ne pense pas non plus avoir haï ses frères en semant la discorde ; en prostituant la cène du Seigneur, il a rampé hors de la bergerie. Il a soustrait le pouvoir aux Pères et leur auditoire aux pasteurs ; dissemblable au Christ, il ressaisit la foudre papale : il s’occupe à asservir le peuple en frère du pontife. »

+ « Ce qui est d’autant plus choquant qu’il fut lui-même membre de ce Synode. » {d}


  1. Réuni en 1618-1619, v. supra note [12].

  2. Traduction douteuse d’une transcription latine certaine et vérifiée.

  3. Achate, le compagnon le plus fidèle d’Énée (v. note [24], lettre latine 88), figure ici Marten Schoock, le disciple de Voetius.

  4. Vers ajouté au bas du poème, avec signe de renvoi (+) pour le replacer dans l’épigramme.

On fait décidément de singulières découvertes sur la Toile : cette épigramme (sans son addition et non signée) a été imprimée sous le titre de Papa exlex [Un pape hors-la-loi] à la fin d’un court recueil anonyme intitulé De vryheyd van de vry-gevochte Nederlanden… [La liberté des Pays-Bas où elle est combattue…] (sans lieu, Hieronimus van Eden, 1656, une feuille in‑8o).

56.

V. note [13], lettre 127, pour les sociniens, antitrinitaires et partisans du libre arbitre.

57.

Apologia pro Veritate accusata ad Illustrissimos et Potentissimos Hollandiæ et West-Frisiæ Ordines. Conscripta ab Equite Polono.

[Apologie pour la Vérité qu’on a mise en accusation, adressée aux très illustres et très puissants États de Hollande et de Frise-Occidentale. Écrite par un chevalier polonais]. {a}


  1. Sans lieu ni nom, 1654, in‑8o, attribuée à Jonas Schlichting (Jonas Schlichtingius ou Jonaz Szlichtyng, natif de Bukowiec, 1592-1661), théologien socinien de la Petite Église polonaise.

Créés vers 1570, Les États de Hollande et de Frise-Occidentale, provinces dominantes des Pays-Bas, pendant leur révolte contre l’Espagne, étaient formés de représentants de la noblesse et de la bourgeoisie, et assuraient le gouvernement militaire et civil de la République.

58.

Equitis Poloni Apologia adversus Edictum Illustr. et Præpotent. D.D. ordinum Hollandiæ et West-Frisiæ, de 19. Sept. A.D. clɔ lɔc liii. quo Socinianæ Doctrinæ Propagatio coerceretur : Examinata a Johanne Coccejo, S.S. Theol. in Acad. Lugd. Bat. Professore.

[Apologie du chevalier polonais contre le décret des très illustres et tout-puissants MM. des États de Hollande et de Frise-Occidentale, daté du 19 septembre 1653, qui interdit la propagation de la doctrine socinienne, examinée par Johannes Cocceius, {a} professeur de très sainte théologie en l’Université de Leyde]. {b}


  1. Johannes Cocceius (Johannes Koch ou Cock, Brême 1603-Leyde 1699) est le fondateur du coccéianisme, à partir d’une lecture rénovée de la Bible. Voetius l’accusa d’hérésie et de complaisance socinienne.

    Le Dictionnaire de Trévoux (1743-1752) a résumé les convictions des coccéiens :

    « Nom de nouveaux sectaires qui sont répandus dans toute la Hollande et dans les pays voisins. Ils tirent leur nom de Jean Cocceius, professeur en théologie dans l’Académie de Leyde, qui était très savant dans la langue hébraïque. Les autres professeurs calvinistes lui donnèrent le nom de Scripturarius parce que, lisant continuellement l’Écriture, il y avait découvert plusieurs choses qui n’étaient point connues auparavant : il trouvait entre autres choses presque dans toutes les prophéties de l’Ancien et du Nouveau Testament le règne de Jésus-Christ et celui de l’Antéchrist qui lui est opposé. On dit de lui, qu’il voyait partout le Messie et que Grotius, {i} au contraire, qu’il combat ordinairement, ne le voyait en aucun endroit. […] Il croit qu’il doit s’élever dans le monde un règne de Jésus-Christ qui abolira le règne de l’Antéchrist ; que quand le règne de Jésus-Christ sera aboli, avant la fin du monde, après la conversion des Juifs et de toutes les nations, l’Église sera alors fort éclatante : selon lui la Jérusalem céleste qui est décrite dans l’Apocalypse, représente la condition de l’Église telle qu’elle doit être glorieuse sur la Terre, et non celle qui doit triompher dans le Ciel. Les Coccéiens font aujourd’hui un grand parti dans les Provinces-Unies. Voetius et Desmarets {ii} condamnèrent plusieurs opinions de Cocceius comme hérétiques ; et ils prétendirent même qu’il était socinien {iii} en beaucoup de choses ; ils le traitaient de novateur et d’homme qui s’attachait trop à l’Écriture ; pour ce qui est du socinianisme, il serait aisé de l’en justifier : il a combattu avec force les sociniens dans ses commentaires sur l’Écriture. Tout ce qu’on peut dire de lui, c’est qu’il a avancé quelques visions et qu’il a eu des pensées trop particulières. »

