À souhait
Selon les désirs de celui qui écrit ou de celui dont il parle (comme on dit encore « À tes (vos) souhaits ! » à quelqu’un qui éternue).
À vau-l’eau
Suivant le courant de l’eau (vers l’aval).
Accort
Celui qui est courtois, complaisant, adroit, qui se sait accommoder à l’humeur des personnes avec qui il a affaire, pour réussir en ses desseins (Furetière).
Accroire (faire)
Faire croire à quelqu’un une chose fausse (Furetière). Présumer trop de soi-même, s’attribuer un mérite qu’on n’a pas (Littré DLF).
Actuellement
N’avait pas, du temps de Guy Patin, le sens temporel de « maintenant », mais celui, factuel, de « en effet, effectivement, de fait » (comme l’adverbe anglais actually).
Adonner (s’), être adonné
Se donner, s’appliquer, s’attacher à quelque exercice, à quelque profession. Adonner se dit aussi au passif en parlant des choses où notre plaisir, où notre inclination nous portent : ce jeune homme est adonné aux femmes, au vin, au jeu ; cet autre est adonné à l’étude, à la chasse, aux armes ; il est dangereux d’être adonné aux vices (Furetière).
Affronteur
Qui trompe, qui affronte : Paris est plein de devins, de donneurs d’avis, de faux chimistes, qui sont tous des gueux, des filous et des affronteurs (Furetière).
Agréger, agrégé, agrégation
Joindre et unir à un même corps, soit moral, soit physique : l’Université n’a pas voulu agréger dans son corps plusieurs sortes de religieux ; ces révoltés contre le corps ne sont pas du premier établissement, ce sont seulement des gens qu’on y a agrégés de nouveau (Furetière). Les collèges de médecine des villes dénuées de Faculté (comme Lyon ou Troyes) agrégeaient les docteurs qu’ils recevaient après les avoir soumis à l’examen de leurs diplômes et de leurs connaissances ; cette agrégation conférait seule le droit d’exercer légitimement la médecine dans la cité.
Aides (Cour des)
Les aides désignaient toute imposition de deniers extraordinaires (taxes sur la vente, la fabrication et la circulation de certaines marchandises), que le roi levait sur le peuple pour soutenir les charges de son État, auxquelles le revenu de son Domaine n’aurait pu suffire. La Cour des aides était une juridiction souveraine établie en plusieurs endroits du royaume pour juger des différends qui arrivaient sur le paiement des aides et de tous les autres deniers royaux, à la réserve du Domaine. La Cour des aides de Paris avait trois chambres ; il y en avait une à Rouen, à Clermont-Ferrand, etc. C’était à Paris l’une des cinq compagnies souveraines (ainsi nommées parce qu’elles étaient sans appel), avec le Parlement, la Chambre des comptes, le Grand Conseil et la Cour des monnaies (Furetière).
Aimable, amateur
Aimable (adjectif) : « qui a des qualités qui attirent l’amour ou l’amitié de quelqu’un » (Furetière) ; le sens de poli n’est apparu qu’à la fin du xviiie s. (Robert). Le mot dérivé, amabilité, synonyme de courtoisie, n’est apparu en français qu’à la fin du xviie s.

Amateur (substantif) : celui « qui aime quelque chose. Il ne se dit point de l’amitié, ni des personnes » (Furetière) ; le sens de dilettante n’a émergé qu’au xixe s. (Robert).

Ains
Vieux mot qui signifiait « mais » (Furetière).
Ajournement
Assignation qu’on donne à quelqu’un pour comparaître en justice à un certain jour, pour répondre sur quelque demande qu’on fait contre lui (Furetière).
Alléguer
Citer une loi, une autorité, un exemple ; mettre en avant, prétexter.
Altération
Soif causée par la sécheresse du gosier et de la bouche, faute de salive pour l’humecter. On sent dans la fièvre une grande altération ; quand on a marché, quand on s’est échauffé, on sent de l’altération (Furetière).
Altéré
Assoiffé au sens propre, avide au sens figuré.
Amender, amendement
Mots dérivés du latin mendum (faute) et e (ex, sorti de). Un amendement est un changement par lequel on devient en meilleur état, tant à l’égard de l’âme que du corps : il faut prier pour l’amendement des pécheurs ; ce malade est toujours de même, il n’y a point d’amendement. Amender ou s’amender c’est se corriger, devenir meilleur (Furetière).
Amiablement
À l’amiable, d’une manière honnête, douce et amie. Le meilleur est de terminer ces procès à l’amiable, ou amiablement (Furetière).
Anatomie, anatomique, anatomiste, anthropographie
L’anatomie (du grec anatomê, dissection, de anatemein, couper en morceaux, de ana, à travers, et temein, couper) est la « science qui donne la connaissance des parties du corps humain par la dissection, et même celle des autres animaux [anatomie comparée] » (Furetière).

Titre que l’anatomiste Jean ii Riolan avait donné à son plus fameux ouvrage, l’anthropographie (du grec anthrôpos, l’homme, et graphein, décrire) est un synonyme d’anatomie, mais il exprime mieux le fait qu’il s’agissait alors non seulement d’étudier la structure (anatomie proprement dite), mais aussi la fonction normale (physiologie) et même anormale (pathologie) des parties corporelles.

On donnait aussi le nom d’anatomie à la dissection (enseignement et recherche) et à l’autopsie (diagnostic post mortem). Ordinairement, dans les facultés de médecine, celui qui expliquait l’anatomie aux étudiants (en latin) était docteur régent, et celui qui disséquait était chirurgien (ignorant presque toujours le latin).

Au Collège de France, comme dans d’autres institutions académiques européennes (mais pas à la Faculté de médecine de Paris), la chaire d’anatomie était couplée à celle de botanique car la première discipline s’enseignait l’hiver (quand la température était propice à la conservation des cadavres), et l’autre l’été (quand les plantes étaient dans leur plein épanouissement).

Dans la classification galéniste (v. note [13] dans lesPièces liminaires du Traité de la Conservation de santé), l’anatomie normale et la physiologie formaient ce qu’on appelait les choses ou qualités naturelles du corps humain. À la Faculté de médecine de Paris (v. note [5] desActes de 1650‑1651 dans les Commentaires de la Faculté), elles étaient enseignées ensemble, en même temps que la diététique et l’hygiène (choses non naturelles), par l’un des deux professeurs de médecine en exercice, pendant la première année de son mandat de deux ans (la seconde année étant consacrée à l’enseignement de la pathologie, ou choses contre nature).

L’anatomie a été le principal moteur du progrès médical aux xvie et xviie s. Ce fut véritablement son « âge d’or ». En étant la première à prouver de visu que l’Antiquité n’était pas infaillible, l’anatomie permit à la médecine de quitter l’ornière où le dogme hippocratico-galéniste l’avait profondément enlisée.

Ancien ami
À prendre au sens d’ami qu’on a de longue date, et non d’ami qu’on a perdu.
Animadversion
Se dit dans le dogmatique pour signifier quelques notes ou observations que les doctes critiques font sur quelques auteurs, comme les animadversions sur Pétrone (Furetière).
Antiquité, antiquaire
Distincte de l’Antiquité, période historique allant de l’invention de l’écriture (fin du ive millénaire av. J.‑C.) à la chute de l’Empire romain d’Occident (an 476 de notre ère), l’antiquité était l’ancienneté.

Les antiquaires étaient les savants qui s’intéressaient aux antiquités, c’est-à-dire à l’histoire et surtout aux vestiges de l’Antiquité gréco-romaine (monuments, inscriptions, médailles, monnaies, etc.).

Apparat
Préparation à une action solennelle (Furetière).
Après-dîner, après-dînée, dîner, déjeuner, souper
Après-midi : la seconde partie du jour que l’on compte depuis midi, qui est l’heure ordinaire de dîner (notre déjeuner) (Furetière). Le déjeuner (rompre le jeûne) était notre petit déjeuner, et le souper (manger la soupe), notre dîner (ou encore souvent souper).

Archiatre, premier médecin
L’autorité distingua de très bonne heure, à Rome et dans les villes les plus considérables de l’Empire romain, des médecins d’un mérite reconnu, auxquels on donnait le nom d’archiatres. Ils avaient la surveillance sur les autres médecins, ils jouissaient de certains privilèges et recevaient un traitement particulier. Le premier archiatre dont l’histoire fasse mention est Andromaque de Crète, dit l’Ancien, qui vivait du temps de Néron (37-68 apr. J.-C.) et qui inventa la thériaque. Longtemps on a disputé sur la question de savoir si ce titre signifiait médecin du prince ou chef des médecins, mais il semble qu’on peut en quelque sorte trancher la difficulté en admettant que le premier médecin d’une ville, αρχων των ιατρων [le chef des médecins], portait en même temps le nom du médecin du magistrat, ιατρως του αχρχουλος [médecin du chef].

Les principaux archiatres furent, depuis l’époque de Constantin, les archiatres palatins, archiatri palatini, que l’on rangeait toujours parmi les premiers officiers de la cour. Au ve s., chaque archiatre palatin obtint le rang de vicarius et de dux, de sorte cependant que l’ancienneté réglait seule l’ordre des rangs. Les archiatres se rapprochèrent ainsi des princes et vécurent souvent même dans une grande intimité avec les empereurs. Les médecins romains du second ordre s’appelaient les archiatres populaires, archiatri populares. Leur nombre était déterminé dans toutes les villes principales : dix dans les grandes villes, sept dans celles du second ordre et cinq dans les plus petites, au temps d’Antonin le Pieux. Lorsqu’il s’en établissait davantage, ils ne jouissaient pas des privilèges attachés à la place de médecin d’État. Les archiatres populaires de chaque ville formaient un collège. Ils étaient proposés par la municipalité au collège qui s’assurait de leurs capacités à exercer, puis les admettait dès qu’une place était vacante (Sprengel).

Dans la suite des temps, on a décoré du titre d’archiatre les médecins des souverains et il fut en usage dans les principales cours d’Europe. Les médecins qui y sont attachés prennent la qualité d’archiater, et les premiers médecins du prince se donnent celle de comte des archiatres, archiatrorum comes ou comes archiatrωn, en conservant le plus souvent l’oméga d’archiatrωn pour rappeler la noble ascendance antique du mot et de la fonction (κωμης αρχιατρων). Chomel croit que c’est Marc Miron, premier médecin de Henri iii, qui a commencé à se décorer de ce titre en France (Éloy).
Archiduc
Titre des princes de la Maison d’Autriche (Habsbourg). Guy Patin et ses contemporains l’utilisaient absolument pour désigner Léopold-Guillaume de Habsbourg, archiduc d’Autriche et gouverneur des Pays-Bas espagnols de 1647 à 1658 (v. note [16], lettre 155) : l’hostilité de l’Archiduc Léopold menaçait directement le nord de la France et Paris ; mais Patin s’est aussi servi du même titre pour désigner l’empereur Léopold ier avant qu’il ne devînt empereur germanique (en 1658).
Arrêts sur requêtes, requête civile
La requête civile est un remède de droit introduit pour faire casser les arrêts qui ont été surpris et où il y a erreur ; ce qui se fait par le moyen des lettres de chancellerie qu’on obtient dans les six mois. Les arrêts sur requête ne sont d’aucune considération quand on juge le fond (Furetière).

Attentat
Outrage ou violence qu’on tâche de faire à quelqu’un. En termes de Palais, se dit figurément de ce qui est fait contre l’autorité des supérieurs et de leur juridiction. Le Conseil privé, le Grand Conseil cassent comme attentat toutes les procédures qui sont faites au préjudice des instances pendantes par devant eux. Les Requêtes du Palais et de l’Hôtel cassent pareillement comme attentat tout ce qui est fait au préjudice du renvoi. Cette entreprise est un attentat à l’autorité royale, à l’autorité des lois (Furetière).
Au prix de
En comparaison de.
Audiencier
Huissier qui sert à l’audience à ouvrir et fermer les portes, à tenir le barreau, à faire faire silence et à rapporter les causes appelées. Les huissiers audienciers du Châtelet sont distingués des autres huissiers et sergents à verge. Le grand audiencier est un grand officier de chancellerie : il y a quatre grands audienciers qui rapportent à M. le chancelier les lettres de noblesse et autres lettres d’importance. Les audienciers de la petite chancellerie mettent la taxe au haut des lettres (Furetière).
Augustin
Sorte de religieux qui suit la Règle de saint Augustin. Il en existait deux congrégations à Paris (Furetière) :

  • Les ermites de saint Augustin, vêtus de noir, étaient un des quatre ordres mendiants (avec les cordeliers, les jacobins et les carmes) ; leur réforme était celle des augustins déchaussés, autrement dits les petits pères ; leur couvent parisien (les Augustins ou Grands-Augustins) se situait sur la rive gauche de la Seine près du Pont-Neuf ;

  • Les chanoines réguliers de saint Augustin, vêtus de blanc avec des rochets de toile et n’ayant que la chape noire, étaient connus à Paris sous le nom de chanoines réguliers de Sainte-Geneviève (génovéfains) parce que cette abbaye était le chef de leur réforme.

