Autres écrits : Ana de Guy Patin :
Naudæana 3

Note [27]

Quand mourut le cardinal Bagni (Giovanni Francesco Guidi di Bagno, v. note [12], lettre 59), Gabriel Naudé, son bibliothécaire, écrivit en sa mémoire la Lessus in funere domestico Eminentiss. Principis Ioannis Francisci cardinalis a Balneo [Lamentation pour les funérailles privées de l’éminentissime prélat Gianfrancesco, cardinal di Bagno] (Rome, Dominicus Marcianus, 1641, in‑4o), avec cette dédicace :

Paganino Gaudentio
Viro clarissimo

Gabriel Naudæus S.P.D.

Non modo concussam, sed prostratam ferme, vim omnem ingenij mei gravissimo illo casu, qui molestus omnibus, mihi vero potissimum acerbissimus, et luctuosissimus accidit ; tam commode literis tuis erexisti, Paganine doctissime, ut in optimi Principis nostri Funere Domestico (quod nisi calores maximi impedimento fuissent, quadragesimo die post eius obitum nobis celebrare, in animo fuerat) Elegiam hanc rudem, ut vides, et incomptam effuderim ; quam propterea mittere ad te constitui, cum ut illam expolias accuratissima tua censura, tum vero ut ex ea cognoscas, quantum mihi in maximo dolore lenimenti, gratissima tua consolatio attulerit, cui me ni summopere devinctum esse profitear, parum equidem viderer, aut amoris in me tui magnitudinem, aut orationis præstantiam intelexisse. Vale. Romæ iii. non. Octob. mdcxli.

[Gabriel Naudé adresse ses profondes salutations au
très distingué M. Paganino Gaudenzi.

Cette très lourde perte qui nous a frappés n’a pas seulement profondément ébranlé toutes les ressources de mon esprit, mais les a entièrement terrassées : elle est fâcheuse pour tous, mais elle est surtout extrêmement cruelle et douloureuse pour moi. Par vos lettres, très docte Paganino, vous m’avez si bien rasséréné que je me suis laissé aller à cette élégie pour les funérailles privées de notre prélat (deuil que nous avions l’intention de célébrer quarante jours après sa mort, si les très fortes chaleurs n’y avaient fait obstacle) ; {a} mais vous verrez comme elle est grossière et négligée. J’ai donc décidé de vous la dédier pour que vous la polissiez en la soumettant à votre très soigneuse censure, mais surtout pour que vous sachiez combien votre très chère consolation a adouci mon immense chagrin : j’avoue que si elle n’en est pas entièrement venue à bout, elle semble m’avoir fait percevoir et la grandeur de votre affection pour moi, et la supériorité de votre plume. Vale. De Rome le 5 octobre 1641]. {b}


  1. Le cardinal Bagni était mort à Rome le 24 juillet 1641, terrassé par la goutte et la dysenterie ; quarante jours plus tard auraient mené au 2 septembre suivant.

  2. L’élégie latine qui suit est longue de cinq pages. Écrite dans le style pompeux et convenu qui sied à ce genre d’exercice, je n’y ai remarqué aucun vers qui mérite d’être cité.

Le livre italien que Paganino Gaudenzi a publié contre les jésuites est intitulé Dell’Anno secolare solennemente celebrato in Roma dalli Padri della Compagnia di Giesù nel 1639, lettera di Ventidio Gangapano Gentilhuomo et Academico Ricovrato di Padova [Le Centenaire des pères de la Compagnie de Jésus, solennellement célébré à Rome en 1639 : lettre de Vendito Gangapano (anagramme presque parfaite de Paganino Gaudenzi), gentilhomme et membre de l’Académie des Ricovrati (v. note [165] des Déboires de Carolus)] (sans lieu, ni nom, ni date, in‑8o de 53 pages).


Additions et corrections du P. de Vitry
(1702-1703, v. note [12] des Préfaces), pages 212‑214 :

« Paganinus Gaudentius était de Pesclat, que les Italiens appellent Puschiavo, petite ville dans le Pays des Grisons. Il mourut en 1649, si nous en croyons M. Patin, lettre 22. {a} Il a fait plusieurs autres ouvrages dont on peut voir la liste à la tête du livre dont je vais donner le titre : I fatti d’Alessandro il Grande spiegati e suppliti [con pochi avvenimenti de’ nostri tempi, massimo quelli delle Alemanniche Guerre.] Opera di Paganino Gaudenzio, Dottor Teologo, Filosofo, e Giurisconsulto, che per diecisette anni hà publicamente interpretata ed interpretata oggi nello Studio di Pisa la Politica e l’Istoria, in Pisa, 1645, in‑fo ; {b} on voit par ces paroles qu’il professait la politique et l’histoire, et non point les humanités, comme dit notre auteur. {c} Remarquez aussi que ce livre que Naudé lui a dédié est une élégie de cent vers sur la mort du cardinal Bagni : c’est faire des livres à bon marché. Au reste, l’ouvrage en question contre les jésuites est intitulé dell’anno secolare solennemente celebrato in Roma dalli padri della Compania di Giesû nel 1639. Lettera di Ventidio Gangapano Gentilhuomo et Academico Ricovrato di Padova : tout le monde voit qu’il n’est pas difficile de retrouver dans le faux nom de Ventidio Gangapano le véritable auteur, Paganino Gaudentio ; cette lettre contient deux parties, dont la seconde est une censure du P. Rho, jésuite, touchant cette même année séculaire de la Société. » {d}


  1. V. le début de la note [24] supra : la lettre 187 (13 juillet 1649 à André Falconet) de notre édition est numéroté xv dans celle de Francfort, 1683, mais bien xxii dans le tome i de celle de Cologne, 1691.

  2. J’ai complété, entre crochets, le titre de cet ouvrage (Pise, Amador Massi et Lorenzo Landi, 1645, in‑4o, et non in‑fo) :

    « La geste d’Alexandre le Grand, expliquée et augmentée [d’un nombre non négligeable d’événements de notre temps, touchant particulièrement à la guerre d’Allemagne (guerre de Trente Ans, terminée en 1648).] Ouvrage de Paganino Gaudenzio, docteur en théologie, philosophie et droit, qui a publiquement enseigné la politique et l’histoire à l’Université de Pise pendant dix-sept ans, et l’enseigne encore aujourd’hui. »

    La liste des ouvrages de Paganino Gaudenzi se trouve à l’avant-dernière page des pièces introductives du livre.

  3. Le rédacteur du Naudæana.

  4. Sous la cote 160665, la Bibliothèque vaticane conserve le manuscrit de la Lettera de Ventidio Gangapano, sous le pseudonyme moins transparent de Parresio Misoceno da Eliopoli (où Héliopolis, « la ville du Soleil », est un autre nom fictif, qui renvoie à la cité égyptienne homonyme) ; elle est datée du 10 décembre 1639.

    Giovanni Rho ou Ro (Milan 1590-Rome 1662) est un enseignant et prédicateur jésuite que Leo Allatius a honoré d’un court article à la page 164 de ses Apes urbanæ [Abeilles citadines] (Rome, 1633, v. première notule {a} de la note [68] du Naudæana 1), avec la citation des deux premiers titres de sa copieuse et pieuse bibliographie.



Correspondance complète de Guy Patin et autres écrits, édités par Loïc Capron. – Paris : Bibliothèque interuniversitaire de santé, 2018. – Autres écrits : Ana de Guy Patin :
Naudæana 3, note 27.

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(Consulté le 11/12/2024)

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