Autres écrits : Ana de Guy Patin :
Grotiana 1
Note [19]
« Mén. {a} “ Ne sais-tu pas, femme, pourquoi les Grecs disaient qu’Hécube avait été métamorphosée en chienne ? ”
Mu. “ Non, je n’en sais rien. ”
Mén. “ Parce qu’elle faisait ce que tu fais maintenant : elle accablait d’injures tous ceux qu’elle rencontrait. Voilà ce qui lui valut le nom de chienne, et ce n’était que justice. ”
Johannes Philippus Pareus a écrit ici dans la marge : {b}
“ Les Grecs ont pourchassé Hécube comme une chienne en lui jetant des pierres parce qu’elle lançait des invectives contre quiconque était grec. Et à cause de cette animosité et de cette rage, on a imaginé qu’elle a été métamorphosée en chienne. Voyez ce qu’en disent les fables. ” {c}
Cette Hécube était l’épouse du roi Priam et la mère de Pâris. » {d}
- Dialogue (vers 14‑18) entre Ménechme Sosiclès (Mén) et la femme (Mulier, Mu) de son jumeau Ménechme ravi. V. note [9], lettre 75, pour les Ménechmes de Plaute.
- V. note [17], lettre 248, pour Johannes Philippus Pareus et ses études sur Plaute.
Son commentaire sur le passage des Ménechmes est dans la marge de la page 401 des M. Accii Plauti Sarsinatis Umbri Comœdiæ xx superstites : et deperditarum Fragmenta. Philippus Pareus tertium recensuit : ac notis perpetuis illustravit [Les 20 Comédies qui nous restent de Plaute, natif de Sarsina en Ombrie, et les Fragments de celles qu’on a perdues. Philippus Pareus les a revues pour la troisième fois et les a éclairées de notes continues] (Francfort, Philipp Jacob Fischer, 1641, in‑8o ; première édition en 1610).
- Ici s’arrête le commentaire de Pareus. La suite est l’explication de Grotius.
Dans Homère, Priam, roi légendaire de Troie, est l’époux d’Hécube (v. supra notule {b}, note [17]). Pâris (fréquemment désigné sous le nom d’Alexandre dans L’Iliade), l’un de leurs très nombreux enfants, est le prince troyen qui tua Achille (v. note [27], lettre 989) en le blessant d’une flèche au talon ; il était amant de la belle Hélène (v. note [4], notule {a}, du Mémorandum 5).
Hécube avait de bonnes raisons pour haïr les Grecs (Fr. Noël, Dictionnaire de la fable) :
« fille de Dymas, selon Homère, ou, selon Euripide et Virgile, de Cisséis, roi de Thrace, {i} et sœur de Théano, prêtresse d’Apollon, épousa Priam, dont elle eut 50 fils, qui périrent presque tous sous les yeux de leur mère pendant le siège ou après la ruine de Troie. Hécube n’évita la mort que pour devenir l’esclave du vainqueur. On la chercha longtemps sans la trouver ; mais enfin, Ulysse {ii} la surprit parmi les tombeaux de ses enfants et en fit son esclave ; destin qui fut pour elle le comble de l’infortune car elle avait vu ce prince ramper à ses pieds lorsque, surpris à Troie déguisé en espion, il la supplia de le dérober à une mort certaine. Avant de partir, elle avale les cendres d’Hector, {iii} pour les soustraire à ses ennemis, et voit périr Astyanax, son petit-fils, dont elle doit encore conduire les funérailles. Conduite chez Polymnestor, roi de Thrace, {iv} à qui Priam avait confié Polydore, le plus jeune de ses fils, avec de grands trésors, elle trouve le corps de son fils sur le rivage, s’introduit dans le palais du meurtrier et l’attire au milieu des femmes troyennes qui l’aveuglent avec leurs fuseaux ou leurs aiguilles, tandis qu’elle tue elle-même les deux enfants du roi. Les gardes et le peuple furieux poursuivent les Troyennes à coups de pierres. Hécube mord de rage celles qu’on lui lance et, métamorphosée en chienne, elle remplit la Thrace de ses hurlements qui touchent de compassion non seulement les Grecs, mais Junon {v} elle-même, la plus cruelle ennemie des Troyens. On montrait encore en Thrace, du temps de Strabon, {vi} le lieu de sa sépulture, qu’on appelait le tombeau du chien, soit à cause de sa métamorphose, soit à cause de la misère où elle tomba, étant enchaînée comme un chien, dit-elle dans Euripide, à la porte d’Agamemnon. {vii} Les traditions varient sur sa mort : Dictys de Crète rapporte qu’Hécube, esclave d’Ulysse, abandonnée par ce prince, obligé de partir, fut lapidée par ses ennemis ; mais il y a toute apparence qu’il fut lui-même auteur de sa mort puisqu’arrivé en Sicile, il fut tourmenté de songes funestes, au point de bâtir une chapelle à Hécube ; Hygin croit qu’elle fut jetée dans la mer et qu’on donna le nom de Cyneum au lieu de sa chute. » {viii}
- V. notule {d‑iii}, note [19] du Grotiana 1, pour la Thrace antique.
- V. note [14], lettre d’Adolf Vorst, datée du 4 septembre 1661.
- Héros troyen, l’un des fils d’Hécube, Hector avait été tué par Achille.
- V. note [23], lettre 197, pour la Thrace antique.
- V. note [3], lettre 286.
- Géographe grec du ier s. av. J.‑C. (v. note [5], lettre 977).
- Roi d’Argos et de Mycène, v. note [55] de l’Autobiographie de Charles Patin.
- Hygin est un écrivain latin du premier siècle de notre ère, auteur d’un recueil de Fabulæ [Légendes].
Le Cyneum mare, en Thrace, est le détroit des Dardanelles (Hellespont, v. note [51], lettre 413).