Aulique, aulicus
Relatif à la cour royale (aula en latin). Guy Patin a toujours marqué de la défiance et du mépris à l’égard des médecins auliques ; il les qualifiait généralement de médicastres.
Aumônier
« Officier ecclésiastique qui sert le roi, les princes et les prélats dans les fonctions qui regardent le service de Dieu. On doute s’il doit être mis au nombre des officiers de la Couronne. Dans les ordonnances il est seulement qualifié “ grand aumônier du roi ” [ou grand aumônier de France]. Cette charge fut érigée par Charles viii en 1483. Il a la surintendance sur tous les hôpitaux et maladreries de France. Autrefois il conférait les bénéfices qui étaient à la nomination du roi [comme les chaires royales du Collège de France]. Le grand aumônier officie devant le roi aux grandes cérémonies. L’aumônier de quartier aide au roi à faire ses prières et fait la bénédiction de la table. Les aumôniers des prélats les servent à l’autel dans les jours qu’ils officient » (Trévoux).

Autoriser
Donner puissance de faire quelque chose, donner force et vigueur à quelque loi, à quelque usage, à quelque cérémonie (Furetière).
Babil, babillard, babiller
Bavardage, bavard, bavarder : le babil est une abondance de paroles sur des choses de néant ou superflues ; babillard se dit aussi d’un indiscret qui ne saurait tenir sa langue, qui va dire tout ce qu’il a ouï dire en tous les lieux où il se trouve ; babiller, c’est parler sans cesse et ne dire que des choses de peu de considération (Furetière).
Badaud
Sot, niais, ignorant. C’est un sobriquet injurieux qu’on a donné aux habitants de Paris à cause qu’ils s’attroupent et s’amusent à voir et à admirer tout ce qui se rencontre en leur chemin, pour peu qu’il leur semble extraordinaire. Un charlatan a bientôt amassé autour de lui plusieurs badauds (Furetière).
Badin, badiner, badinerie, badinage
Est badin celui qui est folâtre, peu sérieux, qui fait des plaisanteries : les enfants sont naturellement badins ; il n’y a rien plus agréable qu’un amour badin.

Badiner, c’est faire le badin : les enfants badinent avec les pieds et les mains, avec tout ce qu’ils tiennent ; un galant homme sait badiner agréablement avec sa maîtresse.

Une badinerie est une action badine : on gagne plutôt une femme avec des badineries qu’avec des entretiens sérieux ; on dit aussi qu’un ouvrage ne contient que des badineries, quand il n’y a rien de sérieux ni de solide.

Un badinage est une petite folâtrerie, un divertissement peu sérieux, un jeu d’enfants ; c’est aussi, en matière de galanterie, de petits mystères, de petites façons et grimaces qui servent à divertir ou à cacher aux autres sa passion ; ainsi Sarrasin a dit que Voiture avait fait je ne sais comment les Muses à son badinage ; on dit aussi, qu’un valet est fait au badinage de son maître lorsqu’il sait tous ses petits secrets, qu’il s’accommode à ses petites façons de faire (Furetière).
Bailli, bailliage
En termes de guerre, le bailli est le chef de la noblesse de la province et celui qui la commande quand on convoque l’arrière-ban. Le bailli du Palais, le bailli de Vermandois sont des hommes d’épée. Le bailli, le sénéchal et le prévôt sont des noms qu’on donne en divers lieux pour les mêmes fonctions.

En termes de Palais, le bailli est un officier de robe qui rend la justice dans certain ressort, qui était autrefois rendue par le bailli noble, dont celui-ci n’est que le lieutenant, tel qu’est celui qui rend la justice au bailliage du Palais. On les a appelés baillis parce qu’ils avaient la charge et l’administration d’une justice ou d’une seigneurie, et étaient conservateurs et gardiens des biens du peuple contre ceux qui les voulaient opprimer.

Il y a aussi des baillis de robe qui ne sont point lieutenants de baillis nobles et qui sont juges dans des sièges subalternes, comme le bailli de Saint-Germain-des-Près, le bailli du Temple.

Le bailliage est la juridiction d’un bailli dans une certaine étendue de pays ou de seigneurie. C’est aussi le lieu où le bailli tient son siège (Furetière).
Baïonnette
Dague, couteau pointu en guise de poignard, qui n’a que deux petits boutons pour garde, qui est venu originairement de Bayonne (Furetière).
Baiser les mains
Formule d’affection et de politesse très souvent employée par Guy Patin. « On dit au contraire ironiquement à ceux qu’on veut éconduire de quelque demande qu’ils font ou à qui on veut nier quelque proposition qu’ils avancent, je vous baise les mains, pour dire je n’en ferai rien, je n’en crois rien » (Furetière).
Balle, ballot
Se dit des marchandises ou meubles qu’on veut transporter au loin et qu’on empaquette dans de la toile, après les avoir bien garnies de paille, pour empêcher qu’elles ne se mouillent ou qu’elles ne se brisent. Toutes les marchandises qui viennent aux foires sont en balles ou des ballots (Furetière).
Banlieue
On appelait banlieue les environs d’une ville qui sont dans l’étendue d’une lieue (Furetière). C’était le périmètre du territoire sur lequel s’étendait le ban (la juridiction) d’une ville.

Bateau (étourdi du)
On dit proverbialement qu’un homme est tout étourdi du bateau quand il lui est arrivé depuis peu quelque infortune qui lui a causé quelque trouble d’esprit (Furetière).
Bateleur
Charlatan, danseur de corde, bouffon : se dit de toute autre sorte de gens qui amassent le peuple pour le divertir, en faisant des sauts, des danses, et des tours de passe-passe (Furetière). Ce terme méprisant s’appliquait en particulier aux vendeurs de panacée qui œuvraient sur les estrades des marchés, en agrémentant leur boniment d’un spectacle propre à attirer l’attention du public.

Bateleur est l’un des surnoms que Guy Patin a donnés au cardinal Mazarin.

Belles-lettres
Partie des études et de l’enseignement qui, selon Littré (DLF), groupait la grammaire, l’éloquence et la poésie. C’était le sens qu’entendait aussi Guy Patin, mais Furetière n’était pas de même avis : « On appelle les lettres humaines, et abusivement les belles-lettres, la connaissance des poètes et des orateurs ; au lieu que les vraies belles-lettres sont la physique, la géométrie, et les sciences solides [fondées sur des principes fermes et démonstratifs, par opposition aux sciences vaines, comme la chiromancie ou l’astrologie judiciaire]. »
Bénédictins
Religieux ou religieuses qui ont fait la profession de vivre sous la règle de saint Benoît. Les bénédictins sont divisés en plusieurs congrégations : de Cluny, de Saint-Maur (mauristes), etc. (Furetière).
Bénéfice, bénéficier
Un bénéfice est une église dotée de quelque revenu pour y faire le service divin ; se dit non seulement de l’église, mais aussi du revenu qui y est affecté. Les évêchés, abbayes, cures, chanoinies, chapelles, prieurés sont les divers genres de bénéfices. Ce mot vient des fiefs, qu’on appelait autrefois bénéfices et qui étaient alors viagers (la vie durant), à l’imitation desquels on a appelé bénéfices les possessions des ecclésiastiques, dont ils jouissaient de même manière ; et comme ces bénéfices revenaient au roi après la mort de ceux qu’il en avait pourvus, il en jouissait jusqu’à ce qu’il en eût rempli la place par un successeur (droit de régale ou régalien). Le bénéficier est celui qui possède un ou plusieurs bénéfices : on distingue les bénéficiers du royaume payant décimes, d’avec ceux qui n’en payent point, qui n’ont que de simples administrations (Furetière).

Le trafic ou « maquignonnage » des bénéfices caractérisait la simonie.

Blanc (en)
Livre en blanc : livre non relié (Littré DLF). Les frais de reliure s’ajoutaient au prix demandé par le libraire.
Blanc (monnaie)
Ancienne monnaie qui valait cinq deniers (soit cinq douzièmes de sol). On a appelé des grands blancs au soleil de Louis xi et Charles viii des sous qui valaient treize deniers, qu’on a aussi nommés treizains. Il y a eu aussi des pièces de six blancs appelées nesles, parce qu’elles avaient été faites en la tour de Nesle à Paris. On a appelé cette monnaie sous ou livres blancs, à cause qu’elle était blanchie, à la différence d’une autre monnaie noire, qui était de moindre valeur, qu’on appelait sous nerets (Furetière).
Boîtes
Bouëtes ou boëste dans l’orthographe du xviie s. a le double sens de « petit vaisseau qui se ferme avec un couvercle, […] des boëstes d’apothicaire. Ce mot vient de buxuletta, diminutif de buxula, qui a été fait de buxus, à cause que les boëstes se font ordinairement de buis » et, en termes d’artillerie, de « petit mortier de fer, haut de sept à huit pouces, qu’on charge de poudre jusqu’au haut et qu’on bouche avec un fort tampon de bois pour le tirer dans des feux et réjouissances publiques, afin que le bruit s’en fasse ouïr de plus loin » (Furetière).
Boiteux (attendre le)
On dit proverbialement, en matière de nouvelles, qu’il faut attendre le boiteux pour dire qu’il en faut attendre la confirmation avant de les croire (Furetière). L’expression vient de ce que le messager a été dit boiteux, par plaisanterie et comme n’allant pas assez vite (Littré DLF).
Bon an, bon jour
Bonne année, bonne fête (de nouvel an) ; faire son bon jour, c’était communier à l’occasion d’une fête solennelle.
Bonace
Calme de la mer, qui se dit quand le vent est abattu ou a cessé. La bonace trompe souvent le pilote. La bonace se tourne souvent en orage. On le dit figurément en morale : le gouvernement politique est aisé pendant la bonace et la paix (Furetière).
Bonhomme
Désigne non seulement un vieillard fort âgé, mais encore un homme doux et facile, avec qui on traite aisément et qui se laisse même tromper (Furetière). Guy Patin employait ce mot sans nuance péjorative pour qualifier un homme âgé, notamment quand il en existait un jeune de même nom.
Bonnet carré
Bonnet que portent les gens d’Église (bonnet rouge des cardinaux), les gens de justice et les gens de collège qui sont philosophes ou gradués. Les bords du bonnet étaient relevés pour former des cornes permettant de le tenir en mains et de l’ajuster sur la tête ; leur nombre était ordinairement de quatre (bonnet carré).

« Recevoir le bonnet » signifiait être reçu docteur d’une université.

Botté
On appelle un vilain botté, un homme de ville qui a des bottes, à cause que cela n’appartenait autrefois qu’aux nobles qui allaient à la guerre (Furetière). Guy Patin a appelé docteurs bottés les médecins de Montpellier diplômés à la petite mode (hâtivement), et laquais bottés les chirurgiens.
Bourde
Mensonge dont on se sert pour s’excuser ou pour se divertir de la crédulité des autres (Furetière).
Bourgeois
Nom collectif : l’assemblage du peuple qui habite dans une ville. Il ne faut pas mettre les armes entre les mains des bourgeois ; la police des marchés veut que le bourgeois soit fourni avant les marchands et regrattiers. Ce mot vient de l’allemand burger, signifiant la même chose.

Bourgeois se dit aussi de chaque particulier habitant de la ville : ce marchand, cet avocat est un bon bourgeois.

Bourgeois se dit aussi pour marquer les gens du tiers-état, à la distinction des gentilshommes et des ecclésiastiques, qui jouissent de plusieurs privilèges dont le peuple ne jouit pas. Les charges de l’État sont portées par le bourgeois. On dit en ce sens : un tel est gentilhomme, et un tel n’est que bourgeois ; une telle femme est bien demoiselle, et une telle n’est qu’une simple bourgeoise.

Bourgeois se dit quelquefois en mauvaise part par opposition à un homme de la cour, pour signifier un homme peu galant, peu spirituel, qui vit et raisonne à la manière du bas peuple. C’est un franc bourgeois. Molière a dit plaisamment dans les Femmes savantes : « Un corps composé d’atomes plus bourgeois » ; le Gentilhomme bourgeois.

On appelle garde bourgeoise la milice des bourgeois qui font garde en quelque partie de leur ville. On appelle caution bourgeoise, une bonne caution, et facile à discuter (Furetière).

