À Sebastian Scheffer, le 24 mai 1665

Note [84]

Page 405 (Paris, 1646), livre ii, chapitre cxxxvii, De Maiorana [La Marjolaine (v. note [2], lettre latine 307)], lignes 24 et 25 (§ 2), sur les divers noms grecs (σαμψυχος, αμαρακος, μαρον) et latins (maiorana, amaracum) de cette fleur, remplacer exscripseris [tu aurais inscrit] par exsculpseris [tu aurais gravé], et ex [venant de] par et [et] dans :

Cæterum inter has plantas discrimen fuisse maioris aut minoris θυωδιας probo ex 1. Antid. 10. 3. κ. γεν. 8. Cur enim reiicitur ο αμαρακος ? Non simpliciter, quod non sit θυωδης : sed quod (ut ego interpretor) non sit eximie odoratus. Interim et Amaracinum non fuisse odoris aspernabilis, discas licet partim ex Athen. l. 15. partim ex proverb. Quid sui cum Amaracino ? Si prorsus contemnere mihi voles Amaracum, dicam a Maro, quod etiam ingreditur, odorem habuisse. Tu vero neutiquam hinc exscripteris [exsculpseris], diversas prorsus esse plantas. Specie sunt ex [et] natalibus, non genere.

[Du reste, on a distingué ces plantes odorantes en deux catégories, grande et petite, comme je le constate au livre 1, chapitre 10, de Antidotis, et au livre 3, chapitre 8, κατα γενη. {a} Mais pourquoi donc < Galien > y rejette-t-il la marjolaine ? Non point parce qu’elle n’aurait pas bonne odeur, mais parce que, à ce que je comprends, son parfum ne sortirait guère de l’ordinaire. Toutefois, l’essence de marjolaine ne sentait pas mauvais, comme tu peux l’apprendre tant du 15e livre d’Athénée {b} que du proverbe quid sui cum amaracino ? Si tu veux que je dénigre tout à fait l’amaracum, {c} je te dirais aussi qu’elle tire son nom du marum, parce qu’elle en a le parfum. Pour autant, tu n’en aurais bien sûr pas déduit et inscrit (gravé) dans le marbre qu’il s’agit de deux plantes tout à fait distinctes. Elles le sont par l’espèce venant des (et par les) lieux où elles poussent, mais non par le genre].


  1. Renvoi à deux références où Galien, sans les distinguer sur leur taille, compare les qualités de l’amaracum (αμαρακον, marjolaine) et du marum (μαρον, marum, plante aromatique qui porte plusieurs autres noms en français, dont celui de « petite marjolaine » dans Thomas Corneille) :

    • au livre i De Antidotis [Les Antidotes], chapitre x, intitulé Hedychroi confectio [Onguent qui parfume et adoucit la peau] (Kühn, volume 14, pages 53‑54) ;

    • au livre iii De Compositione medicamentorum per genera [La Composition des médicaments selon leurs genres (κατα γενη)] (v. supra note [75]), chapitre viii, intitulé De sumptuosis medicamentorum confecturis ad nervos vulneratos [Les coûteuses confections de médicaments pour les lésions des nerfs] (Kühn, volume 13, pages 638).
  2. V. note [17], lettre de Charles Spon, datée du 6 avril 1657, pour les 15 livres des Déipnosophistes d’Athénée de Naucratis, dont le dernier célèbre en plusieurs endroits les propriétés de la marjolaine, avec ces deux mentions dignes de remarque :

    • « il ne faut pas non plus regarder comme étrangère aux parties de bouteille la couronne de laurier ; mais on en éloignera celle de giroflée comme portant à la tête, celle de marjolaine, et toutes celles qui pourraient causer de l’assoupissement ou une pesanteur de tête, par quelque cause que ce soit » (chapitre v, § 17) ;

    • « Dioclès (de Caryste, médecin grec du ive s. av. J.‑C.) appelle la marjolaine amaracos dans son traité des poisons décidément mortels, tandis que d’autres la nomment sampsychon » (chapitre viii, § 27).

  3. « Quoi de commun entre un porc et l’essence de marjolaine ? » : Nihil cum amaracino sui [Rien de commun entre un porc et l’essence de marjolaine] est un adage qui a inspiré de nombreux classiques latins et qu’Érasme a commenté (no 338), en s’attardant sur l’origine du mot amaracum :

    Amaracus herbæ genus, Siculorum lingua a Cyniræ Cyprii Rehis ejusdem nominis filio dictum, quem in hanc herbam conversum fuisse fabulis proditum est. Cæterum Servius in primum Æneidos scribit Amaracum puerum fuisse regis ungentarium, qui casu lapsus dum ferret unguenta, majorem confusione odorem creavit, unde et optima unguenta amaracina dici cœperint, hunc postea in herbam amaracum fuisse conversum.

    [L’amaracus est un genre de plante dont le nom vient, en langue sicilienne, d’un certain Amaracus, fils du roi de Chypre Cyniras : les fables racontent qu’il se serait changé en cette fleur. Autrement, Servius, {i} dans son commentaire sur le premier chant de L’Énéide, écrit qu’Amaracus était un esclave parfumeur du roi, qui ayant trébuché tandis qu’il transportait des parfums, les mélangea en créant une senteur particulièrement forte. Voilà pourquoi on a commencé à attacher le nom d’Amaracus aux meilleurs parfums, et il a ensuite servi à appeler la marjolaine].

    1. Maurus Servius Honoratus, v. note [49] du Borboniana 6 manuscrit.

La réédition de Francfort (1667, pages 322) a appliqué ces deux corrections.


Correspondance complète de Guy Patin et autres écrits, édités par Loïc Capron. – Paris : Bibliothèque interuniversitaire de santé, 2018. – À Sebastian Scheffer, le 24 mai 1665, note 84.

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(Consulté le 19/04/2024)

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