À Charles Spon, le 6 janvier 1654

Note [14]

Guy Patin narrait ici l’arrivée de l’Orviétan à Paris en 1647, opérateur italien venu d’Orviette (Orvieto, à 95 kilomètres au nord-ouest de Rome) et inventeur et débiteur d’un médicament « dont il a fait des expériences extraordinaires en sa personne sur un théâtre public » (Furetière). Le nom commun d’orviétan servait à désigner l’antidote ou contrepoison que vendait cet Orviétan, dénommé Cristofero Contugi (mort à Paris en 1681). « Dans la Pharmacopée de Charras il y a une manière de faire l’orviétan où l’on voit que la thériaque est une des principales drogues qui y entrent » (ibid.).

La composition de cette panacée était alors soigneusement tenue secrète et Patin se contentait de lui donner le nom vague d’opiate (v. note [6], lettre 81). Elle connut un succès considérable pendant plus d’un siècle, tout en devenant synonyme de drogue charlatanesque (Nachet in Panckoucke, 1819) :

« Médicament interne, officinal que nous rangeons parmi les conserves composées molles et qui, suivant le Codex de Paris, 1818, devra trouver place parmi les électuaires opiats puisqu’il contient de l’opium. Il entre dans cet électuaire 54 drogues, ce qui le rapproche, pour le nombre, de la thériaque ; Hoffmann {a} l’a réformé et a réduit ses composants au nombre de 26, il diminua aussi la quantité d’opium de moitié ; il l’a décoré du nom d’orviétan sublime ou orvietanus prestantius. Ces deux compositions hors d’usage n’étant pas comprises dans le nouveau Codex, je me crois dispensé d’en transcrire ici les formules. »


  1. Friedrich Hoffmann, au xviiie s.

Ce remède douteux connut un succès tel que Molière a jugé bon de le brocarder en deux passages de son Amour médecin (acte ii, 1665, v. note [1], lettre 835).


Correspondance complète de Guy Patin et autres écrits, édités par Loïc Capron. – Paris : Bibliothèque interuniversitaire de santé, 2018. – À Charles Spon, le 6 janvier 1654, note 14.

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(Consulté le 29/03/2024)

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