Les charges d’officiers au parlement conféraient à leur titulaire, au bout de 20 ans d’exercice ou en cas de mort en charge, une noblesse transmissible à leurs descendants ; mais la noblesse traditionnelle, dite d’épée, méprisait cette noblesse de robe, et traitait volontiers ses membres de bourgeois.
Bourru
Bizarre, qui ne veut point voir le monde, qui a des maximes extravagantes : c’est un esprit bourru qui ne se laisse gouverner par personne (Furetière).
Brave, braverie
Outre son sens moderne, brave avait celui de bien vêtu. La braverie était la dépense, la magnificence en habits.
Brigue, briguer
Désir ambitieux qu’on a d’obtenir quelque charge ou dignité, où l’on tâche de parvenir plus par adresse que par mérite ; cabale qui est intéressée à soutenir plutôt un parti que l’autre dans une élection (Furetière).
Brouillon
Remuant, qui tâche de brouiller les affaires : les hérétiques ont toujours été accusés d’être des esprits brouillons qui ont voulu troubler l’État ; ce procureur est un brouillon, qui ne tâche qu’à embarrasser les parties en procès (Furetière).
Bureau (sur le)
Table sur laquelle le rapporteur met les pièces d’un procès qu’il rapporte : et c’est en ce sens qu’on dit qu’il est au bureau, qu’il a mis un procès sur le bureau, qu’il lui a fait baiser le bureau, pour dire, qu’il en a entamé le rapport (Furetière).
Burlesque
Plaisant, gaillard, tirant sur le ridicule. Ce mot est assez moderne et nous est venu d’Italie où il y a quantité de poètes burlesques. Les vers burlesques en français n’ont pas régné longtemps à cause qu’on y a introduit trop de licence, tant dans le sujet que dans les vers, et trop de ridicules plaisanteries. En prose, le style burlesque emploie des mots qui se disent par pure plaisanterie et qu’on ne souffre point dans le sérieux (Furetière).
Busquer
Chercher ; ne se dit proprement qu’en cette phrase : busquer fortune, en parlant de ces gens sans biens qui vont par le monde chercher à vivre et à faire fortune. Ce mot vient tout pur de l’espagnol, ou le mot de buscar signifie proprement chercher (Furetière).
Cabale, cabaliste, cabalistique, cabaler
« Societé de personnes qui sont dans la même confidence et dans les mêmes intérêts, mais il se prend ordinairement en mauvaise part. Tous ces gens-là sont d’une même cabale. On le dit aussi des conspirations et des entreprises secrètes, des desseins qui se forment dans cette société. On a fait une cabale pour décrier cette tragédie. Se dit aussi de quelques sociétés d’amis qui ont entre eux une liaison plus étroite qu’avec d’autres, sans avoir aucun mauvais dessein, comme pour se divertir, étudier » (Furetière). Les cabalistes sont les membres d’une cabale.

V. note [26] du Borboniana 1 manuscrit pour la Cabale (Cabbale ou Kabbale) rabbinique sacrée, d’où a dérivé l’adjectif cabalistique (relatif à la Cabale), au sens d’impénétrable (hermétique).

Cacochymiste, cacochymique
Cacochymiste est ma traduction du néologisme gréco-latin péjoratif, caco-chymicus (mauvais chimiste, v. note [4], lettre latine 224), que Guy Patin a employé pour dénigrer les chimistes, en altérant le mot cacochymus (κακοχυμος, plein de mauvaises humeurs, v. note [8], lettre 5) ; cacochymique (caco-chymicus) est l’adjectif qu’il en a dérivé (Littré DLF atteste cacochymique, mais comme voulant dire relatif à la cacochymie).

Cagot, cagoterie
Un cagot est un faux dévot et hypocrite, qui affecte de montrer des apparences de dévotion pour tromper et pour parvenir à ses fins. Ce mot est injurieux, et vient d’une condition de personnes habituées en Béarn et en quelque partie de la Gascogne qu’on croit descendus des Visigoths, qui sont tenus pour ladres (lépreux), auxquels est interdite par la coutume la conversation avec le reste du peuple et qui logent en de petites maisons écartées. Ce nom leur a été donné, comme qui dirait chats Goths, ou chiens Goths, en haine de l’arianisme dont les Goths avaient fait profession. Il y a bien des gens qui font leur fortune par cagoterie (Furetière).
Cahier
Feuille imprimée qu’on plie un nombre variable de fois (deux pour in‑fo, quatre pour in‑4o, huit pour in‑8o etc.) pour composer les pages d’un volume. Chaque feuille imprimée, pour être facilement distinguée des autres au moment de la reliure, portait une marque distinctive (imprimée en bas à droite de chacune de la première moitié de ses pages impaires), habituellement une lettre de l’alphabet, qu’on appelait signature en français et registre en italien.

Cahier avait aussi le sens courant de feuilles de papier assemblées où les écoliers écrivaient sous leurs maîtres en philosophie, théologie et en toute autre science qu’on enseignait dans les écoles. « Un écolier doit représenter ses cahiers à son maître pour en obtenir une attestation de son temps d’étude. »

On consignait sur des cahiers les « délibérations des assemblées, comme celles du Clergé, des États et autres, qui contiennent des remontrances ou des propositions qu’elles font au roi », ainsi que les mémoires particuliers : inventaire, relevé de frais, etc. (Furetière).

Ainsi, dans la langue de Guy Patin, un cahier était soit un assemblage de feuilles imprimées, soit un texte manuscrit à usage privé, ou destiné à être un jour publié. Les « Cahiers de Guy Patin » est le nom qu’on a donné à ceux où il a consigné les propos qui ont servi à composer ses ana (Naudæana, Patiniana, Grotiana et Borboniana).

Cambrai
Surnom du Collège royal de France (aula regia Cameracensis), dont les leçons étaient données dans la grande salle du Collège de Cambrai (ou des Trois-Évêques, v. note [15], lettre 153).

Cancre
Se dit proverbialement d’un homme pauvre qui n’est capable de faire ni bien, ni mal : cet homme est un gueux, un cancre, un pauvre cancre (Furetière).
Capucin
Religieux ou religieuse de l’ordre de saint François (franciscains ou frères mineurs) de la plus étroite observance. Ils portent des capuchons pointus et sont vêtus de gris. Ils vont toujours nu-pieds, jamais en carrosse, et les hommes ne rasent jamais leur barbe (Furetière).
Carabin, braguette
« Chevau-léger armé d’une petite arme à feu qui tire avec un rouet [ressort à clef]. Ces cavaliers qui faisaient autrefois des compagnies séparées, et quelquefois des régiments, servaient à la garde des officiers généraux, à se saisir des passages, à charger les premières troupes que l’ennemi faisait avancer et à les harceler dans leurs postes ; souvent aussi ils ne faisaient que lâcher leur coup et ils se retiraient. Il n’y en a plus guère que parmi les gardes du corps. On appelle figurément un carabin celui qui entre en quelque compagnie sans s’y arrêter longtemps, qui ne fait que tirer son coup et s’en va » (Furetière). « Celui qui hasarde volontiers un coup sans jamais s’engager réellement » (Littré DLF).

Guy Patin qualifiait méchamment les jésuites de carabins sortis de la braguette du P. Ignace (Ignace de Loyola fondateur de la Compagnie de Jésus à Paris en 1534). La braguette (ou brayette) est « la fente d’un haut-de-chausse où les braies (linges qui couvrent les parties honteuses, comme caleçons, bas de chemises) sont contenues. Il y a peu de temps qu’on disait braguette ; et c’était une partie de l’habillement qui représentait un lieu propre à mettre les parties génitales. On les voit encore peintes dans les tableaux du siècle passé [xvie s.] » (Furetière).
Cardinal
S.R.E. (Sacræ Romanæ Ecclesiæ) cadinalis [cardinal de la sainte Église romaine] : prince de l’Église, qui a voix active et passive dans le conclave lors de l’élection des papes. Cardinalis, purpuratus Ecclesiæ Princeps [prince empourpré de l’Église]. Les cardinaux composent le Conseil et le Sénat du pape. Un chapeau de cardinal, est un chapeau rouge ; et on dit absolument, qu’un homme « prétend au chapeau » ou qu’il « a eu un chapeau », pour dire qu’il prétend à être cardinal, qu’il est devenu cardinal. Cardinal neveu est celui qui est neveu du pape vivant.
Les cardinaux sont divisés en trois ordres : 6 évêques, 50 prêtres et 14 diacres (tonsurés mais non ordonnés prêtres). Ces 70 ecclésiastiques forment le Sacré Collége, Sacrum purpuratorum patrum Collegium, Collegium Cardinalium, Sacrum Collegium. Le Consistoire est une assemblée partielle de cardinaux que le pape a librement choisis pour délibérer avec lui.
Le pape doit être pris du sacré Collége et choisi d’entre les cardinaux. Quand le pape veut créer des cardinaux, après avoir écrit les noms de ceux qu’il veut élever à cette dignité, il assemble le Consistoire et dit aux cardinaux : Habetis fratres [Vous avez des frères], puis il fait lire les noms qu’il a écrits. Saint Bernard dit que les cardinaux doivent être pris de tout le monde, puisqu’ils doivent le juger, et les plus parfaits qu’il est possible, parce qu’il est plus aisé de venir bon à la Cour que d’y devenir bon.
Le cardinal-évêque d’Ostie précède tous les cardinaux, il consacre le pape. Les six cardinaux-évêques qui sont comme les vicaires du pape, portent le titre des évêchés qui leur sont attribués. Pour les cardinaux-prêtres et diacres, ils ont tous des titres tels qu’ils leur sont assignés.
Le décret du pape Urbain viii par lequel il est ordonné que les cardinaux seraient traités d’Éminence, est de l’année 1630. Avant cela on les traitait d’illustrissimes (Trévoux).

Le sacré Collège était un subtil mélange de diverses nationalités où prédominaient les Italiens (sans que ce mot eût alors le sens qu’il a aujourd’hui car la Péninsule était une mosaïque d’États indépendants). En principe, chaque souverain étranger proposait les noms des prélats qu’il souhaitait voir promus au cardinalat, et le pape en disposait. Outre leur sacerdoce, les cardinaux exerçaient de hautes fonctions politiques et diplomatiques, qui prenaient toute leur importance lors de l’élection pontificale, car elle influençait puissamment les équilibres spirituels et temporels de la chrétienté. Les gens soucieux des affaires internationales, comme était Guy Patin, attachaient donc grande importance aux nominations cardinalices. Richelieu et Mazarin sont (en France) deux remarquables exemples des éminentes fonctions temporelles que pouvainet jour les cardinaux

Carme, carmélite
Ordre de religieux, qui est l’un des quatre mendiants [avec les cordeliers, les jacobins et les augustins], qui prétend tirer son nom du Mont Carmel en Syrie, qu’on dit avoir été habité par Élie. Ils ont été amenés en France par le roi Louis ix (saint Louis, qui régna de 1226 à 1270). Il est célèbre par la dévotion du scapulaire, et par la vision de Simon Stock, à qui il fut donné par la Sainte Vierge ; sur quoi Launoy a écrit une curieuse Dissertation (v. note [20], lettre 207). Quelques réformateurs d’ordres religieux ont mitigé leur règle, et en ont fait une mitoyenne entre la sévérité trop grande de l’Institution et le relâchement qui s’y était introduit, d’où est venu le nom de carmes mitigés, qu’on nomme à Paris billettes (Furetière).

Les carmes déchaussés formaient un Ordre à part des autres carmes et allaient sans chausses, c’est-à-dire jambes et pieds nus dans les sandales.

Les carmélites sont un Ordre de religieuses vivant sous la même règle que les carmes.

Carton
Feuillet qu’on réimprime à la place d’un autre où il s’était glissé quelque grosse faute. On a refait plusieurs cartons de ce livre pour en empêcher la censure (Furetière).
Cassade
Bourde qu’on invente pour se défaire des importunités de quelqu’un. On le dit aussi des hâbleurs qui promettent beaucoup, et qui tiennent peu : on les appelle donneurs de cassades. Ce mot vient de ce qu’un Manceau pour s’exempter de prêter son cheval à ses amis, leur disait toujours qu’il avait une cassade, qui est un vieux mot qui signifiait alors une blessure de cheval (Furetière).
Caudataire
Celui qui porte la queue du pape, d’un cardinal, d’un prélat (Furetière).
Centon
Ouvrage composé de plusieurs vers ou passages dérobés ou empruntés d’un ou de plusieurs auteurs (vLieux communs). Ce mot vient du latin cento [du grec kentrôn], qui signifie un manteau rapetassé, fait de cent pièces rapportées (Furetière).
Cependant
Pendant ce temps, en attendant, ce faisant.
Chaînes
Dans les séditions (comme les journées de barricades), on barrait les rues et les carrefours en y tendant de grosses chaînes.
Chaise
Voiture pour aller assis et à couvert tant dans la ville qu’à la campagne. Un petit carrosse coupé s’appelle une chaise roulante. Une chaise à porteurs est un vaisseau portatif que deux hommes portent sur leurs épaules avec des bricoles [pièces de cuir attachées ensemble] (Furetière).
Chancelier, garde des sceaux
Le chancelier de France était l’un des grands officiers de la Couronne et en devint le premier après la suppression de l’office de connétable en 1627. Depuis des siècles, sa charge était l’une des plus prestigieuses de la monarchie. Elle le rattachait à la Couronne et non à la personne du souverain, et c’est pourquoi il était inamovible : il ne pouvait perdre sa place que par mort, démission volontaire ou forfaiture. Symbolisée par le fait qu’il ne prenait pas le deuil au décès des rois, puisque leur justice était immortelle, cette inamovibilité pouvait devenir gênante lorsque l’âge ou les infirmités ralentissaient le travail du chancelier, ou lorsqu’il avait politiquement cessé de plaire. Dans ce cas, le roi le réduisait plus ou moins à l’inaction en lui retirant ses sceaux et en les confiant à un garde des sceaux révocable, qui remplissait ses fonctions à sa place. Assez souvent, la nomination d’un garde des sceaux a constitué une expectative de la succession d’un chancelier âgé ou valétudinaire. Vu la nature de ses fonctions, le chancelier (ou le garde des sceaux) était choisi par le roi dans la haute magistrature.