    1. Hugo Grotius, v. note [2], lettre 53.

    2. Samuel Desmarets, v. note [14], lettre 76.

    3. V. note [13], lettre 127.
  2. Leyde, Johannes Elsevier, 1656, in‑4o. Ce livre contient :

    • la traduction en latin du décret prononcé à Leyde en 1653.

    • l’Apologia du chevalier polonais écrite en 1654 (pages 1‑312), entrecoupée par l’examen ligne à ligne qu’en ont fait les magistrats hollandais.

59.

Dans la mythologie, l’Égide est la protection, enveloppée dans la peau de la chèvre Almathée, que Zeus donna à Pallas Athéna. « L’égide n’est pas, à proprement parler, un bouclier ; c’était une pièce défensive fixée en haut de l’épaule gauche, et retombant sur le bras qui pouvait la soulever pour en protéger le corps » (Littré DLF).

60.

P. Cunæi Satyra Menippea Incastrata. Item D. Iuliani Imperatoris Satyra.

[La Satire Ménippée non châtrée de Petrus Cunæus, {a} ainsi que la Satire de l’empereur Julien]. {b}


  1. V. note [23], lettre 155.

    Le titre complet de son pamphlet est :

    Sardi Venales. Satyra Menippea in hujus seculi homines plerosque inepte eruditos.

    [Sardes à vendre. {i} Satire Ménippée {ii} contre quantité d’hommes sottement érudits de notre siècle]. {iii}

    1. V. note [28], lettre 301.

    2. Titre générique repris par plusieurs ouvrages, pour imiter les Satires Ménippées de Varron (v. note [1], lettre 14).

    3. En feuilletant, j’ai vu passer les noms des humanistes Jean Pic de la Mirandole, Hermolao Barbaro, Rodolphus Agricola ou Mélanchthon. Les théologiens y sont critiqués pages 90 et suivantes, mais sans attaques ad hominem.

  2. Leyde, Justus Livus, 1632, in‑12. Le titre complet de la seconde partie (pages 105‑246) est : D. Iuliani Imperatoris Cæsares, sive Satyra in Romanos imperatores. Interprete Petro Cunæo. In limine est ejusdem Præfatio in Julianum [Les Césars de l’empereur Julien, ou Satire contre les empereurs romains, dans la traduction de Petrus Cunæus, avec au début sa préface sur Julien] ; le texte grec (Ιουλιανου αυτοκρατορος Καισαρες) est transcrit à la suite du latin. Il s’agit d’un des ouvrages écrits par Julien, dit l’Apostat (v. note [15], lettre 300).

61.

« Qui beaucoup pèche, rien ne pardonne » (adage italien sans source identifiée). Après sa digression sur les sociniens et la Satyra de Petrus Cunæus, Christiaen Utenbogard revenait à Gisbertus Voetius, sa pire bête noire et le principal sujet de sa lettre, mais dont Guy Patin prisait fort les ouvrages.

62.

« vous êtes fort inquiet de l’état présent de mes affaires, pour savoir si je suis en vie, si je me porte bien » ; rappel des mots que Guy Patin avait employés au début de sa lettre du 2 juillet 1656 à Christiaen Utenbogard : de præsente rerum tuarum statu valde anxius, an nimirum vivas, an valeas.

63.

Alecto, l’Implacable, était celle des trois déesses infernales (v. notule {d}, note [35], lettre 399) qui figurait le mieux la personne de Gisbertus Voetius, telle que Christiaen Utenbogard l’avait décrite.

64.

V. supra note [27], pour la mise en petites capitales du mot pieds [pedibus]. La famille de Christiaen Utenbogard était celle des arminiens (remontrants, v. notes [28] supra et [65] infra).

65.

Allusion à l’histoire religieuse de la famille Utenbogard, dont le plus fameux représentant avait été le pasteur Johannes (Jan) Utenbogard (Wtenbogaert ou Uytenbogaert, Utrecht 1557-1644) : grand-père ou grand-oncle de Christiaen, Jan avait été élevé dans la religion catholique et s’était converti au calvinisme en 1578 ; il avait étudié la théologie à Genève auprès de Théodore de Bèze, où il avait fait connaissance de Jacobus Arminius et de ses idées favorables au libre arbitre, opposé à la prédestination prônée par Jean Calvin ; après la mort d’Arminius (1609), Jan Utenbogard était devenu le meneur des arminiens (remontrants) et dut endurer les vives attaques qu’ils eurent à subir (v. note [7], lettre 100).

