Autres écrits : Ana de Guy Patin :
Borboniana 9 manuscrit
Note [54]
Le Borboniana se référait à deux textes de Jacques-Auguste i de Thou.
« Il était petit-fils de Jacques de Beaune de Samblançay, auquel on fit son procès et qui fut condamné à une mort injuste et infâme, pour satisfaire la haine de l’impérieuse mère de François ier. […] {a}Il était d’un tempérament si chaud {b} qu’il avait besoin d’un aliment continuel pour entretenir sa santé, qui faisait sa plus grande attention. L’exercice ou le sommeil ne lui étaient point nécessaires pour digérer ; la chaleur naturelle y suppléait suffisamment : à peine dormait-il tous les jours quatre heures, au bout desquelles le besoin de manger le réveillait. À deux heures après minuit, ou même plus tôt, il se faisait donner à manger, se reposait ensuite et expédiait ses affaires particulières jusqu’à quatre heures, qu’il se remettait à table avec quelques-uns de sa maison qu’il faisait lever. À huit heures, on le servait pour la troisième fois ; il sortait après ce déjeuner pour les affaires publiques jusqu’à midi, qu’il rentrait chez lui pour dîner, toujours en bonne compagnie. Il mangeait encore à quatre heures, et le soir, sa table n’était pas moins bien servie que le matin ; cela n’empêchait pas qu’il ne mangeât encore avant que de se mettre au lit. L’hiver, il était toujours une bonne heure à table, et l’été, qu’il semble qu’on ait moins d’appétit, cinq quarts d’heure […]. »
La suite, citée par le Borboniana, mérite une traduction plus fidèle à l’original latin (Historiarum sui temporis tomus iii, Francfort, Joachimus Wildius, 1658, in‑fo, page 1190) que celle de de Thou fr :
« Ces soupers de promenade {c} le heurtaient tant qu’il déclinait invariablement les fréquentes invitations à dîner que lui faisait le premier prince. {d} Lui ayant demandé pourquoi il agissait ainsi, il lui répondit que sa manière de manger était plutôt celle d’un chien que celle d’un homme, voulant dire que les plats y passaient beaucoup trop rapidement. Ayant bien entendu la remarque du prélat, le prince promit de le recevoir non seulement somptueusement, comme il faisait toujours, mais longuement ; et quand il l’invitait, il ordonnait toujours à son maître d’hôtel de respecter un intervalle convenable entre les plats. »
- V. supra note [53].
- Latin d’origine : temperamento ad iram et violentos impetus natus videretur [semblant né avec un tempérament porté à la colère et aux emportements violents] ; soit une complexion à la fois bilieuse et sanguine (v. note [36], lettre latine 98).
- Traduction empruntée à Guy Patin, qui a cité ces mots dans sa lettre à André Falconet du 22 décembre 1665 (v. sa note [4]).
- Renaud de Beaune était le chancelier du duc d’Anjou et d’Alençon, François de France, premier prince du sang, comme frère puîné de Henri iii (v. note [13] du Borboniana 3 manuscrit).
« Le roi, sentant toute l’importance de cette affaire, qui demandait de mûres réflexions, avait fait venir de Tours Achille de Harlay, premier président, Jean Thumery, Jacques Gillot et Jean Villemereau, conseiller, pour examiner la chose avec eux. Ces magistrats firent de grandes instances auprès de Sa Majesté pour la détourner d’envoyer à Rome, parce que cette démarche donnerait atteinte à l’arrêt du Parlement qui y était formellement contraire. Renaud de Beaune, archevêque de Bourges, qui avait eu la charge de grand aumônier à la mort de Jacques Amiot, était présent à ces délibérations. Il courait un bruit qu’il secondait les intentions du Parlement, qui voulait qu’on établît en France une discipline indépendamment du pape, qui ne devait plus être regardé que comme l’ennemi du royaume. {a} Les ennemis de ce prélat, qui était déjà patriarche (dignité qui n’appartient en France qu’au seul archevêque de Bourges), disaient qu’il voulait être regardé dans le royaume, tant que le schisme y régnerait, comme le chef des évêques, par rapport aux dispenses et < à > la collation des bénéfices. le cardinal de Lenoncourt, qu’on avait accusé à Rome d’avoir les mêmes desseins, étant mort quelques mois auparavant à Blois, de chagrin par rapport à une injure dont on ne l’avait point vengé, tout le monde soupçonna l’archevêque de Bourges d’avoir succédé à ses prétentions. {b} Le cardinal de Bourbon qui, n’étant pas encore dans les ordres sacrés, ne pouvait posséder la dignité de patriarche, {c} ne voulant pas en voir un autre revêtu de cette dignité, s’opposa à ce projet, sous prétexte que ce coup d’éclat allait fortifier le schisme. Il insinua qu’il y avait une espérance de faire revenir le pape en faveur du roi ; et qu’au contraire, on en ferait par ce moyen un ennemi irréconciliable. » {d}
- Gallicanisme qui allait s’épanouir en richérisme dans les années 1610 (v. note [27], lettre 337).
- Philippe de Lenoncourt, évêque de Châlons-sur-Marne en 1550, reçu cardinal en 1588, était mort en 1592. Thou a conté son infortune dans le livre ci de son Histoire universelle (année 1591, Thou fr, volume 11, pages 350‑351) :
« Dans le même temps, le cardinal Philippe de Lenoncourt, par le conseil de Madeleine d’Angoulême, {i} écrivit secrètement au roi pour l’instruire de ce qui se tramait à Tours, contre ses intérêts, par les princes de son sang. Mais cette lettre ayant ensuite été tirée des mains du roi par la perfidie d’un homme de sa Maison, qui était de la première noblesse, elle fut envoyée à ces princes. Irrités contre le cardinal, ils le traitèrent avec la dernière indignité ; et peut-être qu’ils auraient passé outre, s’ils n’eussent été retenus par son caractère. » {ii}
- Sic pour Diane d’Angoulême (Dianæ Engulismensis dans l’original latin), bâtarde légitimée du roi Henri ii (v. note [71] du Borboniana 4 manuscrit).
- « Peut-être seraient-ils allés plus loin si sa qualité de cardinal ne les avait retenus. »
- Charles ii de Bourbon (v. note [45] du Borboniana 5 manuscrit), cardinal de Vendôme nommé en 1583, ne pouvait pas prétendre diriger le clergé français car il ne fut jamais prêtre. Politiquement, il était l’âme du tiers parti, opposé à la fois à la Ligue et au roi (v. note [57], du Borboniana 5 manuscrit). Au sein du Conseil royal, Renaud de Beaune était le seul prêtre capable de se charger des affaires ecclésiastiques (c’est-à-dire de ce qui allait plus tard devenir le Conseil de conscience, v. note [3], lettre 686).
- Toutes ces tractations aboutirent à la conversion catholique de Henri iv en 1593, dont Arnaud de Beaune fut l’un des principaux artisans.