À Charles Spon, le 4 septembre 1654

Note [11]

L’extraordinaire de la Gazette, no 112 daté du 1er septembre 1654, intitulé Les Particularités de la levée du siège d’Arras par les Espagnols (pages 925‑936), est un long récit qui se termine sur ces enthousiastes remarques historiques :

« Voilà comme chacun s’est vaillamment exposé pour mériter sa part à la gloire d’une action qui ne peut avoir de pareille que celle de la prise, aussi par les Français, de la même ville qui vient d’être mise en liberté, pour les beaux rapports qui se rencontrent entre elles. Arras fut pris en 1640 au mois d’août en la présence du roi par trois maréchaux de France, à la vue du cardinal-infant gouverneur général des Pays-Bas et d’une armée de 30 000 hommes qu’il commandait, laquelle donna inutilement dans nos lignes ; et cette place a été secourue au même mois d’août, en présence de Sa Majesté, par trois maréchaux de France, à la barbe de l’archiduc Léopold, aussi gouverneur général des Pays-Bas, assisté de tous les autres généraux d’Espagne et d’une armée pareillement de 30 000 hommes, retranchés de telle sorte dans leur camp que l’entreprise de les y forcer eût été impossible à tous autres qu’à des Français qui montrent par là qu’ils savent bien garder leurs conquêtes, ou plutôt seconder le beau zèle que montre leur souverain à conserver ce qui lui appartient légitimement. Car le roi secourant Arras n’a fait que conserver son ancien Domaine, puisque Louis xi, après la mort de Charles, dernier duc de Bourgogne, de la race de France, y faisant son entrée, fit connaître aux Artésiens qu’elle était de cette Couronne ; que Théodoric ier, de la première race de nos rois, est fondateur de la riche abbaye de Saint-Vaast d’Arras dont nous voyons encore ici le Collège ; {a} et que saint Louis, par une particulière affection qu’il avait pour son pays d’Artois, l’érigea en l’an 1238 en comté pour le donner en faveur de son mariage à son frère Robert qui en fut le premier comte ; étant assisté en cette action de toute la noblesse française et de deux mille chevaliers. Il ne faut donc pas douter que ce grand saint n’ait voulu, quoique 500 ans après sa mort, faire visiblement sentir, au jour de sa solennité, {b} sa faveur et son alliance à un roi qui, portant son nom et marchant si glorieusement sur ses routes, montrait une si forte ardeur pour la conservation d’une ville qu’il avait tant chérie. Enfin, il ne faut point douter que le Ciel, à la prière de ce saint, ne se soit aussi intéressé en cette occasion pour couronner le zèle de notre monarque, celui de la reine sa mère, et les soins particuliers de son premier ministre dont on voit bien que les maximes n’ont rien de commun. »


  1. Collège fondé à Paris au xive s. par Nicolas Le Canderlier, abbé de Saint-Vaast, pour les écoliers pauvres du diocèse d’Arras et situé près de l’actuelle rue d’Arras (ve arrondissement de Paris).

  2. Le 25 août.


Correspondance complète de Guy Patin et autres écrits, édités par Loïc Capron. – Paris : Bibliothèque interuniversitaire de santé, 2018. – À Charles Spon, le 4 septembre 1654, note 11.

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(Consulté le 25/04/2024)

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