À Charles Spon, le 24 juillet 1654

Note [14]

Guy Patin identifiait le P. René de Cerisiers (ou Ceriziers, Nantes 1609-1662) {a} comme auteur de :

l’Examen du jugement de l’Argolin {b} sur l’éclipse du mois d’août 1654. À M.D.C. {c}


  1. Entré fort jeune (1622) dans la Compagnie de Jésus, Cerisiers avait d’abord enseigné les humanités et la philosophie dans ses collèges ; sécularisé en 1641, il était devenu aumônier du duc d’Orléans puis aumônier ordinaire et conseiller de Louis xiv. Il a publié de nombreux ouvrages historiques, romanesques, théologiques et scientifiques.

  2. Andrea Argoli, v. note [22], lettre 525.

  3. Paris, Pierre le Petit, 1654, in‑4o de 8 pages.

C’est une lettre contre les abus des astrologues, adressée à une dame prénommée Cléone, qui s’achève sur ces phrases :

« Si tout ceci ne persuade les curieux, qu’ils lisent la météorologie d’Épicure, ou plutôt celle du savant Gassendi, qui rejette si solidement le pouvoir des astres et les prédictions de l’astrologie qu’il sera désormais aussi juste de les recevoir qu’il est honorable de rêver. C’est là où il juge son fameux compatriote Nostradamus, {a} lui reprochant en premier lieu qu’il parle avec la même obscurité que les anciens oracles, préparant ainsi des réponses aux reproches qu’on lui pourrait faire. Et puis, rapportant l’exemple de Jean-Baptiste Suffren, dont il a vu l’horoscope apostillé de la main de ce grand devin, qui promet une longue barbe frisée, des dents rouillées, la succession d’un parent, des frères assassins et une femme étrangère à celui qui toute sa vie a été rasé, qui a toujours conservé des dents blanches, qui n’a hérité de personne, qui n’a point eu de frères et qui prit femme dans sa ville. {b} En voilà assez pour faire voir aux sages qu’ils sont maîtres des astres, qu’on ne doit pas craindre, que Dieu est par dessus tout et que c’est lui qu’il faut aimer. »


  1. Le trop célèbre oracle de Salon-de-Provence, mort en 1566, v. note [5], lettre 414.

  2. Cette anecdote {i} est fidèlement résumée dans La Vie de Pierre Gassendi {ii} (livre iii, année 1638, pages 177‑178) :

    « Dès le mois de février, Gassendi accompagna à Arles François Bochart de Champigny, intendant de Provence : {iii} je crois devoir rapporter à ce voyage ce qui lui est arrivé à Salon, dans la maison de J.B. Suffren, juge de cette ville. Il leur communiqua l’horoscope d’Antoine Suffren son père, et frère de Jean Suffren, {iv} jésuite, confesseur de Louis xiii. Cet horoscope était fait et écrit de la propre main de Michel Nostradamus. Charmé de cette découverte, Gassendi voulut examiner cette pièce : il interrogea Suffren sur les circonstances de la vie de son père, dont il était très instruit, ayant vécu longtemps avec lui. Après avoir observé le point précis de sa naissance, que Nostradamus avait calculé selon les règles, Gassendi s’arrêta précisément aux circonstances suivantes : le prétendu prophète disait que Suffren porterait une longue barbe et fort crêpée – et il se fit toujours raser ; qu’il aurait les dents malpropres et mangées de la rouille – et il les eut jusqu’à la mort très blanches ; que dans sa vieillesse, il serait fort courbé – au contraire, il porta toujours son corps fort droit ; qu’à sa dix-neuvième année, il aurait une succession étrangère – il n’eut jamais que celle de son père ; que ses frères lui dresseraient des embûches et que, dans sa trente-septième année, il serait blessé par ses frères utérins – mais il n’en eut jamais, et son père n’eut q’une femme ; qu’il se marierait hors de la Provence – il se maria à Salon même ; qu’à sa vingt-cinquième année, ses maîtres lui apprendraient la théologie, les siences naturelles, qu’il s’appliquerait surtout à la philosophie occulte, à la géométrie, à l’arithmétique, à l’éloquence – il n’étudia que la jurisprudence, dont le prophète ne dit mot. Il oublie aussi de marquer que cette année, il fut reçu conseiller au parlement de Provence. Il ajoute que dans sa vieillesse, il aimerait la navigation, la musique, les instruments – il ne s’embarrassa, ni jeune ni vieux, de toutes ces choses, il ne fit même jamais aucun voyage sur mer et mourut l’an 1597, quoique Nostradamus ne fixât sa mort qu’en 1618. Gassendi ne manqua pas dans la suite de faire usage de cet horoscope contre les astrologues ; »

    1. Écrite par Joseph Bougerel (Paris, 1737, v. notule {b}, note [34], lettre 322).

    2. Relatée par Gassendi lui-même dans ses Animadversiones in decimum librum Diogenis Lærtii… (Lyon, 1649, v. note [1], lettre 147), Physica, pages 970‑971.

    3. V. note [11], lettre 390.

    4. V. note [13], lettre 61.


Correspondance complète de Guy Patin et autres écrits, édités par Loïc Capron. – Paris : Bibliothèque interuniversitaire de santé, 2018. – À Charles Spon, le 24 juillet 1654, note 14.

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(Consulté le 19/04/2024)

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