À Charles Spon, le 5 février 1658

Note [4]

V. note [4], lettre de Charles Spon, le 15 janvier 1658, pour la question de syntaxe qu’il posait sur ce passage de Louis Duret sur les Coaques d’Hipocrate (Paris, 1631, v. note [10], lettre 11).

Hypochondria – les hypocondres, qui sont les parties droite et gauche de l’abdomen situées immédiatement sous les côtes – est un nom neutre pluriel, dont le génitif est hypochondriorum. Hypochondrium n’en représente en principe aucun cas ; mais par nécessité anatomique, le jargon médical a dû créer cet accusatif singulier. La phrase d’Hippocrate traduite du grec par Duret est :

At vero tumor in hypochondriis durus quidem ac dolorificus, pessimus est, si sit ab omnibus partibus. Eorum vero qui sunt unius partis, periculi minus habet qui e sinistris assurgit.

[Un gonflement dans les hypocondres, dur et douloureux, est très mauvais s’il est bilatéral ; le moins dangereux des gonflements unilatéraux est celui qui occupe le côté gauche].

Fidèle à sa source, Duret a là soigneusement évité de mettre hypochondria au singulier (hypochondriorum au lieu de in hypochondriis), bien que sa phrase eût gagné en clarté et en élégance ; mais il ne s’est pas privé de cette facilité dans son commentaire :

Ergo non omnis meteorismus dolorificus hypochondriorum, {a} denunciat viscerum inflammationem : quoniam abdominis musculi dolere possunt atque tumere, concepta in ipsis causa doloris, atque tumoris, per distensionem propriam, et eximiam intemperiem. Nam quæ a visceribus inflammatione aut scirrho obsessis, tensio duritasque incidit in hypochondrium, {b} per oppressionem accidit : nisi fortasse excusatio sit apostematis e visceribus in hypochondria {c} abscedentis. Sed hypochondriorum externorum vitia, suis quæque notis certissimisque argumentis, a visceribus hypochondriacis {d} distinguuntur.

[Tout gonflement douloureux des hypochondres ne traduit donc pas une inflammation {e} des viscères : les muscles de l’abdomen peuvent devenir douloureux et enfler ; ils contiennent alors la cause à la fois de la douleur et de la tuméfaction, par leur contraction propre et par une intempérie sortant de l’ordinaire. De fait, quand une inflammation ou un cancer affecte les viscères, une tension et une induration s’installent dans l’hypocondre, ce qui arrive par oppression ; sauf peut-être quand l’explication vient d’un abcès qui se forme dans les hypocondres à partir des viscères. Mais les atteintes des parties superficielles des hypocondres, chacune d’elles ayant ses signes propres et sesdémonstrations très certaines, sont à distinguer de celles des viscères qu’ils contiennent].


  1. Hypochondriorum : génitif pluriel qui devait être nominatif singulier, hypochondrium, dans l’édition fautive de 1621 qui déroutait Spon.

  2. Hypochondrium : accusatif singulier.

  3. Hypochondria : accusatif pluriel.

  4. Hypochondriacis : ablatif pluriel de l’adjectif dérivé, hypochondriacus ; viscera hypochondriaca sont les viscères contenus dans les hypocondres (foie à droite et rate à gauche, chacun avec ses organes de proche voisinage).

  5. V. note [6], lettre latine 412.

V. note [6], lettre 673, pour la maladie qu’on appelait hypocondrie et les hypocondriaques qu’elle affectait.


Correspondance complète de Guy Patin et autres écrits, édités par Loïc Capron. – Paris : Bibliothèque interuniversitaire de santé, 2018. – À Charles Spon, le 5 février 1658, note 4.

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(Consulté le 18/04/2024)

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