Autres écrits : Observations de Guy Patin et Charles Guillemeau sur les us et abus des apothicaires (1648) : iv

Note [2]

Galien, De anatomicis administrationibus [Des travaux anatomiques], livre vii, chapitre x (Kühn, volume 2, pages 619‑620, traduit du grec) :

Nuper elephante maximo Romæ jugulato, plerique medici ad ipsius dissectionem convenerant, discendi gratia, duosne cor haberet vertices, an unum ; et ventriculosne duos, an tres. Ego autem et ante ipsius dissectionem asserebam, eandem cordis structuram cum aliis omnibus animalium aërem spirantium inventum iri ; quæ etiam ipso diviso apparuerunt. Item os ipsius sine negotio reperi, una cum familiaribus digitos admolitus ; at inexercitati sperantes id, quod in aliis animantibus apparet, ita in magno se inventuros, ne elephanti quidem cor os habere putabant. Ego autem ostenturus ipsis eram, nisi familiares risissent, quod attonitos illos, ac sensus expertes propter loci ignorantiam conspicerent ; et, quum adhortarentur, ne indicarem, subticui. Corde vero a Cæsaris coquis exempto, misi aliquem ex familiaribus in hujusmodi exercitatis rogatum coquos, ut os ipsius eximi sinerent ; atque sic factum est. Servatur idem apud nos etiam hodie, eximiæ adeo magnitudinis, ut ab iis, qui intuentur, nullo modo credi queat, tantum os medicos latuisse. Ita sane et maximæ in animalibus partes inexercitatis ignorantur. {a}

[Récemment, à Rome, on a tué un très grand éléphant et de nombreux médecins sont venus assister à sa dissection pour voir si son cœur avait deux pointes ou une seule, et s’il avait deux ou trois ventricules. Avant cette anatomie, j’avais soutenu qu’on allait trouver un cœur de structure identique à celle de tous les animaux qui respirent l’air, telle qu’elle m’était déjà apparue en en disséquant un avec des amis. En fouillant à l’aide des doigts, j’y avais même sans peine trouvé un os ; mais étant inexpérimentés, mes amis s’attendaient à n’observer chez ce gros animal que ce qui se voit chez les autres, refusant de croire que le cœur de l’éléphant eût un os. J’allais le leur faire voir quand ils se mirent à rire, rendus incrédules et stupides par leur ignorance du sujet ; et comme ils me dissuadaient de le leur montrer, je m’en abstins. Les cuisiniers de l’empereur ayant emporté ce cœur, j’envoyai l’un de mes domestiques, rompu à ce genre d’exercice, les prier de l’autoriser à chercher l’os de ce remarquable spécimen, et il le trouva. Encore aujourd’hui, je le conserve chez moi ; il est d’une taille si étonnante que ceux qui le voient refusent catégoriquement de me croire, et j’ai renoncé à le montrer à des médecins. Cela prouve que les novices ne connaissent pas les plus grands organes des animaux].


  1. La traduction latine m’a semblé elliptique par endroits, mais elle est la transcription fidèle de celle qui a été publiée en 1549 (Froben, Bâle, volume 1, bas de la colonne 358), reprise par René Chartier (v. note [13], lettre 35) en 1639 (Paris, tome iv, page 157). Ce constat fortuit a fait baisser d’un cran dans mon estime les mérites de Chartier et de Kühn.


Correspondance complète de Guy Patin et autres écrits, édités par Loïc Capron. – Paris : Bibliothèque interuniversitaire de santé, 2018. – Autres écrits : Observations de Guy Patin et Charles Guillemeau sur les us et abus des apothicaires (1648) : iv, note 2.

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(Consulté le 25/04/2024)

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