L. latine reçue 15.  >
De Vopiscus Fortunatus Plempius,
le 13 décembre 1656

[Ms BIU Santé no 2007, fo 346 ro | LAT | IMG]

Très distingué Monsieur, très cher ami, [a][1][2]

Je désire très vivement voir les notes que vous avez prises sur la patrie d’Avicenne, et voudrais donc que vous me les envoyiez à la première occasion. [1][3] Je soutiens pour ma part qu’il était natif de Bokhara, [2][4] mais j’examinerai avec soin ce qu’en disent vos auteurs. Je ne connais pas ce Suisse Hottinger et n’ai pas vu ses Analecta ; je m’étonne même qu’il y ait parlé de moi. [3][5] On a déjà fini d’imprimer le premier livre de mon Arabe. [4] Vous auriez tort de croire que je le défends car bien au contraire, j’agis en fidèle traducteur, je dénonce et démontre les nombreuses erreurs qu’il y a dans ses pages ; mais qui donc ne se trompe pas ? Fernel en personne, qui fut un si grand homme et le censeur des autres, s’est trompé gravement et grossièrement en bien des choses. [5][6] J’ai lu dans les de Scriptis medicis de M. Vander Linden que les œuvres anatomiques d’Oribase ont été imprimées à Paris chez Guillaume Morel en 1556, in‑8o ; mais comme votre Riolan vous a répondu autrement, je lui fais confiance. [6][7][8][9][10] Je souhaite que cet homme vive longtemps et défende la véritable médecine, tant par oral que par écrit. J’ai bien sûr appris avec une immense peine le décès du grand René Moreau ; [11] il m’avait écrit une première puis une seconde lettre, que je conserve parmi mes ceimelia[7] Vale et vive.

Tout à vous,
V.F. Plempius.

De Louvain, ce 13e de décembre 1656. [8]


a.

ms BIU Santé no 2007, fo 346 ro, lettre autographe de Vopiscus Fortunatus Plempius « Au très distingué/ Monsieur Guy Patin,/ docteur en médecine et professeur royal », avec annotation en français, de la plume de Patin, « Reçue le 29e de janvier 1657 » (fo 346 vo).

1.

V. note [5] de la lettre latine que Guy Patin avait écrite à Vopiscus Fortunatus Plempius le 3 novembre 1656. Sans la possibilité de lire ces notes de Patin (car il les a bien envoyées à son correspondant, v. le début de sa lettre latine du 9 février 1657), on est incapable de dire si Plempius s’en est inspiré dans les préambules de son Avicenne (Louvain, 1658), sans citer sa source, comme il avait fait pour les deux Avicenne (v. notes [10] et [11], lettre latine 56).

2.

Bokhara, jadis en Perse, est aujourd’hui une ville d’Ouzbékistan. Avicenne y a passé sa jeunesse, mais est né dans une proche bourgade, dénommée Afshara.

3.

V. note [5], lettre latine 61, pour Johann Heinrich i Hottinger, ses « Morceaux choisis » et leur allusion aux travaux de Plempius sur Avicenne.

4.

C’est bien sûr Avicenne que Vopiscus Fortunatus Plempius s’appropriait ici familièrement en l’appelant « mon Arabe », et dont il s’apprêtait à publier les deux premiers livres du Canon, traduits en latin.

5.

V. note [7], lettre latine 61, pour l’avis critique de Fernel sur Avicenne, à propos de la saignée, qui n’avait semble-t-il pas plu à Vopiscus Fortunatus Plempius.

6.

Johannes Antonides Vander Linden a correctement répertorié l’Oribasii Collectaneorum artis medicæ liber… [Livre des Mélanges de l’art médical d’Oribase…] (Paris, 1556) à la page 476 de ses deux livres « des Écrits médicaux » (2e édition, 1651, v. note [3], lettre latine 26). Sur la foi de Jean ii Riolan, Guy Patin avait donné 1555 à Vopiscus Fortunatus Plempius pour année de cette édition (v. note [9], lettre latine 61). Cette allusion de Plempius dut néanmoins retourner le couteau dans la plaie de Patin car il n’avait toujours pas en mains le livre de Linden qu’il attendait depuis décembre 1653.

Guillaume Morel (Le Teilleul en Normandie 1505-Paris 1564), imprimeur et helléniste français, associé puis successeur d’Adrien Turnèbe (v. note [20], lettre 392), avait publié cet Oribase grec. Le libraire parisien Gilles Morel (v. note [2], lettre 93) ne lui était pas apparenté.

7.

Ceimelium (ceimelia au pluriel) est un hellénisme latin dérivé de κειμηλιον (keimêlion), objet que l’on conserve en précieux souvenir.

8.

La réponse de Guy Patin est datée du 9 février 1657.

s.

Ms BIU Santé no 2007, fo 346 ro.

Vir Clarissime simul ac benignissime

Omninò discupio videre quem annotasti de pat[ria]
Abensinæ. Velim itaque ut primâ datâ occasione
mihi mittas. Ego assero eum esse Bocharensem :
expendam, quæ tui Authores dicant. Hottingerum
Helveticum non novi, neque eius analecta sub ocu-
los meos venerunt ; et miror Virum mei mentionem
facere. Primus Arabis mei liber iam excusus
est. Quod verò existimes me eum defendendum
suscipere ; longissimè secus est. fidelem inter-
pretem ago : in foliis errores eius, qui plures
sunt, monstro et coarguo. Et quis non errat ?
Fernelius ipse, tantus Vir et censor aliorum
quàm graviter et abnormiter in multis erravit.
Oribasii opera anatomica Parisiis excusa est apud
Guil. Morellum 1556 in 8 legi in de Script. Med.
D. Vander Linden : sed cum D. Riolanus vester
aliter responderit, acquiesco : quem ergo Virum
diu vivere velim, et veram Medicinam voce
styloque propugnare. Decessum certè magni Re-
nati Moreau ægerrimè tuli : scripsit mihi
unas atque alteras literas, quas inter cei-
melia servo. Vale et vive.

Vester totus
V.F. Plempius

Scripsi Lovani die xiii Decemb.
ↀiɔcLvi

t.

Ms BIU Santé no 2007, fo 346 vo.

Clarissimo Viro
Domino Guidoni Patin
Medicinæ doctori et
professori Regio
Parisiis

Receu le
29. de Ianv.
1657.


Correspondance complète de Guy Patin et autres écrits, édités par Loïc Capron. – Paris : Bibliothèque interuniversitaire de santé, 2018. – De Vopiscus Fortunatus Plempius, le 13 décembre 1656

Adresse permanente : https://www.biusante.parisdescartes.fr/patin/?do=pg&let=9066

(Consulté le 23/04/2024)

Licence Creative Commons "Correspondance complète de Guy Patin et autres écrits, édités par Loïc Capron." est mis à disposition selon les termes de la licence Creative Commons Attribution - Pas d’Utilisation Commerciale 4.0 International.