À Charles Spon, le 10 novembre 1644

Note [6]

Le passage de la Vie de Jules César (prémices de la bataille de Pharsale, chapitre xlviii), dont parlait Guy Patin, se trouve dans les Vies des hommes illustres, grecs et romains, comparées l’une avec l’autre par Plutarque de Chéronée, translatées premièrement de grec en français par Maître Jacques Amyot lors abbé de Bellozane, et depuis en seconde édition, revues et corrigées en infinis passages par le même translateur, maintenant abbé de Sainte-Corneille de Compiègne, conseiller du roi et grand aumônier de France, à l’aide de plusieurs exemplaires vieux, écrits à la main, et aussi du jugement de quelques personnages excellents en savoir : {a}

« Depuis qu’il {a} eut pris la ville de Gomphes en la Thessalie, non seulement il recouvra vivres à foison pour nourrir son armée, mais aussi la garantit et délivra étrangement de maladie, pource que, y ayant les soudards trouvé grande quantité de vins, ils chassèrent la contagion de pestilence à force de boire et de faire grande chère ; car ils ne firent autre chose que baller, mômer {b} et jouer les bacchanales par tous les chemins, tant qu’ils se guérirent de maladie par ivrogner et se firent des corps tout neufs. »


  1. Paris, Michel Vascosan, 1565, in‑8o, fo 506 ro, repère E.

  2. Après que Jules César.

  3. Danser, polissonner.

La traduction classique de Dominique Ricard (1743) n’en diffère pas sur le fond :

« Lorsqu’il eut pris la ville de Gomphes en Thessalie, il eut des vivres en abondance pour son armée, qui fut guérie même de sa maladie d’une manière fort étrange. Ses soldats ayant trouvé une quantité prodigieuse de vin, en burent avec excès, et se livrant à la débauche, ils célébrèrent, dans tout le chemin, une espèce de bacchanale. Cette ivresse continuelle chassa la maladie, qui venait d’une cause contraire et changea entièrement la disposition de leur corps. »

Jacques Amyot (Melun 1513-Auxerre 1593) fut nommé grand aumônier de France en 1560 et évêque d’Auxerre en 1570. V. note [4] du Faux Patiniana II‑7 pour un copieux complément sur sa biographie.

Guy Patin ne sachant pas bien le grec, on se demande comment il avait pu compter les fautes qu’il y avait dans sa traduction de Plutarque (reprise par la Bibliothèque de La Pléiade en 1951) ; sans doute n’était-elle pas conforme à celle, latine, de Henri Estienne (v. note [22] de la thèse de la Sobriété, 1647) que son père lui faisait lire quand il était enfant (v. note [23], lettre 106).


Correspondance complète de Guy Patin et autres écrits, édités par Loïc Capron. – Paris : Bibliothèque interuniversitaire de santé, 2018. – À Charles Spon, le 10 novembre 1644, note 6.

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(Consulté le 25/04/2024)

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