Responsable de l’expédition et du scellement des actes royaux, le chancelier avait ainsi regard sur tous les aspects de la vie du royaume, quels qu’ils fussent. Gardien des grands sceaux du roi, il les apposait en tenant le tribunal de l’audience du sceau. Il incarnait la justice du roi et, à ce titre, était le chef de ses conseils, qu’il présidait en son absence et dont les arrêts n’étaient validés que revêtus de sa signature. Il était pour la magistrature « la bouche du roi », ce qui plaçait non seulement tous les tribunaux sous son autorité, mais aussi les intendants des provinces. Il avait la police de la librairie et de l’imprimerie, et octroyait les privilèges d’impression. Enfin, conjointement avec « messieurs des finances », il participait au maniement des finances. Ses prérogatives et ses activités le plaçaient au sommet de la hiérarchie administrative, judiciaire et financière de l’État, duquel on a pu dire qu’il était en quelque façon le secrétaire général. Solidement fondés par les lois, la coutume et la tradition, les pouvoirs du chancelier n’en étaient pas moins, dans la pratique, dépendants de la personnalité de chacun de ces grands officiers et des événements politiques (M. Antoine, in D.G.S.).

Par extension, le chancelier était aussi celui qui gardait les sceaux des princes de la Maison royale, ou de quelques communautés : le chancelier de la reine, de Monsieur, de l’Université, de l’Académie française, des ordres de chevalerie du Saint-Esprit, de Saint-Lazare, etc.

Chandeleur
Fête qu’on célèbre en l’Église le 2 février en l’honneur de la purification de la Vierge, où on fait des processions avec des chandelles allumées (Furetière).
Chape-chute
On dit qu’un homme cherche chape-chute, qu’il a trouvé chape-chute, pour dire, qu’il cherche, ou qu’il a trouvé quelque occasion, quelque hasard, quelque rencontre avantageuse, ou quelquefois mauvaise (Furetière). Chape-chute a besoin d’une explication, qui est fournie par un texte de Wace, rapporté dans l’historique de chape : il dit qu’une femme encline à voler aurait pris une chape tombée, si cette chape n’eût été réclamée par celui à qui elle appartenait (Chape chaete prist, s’el n’eüst bon garant). Chute est donc ici l’ancien féminin du participe chu, tombé, et chape chute signifie une chape tombée. De là on voit sortir la locution : une chape tombée est bonne aubaine pour celui qui, la trouvant, s’en empare. Dans le Roman de Renart, il est dit que, Renart s’étant échappé, chacun doit prendre garde à sa chape ; ce qui montre que la chape se prenait proverbialement pour exprimer vaguement ce que chacun possède. Enfin, au xvie s., il est parlé des chapes chutes autour des personnes, ce qui reproduit la locution à la fois dans son sens propre et son sens figuré. Le verbe choir faisait au participe passé, suivant les dialectes de l’ancienne langue, cheüt, cheoit, cheeit, chaeit, etc. (Littré DLF).
Chartreux
Religieux de l’ordre de saint Bruno, qui vit fort austèrement et dans une clôture et une solitude fort étroite. Ce nom vient du village de Chartreuse en Dauphiné où saint Bruno se retira lorsqu’il commença à fonder cet ordre en 1086, et l’on a donné ce nom aux autres maisons de chartreux (Furetière).
Chevau-légers
Nom qu’on donnait à une compagnie de cavalerie composée de gens de naissance et d’honneur, qui faisaient partie de la garde du roi. Il y a eu aussi des chevau-légers de la reine, du dauphin et de Monsieur. La différence ancienne des gendarmes et des chevau-légers consistait en ce que les premiers étaient armés pesamment, de pied en cap, et les autres légèrement (Littré DLF).
Chiaoux
Officier de la Porte du grand Seigneur (ou grand Turc), qui fait l’office d’huissier. Le grand Seigneur a coutume d’en choisir quelqu’un de ce rang pour envoyer en ambassade vers les autres princes (Furetière). Le chiaoux baschi et l’officier qui marche à la tête des chiaoux et qui assiste au Divan, où il introduit ceux qui y ont des affaires ; il accompagne ordinairement les ambassadeurs à l’audience du grand Seigneur (Trévoux).
Chicane, chicaner, chicaneur
La chicane est l’abus des procédures judiciaires, quand on s’en sert pour dilayer (retarder), tromper ou surprendre les juges et les parties ; se dit encore de toutes les disputes et contestations qui se font dans les affaires et négociations civiles (Furetière). Chicaner, c’est faire des chicanes, comme aime à faire le chicaneur.
Chimystique
Traduction de l’adjectif néolatin chymisticus, qui associe chymicus [chimique] et mysticus [mystique ou mystérieux], que Guy Patin employait pour dénigrer sciemment les médicaments alchimiques ou leurs prescripteurs : v. note [9], lettre 911.

Chyle
Suc blanc qui se fait des viandes digérées. Les aliments se tournent en chyle dans le ventricule. les veines du mésentère préparent le chyle pour en faire du sang. Ce mot est grec, où il signifie suc (Furetière). Fluide qui, dans l'intestin grêle, est séparé des aliments pendant l'acte de la digestion, et que les vaisseaux dits chylifères pompent à la surface de l'intestin, et portent dans le sang pour servir à sa formation (Littré DLF). Dans la physiologie moderne, le chyle se mêle au sang, mais ne le forme pas à proprement parler.
Ci-devant, par ci-devant
Par le passé ; auparavant, jadis ou naguère.
Cicéro
Terme d’imprimerie : c’est le caractère entre le petit romain et le saint-augustin (Furetière). Ce mot n’est plus guère usité dans cette acception, les caractères étant généralement désignés par le nombre de points qui en exprime la force de corps ; mais il est employé pour indiquer en typographie une mesure de longueur, qui est de onze ou douze points, suivant les différentes imprimeries (Littré DLF). Le mot tire son origine de la hauteur du caractère employé par Swenheim et Lannartz dans leur édition des Épîtres de Cicéron, Rome, 1467 (L.J.).
Coche
Voiture posée sur quatre roues, qui est en forme de carrosse, à la réserve qu’il est plus grand et qu’il n’est pas suspendu. On s’en sert pour aller de ville en ville. On appelle aussi coche d’eau des bateaux publics et couverts qui servent à voiturer les personnes et les marchandises sur les rivières (Furetière). Les coches assuraient les services de poste ou messagerie, et par métonymie du contenant et du contenu, Guy Patin assimilait le coche à la poste.
Coction (coctio, coctionis en latin)
Le mot coction (du latin coctio, cuisson) avait deux sens bien distincts en médecine classique.

  1. La maladie « hippocratique » (à laquelle Guy Patin était aveuglément attaché) évoluait en trois phases : crudité, coction et crise ; cela correspondait respectivement aux préparatifs, à la maturation, et la résolution (guérison ou mort) du mal. Tout le travail du médecin consistait à accompagner et assister la nature dans ces trois phases, en évitant, si possible, que la dernière, la crise, fût funeste.

  2. La coction des aliments est l’ancien nom qu’on donnait à leur digestion. On en distinguait trois sortes, selon qu’elle se déroulait : 1. dans l’estomac, donnant naissance au chyle ; 2.  dans le foie, à l’origine l’urine ; et 3. dans la peau, à celle de la sueur (v. note [1], chapitre vii du Traité de la conservation de santé, pour l’explication détaillée qu’en a fournie Jean Fernel)..

Collation, collationner
En termes ecclésiastiques, c’est à la fois le titre, la provision d’un bénéfice (ce chanoine a eu sa collation du pape), et le droit, la puissance de conférer (la collation du pape est reconnue par toute l’Église).

En termes de Palais, c’est la représentation d’une copie à son original pour voir si elle est conforme, et l’acte qui en rend témoignage, que donne la personne publique qui a pouvoir de le faire (la collation vaut l’original).

C’est aussi le repas léger qu’on fait les jours de jeûne, au lieu du souper, et où on ne doit manger que des fruits ; en hâte en passant, quand on n’a pas le loisir de s’arrêter ; entre le dîner et le souper, que les enfants appellent goûter ; en allant coucher, un doigt de vin et des confitures ; mais aussi le repas copieux qu’on fait au milieu de l’après-midi ou la nuit (réveillon à la ville, médianoche à la cour).

Le verbe collationner englobe toutes ces actions ; à quoi s’ajoute, en librairie, vérifier s’il ne manque pas de feuillets à un livre (Furetière).
Collège royal de France, professeurs et lecteurs royaux
Vers 1530, François ier, sur les sollicitations de Guillaume Budé et de Jean du Bellay, institua à Paris, en dehors de l’Université, deux chaires libres, l’une de grec, l’autre d’hébreu. Le but était de donner gratuitement une instruction supérieure et publique, destinée à lancer dans les voies du progrès, avec l’impulsion d’une haute autorité, les activités diverses de l’esprit humain. Dès 1532, François ier porta le nombre des chaires à trois pour chacune des deux langues enseignées. Les professeurs de l’Université, qui vivaient du produit de leurs leçons, ne virent pas sans jalousie l’installation de ces nouveaux professeurs, dont les cours étaient gratuits et qui recevaient une dotation de la Couronne. Le syndic de la Faculté de théologie, Noël Beda, les cita devant le Parlement, et voilant sous un zèle fanatique les motifs intéressés de ses collègues, s’écria que, si l’on permettait d’enseigner publiquement le grec et l’hébreu, la religion allait être perdue et l’autorité de la Vulgate détruite. L’avocat G. de Marillac soutint, avec son talent habituel, la cause de la nouvelle institution et lui gagna les voix des juges. La Faculté, toutefois, ne se regarda pas comme définitivement battue et l’année suivante, les nouveaux professeurs, auxquels on donnait alors le titre de « liseurs du roi en l’Université » furent accusés d’incliner aux idées de la Réforme. On les fit comparaître devant le Parlement, qui leur défendit de lire et d’interpréter aucun livre de la Sainte Écriture en langue hébraïque ou grecque. Le roi, qui entendait protéger efficacement ses liseurs, empêcha que cette défense fût suivie d’effet et en 1534, il créa une nouvelle chaire, celle d’éloquence latine. Le Collège fut appelé alors Collège des trois langues. Si l’enseignement du grec et de l’hébreu était nécessaire en dehors de l’Université qu’absorbaient les querelles scolastiques, l’enseignement de la langue latine n’était pas moins utile pour détruire le latin barbare qu’on parlait dans les écoles.

François ier ne tarda pas à ajouter les sciences aux langues, et en 1545, outre les sept professeurs chargés de l’hébreu, du grec et du latin, on en comptait deux pour les mathématiques, un pour la médecine, un pour la philosophie ; ce qui portait à 11 le nombre total.

Le Collège des lecteurs royaux s’agrandit encore sous les règnes suivants. Charles ix y introduisit la chirurgie ; Henri iii, l’arabe ; Henri iv, la botanique et l’astronomie ; Louis xiii, le droit canon et la langue syriaque. Sous ce dernier roi, il reçut la dénomination de Collège royal et ne subit que des modifications de peu d’importance jusqu’à l’époque où Louis xv y fonda la chaire de littérature française.

Le Collège royal fut d’abord placé sous la direction du grand aumônier de France, qui nomma aux chaires jusque vers 1661. Malgré la guerre que lui fit d’abord l’Université, le Collège fit longtemps partie du corps universitaire. Vers la fin du xviie s., il en fut détaché et y fut de nouveau agrégé en 1766.

L’emplacement du Collège de France avait été désigné par François ier. Il devait s’élever sur les terrains de l’hôtel de Nesle. La mort du roi empêcha l’exécution de ce projet. On continua donc à faire les cours dans divers collèges de l’Université. Henri II ordonna qu’ils auraient lieu exclusivement dans le Collège de Cambrai ou des Trois-Évêques, et dans celui de Tréguier. Henri ivrevint au projet d’un local affecté spécialement aux cours et aux logements des professeurs royaux. Il avait pour eux une grande estime et ayant connu le peu de régularité avec lequel on soldait leurs honoraires, il fit dire à Sully : « J’aime mieux qu’on diminue de ma dépense et qu’on m’ôte de ma table pour payer mes lecteurs. » Son plan commença à être exécuté dans la première année du règne de Louis xiii et le bâtiment qui fut construit alors subsista jusqu’en 1774. Il se situait sur l’emplacement actuel, ancien terrain du Collège de Cambrai, au carrefour de la rue Saint-Jacques et de la rue des Écoles, en face de la Sorbonne (GDU xixe s.).
Collèges de Paris
La cinquantaine des collèges parisiens, à l’exception de celui de Clermont (aujourd’hui Louis-le-Grand) qui appartenait aux jésuites, dépendaient de l’Université et de la Faculté des arts, ou Collège des Quatre-Nations (France, Picardie, Normandie et Allemagne). La plupart ne servaient qu’à loger les étudiants. Ceux qui enseignaient aussi s’appelaient collèges de plein exercice ; ils étaient au nombre de neuf : Navarre (ancienne école polytechnique), la Marche (un peu plus bas que Navarre dans la rue de la Montagne-Sainte-Geneviève), Cardinal Le Moine, Beauvais (ou Presles-Beauvais), Montaigu, Grassins, Lisieux, Plessis, Harcourt (aujourd’hui lycée Saint-Louis). Il y avait aussi Sainte-Barbe, situé derrière Montaigu, où régentaient neuf professeurs d’humanités, un de grec et quatre de philosophie. Initialement collège de plein exercice, la Sorbonne était devenue le siège des facultés de théologie et de droit canonique.

