À André Falconet, le 18 mars 1661

Note [7]

La mort de Mazarin marquait la fin de ce que les historiens ont appelé le « premier xviie siècle ». Le pouvoir royal devenait plus personnel. Mazarin n’eut pas de successeur qui fût son équivalent. Louis xiv s’était déjà détaché de l’influence des grands, démantelée par la Fronde, mais il n’allait gouverner lui-même et directement, c’est-à-dire être vraiment monarque absolu qu’en 1691, après les ministères de Colbert puis de Louvois.

Mme de Motteville (Mémoires, page 506) :

« Le roi, depuis qu’il voyait son ministre pencher vers sa fin, avait montré qu’il voulait à l’avenir gouverner son royaume. Il disait qu’il n’approuvait point la vie des rois fainéants et qui se laissent mener par le nez. Il ajoutait lui-même à cela qu’il voyait bien qu’on pouvait lui reprocher qu’il avait fait ce qu’il blâmait, mais il attribuait sa conduite passée à l’estime qu’il avait eue pour le cardinal, à cause de son habileté, et à cette soumission et dépendance à laquelle son enfance l’avait accoutumé. La reine, sa mère, qui avait senti l’incommodité du joug qu’elle s’était imposé, ne voulait plus se soumettre à d’autre puissance qu’à celle du roi son fils ; si bien qu’elle souhaitait qu’il voulût travailler lui-même pour lui-même. Elle n’était point ambitieuse, mais elle était assez bonne mère pour vouloir lui aider en tout ce qu’elle pourrait. Tous les gens de bien étaient dans ce même sentiment et le ministre en mourant, soit par le désir de faire son devoir en donnant de bons conseils au roi, soit pour ne vouloir point de successeur dans la gloire de sa faveur, lui laissa pour principale maxime de faire lui-même ses affaires et de ne plus élever de premier ministre à ce suprême degré où il était monté ; lui avouant que par les choses qu’il aurait pu faire contre son service, il connaissait combien il était dangereux à un roi de mettre un homme dans cet état. Il lui laissa des conseils et des préceptes estimables, que le roi lui-même écrivit afin de s’en souvenir pour sa conduite. »


Correspondance complète de Guy Patin et autres écrits, édités par Loïc Capron. – Paris : Bibliothèque interuniversitaire de santé, 2018. – À André Falconet, le 18 mars 1661, note 7.

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(Consulté le 28/03/2024)

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