66.

« Je ne veux pas pour ami un ennemi de sa propre patrie » (sans source identifiée).

67.

« je hais pire que chien enragé ou serpent » (Horace et Érasme, v. note [6] de la consultation 16).

68.

Guy Patin a ajouté ces derniers mots, mis en italique. Redoutant les possibles indiscrétions de la censure et les foudres de Gisbertus Voetius, Christiaen Utenbogard avait jugé bon ne pas signer sa lettre.

Le ms BIUS 2007 conserve la réponse plutôt évasive de Patin à Utenbogard, le 2 février 1657.

s.

Collège de France, ms Montaiglon, page 185 (non disponible en ligne).

Celeberrimo viro,
Do Gùidoni Patino
Doctori medico et Professori Regio S.D.
Quas 2. Jùlij per adolescentem popùlarem, vir celeberrime, ad
me dedisti, 26/16 Agùsti nùdas Leydâ accepi. Si adole-
scens suas addidisset, quibus nomen aut domicilium sùúm mihi
indicasset, per ipsùm tibi et repondissem et fascicùlùm transmississem : jam
nec ùbi sit, nec quomodo vocetùr, scio ; quapropter per cl. D. Lindanùm
hasce cùm fasculo mitto. Hisce per adolescentem literis, ùt singùlis quæ
scire desideras, respondeam, petis. Sed plùrimis jam responderam 13. Jan.
quam responsionem te 5 Jùlij accepisse, mihi 7. Júlij indicasti : tùis
aùtem de 7 Jùlij respondi 22 per Cl. D. Lindanùm, quam responsio-
nem te jam recepisse confido. Theologùs dictùs Voetius vivit et valet magno
nostræ reip. et Religionis malo : calùmniarùm, mendaciorùm, et ziza-
niarùm seminator indefessus : novitatùm non citra perjùriùm inventor,
doctor perpetuus et dictator perpetùùs. Festa non Sanctorum sed ipsiùs
Salvatoris (diem Natalem, circùmcisionis, Passionis, resurrectionis,
ascensionis in Cœlùm, missionis spiritùs sancti) per se et discipùlos sùnt
contra datam fidem abrogans in contionib. et catechizationib. pùblicis,
cùm tanto rigore, ùt observationem istorùm festorùm clamosi ipsiùs di-
scipùli passim pronùntient esse non pùerilem aút ridicùlam, sed bestialem
et diabolicam. Quàre ? quia inventùm papistarùm, cùm quibùs
nihil commùne volùnt hi deformatores. Placentas è farinæ flore et
ovis qùisqùis etiam sobriùs comederit bacchanaliorùm tempo/re, abominandæ súperstitionis
papisticæ reùm esse, tanquam oracùlis ex Apollonio tripode deprom-
tis, credi volùnt. Diem Dominicam nobis christianis observandam
rigidiùs præscribùnt, quàm ipse Moyses Sabattùm popùlo Jùdaico
imò eo severitatis plùsquam Pharisaicæ prolapsi sùnt quidam ex nostris
tùrbonibùs, ùt hypocritas Pharisæos, quibùs Christùs toties illùd
væ pronùntiavit, præcisitate súa longe sùperent : nam illi vel
bovem qùi sabatto in pùteùm ceciderat, edùcerent, testante id de
ipsis ipso salvatore : horùm qùidam, christiano inservire die domi-
ni nemini permittùnt, etiam casù qùo sine vitæ discrimine illùd
omitti nequant. Qùidam clamant, oia/ mala patriæ nostræ
evenire ob solam sab-/bathi profanationem :/ [a]lij clamosiores/
vociferantur, maxima/ patriæ imminere mala/ ob solam bestialem
istam ignoran-/tiam qùam in festor./observationibùs/ ostendimùs nos foco æter-
no addicti pseùdo-/christiani : et sic/ pavidam plebem/ territat minacijs
hæc viperarum proge-/nies.
O fermentùm plùsquam farisaicùm ! Pharisaicæ novi-
tates, non solùm omniùm christianorùm institùtis, sed et synodo Dor-
dracenæ nationali repùgnantes, cùjùs obedientiæ quotquot in hisce Provincijs con-
cionatores pùblici, sese jùramento obstrinxerùnt. Hisce nostrorùm
tenebrionùm novitatibùs tota patria commota tremit. In plùrimis Hol-
landiæ ùrbibùs concionatores nostris novatoribùs è diametro sese
opponùnt : qùin et in hac provincia in ùrbe Amisfùrtensis omnes
concionatores contrarias nostrorùm concionibùs habent : imò et
in hac ipsa civitate tres pii Ministri (qùi

Mirantùr Patriæ patres tolerare nefanda)

reliqùis cordatè in concionib. sæpe sese opponùnt, licet privatim
in choragio hi Evangelici doctores à legislatoribùs plùralitati
votorùm semper superentur. Hæc ne in novùm schisma erùmpant
mùlti metùùunt. Deùs præsidet his flùctibùs ; qùem, ùt pijs
nostris, sùis in terrâ legatis, et ùtriùsq; tabùlæ observatoribùs legiti-

t.