De la sixième à la rhétorique (première), les études secondaires portaient sur la grammaire latine et l’explication des auteurs latins ; en seconde et en rhétorique on étudiait le grec, mais fort incomplètement au xviie s. (contrairement au xvie s.). Suivi ensuite à la Faculté des arts, le cours de philosophie durait deux ans. L’examen de maîtrise ès arts avait lieu en août à la fin de la seconde année de philosophie.
Collet (petit)
Homme qui s’est mis dans la réforme (morale), dans la dévotion, parce que les gens d’Église portent par modestie de petits collets, tandis que les gens du monde en portent de grands, ornés de points et de dentelles. Se dit quelquefois en mauvaise part des hypocrites qui affectent des manières modestes, et surtout de porter un petit collet (Furetière).
Colloquer
Placer : il avait de l’argent à mettre en rente, mais il l’a mal colloqué, il l’a donné à un insolvable. Signifie aussi mettre en rang, en ordre. Dans les instances d’ordre on colloque les créanciers suivant leur hypothèque, suivant leur privilège. Cet homme a été colloqué utilement, c’est-à-dire, il y a eu du fonds suffisant sur le prix de la chose vendue pour le payer. On dit en ce sens, on l’a colloqué au nombre des saints, pour dire on l’a canonisé. En astronomie, on a colloqué Saturne dans la plus haute région des planètes. En logique, sous quelle catégorie colloquez-vous une chose ? En morale, en quel rang colloquez-vous une telle vertu, un tel capitaine ? Signifie aussi établir : ce financier a bien colloqué tous ses enfants ; il a colloqué sa fille, il l’a mariée à un président ; il a colloqué son fils dans une telle charge (Furetière).
Colonel, colonelle
Le colonel de la ville était le régiment de la milice bourgeoise dans les villes, ou celui qui le commandait. Il y avait 16 colonels à Paris, et un colonel des archers de ville. De même, les colonelles étaient les unités de la milice bourgeoise. Aux armées, la colonelle était la première compagnie d’un régiment d’infanterie qui portait le drapeau blanc, et un colonel était l’officier qui commandait un régiment d’infanterie française (Furetière).
Commissaire, commission, commissionnaire
Un commissaire était le juge ou la compagnie à qui le roi attribuait un pouvoir particulier et extraordinaire de juger souverainement certaine nature d’affaires en des chambres ou des bureaux qu’il établissait à cet effet. « Les chambres de la marine, des francs-fiefs, la Chambre de justice, la Chambre royale sont composées de commissaires. On a fait juger ce prisonnier par des commissaires, on lui a donné des commissaires. Plusieurs grands seigneurs demandent des commissaires au Conseil pour juger leurs affaires particulières » (Furetière). Agissant sur ordre exprès donné sous forme de lettres (dite de commission), le commissaire était révocable à la volonté du roi, mais l’emportait sur les prérogatives des officiers ordinaires et des institutions locales. Les intendants étaient des commissaires (Descimond et Jouhaud). Le commissaire pouvait être un officier (par exemple un conseiller au Parlement) dont les fonctions et pouvoirs étaient temporairement élargis sur la volonté du pouvoir royal.

Employé seul, le mot commission s’appliquait à toute charge ou emploi qu’on donnait à des gens qu’on commettait pour avoir le soin de quelque chose ; dans les affaires commerciales, on les appelait commissionnaires. Une charge qu’on disait attribuée par commission était temporaire.

Composition
Capitulation, traité, accord où l’on fait grâce, ou remise : on a envoyé des otages et des articles pour demander composition, et rendre la place ; ses créanciers lui ont fait une bonne composition ; cet homme a eu une telle terre à bonne composition, à un prix honnête, à bon marché (Furetière).
Comptes (Chambre des)
Cour souveraine fort ancienne et qui va à côté du Parlement, où se rendent les comptes des deniers du roi, où on enregistre et où on garde ce qui concerne son Domaine. Il y a des présidents et maîtres des comptes en chaque semestre. Au grand bureau ils jugent et vérifient les lettres patentes, serments de fidélité, aveux et dénombrements. Au second bureau se jugent les comptes de tous les comptables. Les auditeurs des comptes sont ceux qui examinent les comptes et les quittances, et les rapportent au bureau, qui mettent les apostilles, arrêts, et finito (état final) des comptes. Il y a des correcteurs qui sont établis pour revoir et corriger les comptes quand il y a eu de l’erreur en leur jugement. Il y a des chambres des comptes établies à Paris, à Rouen, à Dijon, à Montpellier, en Provence, etc. Il y en a une à Blois pour l’apanage de Monsieur. Le compte du trésor royal, des parties casuelles, des recettes générales, etc. (Furetière).
Concussionnaire
Officier public coupable de péculat (détournement des deniers de l’État) ; peculator en latin.
Confection, confectio
Remède qui est de consistance d’électuaire (mélange de substances choisies) solide, composé de plusieurs drogues précieuses (Furetière). Partisan convaincu des médicaments simples, Guy Patin exécrait toutes les confections.

Confesseur du roi
Par les États de Philippe iii, Philippe ivle Bel, et Philippe v le Long, le grand aumônier et le confesseur du roi avaient chacun une chambre et logeaient en l’hôtel du roi ; par une ordonnance de Philippe le Long faite à Bourges le 16 novembre 1318, il est défendu à tous de s’ingérer à parler au roi durant qu’il entend la messe, hors à son confesseur qui lui peut parler seulement des choses qui regardent sa conscience et le salut de son âme ; et après la messe dite, avant que le roi parte de son oratoire, il lui peut parler de ce qui concerne le fait de la collation des bénéfices, et non d’autres choses. Par ordonnance de Philippe le Long, régent du royaume, faite à Saint-Germain-en-Laye, en juin 1316, il est déclaré que le confesseur du roi a pouvoir de commander les lettres aux bénéfices pour être signées et scellées. Il ajoute que l’institution et destitution des boursiers du Collège de Navarre étaient de la charge du confesseur du roi. Les confesseurs des rois de France ont été constamment des jésuites, depuis Henri iv. Avant lui, les dominicains et les cordeliers étaient presque toujours confesseurs des rois de France et de tous les grands de leur cour (Du Tillet in Trévoux).
Connétable de France
Officier de la Couronne qui est chef des maréchaux de France et le premier officier des armées. C’est le connétable qui porte l’épée du roi. Anciennement, dans les couronnements des rois, l’épée était baillée par le roi en garde au connétable à titre de fief et en hommage ; et ensuite, il la lui ceignait au côté, tant pour lui que pour tous les autres gentilshommes. L’origine de ce mot vient de Comes stabuli [comte de l’étable], parce qu’autrefois cette charge a été exercée par le grand écuyer de France, lequel on établit ensuite chef de toute la gendarmerie ; et c’est une dignité qui est venue des Goths, la seconde après le roi. Cette grandeur commença sous le règne du père de saint Louis, du temps duquel Matthieu de Montmorency fut fait connétable (Furetière). La dignité de connétable fut supprimée par Louis xiii en 1627. Le dernier connétable fut, de 1622 à sa mort en 1626, François de Bonne, duc de Lesdiguières. Il avait succédé à Charles d’Albert, duc de Luynes, favori omnipotent de Louis xiii, investi, disgracié et frappé d’une fièvre mortelle dans la même année, 1621. Le maréchal d’Estrée fit fonction de connétable au sacre de Louis xiv. Le Grand Condé (en 1649), puis Gaston d’Orléans (en 1650) revendiquèrent sans succès la charge de connétable durant la régence d’Anne d’Autriche.
Conseiller
« Titre qu’on donne à presque tous les officiers du Royaume. Il n’y a pas jusqu’aux notaires qui prennent maintenant la qualité de conseillers notaires et garde-notes du roi. On a expédié plusieurs brevets de conseiller, aumônier et prédicateur ordinaire du roi à des gens qui n’ont jamais fait cette fonction.

Conseiller se dit plus régulièrement des officiers royaux de judicature. Conseiller du roi en tous ses Conseils, ce sont les ministres, secrétaires d’État, contrôleur général des finances, et les conseillers d’État ordinaires et semestres.

Conseiller se dit aussi dans des juridictions souveraines. Conseiller en la Cour, signifie absolument un conseiller au Parlement de Paris : un conseiller des Enquêtes, en la Grand’Chambre, en la Cour des aides, au Grand Conseil, en la Cour des monnaies.

On le dit encore des présidiaux et sièges royaux : conseiller au Châtelet, au bailliage du Palais, aux Eaux et Forêts, au Trésor, à l’Élection, Conseiller de ville.

On divise encore les conseillers en conseillers d’Église [ou conseillers clercs], qui sont ecclésiastiques, et en conseillers laïques, qui sont les séculiers.

On appelle conseiller honoraire, un conseiller qui a servi 20 ans, qui est vétéran et qui s’est défait de sa charge, qui a droit d’entrer et d’opiner aux causes d’audience. Il y a aussi des gentilshommes qui sont conseillers honoraires, qui ont droit d’entrer au Parlement.

Conseiller-né est une qualité attribuée à certaines dignités, qui leur donne entrée dans le Parlement. L’archevêque de Paris est un conseiller-né du Parlement  » (Furetière).

Les conseillers formaient la belle partie des clients (de la pratique) de Guy Patin et lui procuraient d’abondantes informations politiques.

Consorts
Terme relatif, qui se dit au Palais de ceux qui sont engagés dans la même affaire, qui ont le même intérêt (Furetière).
Contremander, contremandement
Envoyer à celui qu’on avait mandé un ordre contraire, un contremandement, afin qu’il ne fasse pas une chose qu’on lui avait ordonnée (Furetière).
Controuver
Inventer quelque calomnie, quelque imposture : cet avocat n’a plaidé que des faits controuvés, inventés sur le barreau ; voilà un hâbleur qui ne nous dit que des choses controuvées, des contes inventés à plaisir ; il faut que ce soit un démon pour avoir controuvé une si noire calomnie (Furetière).
Contumace
Refus de comparaître, de se présenter en justice. Il se dit au civil aussi bien qu’au criminel (Furetière).
Cordelier, franciscain
Religieux de l’Ordre de saint François (franciscains), qui a une ceinture de corde ; autrement un frère mineur. Les cordeliers sont ainsi appelés, à cause de la corde dont ils sont liés ; et ce nom leur fut donné en la guerre de saint Louis contre les Infidèles, en laquelle les frères mineurs ayant repoussé les Barbares, quand le roi demanda leur nom, on lui répondit que c’était des gens de corde liés (Furetière). Les cordeliers étaient l’un des quatre ordres mendiants, avec les carmes, les jacobins et les augustins]
Corps de marchands
On appelle à Paris les six corps des marchands, les anciennes communautés des marchands qui vendent les plus notables marchandises. Les premiers sont les drapiers, chaussetiers, les seconds sont les épiciers, les troisièmes les merciers, les quatrièmes les pelletiers qui étaient autrefois les premiers, mais qui ont vendu leur primogéniture aux drapiers, les cinquièmes sont les bonnetiers, et les sixièmes les orfèvres. Les marchands de vin ont voulu former un septième corps ; mais il n’est point reconnu des autres (Furetière).
Coureur
Deux sens employés dans la correspondance de Guy Patin peuvent mériter explication :

  1. en termes de guerre, les coureurs sont des cavaliers détachés pour battre l’estrade (envoyer des cavaliers en reconnaissance), pour aller aux nouvelles et à la découverte des ennemis ; on le dit aussi de ceux qui sortent d’une garnison pour picorer ;

  2. en mauvaise part, un coureur est celui qui court avidement après certaines choses qu’il souhaite (Furetière).

Courtisan, courtisane
« Homme qui hante la cour, qui est à la suite du roi. Ce seigneur est un sage courtisan, un habile, un rusé courtisan. Les courtisans ne doivent pas dire tout ce qu’ils pensent. Se dit aussi de ceux qui rendent des respects ou des assiduités à de grands seigneurs, pour en obtenir quelque avantage. Ceux qui ont bien des emplois à donner, à procurer, ne manquent point d’avoir beaucoup de courtisans. On nomme aussi courtisans, les amants des dames, ceux qui leur content des fleurettes. Cette femme riche a beau être laide, elle ne manque point de courtisans qui la veulent épouser » (Furetière). Trop entier et abrupt pour en être un, Guy Patin méprisait les courtisans (mais non sans parfois laisser poindre un grain de jalousie).

Courtisane : « terme un peu honnête pour nommer une personne entretenue qui gagne sa vie à faire l’amour » (ibid.).

