À Charles Spon, le 3 décembre 1649

Note [7]

Les pourparlers qui avaient mené à la paix de Saint-Germain, le 1er avril 1649 s’étaient d’abord tenus à Rueil, du 4 au 11 mars, puis à Saint-Germain, du 16 au 30 mars (v. note [1], lettre 170).

Retz (Mémoires, pages 488 et 491-492) :

« Le 8 mars 1649, se souvient le coadjuteur, M. le prince de Conti dit au Parlement que M. de Bouillon, que la goutte avait repris avec violence, l’avait prié de dire à la Compagnie que M. de Turenne {a} lui offrait sa personne et ses troupes contre le cardinal Mazarin, l’ennemi de l’État. J’ajoutai que, comme je venais d’être averti qu’on avait dressé la veille une déclaration à Saint-Germain par laquelle M. de Turenne était déclaré criminel de lèse-majesté, je croyais qu’il était nécessaire de casser cette déclaration, d’autoriser ses armes par un arrêt solennel, d’enjoindre à tous les sujets du roi de lui donner passage et subsistance, et de travailler en diligence à lui faire un fonds pour le paiement de ses troupes et pour prévenir le mauvais effet que 800 000 livres, que la cour venait d’envoyer à Erlach pour les débaucher, y pourraient produire. Cette proposition passa tout d’une voix. La joie qui parut dans les yeux et dans les avis de tout le monde ne se peut exprimer.

[…] Enfin, M. le cardinal Mazarin trouvait toutes les portes de la négociation, qu’il aimait passionnément, ou fermées ou embarrassées, dans une conjecture où ceux mêmes qui n’y eussent pas eu d’inclination eussent été obligés de les chercher avec empressement parce que, dans la vérité, il n’y avait plus d’autre issue dans la disposition où était le royaume. Ce désespoir, pour ainsi parler, de négociation fut par l’événement {b} plus utile que la négociation la plus fine ne la lui eût pu être ; car il ne l’empêcha pas de négocier, le cardinal ne s’en pouvant jamais empêcher par son naturel ; et il fit toutefois que, contre son ordinaire, il ne se fia pas à sa négociation ; et ainsi, il amusa nos généraux {c} cependant qu’il envoyait 800 000 livres qui enlevèrent à M. de Turenne son armée, et qu’il obligeait les députés de Rueil à signer {d} une paix contre les ordres de leur Corps. {e} M. le Prince m’a dit que ce fut lui qui fit envoyer les 800 000 livres et je ne sais même si il n’ajouta pas qu’il les avait avancées, je ne m’en ressouviens pas précisément. »


  1. Son frère.

  2. L’issue qu’il trouva.

  3. Frondeurs.

  4. Le 11 mars.
  5. Le Parlement. Retz n’a pas nommé Hervart, mais c’est bien lui, comme le disait Guy Patin à Charles Spon, qui avait avancé l’énorme somme.

L’armée de Turenne était formée de mercenaires allemands, les Weimariens (v. note [7], lettre 27), qui servaient celui qui les payait le mieux. Mazarin avait eu connaissance de leurs premières défections le 6 mars au soir, mais ne fut prévenu de la fuite de Turenne en Hollande que le 13, et redoutait encore dix jours plus tard un retournement de la situation (Bertière a).


Correspondance complète de Guy Patin et autres écrits, édités par Loïc Capron. – Paris : Bibliothèque interuniversitaire de santé, 2018. – À Charles Spon, le 3 décembre 1649, note 7.

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(Consulté le 16/04/2024)

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