À Charles Spon, le 8 mai 1648

Note [46]

« même sous la pression de son père, Monsieur Gaston [d’Orléans]. »

Mme de Motteville (Mémoires, pages 154‑155) a raconté la brouille qui se fit à la cour en avril 1648 au sujet de César-Louis de Saujon, capitaine des gardes de Monsieur, « gentilhomme qui était à Mademoiselle [Anne Marie Louise d’Orléans, duchesse de Montpensier, fille aînée de Monsieur] » :

« Le fond de cette affaire était que Saujon, peut-être du consentement de Mademoiselle, l’avait voulu marier à l’archiduc. {a} Son crime était d’avoir eu intelligence avec un bourgeois de Furnes, et ce bourgeois en avait eu avec une personne de qualité qui était à la cour de ce prince. Cette personne, au lieu de travailler à faire réussir cette affaire, soit que ce fût du consentement de son maître, soit comme espion payé de la France, pour le trahir, avertit le cardinal {b} de la négociation ; et le ministre n’étant pas content de Mademoiselle, l’avait noircie à la reine {c} et lui avait parlé de cette intelligence comme étant quasi criminelle et digne de sa colère. La reine en effet trouva que Mademoiselle était coupable et en parla à Monsieur {d} avec tant de ressentiment que Monsieur, malgré sa qualité de père, ne l’osa jamais excuser. Cette jeune princesse, qui avait senti cet orage, avait cru qu’il fallait cacher son inquiétude et paraître ne rien craindre ; de sorte que le jour précédent (le dernier d’avril), entrant dans le Luxembourg {e} et dans la chambre de Madame, sa belle-mère, elle dit tout haut en riant qu’on disait que Saujon était prisonnier pour elle et pour l’avoir voulu marier avec l’archiduc ; qu’elle trouvait cela plaisant, mais qu’au moins elle n’en savait rien et qu’ainsi, elle n’y prenait nulle part que celle de la compassion. Cependant, la voilà appelée au Conseil et fort troublée de l’avis que lui donna l’abbé de La Rivière. Elle trouva la reine irritée, qui l’accusa d’avoir des intelligences avec les ennemis de l’État, d’avoir voulu se marier sans sa permission ni celle de son père, d’avoir manqué de respect à elle et à lui ; et après l’avoir rigoureusement traitée, elle l’abandonna au duc d’Orléans qui confirma le ressentiment de la reine par le sien et n’oublia rien à dire de tout ce qui pouvait servir de châtiment à cette faute. »


  1. Léopold.

  2. Mazarin.

  3. Anne d’Autriche.

  4. Gaston.

  5. Le palais du Luxembourg.


Correspondance complète de Guy Patin et autres écrits, édités par Loïc Capron. – Paris : Bibliothèque interuniversitaire de santé, 2018. – À Charles Spon, le 8 mai 1648, note 46.

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(Consulté le 28/03/2024)

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