Couteau pendant
Homme qui en accompagne toujours un autre ; locution tirée de l’habitude d’avoir, en certaines professions, un couteau pendu à son côté. Un tel est toujours avec lui, c’est son couteau pendant (Littré DLF).
Coyon, coyonnerie
Qui fait profession de lâcheté, de poltronnerie. Les bouffons de la comédie se piquent d’être de grands coyons. Les capitans qui font tant les braves sont toujours de grands coyons. Ce mot vient du latin quietus, parce que les poltrons n’aiment pas à se donner de la peine. La coyonnerie est la lâcheté, la poltronnerie. C’est aussi un discours impertinent, plaisant, extravagant. Les charlatans amassent et amusent le peuple en leur disant mille coyonneries (Furetière).
Crasse
Qui est épais, grossier, visqueux. Ce sont les humeurs crasses qui font des obstructions dans le corps, qui causent la plupart des maladies. La chimie s’applique à séparer des corps les parties les plus subtiles d’avec les plus crasses (Furetière).
Crieur
Se dit de ceux qui vendent, ou qui achètent des menues marchandises en criant par les rues : un crieur de gazette, un crieur de vieux passements d’argent, une crieuse de vieux souliers et chapeaux (Furetière).
Croc (pendre au)
Croc se dit de la cheville d’un râtelier, ou d’autre chose qui avance en pointe, où on peut attacher ou pendre quelque chose ; et c’est en ce sens qu’on dit qu’un procès est pendu au croc, quand on ne le poursuit plus ; qu’un homme a pendu les armes au croc, quand il a cessé d’aller à la guerre (Furetière).
Crocheteur
Qui crochète des portes, des serrures. On a pendu le serrurier avec un écriteau au dos, Crocheteur de portes. Crocheteur, signifie aussi un portefaix qui transporte des fardeaux sur des crochets : ce laquais est trop chargé, on lui a donné la charge d’un crocheteur. Crocheteur, se dit aussi par extension, des gens de basse condition qui font des choses indignes des honnêtes gens : il n’appartient qu’aux crocheteurs de battre leurs femmes ; on nous a donné à ce repas du vin de crocheteur ; ces gens-là se sont dit des injures de crocheteur (Furetière).
D’autant que
Étant donné que, dans la mesure où, outre que.

Damoiselle, damlle, Mademoiselle, Mlle
Titre d’honneur qu’on donne aux filles et aux femmes des simples gentilshommes, qui est mitoyen entre la madame bourgeoise et la madame de qualité (Furetière). Mademoiselle ou damoiselle convenait pour une femme mariée encore jeune. Mademoiselle votre maîtresse se disait particulièrement d’une fille qu’on recherchait en mariage.

Depuis le premier mariage de Gaston d’Orléans avec Mademoiselle de Montpensier (en 1626), Mademoiselle était le titre princier abrégé qu’on attribuait à la fille de Monsieur, frère puîné du roi.
Débauche, débaucher, débauché
Au sens premier, faire une débauche (dérivé du vieux mot débau, arrêt du travail [Littré DLF]), signifiait ne pas travailler. Comme le libertinage, la débauche pouvait être : soit vulgaire ou scandaleuse (abandon au vin, aux femmes, au jeu et aux autres vices [Furetière]) ; soit érudite, spirituelle ou philosophique (petite réjouissance qui se fait entre honnêtes gens, d’un repas, d’une promenade, d’une partie de divertissement (ibid.).

Ce second sens était celui qu’entendait Guy Patin en parlant de ses propres débauches. On trouve la même touche ironique dans une lettre française de Joseph Scaliger à Claude Dupuy (Ép. fr., 11 mai 1576 ; publiée en 1879 [xi, page 48], mais que Patin pouvait avoir vue chez ses amis les Dupuy, fils de Claude) : « il n’y a homme au monde plus débauché que je suis. »
Deçà, delà
Deçà et delà étaient au xviie s. deux adverbes de temps et de lieu de sens contraires, servant à marquer la proximité et l’éloignement. « De deçà » veut dire de maintenant (temps) ou d’ici et de ce côté-ci (lieu) ; et « de delà » (ou « delà » seul), après et ensuite, en conséquence, ou là-bas, chez vous, et de l’autre côté. « Deçà et delà » signifie ici et là, de ce côté-ci et de ce côté-là.

Décréditer
Perdre sa réputation, son estime, son crédit : il ne faut qu’une lâche action pour décréditer un homme de guerre pour toute sa vie ; un méchant livre décrédite un auteur ; le moindre soupçon de banqueroute décréditait autrefois un marchand, un banquier (Furetière).
Décrépit
Qui est fort vieux, qui radote. C’est un vieillard décrépit, en un âge décrépit, qui n’est plus capable d’aucune affaire (Furetière).
Décrier, décri
Au sens propre, décrier signifie défendre par ordonnance ou cri public une monnaie, des dentelles, des manufactures : on a décrié les manufactures étrangères pour mieux débiter celles du pays ; on a décrié cette monnaie parce qu’il s’y en était mêlé de fausse. Au sens figuré, c’est ôter l’honneur, la gloire de quelqu’un : cet homme a bien des ennemis qui le décrient ; les malcontents tâchent toujours à décrier le gouvernement ; on a beau être absous d’une accusation, elle décrie toujours un homme (Furetière). Le décri des monnaies est leur dévaluation.
Déférer
Rendre des respects, des soumissions à quelqu’un, se ranger à son avis, lui complaire (Furetière).
Défiler
En termes de guerre, se dit lorsque des soldats étant assemblés en un corps, sont obligés d’aller à la file et l’un après l’autre, pour se mettre en marche et passer par des lieux serrés. L’armée commença à défiler par la gauche et était contrainte de défiler à chaque bout de champ, à cause des marais et des bois (Furetière).
Déniaiser
Tromper quelqu’un, le rendre défiant, soigneux et vigilant : les filous de Paris ont bientôt déniaisé les provinciaux, leur ont bientôt escroqué tout leur argent ; le chat a déniaisé la cuisinière, lui a attrapé une perdrix qu’elle avait négligé de serrer (mettre à couvert). Se dit aussi de ceux qui par le commerce du monde acquièrent quelque habileté, quelque expérience : cet écolier s’est bien déniaisé depuis qu’il est sorti du collège, c’est lui maintenant qui déniaise les autres ; il est bien guéri du niais (Furetière).
Denier (numéral)
Les intérêts s’exprimaient souvent en denier par rapport à la somme prêtée, indiquée par un nombre numéral. Le denier douze représentait un denier d‘intérêt pour douze prêtés, soit 8,33 ,pour cent ; le denier dix équivalait à 10 pour cent ; etc.
Dépayser
Faire sortir quelqu’un de son pays natal ; corriger quelqu’un des défauts, de l’accent, des mœurs du pays ; faire changer de pays à un homme qui y est habitué pour lui faire perdre ses connaissances, pour le mettre en lieu où il soit déguisé et inconnu (Furetière).
Dépit
Colère qui donne du dégoût d’une chose contre laquelle on se fâche (Furetière).
Déportement
Conduite et manière de vivre. On le dit en bonne et en mauvaise part, des bonnes ou mauvaises mœurs (Furetière).
Dépouille
Vêtements, habits dont on est ordinairement vêtu. Un homme en mourant laisse sa dépouille, son linge, ses habits, sa garde-robe à son valet de chambre, à sa garde. On l’étend quelquefois à ses meubles et à son bien. Se dit aussi de la récolte des fruits de la terre (Furetière).
Député
Représentant ou émissaire désigné (commis) par un corps (parlement, faculté, clergé, conseil, etc.) pour le représenter dans une négociation, une assemblée ou une cérémonie.
Deux couronnes
Sous ce vocable, Guy Patin et ses contemporains entendaient la France et l’Espagne.
Devers
Préposition relative au temps ou au lieu dont on parle : devers [vers] la Toussaint, je vous paierai ; il a bien plu devers [du côté de] Paris ; il a retenu cet argent devers lui, ou par devers lui [en sa possession] (Furetière).
Dieu aidant
S’il plaît à Dieu ; le Dictionnaire de l’Académie range cette expression dans le style familier.
Dieu tout-puissant
Choix de traduction pour Deus optimus maximus [Dieu qui est le meilleur et le plus grand] (D.O.M.), synonyme de Deus omnipotens.

Diligence
Activité qui nous fait porter avec promptitude à exécuter notre devoir ou nos desseins : ce courrier a fait grande diligence, il est arrivé à Rome en sept jours ; il a fait tenir ma lettre en diligence. Diligence se dit aussi de l’exactitude qu’on a à faire quelque recherche (Furetière). Guy Patin n’a jamais employé le mot diligence pour parler de « certaines commodités de bateaux ou de carrosses bien attelés qui vont en quelques lieux de grand trafic en moins de temps que les autres : on va de Paris à Lyon par la diligence, et on y arrive en cinq jours » (ibid.).
Disputation, Disputatio, dispute, disputer
En latin, disputatio est l’« action d’examiner une question dans ses différents points, en pesant le pour et le contre » (Gaffiot). Devenu rare et académique, voire pédant, le mot disputation désignait jadis la discussion ou dispute d’une thèse (dissertation) ou d’un acte du doctorat. On utilise aujourd’hui soutenir, discuter ou débattre pour disputer, et soutenance, discussion ou débat contradictoire pour dispute. Par métonymie, disputation était aussi synonyme de thèse. La passion de Guy Patin pour ce genre d’écrits polémiques explique la fréquence du mot disputatio sous sa plume latine, et dans les titres des ouvrages qu’il recherchait.
Docteur
Titulaire du doctorat, plus haut degré décerné par une Faculté supérieure (théologie, droit canonique, ou médecine à Paris), qui autorisait à enseigner (régenter) et examiner les étudiants. Le Collège de la Faculté de médecine de Paris comptait autour de 120 docteurs régents. Un docteur de Sorbonne était gradué en théologie catholique.

Au xviie s., contrairement à aujourd’hui, on n’avait pas coutume d’attacher en France le titre de docteur au nom d’une personne (mais on le faisait ailleurs, en Suisse par exemple). Ainsi pour un médecin, on ne disait pas « le docteur X », mais « Monsieur ou Maître X, docteur de la Faculté de médecine ». Dans les rares cas où Guy Patin a employé la première tournure (« son docteur thériacal », « le docteur Meyssonnier » ou « le docteur Bourdelot »), c’était péjorativement pour se moquer d’un charlatan ou d’un confrère dont il jugeait l’esprit mal timbré ou la science indigente. Dans les quelques lettres qu’on a de lui, Charles Spon n’a généralement pas respecté cet usage, préférant apparemment se conformer à la mode allemande de ses origines.

Faire le docteur est à prendre pour faire le savant : « On dit ironiquement et à contresens des ignorants, c’est un grand docteur, un docteur en soupe salée » (Furetière).

Doctrine
Savoir, érudition, ce qu’on a appris en lisant, ou voyant le monde (Furetière). En philosophie et en religion, on le dit aussi de ce qui est contenu dans les livres et des sentiments particuliers des auteurs, ou des sociétés : doctrine chrétienne se dit souvent de ce qu’on appelle le catéchisme ; la doctrine qu’enseignent les calvinistes est condamnée par l’Église (Trévoux).

Guy Patin tenait pour sacrées, et presque pour des préceptes infaillibles, les antiques doctrines d’Hippocrate et de Galien, fondements de la médecine dite dogmatique.

Doint
Ancienne forme du verbe donner, à la troisième personne du singulier du subjonctif : Dieu nous doint sa paix.
Douaire, douairière
Une douairière est une veuve qui jouit de son douaire, c’est-à-dire des biens que le mari assigne à sa femme en se mariant, pour en jouir par usufruit pendant sa viduité (son veuvage), et en laisser la propriété à ses enfants (Furetière).

Mme la Princesse douairière était Charlotte-Marguerite de Montmorency, veuve du prince de Condé et mère du Grand Condé.

Douane
« Lieu où on paye les impôts et les taxes sur les marchandises. […] Il faut que tous les rouliers viennent à la douane faire déclaration de leurs marchandises. […] On le dit aussi du droit que payent les marchandises : on a confisqué ces étoffes faute d’avoir payé la douane. Il se dit aussi des droits qui se lèvent par l’ordonnance des juges » (Furetière).

