À André Falconet, le 11 octobre 1658

Note [1]

V. note [25], lettre 183, pour Nicolas iii Potier, seigneur de Novion.

Saint-Simon (Mémoires, tome ii, pages 632‑633) a laissé un portrait nuancé du premier président Guillaume de Lamoignon (v. note [43], lettre 488), fils de Chrétien, seigneur de Bâville et président à mortier (v. note [25], lettre 472) :

« Lamoignon, beau, agréable, et sachant fort le monde et l’intrigue, avec tous les talents extérieurs, avait brillé au Conseil dans la place de maître des requêtes. On a vu comment, par l’adresse des ministres qui craignaient l’humeur de Novion, il {a} refusa, à l’instigation de sa maîtresse à qui ils donnèrent gros, la place de premier président vacante en 1658 par la mort de Bellièvre et y portèrent Lamoignon. Les grâces de sa personne, son affabilité, le soin qu’il prit de se faire aimer du barreau et des magistrats, une table éloignée de la frugalité de ses prédécesseurs, son attention singulière à capter les savants de son temps, {b} à les assembler chez lui à certains jours, à les distinguer, quels qu’ils fussent, lui acquirent une réputation qui dure encore et qui n’a pas été inutile à ses enfants. Il est pourtant vrai qu’à lui {c} commença la corruption de cette place, qui ne s’est guère interrompue jusqu’à aujourd’hui. » {d}


  1. Novion.

  2. Dont Guy Patin.

  3. Avec lui.

  4. En 1705.

Ayant atteint la plus haute charge de la magistrature, Lamoignon devint membre de la Compagnie du Saint-Sacrement (v. note [7], lettre 640), comme en atteste cet extrait des Annales de la Compagnie du Saint-Sacrement par le comte Marc-René de Voyer d’Argenson, publiées par le R.P. Dom H. Beauchet-Filleau, moine bénédictin (Marseille, Saint-Léon, 1900, in‑8o, chapitre xviii, pages 180‑181) : {a}

« Le 3e d’octobre, {b} on rendit grâce à Dieu dans la Compagnie de la promotion de M. de Lamoignon à la charge de premier président du Parlement de Paris. On ordonna des messes et des communions pour lui, afin d’obtenir du ciel les secours dont il avait besoin pour s’acquitter dignement de cette importante charge. Le supérieur et le directeur de la Compagnie le furent complimenter de sa part, ce qu’il reçut avec grande cordialité ; aussi a-t-il toujours appuyé les bonnes œuvres qui lui ont été recommandées par la Compagnie, et pendant la persécution qu’elle a reçue et même la désolation totale où elle est tombée, il l’a consolée et soutenue autant qu’il a dépendu de lui en particulier ; il s’est toujours souvenu des bons sentiments qu’il avait pris dans la fréquentation des assemblées ; il s’est montré père et protecteur des pauvres et des affligés pendant que Dieu l’a laissé vivre ; aussi cette pieuse conduite lui a-t-elle attiré une douce mort ; {b} il prétendait s’y préparer tout de bon par une retraite dont il avait pris les mesures, mais Dieu se contenta de ses projets et de sa bonne volonté en le retirant du monde, lorsqu’il avait le plus d’apparence de bonne santé. […]

Le 14e de novembre, M. de Lamoignon, premier président, fit donner avis à la Compagnie qu’il serait reçu deux jours après, et qu’il se recommandait à ses prières pour obtenir de Dieu les grâces dont il avait besoin dans la charge où il entrait. La Compagnie reçut cette marque d’amitié avec beaucoup de tendresse et de reconnaissance. Elle obligea tous les prêtres à une messe et tous les laïques à une communion, pour prier Dieu de verser ses plus grandes bénédictions sur les desseins et sur la conduite de cet illustre et très pieux magistrat. » {c}


  1. Référence fournie par Raoul Allier (note 4, page 39‑40).

  2. 1658.

  3. Le 10 décembre 1677.

  4. Jusqu’à la mort de Guy Patin (mars 1672), Lamoignon resta en intime amitié avec lui, l’invitant à parler dans son académie littéraire (v. note [2], lettre 566) et le conviant souvent à dîner : je peine à croire qu’un dévot premier président aussi perspicace et bien informé ait ainsi choyé un athée capable d’occuper ses loisirs à écrire les 1 090 pages du Theophrastus redivivus (v. note [38], lettre 477).


Correspondance complète de Guy Patin et autres écrits, édités par Loïc Capron. – Paris : Bibliothèque interuniversitaire de santé, 2018. – À André Falconet, le 11 octobre 1658, note 1.

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(Consulté le 16/04/2024)

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