À Claude II Belin, le 10 septembre 1636

Note [2]

En dépit de ces débuts peu encourageants, la contre-offensive française fut couronnée de succès. Les Espagnols, au lieu de forcer la marche vers Paris, perdirent du temps à assiéger Amiens et Abbeville ; en outre, le manque d’argent et de ravitaillement poussa leurs soldats à déserter en grand nombre. L’arrivée de l’armée française les détermina à la retraite et Corbie fut reprise le 10 novembre.

La France exulta, le patriotisme de Vincent ii Voiture (v. note [9], lettre 210) a éclaté dans sa Lettre à Monsieur… après que la ville de Corbie eut été reprise sur les Espagnols par l’armée du roi (de Paris ce 24e de décembre 1636), reproduite dans le premier volume des Lettres et autres œuvres de Monsieur de Voiture… (Amsterdam, André de Hoogenhuysen, 1697, in‑12, lettre lxxiv, pages 137‑138) :

« Il y avait trois ans que nos ennemis méditaient ce dessein et qu’ils nous menaçaient de cet orage. L’Espagne et l’Allemagne avaient fait pour cela leurs derniers efforts, l’empereur y avait envoyé ses meilleurs chefs et sa meilleure cavalerie ; l’armée de Flandres avait donné toutes ses meilleures troupes. Il se forme de cela une armée de vingt-cinq mille chevaux, de quinze mille hommes de pied et de quarante canons. Cette nuée, grosse de foudres et d’éclairs, vient fondre sur la Picardie qu’elle trouve à découvert, toutes nos armes étant occupées ailleurs. Ils prennent d’abord La Capelle et Le Castelet ; ils attaquent et prennent Corbie en neuf jours. Les voilà maîtres de la rivière, ils la passent, ils ravagent tout ce qui est entre la Somme et l’Oise ; et tant que personne ne leur résiste, ils tiennent courageusement la campagne, ils tuent nos paysans et brûlent nos villages. Mais sur le premier bruit qui leur vient que Monsieur s’avance avec une armée et que le roi le suit de près, ils se retirent, ils se retranchent derrière Corbie ; et quand ils apprennent qu’on ne s’arrête point et que l’on marche à eux tête baissée, nos conquérants abandonnent leurs retranchements. Ces peuples si braves et si belliqueux, et que vous dites qui sont nés pour commander à tous les autres, fuient devant une armée qu’ils disaient être composée de nos cochers et de nos laquais ; et ces gens si déterminés qui devaient percer la France jusques aux Pyrénées, qui menaçaient de piller Paris et d’y venir reprendre jusque dans Notre-Dame les drapeaux de la bataille d’Avein, nous permettent de faire la circonvallation d’une place qui leur est importante, nous donnent le loisir d’y faire des forts et ensuite de cela, nous la laissent attaquer et prendre par force à leur vue. Voilà où se sont terminées les bravades de Piccolomini. »


Correspondance complète de Guy Patin et autres écrits, édités par Loïc Capron. – Paris : Bibliothèque interuniversitaire de santé, 2018. – À Claude II Belin, le 10 septembre 1636, note 2.

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(Consulté le 16/04/2024)

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