Draper
Critiquer, censurer quelqu’un : quand les auteurs écrivent les uns contre les autres, ils sont sujets à se draper. En ce sens il vient d’un vieux mot français drappier qui signifiait pinceur, railleur, parce qu’on pinçait les draps en les préparant : de là vient qu’on a dit draper pour dire tourmenter quelqu’un par des railleries (Borel). D’autres croient que ce mot vient de la Farce de Pathelin où l’avocat dupe un drapier en l’amusant de paroles (Furetière).
Effigie
L’exécution par (ou en) effigie est celle d’un criminel qui fait défaut (contumax), dont on n’a pu faire la capture mais qu’on a condamné. On pend un tableau à une potence, où est dépeint le criminel, la qualité du supplice ; et le jugement de condamnation est écrit au bas (Furetière). Charles Patin, second fils de Guy, fut pendu de la sorte le 15 mars 1668, en place de Grève à Paris pour détention et commerce de livres interdits. Le bûcher et la roue pouvaient aussi se pratiquer par effigie.
Élabourer
Travailler avec soin et application à quelque ouvrage ; il est peu en usage, si ce n’est au participe : tout ce qui sort des mains de cet artisan, de ce peintre, est bien élabouré, bien fini (Furetière).
Électeurs (du saint Empire germanique)
Prince ou évêque appelé à concourir à l’élection de l’empereur d’Allemagne. En 1024, avec la mort de l’empereur Henri ii, se trouva éteinte la Maison de Saxe qui, depuis Henri ier l’Oiseleur (régnant de 919 à 936), avait occupé héréditairement le trône impérial. Il fallut recourir à l’élection pour désigner un successeur. Les évêques, plus que personne, étaient intéressés à faire cesser l’interrègne ; à leur instigation, se réunit une assemblée pour choisir un nouvel empereur : ce fut Conrad ii le Salique, élu roi de Germanie et roi des Romains à Mayence en 1024. Le procédé s’organisa et s’établit, au fil des successions à décider. En 1338, la diète, rassemblée à Francfort, décida que la majesté et l’autorité impériales seraient conférées par le seul suffrage des principaux électeurs et que l’élection serait décidée par la pluralité (majorité) des voix. En 1356, la diète de Nuremberg promulgua la Bulle d’or qui maintenait les électeurs au nombre de sept, en l’honneur des sept chandeliers de l’Apocalypse : trois appartenaient à l’Église, les électeurs de Mayence, de Cologne et de Trêves ; et quatre étaient laïques, l’électeur roi de Bohême, l’électeur comte palatin, l’électeur duc de Saxe, et l’électeur margrave de Brandebourg, qui portait le titre de Grand électeur. Outre leur droit d’élire l’empereur, les électeurs jouissaient d’un immense pouvoir sur leurs provinces, véritables états dans l’état, et prenaient part au gouvernement du saint Empire germanique. Ils recevaient le titre de sérénissimes. Les questions de préséance entre électeurs ou dans leurs rapports avec la diplomatie étrangère ont soulevé bien des difficultés. Le légat du pape avait seul le pas sur eux, mais ils avaient le pas sur tous les rois, excepté sur ceux de France. Leurs ambassadeurs avaient le pas sur ceux des républiques. Les électeurs recevaient le titre d’excellence et décidaient à leur gré des formules honorifiques que l’on devait accorder aux princes étrangers. Après la Réforme de Luther, les électeurs se scindèrent en deux partis, catholiques et protestants, alors que l’empereur restait catholique ; ce fut l’un des germes de la guerre de Trente Ans. Après la paix de Westphalie qui mit fin à ce conflit (1648), on remit l’électeur palatin en possession de tous ses domaines, excepté le haut Palatinat (Bavière), pour lequel on créa en même temps une huitième dignité électorale, à laquelle était attachée la charge de grand trésorier. L’empereur Léopold ier (élu en 1657 et mort en 1705) établit un neuvième électorat, celui de Hanovre (GDU xixe s.).
Emballeur
Celui dont le métier est d’emballer des marchandises. Les emballeurs à Paris sont la plupart crocheteurs. Se dit figurément des hâbleurs, qui disent plusieurs choses contre la vérité, qui inventent plusieurs histoires à plaisir et qu’ils débitent aux crédules (Furetière).
Embrasser
Serrer dans les bras.

Émouvoir, ému, émotion
Ébranler pour mettre en mouvement, raviver ou arracher. Se dit particulièrement en cas de séditions (émotions) et de querelles : le peuple commençait à s’émouvoir à la publication de cet édit, il est plus difficile à calmer qu’à émouvoir ; c’est untel qui a ému la noise, qui a commencé la querelle ; de légers sujets ont souvent ému de grandes guerres (Furetière).
Empaumer
C’est proprement recevoir une balle (éteuf) dans le milieu de la paume de la main ou du battoir (raquette) et la pousser fortement ; signifie figurément se rendre maître de l’esprit de quelqu’un (Furetière).
Empourpré
Terme choisi pour traduire le mot latin purpuratus que Guy Patin utilisait pour dénigrer les cardinaux (dont la robe était pourpre).

Émulation
Noble jalousie entre les gens de savoir ou de vertu, qui les fait disputer à qui acquerra le plus de gloire. L’émulation est souvent cause des grandes actions (Furetière).
En bref
Dans peu de temps, bientôt.
En çà
Depuis deux ans en çà, c’est-à-dire, ces deux dernières années (Furetière).
En cas que
Supposé que.
En un mot
Locution adverbiale signifiant pour conclusion et dans une transaction commerciale, sans marchander, payé comptant.
Énarration, enarratio
Vieux mot français que Littré DLF définit comme synonyme de narration, mais qui, en latin, signifie explication, commentaire (sens où Guy Patin l’employait en français).
Énétique, eneticus
Scélérat : jeu de mots entre émétique (emeticus, qui fait vomir, du grec εμεσις, vomissement) et énétique, néologisme construit sur enecare, assassiner. Pour dénigrer le vin émétique d’antimoine, Guy Patin le qualifiait d’énétique ou d’hérétique.

Enseignes
Marques (preuves, garanties) qu’on se donne réciproquement pour connaître la vérité d’une chose, pour n’être point trompé : je vous ai vu en telle occasion, aux enseignes que vous y fûtes blessé ; ne donnez point ce dépôt qu’à ceux qui le viendront demander à telles et telles enseignes ; je crains qu’on ne le vienne prendre à fausses enseignes ; vous ne m’avez pas donné de bonnes enseignes (Furetière).
Entrées
Impôt qu’on lève sur les marchandises qui entrent dans une ville, dans un royaume : on a proposé autrefois à Sienne de doubler les portes de la ville pour doubler ses revenus qui consistaient aux entrées ; la traite foraine est le droit qu’on fait payer aux marchandises à l’entrée et à la sortie du royaume ; l’entrée du vin se paie aux portes (Furetière).
Épices
« S’est dit particulièrement autrefois du sucre, des dragées et des confitures qu’on donnait en présent aux juges, quand ils avaient fait gagner un procés, et cela par pure gratification. Aujourd’hui se dit au Palais des salaires que les juges se taxent en argent au bas des jugements, pour leur peine d’avoir travaillé au rapport et à la visitation des procès par écrit » (Furetière). Pour un juge, épicer voulait dire se taxer des épices trop fortes pour ses jugements. V. note [15], lettre 544, pour le sens plus commun (mais restreint) d’aromates.
Épigramme
Espèce de poésie courte qui finit par quelque pointe ou pensée subtile (Furetière). Épigramme a été longtemps de genre incertain ; aujourd'hui il est féminin décidément (Littré DLF) ; Guy Patin a indifféremment utilisé le féminin et le masculin.
Épitaphe
Éloge en prose ou en vers, parfois satirique, sans aucun dessein de le mettre sur le tombeau (Furetière). Au xviie s., épitaphe était indifféremment des deux genres (Littré DLF) ; Guy Patin et ses contemporains employaient volontiers le masculin.

Épitomé
L’abrégé, le précis, le principal d’un livre qui traite amplement d’une matière (Furetière) ; s’écrit et se prononce toujours épitomé (Littré DLF).
Épreuve
Premières feuilles qu’on tire des formes d’imprimerie pour les corriger. Cet auteur veut toujours avoir deux épreuves pour rendre son livre plus correct (Furetière). Guy Patin et Charles Spon ont consacré bien du temps à revoir les épreuves des auteurs et des imprimeurs qu’ils estimaient.
Esclandre
Vieux mot qui signifiait autrefois un accident fâcheux qui troublait et interrompait le cours d’une affaire. Un triste accident n’arrive jamais sans éclat (Furetière).
Escrime
Perdre son ou ses escrimes, c’est perdre son temps, ses peines.
Estafier
Grand valet de pied qui suit un homme à cheval, qui lui tient l’étrier (Furetière). Guy Patin affublait volontiers les chirurgiens du surnom d’estafiers de Saint-Côme.
Et à tant
En voilà assez.
Étrange, étrangement
Ce qui est surprenant, étranger, rare, extraordinaire, pour l’adjectif ; extraordinairement, excessivement, pour l’adverbe (Furetière).
Événement
Issue, succès bon ou mauvais de quelque chose : personne ne peut répondre des événements, ils sont en la main de Dieu ; les plus sages conseils sont souvent suivis de mauvais événements ; un vendeur est garant de l’événement du procès d’éviction qu’on fait à l’acheteur. On dit aussi en tout événement, pour dire en tout cas, ou au pis aller (Furetière).
Évoquer
Tirer une cause d’un tribunal à un autre (Académie) ; attirer à soi la connaissance d’une affaire (Furetière) ; ce mot se dit des juges supérieurs qui tirent à eux un procès pendant devant un juge de leur ressort (Richelet).
Exempt
Officier établi dans les compagnies des gardes du corps, dans celles des prévôts et autres officiers. Ils commandent en l’absence des capitaines et lieutenants et ils sont ordinairement employés à faire des captures ou autres exécutions à la tête de quelques gardes ou archers (Furetière).
Expectorer, expectoration, expectorant
Cracher ce que la toux ramène, pour dégager la poitrine de ce qui encombre les bronches. Un médicament expectorant (anacarthique) favorise cette salutaire expulsion.
Exploit
Acte et expédition que font les sergents : un exploit d’assignation ; un exploit de demande doit être libellé ; un exploit de saisie et d’exécution ; exploit d’emprisonnement, d’offres, de sommation. Les exploits doivent être signés du sergent et de deux records (témoins), et contrôlés (Furetière).
Extoller
Latinisme (extollere) pour élever, exhausser, rehausser, louer (Trévoux).
Fâcheux
Qui donne de la fâcherie, de la peine et de la difficulté. Il se dit des personnes : c’est un homme fâcheux, un esprit fâcheux, qui est fantasque, bourru, avec qui on ne peut vivre. Il se dit aussi des choses : les Alpes sont fâcheuses à traverser ; les chevaux sont fâcheux à dompter, les rossignols à nourrir (Furetière).
Factum
Mémoire imprimé qu’on donne aux juges, qui contient le fait du procès raconté sommairement, où on ajoute quelquefois les moyens de droit (Furetière) ; autrefois on prononçait facton (Littré DLF).
Facture
État (relevé) des marchandises qu’un facteur (commissionnaire) envoie à son maître, ou un marchand à un autre marchand (Furetière).
Fanfreluches
S’est dit originairement des flammèches qui s’élèvent en l’air quand on brûle des feuilles. On l’a étendu par ressemblance aux choses mondaines qui n’ont que de la vanité et un faux éclat (Furetière). Guy Patin ne s’est servi de ce mot que pour brocarder les ornements de la papauté.
Faquin
Crocheteur, homme de la lie du peuple, vil et méprisable. Il y a beaucoup de grands seigneurs qui ont des âmes de faquins. Ce mot vient de l’italien facchino, qui signifie porte-faix (Furetière).
Farine
Synonyme d’aloi (qualité) dans l’expression « ce sont des gens de même farine », ejusdem farinæ en latin, pour dire que « ce sont des vauriens, des personnes également prêtes à mal faire ; on dit aussi, par un terme de mépris, je ne veux point avoir affaire à des gens de cette farine » (Furetière). On dit aujourd’hui « du même tonneau ».

Fatras
Ce mot s’est dit originairement d’une sorte de vers anciens, où un vers était souvent répété ; mais maintenant, il signifie seulement bagatelles, choses vaines et inutiles qui ne sont d’aucune valeur (Furetière).
Faudrai, faut
Manière pure de conjuguer le verbe faillir au futur. Pour éviter la confusion avec le verbe falloir, les trois personnes du présent au singulier (je faux, tu faux, il faut), le futur (je faudrai, tu faudras, etc.) et le conditionnel (je faudrais, etc.) vieillissent, et c’est dommage. Les personnes qui ont besoin du futur ou du conditionnel et qui en ignorent la véritable forme, les composent suivant la règle des verbes en ir, et disent : je faillirai, je faillirais ; c’est un barbarisme, mais qui a chance de s’introduire et de devenir correct (Littré).
Fauteur
Celui qui appuie, favorise, protège ; souvent pris en mauvaise part : fauteur de rebelles, d’hérétiques, etc.
Faux-saunier
Le saunier est un ouvrier qui fait le sel ou qui en trafique. On l’appelle faux-saunier quand il le débite en fraudant les droits du roi. Le faux sel est celui qui est vendu secrètement par des particuliers qui ont fraudé les droits du roi (Furetière).
Féal
Fidèle.
Ferme
Bail ou louage qu’on fait d’héritages ou de toutes sortes de droits, moyennant certains prix ou redevances qu’on paye tous les ans au propriétaire : la ferme d’une telle seigneurie, d’un tel champart, d’une telle forge. On le dit aussi des droits du roi : la ferme du domaine, la ferme des aides, des gabelles, etc. (Furetière).
Ferré
On dit qu’un homme est bien ferré, est ferré à glace, pour dire, qu’il est extrêmement fort sur la matière sur laquelle on l’attaque (Furetière).
Feuillant
Ordre de religieux vêtus de blanc et déchaussés, qui vivent sous l’étroite observance de la règle de saint Bernard. Ce nom est venu d’une réforme de cet ordre qui a été premièrement faite en 1586, en l’abbaye de feuillants à cinq lieues de Toulouse par Jean de La Barrière qui en était abbé (Furetière). Le roi Henri iii lui fonda un couvent à Paris, au faubourg Saint-Honoré à côté du jardin des Tuileries. Le même La Barrière créa, avec Anne de Polastron de La Hillière, l’ordre des feuillantines dont le couvent parisien était situé au faubourg Saint-Victor.
Feuille
Morceau rectangulaire de papier à imprimer d’une grandeur variable, coupé carrément (à angles droits) et qui se plie en un nombre variable de parties dites feuillets formant un cahier. Il y a 25 feuilles dans une main de papier (Littré DLF). La feuille a divers formats : colombier (63x90 cm), jésus (55x70 cm), raisin (50x65 cm), etc.