Collège de France, ms Montaiglon, page 186 (non disponible en ligne).

mis animùm inspiret mascùlùm, qùo tùrbones istos frenis et
catenis coërceant, rogamùs. Paùcis abhinc hebdomadibùs
in Synodo Zùgdhollandica statùtùm, ùt omnes qui hinc veniùnt
proponentes, priùsquam ad concionandùm admittantur,
acerrimè examinentur, nùm novitates nostrorùm in sinù foveant :
si fovent, repùdiandos sanxierùnt aùctoritate ordinum Hollandiæ, quibùs
honos et gloria pro istâ resolùtione æternùm debetur : ipsisq;, quia,
ne novùs papatùs ùlteriùs gliscat, vigilantissimi sùnt, Venetæ
reip. perpetuitatem, exopto.

Tertiùm Disputationum Theol. tomùm se sub prælo habere mihi typographos dixit,
sed non nisi proximo vere finiendùm : quartùmq; et deinde 5. sùbsecùtùrùm.
Incomparabilis vestri Salmasij epistolas Leydæ in 4o excùdi intelligo, et penè
ad ùmbilicùm perdùctam editionem. Freitagij Orationem cùm heic invenire nequive-
rim, Groningâ eam petij (sicùt 22. Jùlij ad te scripsi) sed responderùnt mihi Cl.
D.D. professores, non prostare amplius illam Orationem : qùapropter et præteritâ
hebdomadâ cùm Amsteldami essem, eam diligenter quæsivi, sed non inveni. Cùm
aùtem à Cl. D. Schokio illam Orationem peterem ; petij simùl, ùt si quid sùarùm
lùcùbrationùm te (qùem τον υπερμεγιστον, et sùbinde τον πανυ D. Patinùm
meùm nominare consùevit) dignùm haberet, mihi quam oxyssimè transmitteret,
quoniam brevi fascicùlùs tibi destinatùs Cl. D. Lindano mittendus erat. Misit itaq;
qùæ ad manùm erant, quasdam suas Disputationes, Orationes et de Scepticismo
librùm
, ùnà cùm Cl. D. Maresij Theologi Galli responsione ad maledicam Theolo-
giam natùralem reformatam
scilicet # unà cùm/ inclusa/ huic epi-/ stola. Schokiùs hic popùlaris et in vicinia
mea natùs et nùtritùs ; olim discipùlùs, amicùs intimùs et à secretis, imò satelles
Ismaëlis nostri, solitùs jùrare in verba magistri, nefariùm hominem contra qùos-
vis vel propriæ existimationis jacturâ sæpissimè defendens ; qùi fervor improvidæ
juventùtis erat. Tandem cùm instinctù præceptoris contra Cartesij philosophiam
scripsisset, librùmq; illùm Groningâ Ultrajectùm ad præceptorem misisset imprimen-
dùm, præceptorq; ei Schokij nomen (inscio, imò invito Schokio) præfixisset, titùlùmq;
libro fecisset Admiranda methodus Philosophiæ Cartesianæ, mùltaq; passim sce-
lerata manù
addidisset, nempe de impietate imò Atheismo Cartesij Athei, cùm
Vanino comparati, et pro vago Caïno depicti : Cartesiùs atrocissimis hisce calom-
nijs commotus, ap Groninganùm Magistratùm de intolerabili injùriâ questùs
est. Schokiùs videns se per præceptorem in sùmmùm discrimen addùctùm, tandem
quasi è gravi lethargo excitatùs, de propria existimatione sollicitus, impiùm
præceptorem deserere coactus fùit : qui præceptor 21. Jan. 1645 inter alia hæc ad
Schokium scribit (egregiùm sanè facinùs !)

“ Ante hac ad te scripsi, et consiliùm sùggesti : non dubito qùin scriptio illa jam reddita
“ sit. Inter cetera consùlùi, ni fallor, ùt Quæsitores tùos ableges ad testimoniùm
“ tùùm, quod traditùm fùit senatùi Ultrajectino, et sùb manibùs ejùsdem etiamnùm
“ asservatùr. Non poteris tecùm et cùm testimonio tùo, nec et mecùm committi, si
“ ex rei veritate nihil aliud respondeas, quam nùnc scripto testimonio tùo declarasti.
“ Sùmma huc redit : Te ex te consilium cepisse et statuisse ; teq; opus illud quod ad
“ materiam, formam, methodùm, stylum, inchoasse, absolvisse ; chartas et sc<h>edas
“ à me tibi nùllas suppeditatas, aùt sùbmissas, nec ùllam vel minimam pagel-
“ lam præformatam, quam tù describendo tùam feceris. Nam semper hoc falsùm præ-
“ supponunt, aùt ex malitiâ præsupponere volunt, te scil. jùniorem, tantùm
“ tùo ingenio et stùdio non posse (quia scil. de sùo ingenio hoc sperare non aùsint) itaq; alien-
“ nâ vitùlâ tibi arandùm. Quod si quærat, an ego consciùs fùerim illius consilij,
“ scriptionis et editionis ? respondendùm est, Sic opinor : quia Ultrajecti promiscùè

u.

Collège de France, ms Montaiglon, page 187 (non disponible en ligne).

“ quivis conscij erant, cùm in angulo gesta non sint, sed in officinâ typographicâ et
“ librariâ, quam professores, advocati, stùdiosi quotidie frequentant. Si quærant,
“ an ego correctioni ad prælo præfuerim ? responde, te de eo nihil posse testari tan-
“ qùam testem ocùlatùm, qùippe qui Ultrajecti non fùeris. Hoc scire te, pro-
“ vinciam illam à te demandatam D. Waterlaet, qui unà cùm typographo
“ testetur, non a V. (cùi tantùm otij non est) sed ab ipso D. Waterlaet fuisse
“ correctionem illam susceptam et procùratam.

Quid e, si non hoc falsùm jùramentùm præscribere est ? O virtùtem Theo-
logo eximio dignam ! Prægrandis epistola est, ex qùa hæc paùcùla excerpsi ;
aùtographùm ejus jam ùltra annùm sùb manibus meis est et licet metù inter-
ceptionis, vorsùtissimus Theologùs eam non aliter sùbscripserit quam tùùs quem
nosti
, eam tamen pro sùa recognovit coram jùdicibùs, cùm Schokiùs
ab eo in jùs protractùs, epistolam illam inter alia innocentiæ sùæ docùmen-
ta jùdicibùs exiberet. Quis non, tales pejerandi formùlas, à Theologo se-
niore concinatore et professore discipùlo suo præformatas et præscriptas,
legens, qùis non iùdicet inquam hominem impiùm Theologicâ dignitate indi-
gnùm ? Tantùm abest, ùt etiam à Voetiolatris jùdicibùs plùs in sententia
favoris quam ipse Schokiùs habùerit : quare de hac sententia Schokiùs
ad cùriam provincialem appellavit, ùbi cùm præceptor tot faventes jùdices
neùtiq se habitùrùm sciat, per ùnùm tamen illiùs collegij ita rem
hactenùs dirigere vaferrimùs Theologùs novit, ùt per aliqùot annos lis illa inde-
cisa pendeat, non obstantibùs quotidianis Schokiorùm sollicitationibus.
Sed hoc intolerandùm, qùod adhùc per præceptoris filiùm, Schokiùs bis in-
similetur perjùrij (sicùt legas pag. 371. Dissertationis de bonis vulgò Eccle-
siasticis
, quam tibi mitto) solùm quia pejerare nolùit in præceptoris gratiam,
cujùs patrociniùm toties cùm propriæ famæ prostitùtione intrepidè susceperat ;
quasi Schockiùs prorsùs elephanti corio aùt totùs ligneùs foret. Plura de exi-
mio isto Theologo scriberem ; sed qùid ad te nostra Babel et Theologicùm
in nos Jùdaïzantiùm odiùm, à quo nos liberet Dominùs, et asserat adversus lù-
tùlentorùm pedum tartaricos strepitus. Thersitem, qùem petijsti, mitto
unà cùm confùtatione insulsi et maledici libri. Addo examen accùratùm disp.
primæ
unà cùm Corollarijs repetitis ex dips. i. Disputationem a primam,
quam summo studio quæsivi, invenire non potui, alijs libentissimè adjunxis-
sem. Intelligens postea, olim dùos libros (nempe Academiam Ultraject.
et Gymnasiùm Ultrajectinùm) ejùsdem materiæ, scilicet contra disp. i. et maledi-
cùm Thersitem scriptos, omni diligentia usus non nisi Gymnasiùm Ultraject.
reperi. In quo lege Præfationem : sed admonitùm te velim, plùrima ibi in
Cl. D. Schokiùm dici, nec immeritò ; sed in Schokiùm qualis tùnc fùit,
cùm jùvenili fervore, præceptoris satellitem ageret, non qualis nùnc est,
Antagonistam Theologi dicti : tùnc, cùm pùer esset, ut puer loquebatur,
nùnc vir factùs, qùæ virùm decent, loquitùr. Præfationem hanc excipit
Thrasonica illa disputatio prima ad ostentationem facta, mihi diù expetita.
Hanc corollaria ex Disput. i. repetita. Dein sequitùr Gymnasiùm Ultr.
i.e. accuratùm examen. Lege per otiùm. Addo erùditissimam Cl. D. Schokij
epistolam ad Cl. D. Jo. Horenbeek
, ex intimâ antiq<ui>tate depromptam. Ubi
cùm de Aùctorib. MS loquitùr aùtor, intelligit Voetij consiliùm theologicùm
(cùm de Adversario, Voetiùm intelligit, cùm quo ipsi injùriarùm lis sub judice
pendet) belgicè ab ipso scriptùm, et à quibùsdam dùmtaxat collegarùm subscriptùm : quare
et tùnc à magistratù pro consilio prorsus sc<h>ismatico repùlsùm fùit, ùtpote non ab
omnibus Voetij collegis sùbscriptùm. Sc<h>ismatici istiùs consilij plùrimas copias

v.

Collège de France, ms Montaiglon, page 188 (non disponible en ligne).

Voetiùs distribuit. Tandem in lùcem prodijt famosùm Consiliùm, se Voetio (ùt ai[t)]
inscio. Mendacissimùm illùd consiliùm, et injùriosum non solùm in civiùm
honestorùm plùrimos ; sed et Blasphemùm in Deos, superiores nostros, senat[us]
urbicùs pro Pasquillo et famoso libello distrahi interdixit : contra aùtorem t[amen]
(qùem Voetiùm esse sciebant, nec ipse diffitebatur) nihil moliti sunt ; qùare frig[i-]
da hæc interdictio in caùssa fùit ùt apud quoscùmq; Bibliopolas sine ùllo scrùp[u-]
lo venale reperiretur. Aùtor videns se inquunt convitiorùm plaùstra in qùos-
vis et in ipsos proceres impùnè exspuisse, secùndam contùmeliosi et seditiosi istis
consilij partem
hoc mense Belgicè edidit ; non jam, ut ante, suppresso nomi-
ne ; imò et convitijs priore mùlto refertiorem (licentiâ quippe omnes deteri-
ores sùmùs) ùt aùdaces sùnt isti doctores quos D. Petrus ep. 2. c. 2. inter
nos fùtùros prædixit ; qùi per avaritiam fictis sermonibus nos negotiatùri, carnem se-
quentes in impùra cupiditate incedùnt, et dominatùm despiciùnt, aùdaces et
sibi placentes, non horrent dignitates convitijs incessere
(2. Petr. 2. 13.) ipso
Lùcifero pejores
. Cùm anno (ni fallor) 1641. principio Britannicorùm tùmù[l-]
tùùm, philosophaster quidam hic Politicam dispùtationem habuisset de Tyrann[is.]
Quæ inter alia abominanda et christiano homini infanda continebat Ma-
gistratùi licere in regem Tyrannùm tanquam in grassatorem pùblicùm incurrere
imò cùivis privato licere Magistratùm Tyrannùm occidere
 : Ismaël noster,
theologus dictus, nefandæ istiùs dispùtationis aliquot centena exemplaria
ad conjùratos suos in Britannia fratres transmisit.

(En conjùratos cœlùm rescindere fratres !)

Talia tùnc rebùs regis etiamnùm, sat bene stantibus, in Anglia dispùtare
sacrilegiùm fùisset. Ne autem vana me tibi narrare credas, vidi et legi aùtogra-
phùm epistolæ tùnc ea de re à Theologo dicto ad Schokiùm datæ ; in qua hùnc
sensùm me legisse memini : se 300. exemplaria Disputationis de Tyranno
in Britanniam misisse, et à Britannis responsùm habere, quod suas li-
teras ùnà cùm disputationib. de Tyranno bene et sùmmo gaùdio acceperint :
quibus ilico distribùtis, plùra Britanni se desiderare Ultrajectino præsi[deri]
indicabant. Vide nùm in nùmerùm Paricidarum et sicariorum regiorum accensen-
dus sit iste Antistes. Addo Cl. Maresij ùltimam patientiam à Voetio ex-
pùgnatam
 : ùt et Aùreùm, imò ne auro quidem contra carùm, librùm Grallarùm
additis Bombomachiâ Ulissinganâ et Grallatore furente. Quæ tùo pala-
to accommoda fore, sat scio. In lùcem prodiderant initio meæ pregrinationis,
me ad domùm reverso, altùm de illis silentiùm, illæq; rixæ consopitæ videban[t]
ita ùt vix ùnquam de Grallis verbùm ante annùm aùdierim : sed cùm præterito
anno impleretùr Vaticiniùm Aùtoris (Quem Petr. Lansergiùm esse vo-
lùnt : hic ante stabilitam apud Walachros hierarchiam senatoriâ ap Mediobur-
genses dignitate insignis, jam per Theologorùm odiùm exsùl apud Hagienses me-
dicùs, rem feliciter facit) quod pag. 17 videre est, ùbi hæc dixit : nec incertùm
est alibi quoq; similia insecta latere, sed torpida et quasi intra testam hærentia,
qùorùm tamen nemo tam ignavos spiritus fovet, qùin si felicem sùccessùm inve-
nerit Walachrùs pùllatus, brevi similiùm Zelotarum magna ùbiq; adfùtùra sit co-
pia
. Hæc hoc anno vidimus, qùorùm etiam pars magna fùimùs, novùm papisti-
cùm jùgùm in Germanis fratribus experti ; in quos nostræ ùrbis novi jùdaïzan-
tes Papistæ (qùorùm Theologùs dictus, papa est) sùa fùlmina vibrant.

Ang. Po-/ litianus. Sed qui nos damnant, histriones sùnt maxùmi, Nam Cùrios simùlant, vivùnt Bachanalia
Hi sùnt præcipuè quidam clamosi, leves, Sùperciliosùm, incùrvicervicùm pecus :
Qui quod ab alijs habitù et cùltù dissentiùnt, Tristesque vùltù vendùnt sanctimonia[s]
Censuram sibi quandam et tyrannidem occùpant, Pavidamq; plebem territant minacijs.
Sic qui apùd vos veterem diù lùdùnt fabùlam fratres fraterrimi, eandem apud nos incip[i-]
ùnt patres paterrimi. Fabùla vetus, actores novi : sed hi apud vos candidis, nigris, [cine-]
reis et mixtis incedùnt coloribùs, apud nos non nisi ùnico, eoq; pice et carbonibùs [simili]
atro : acciditq; nostris quod vero proverbio dicitur : canis reversus ad propriùm vomi[tum et]
sùs lota ad volutabrùm cæni
 : ita ùt plùrimi metùant, ne

w.

Collège de France, ms Montaiglon, page 189 (non disponible en ligne).

ne semel expùlsùs impùrùs ille desperati papatus spiritus revertatur,
septem alios spiritus se pejores secùm dùcens
, ùt est in Evangelio : sed
hæc Deùs averrùncet. Rebùs heic sic stantibùs, et mùltis mecùm
hisce (proh dolor !) temporibùs et moribùs ingemiscentibùs, à plù-
rimis mihi hæ Grallæ commendatæ sunt ; quas ùbi legi, omni ad-
hibita diligentia (cùm nùsquam ampliùs prostent) tibi hoc exem-
plar expiscatùs sum. Si Grallas forsan hactenus non legeris, qùæ-
so nostrorum ergo eas evolve, si modo rerùm nostrarum cura te tan-
git ; quam enim autor ille in Walachros composuit,

Nostris prælusit fabùla rebùs.

Addo magni Cartesij manes sicùt heri mihi ab ignoto missæ
sunt ; in quibùs technas, calùmnias, mendacia, falsorùm testimo-
niorùm fabricas etc. Voetiorum et Dematii detecta videas
. Ibi le-
gas licet pag. 19 quæ ego sùpra ex epistola 21. Jan. 1645 excerpsi de
perjùrij formula à Theologo seniore præscriptâ discipùlo suo. Sed
quo abripior ? Quia cùm amico, de præsenti rerùm mearùm statù anxio, nego-
tiùm est, interiores animi fibras laxo, inque ejùs sinùm secretiorem
effùndo quæ nolim noster papa (qùi hîc regnùm possidet) resciscat,
nisi Martyrio coronari velim : adeo trùcùlenta bellùa infernalis
hæc hydra est, monstrùm an portentùm dicam : cùi injuriarùm lites,
qùas cùm omnibus fùriosissimè prosequitur, ambrosia et nectar
sùnt ; neminem ferre, omnes persequi pùra religio est ; hùmana si-
mùl et divina jùra pedibus calcans : venenato suò halitù,
pùram religionem inficiens ; infecto sibilo omnem politiam contùrbans.
Sed dùm ego hæc, hoc epigramma mihi affertùr.

Voetius est exlex fidei contortor acerbus,
Enervans leges ; juratos despicit actus
Quod + Synodùs patriæ quondam contexit in ùnùm
Dordraci : physicæ deceptans diffidet arti,
Implorans monachùm ; negat hoc quærente senatù :
Convictùs scripto, fidùm supplantat Achatem.
Dissidium refovens, crimen dignoscere non vùlt.
Nec fratres se odisse pùtat, conjùrgia tractans ;
Prostituens cænam Domini derepsit ovile.
Subtrahit imperiùm Patribùs, coetùmq; ministris :
Christo dissimilis, fùlmen papale resùmit :
Pontificis fratri popùlus servire tenetur.

+ et ipse istis synodi
membrùm fuit. tanto
pejùs.

Sed adeo vitiosè hoc epigr. scriptùm erat, ùt vix conjectùra sen-
sùm assequi potùerim. Cùm Theologi Leydenses opinionem sùam qu
de Socinianis haberent, ordinibùs Hollandiæ aperuissent, statim pù-
blico edicto contra Polonienses istos eorùmq; doctrinam caùtùm
publico edicto
caùtùm est : cùm autem contra consiliùm illùd Theolo-
gorùm et Edictùm ordinùm nobilis quidam Polonùs Apologiam,
quam pro Veritate accùsata nominat, scripsisset, novùm editùm contra
eandem prodijt, sùmma severitate observatùm : ita ùt nùllo modo
Apologia illa reperiri potùerit : qùi eam clam acceperant, nemini id
palam facere aùsi erant : donec tandem nùperrime prodiret
belgicè et latinè Apologia illa pro Veritate accùsata, à Cocceio professori Leydensi
examinata
 : hoc clypeo velùt ægide tùtus ùbivis jam prostat tam

x.

Collège de France, ms Montaiglon, page 190 (non disponible en ligne).

rigidè absq; hoc scùto prohibitus liber, quem quia novùs est,
novaq; et antiqua continet, tuæ cùriositati transmittere volùi,
et matùrissimùm tùùm jùdiciùm (cùi me libens sùbjicio) sùper
hac Apologia, et sùper jùdicio Leydensiùm de erroribùs, aùt Blas-
phemijs (ùt vocant) Poloniensium seu Socinianiorùm. Cùm aùtem
iam omnium manibùs teratur Cùnæi Satyra Menippea, scripta olim
in sui secùli homines ineptè eruditos, qui in mentem cùjùsq;
affectant imperiùm, nobilissimamq; partem, qùæ sola mancipio
non detùr, servire docent : volùi eam addere, si forsan non habeas,
ùt antiquam istam fabùlam legas, qua nostri tùrbones graphicè
describùntùr. Finem facio, ùnicùm hoc ùnicè te obtestans, ùt
apprimè cùres, ne Papa qui heic regnat, me hæc tibi scripsisse
resciscat : atrocem et irreconciliabilem Spiritùm gerit, estque observatissimùs
impiæ apud Theologos ùsitatæ legis, Chi più pecca, man-
co perdona
. Jùsto prolixiùs egi de eo, quem missùm feciste me-
liùs fùisset : verùm quia, vir celeberrime, amice integerrime, de præ-
senti rerùm mearùm statù valde anxiùs es, vivamne nimirùm an
valeam
 ; necesse jùdicavi ad te quædam perscribere de isto, dicam homi-
ne an Infernali Fùria, qùi præter quod ùniversam tùrbet remp.
et toto divisos orbe Britannos, singùlatim nostram familiam ped
pedibus concùlcat. Sed cùm avi proaviq; nostri inter primos in
hisce regionibùs fùerint qùi desperati papatùs jùgùm excùsserent, ne
degeneres exstemùs, cùm bono Deo nos Pharisaicæ isti viperarùm
progeniei viriliter opponemùs, nùnqùamq; jùgùm istùd, quod nec
ipsi nec patres nostri ferre potùerùnt, cervicibùs nostris denùo im-
poni sinemùs. Si tamen proceribùs nostris (qùod et ante ipsos tot e-
mascùlati imperatores et reges fecerùnt) visùm erit, omnia
Papis concedere, ut mùlti provident (avertat omen hoc Deùs)
sùccùmbere aùt secedere oportebit : imò nisi decrepiti mei parentes,
qùibùs post Deùm omnia debeo, obst itissent jam diù ad vos reversùm
me vidissetis : nam, ùt apertè dicam, ùbivis esse, quam in hac
urbe malim : rebùs nempe sic stantibùs, ne tù dicas,

Patriæ inimicùm suæ, nolo amicùm mihi.

Patriæ inimicùs non sùm, sed gliscentem in patria hierarchiam cane
pejùs et angùe odi, avitæ libertatis amantissimùs. Vale, vir celeber-
rime ; et qùem sùmmo semper amore prosecùtùs es, amare perge

Tui cùltorem sincerùm et devotùm
quem nosti
Christianum
Utenbogardum Med. Ultraject.

Ultrajecto 21 Aùg.
die Jovis 1656.

Quam accepi, die Mercurij,
24. Ianu. 1657. et respondi
die Ven. 2. Febr. sequentis.


Correspondance complète de Guy Patin et autres écrits, édités par Loïc Capron. – Paris : Bibliothèque interuniversitaire de santé, 2018. – De Christiaen Utenbogard, le 21 août 1656

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(Consulté le 19/04/2024)

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