  • Pliée en deux, la feuille donne 2 feuillets (4 pages par cahier) de format in‑folio (in‑fo ou in‑2o) dit naturel, dont la hauteur va de 36, petit in‑fo, à 63 cm, grand in‑fo).

  • L’assemblage de trois feuilles pliées en deux aboutissait à un cahier de 12 pages (6 feuillets), qu’on appelait in‑fo composite, bien qu’il s’agît logiquement d’un in‑6o, mais ce terme n’avait pas cours.

  • Pliée en quatre, la feuille donnait des cahiers de 4 feuillets (8 pages) in‑quarto (in‑4o) dont la hauteur pouvait aller de 23 à 45 cm ; en huit (8 feuillets, 16 pages), c’était l’in‑octavo (in‑8o, 18 à 31,5 cm) ; en seize (16 feuillets, 32 pages), l’in‑seize (ou in‑sexto decimo, in‑16o, 11,5 à 22,5 cm).

  • En pliant la feuille en trois dans le sens de la largeur, puis en deux dans le sens de la hauteur, on obtenait l’in‑12, dont chaque cahier comptait 12 feuillets (24 pages).
  • Et ainsi de suite pour les plus petits formats (jusqu’au rarissime in-cent-vingt-huit).

Quel que fût leur format, les feuilles d’un livre étaient numérotées (en bas à droite du recto de la première feuille du cahier) à l’aide d’une signature, figurée par une lettre majuscule (A, B, C…, A1, B1, C1… ou Ai, Bi, Ci…) ; pour les pages impaires suivantes du même cahier (hormis dans l’in‑fo naturel) la signature était affectée d’un indice numérique arabe (A2, A3…) ou romain minuscule (Aii, Aiii…). Une fois le premier alphabet épuisé, les signatures étaient doublées (Aa, Bb, Cc…), puis triplées (Aaa, Bbb, Ccc…), etc., selon le nombre des cahiers qui composaient le volume. L’alphabet de signature ne comptait que 23 lettres parce qu’on en excluait J et V (assimilés à I et U), et que W n’existait pas en français. En divisant par deux le nombre de pages qui séparent deux signatures alphabétiques consécutives (par exemple A et B, A1 et B1, ou Ai et Bi), on connaît la taille du cahier, et donc le format du livre (qui doit figurer dans sa référence). Les pages d’un livre étaient soit toutes numérotées ; soit numérotées une fois sur deux (ce qui mène à distinguer le recto, ro, du verso, vo) ; soit non numérotées, dans les ouvrages les plus anciens (ce qui contraint à se repérer sur les signatures).

Le bibliophile pourra notamment feuilleter La Science pratique de l’Imprimerie, contenant des instructions très faciles pour se perfectionner dans cet art… (Saint-Omer, Martin Dominique Fertée, 1723, in‑4o illustré de 292 pages). Je remercie M. Roch de Coligny, expert en livres anciens, pour les pertinentes corrections qu’il m’a communiquées, en septembre 2021, sur ma première rédaction de cet article.

En France, les libraires vendaient les livres non reliés (en blanc) ; s’il y manquait des pages, il s’agissait d’une feuille entière.

Fièvre
Au temps de Guy Patin, faute de thermomètre médical (vulgarisé au xixe s.), on ne jugeait pas la fièvre sur la température mesurée du corps, mais sur sa chaleur perçue, l’accélération du pouls, la prostration et la survenue de frissons. Aujourd’hui, la fièvre n’est plus qu’un symptôme révélateur d’un grand nombre de maladies : entités spécifiques guidant le raisonnement médical, avec chacune un début, une fin, des signes, un diagnostic, un pronostic, des accidents, des mécanismes, et souvent une cause dont la combinaison et l’enchaînement lui sont propres ; à l’image d’une pièce de théâtre, comme je l’enseigne à mes étudiants. La fièvre est une manifestation de l’inflammation, qui est une réponse de l’organisme à une agression, le plus souvent infectieuse, mais aussi tumorale ou immunitaire. Au xviie s., et depuis l’Antiquité, les médecins considéraient la fièvre tantôt comme un symptôme, et tantôt comme un ensemble de maladies en soi (« les fièvres » qui représentaient la plus grande partie des « maladies internes », sinon toutes).

Une fièvre qui dure plus d’une journée peut être continue ou intermittente, c’est-à-dire faite de paroxysmes périodiques entrecoupés de rémissions plus ou moins complètes. Suivant la durée des rémissions on distinguait divers types d’intermittentes, qu’on attribuait à un mécanisme humoral spécifique (à prédominance humide, sèche, chaude ou même froide), avec de très nombreuses variantes : quotidienne (due à la pituite corrompue), tierce (chaque 3e jour, soit un jour sur deux, causée par la bile), et la quarte (chaque 4e jour, soit un jour sur trois, causée par l’atrabile), etc. Les deux principaux types de continues (ou synoques) étaient la lente et l’hectique. Une fièvre mal réglée laissait les praticiens dans la perplexité, mais l’apparition d’une cadence leur donnait une référence leur permettant de prédire le déroulement de la maladie, ce qui leur autorisait des subtilités rétrospectives pour sauver la face, à défaut du malade. Les fièvres malignes s’accompagnaient de signes de gravité, notamment nerveux (rêverie, stupeur, délire, convulsions, etc.) et cutanés (éruption pourpre, vésiculeuse, etc.). Notre Index renvoie aux notes qui décrivent plus précisément les diverses catégories de fièvre.

L’intermittence de la fièvre (tierce ou quarte) s’observait notamment en cas de malaria (paludisme), fièvre des marais alors encore très répandue dans toute l’Europe. Le quinquina s’y avérait authentiquement efficace ; mais toutes les intermittentes ne répondaient pas à cette cause. Tout cela avait lieu dans une période où la connaissance des agents infectieux, en cause dans la majorité des cas, n’en était qu’au stade de supputations fort contestées (contagium vivum). Il ne reste rien aujourd’hui de l’ancienne et souvent inextricable nomenclature des fièvres.

Filou, filouterie, filouter
« Ce mot, originairement et proprement, signifie un petit corps d’ivoire large de quatre doigts, de figure prismatique, qui a six pans ou cannelures, dont on a fait un jeu en le roulant sur une table unie, où l’on ne gagne que quand il s’arrête sur une autre cannelure que celle qui est marquée de noir. Mais comme à ce jeu le maître peut facilement tromper, soit en chargeant de plomb quelqu’un des endroits de ce petit corps, soit en inclinant un peu le plan sur lequel on le pousse, on a appelé filous, tous ceux qui se servent de quelque tromperie pour gagner au jeu.
Se dit par extension de tous ceux qui se servent de mauvaises voies pour s’emparer du bien d’autrui : comme de ceux qui, sous prétexte de belles espérances, trompent les gens imprudents et de bonne foi, en les engageant dans des affaires dont ils tirent tout le profit par devers eux.
Se dit aussi d’un tireur de laine, de celui qui vole par adresse ou par surprise : il est difficile de purger une grande ville de filous et de coupeurs de bourses. Ce mot vient du grec philitis ou phêlêtês, qui signifie larron, pipeur (Ménage). Du Cange croit qu’il pourrait venir du latin fillones, qui s’est dit pour nebulones, fripons » (Furetière).

La filouterie est un tour de filou ; filouter, c’est en commettre un.

Fleur de lis
Supplice qu’on fait souffrir aux larrons de ville et aux coupeurs de bourse ; on les condamne à être flétris d’une fleur de lis qui s’applique sur l’épaule avec un fer rouge (Furetière).
Fluxion
Chute d’humeurs sur quelque partie du corps. Les fluxions sur le poumon sont dangereuses. Il lui est tombé sur les yeux une fluxion qui le rend presque aveugle (Furetière). On dirait aujourd’hui congestion ou inflammation.
Forain
Étranger, de dehors. Il se dit particulièrement d’un marchand, non seulement de celui qui est d’un autre royaume, mais de tout autre qui n’est pas du lieu où il vient faire trafic. Ce mot vient de foris ou de forum, qui vient de dehors, ou qui fréquente les foires (Furetière).
Forfante, forfanterie
Une forfanterie est une action de forfante, terme injurieux emprunté de l’italien forfante, qui signifie maraud, coquin, scélérat. C’est l’opposé d’honnête homme. Les mariniers, cabaretiers et hôteliers sont de grands forfantes (Furetière).

Fourber, fourbe
Tromper adroitement, finement ; ceux qui agissent avec sincérité, sont ceux qu’on fourbe le plus aisément (Furetière).

Comme substantif, fourbe peut être synonyme de fourberie ; mais cet emploi, aujourd’hui rare, l’était déjà sous la plume de Guy Patin.

Frappart
On dit d’un moine libertin, débauché, que c’est un frère frappart (Trévoux).
Gage
Nantissement, sûreté que l’on donne pour quelque prêt ou pour quelque dette. Il se dit plus proprement des meubles : il lui a donné son lit en gage. Et néanmoins, on le dit quelquefois des héritages : je ne veux pas laisser vendre cette terre sans m’y opposer, c’est mon gage. Quand on dit absolument prêter sur gages, on entend que c’est prêter à usure. On appelle aussi gages les sommes dont on convient avec les valets pour le paiement d’une année de leurs services, et aussi des appointements qu’on donne à des officiers pour les faire subsister honorablement. On dit encore, il est demeuré pour les gages, pour dire il a été retenu ou il a payé pour les autres : les soldats s’en sont enfuis, les plus braves officiers y sont demeurés pour les gages (Furetière).
Gaillard
Adjectif qui signifie enjoué, qui ne demande qu’à rire ou à faire rire. On dit de celui qui est entre deux vins qu’il est un peu gaillard, et aussi de celui qui sans avoir bu est sujet à faire quelques folies. On le dit aussi des choses qui sont licencieuses, hardies, incroyables : ce conte est un peu gaillard, le trait est gaillard. On appelle aussi gaillard un homme qui se porte bien, qui est dispos et vigoureux : cet homme est encore frais et gaillard pour son âge. Dans la forme substantive, un gaillard est adroit, un fourbe, un homme à surprendre les autres, dont il se faut défier (Furetière). Ménage a appelé Guy Patin « le médecin le plus gaillard de son temps ».

Galant
Homme honnête, civil, savant dans les choses de sa profession ; se dit aussi d’un homme qui a l’air de la cour, les manières agréables, qui tâche à plaire, et particulièrement au beau sexe ; amant qui se donne tout entier au service d’une maîtresse ; on dit aussi qu’un homme est un galant pour dire qu’il est habile, adroit, dangereux, qu’il entend bien ses affaires ; se dit aussi, en mauvaise part, de celui qui entretient une femme ou une fille, avec laquelle il a quelque commerce illicite ; et au féminin, quand on dit c’est une galante, on entend toujours une courtisane ; on appelle un vert galant, un jeune homme sain et vigoureux qui est propre à faire l’amour (Furetière).
Galants
Rubans noués qui servent pour orner les habits ou la tête, tant des hommes que des femmes (Furetière).
Galimatias
Discours obscur et embrouillé où on ne comprend rien. On le dit aussi des affaires fort embarrassées, et des maisons qui sont en trouble et en désordre (Furetière).
Garce, putain
Meretrix en latin, femme prostituée et de mauvaise vie : garce de rempart, garce à chien, une garce infâme. Ce mot n’est devenu odieux que depuis quelque temps et en plusieurs provinces, on le dit encore pour signifier une petite fille ou servante de chambre. On a appelé en latin corrompu garsiæ et garzonæ les femmes qui hantaient les fripons et les débauchés, et qui vivaient à la manière des garçons (Furetière).
Gare
Se dit des avis qu’on donne des suites fâcheuses qui peuvent arriver d’une méchante affaire : vous voulez vous battre en duel contre votre ennemi, gare la corde ; vous voulez plaider de gaieté de cœur, gare les dépens (Furetière).
Garni
On dit chambre garnie, maison garnie, pour dire une maison meublée d’ustensiles nécessaires et toute prête à louer aux passants ou aux hôtes qui y arrivent. Les étrangers, les provinciaux sont obligés de loger en chambre garnie. En termes de Palais, garnir signifie donner assurance, payer par provision : se garnir les mains signifie s’engager soi-même ; avoir les mains garnies c’est avoir des garanties sur un engagement (Furetière).
Gazetier
Au sens large, nom commun désignant un éditeur ou vendeur de gazette (journaux contenant les nouvelles du temps) ; au sens particulier, nom propre donné aux rédacteurs et imprimeurs de la Gazette de France. Guy Patin a employé ce mot pour désigner (et dénigrer) Théophraste i Renaudot jusqu’à sa mort (1653), puis ses fils : le plus souvent Eusèbe, mais aussi Théophraste ii (le seul à avoir effectivement repris l’exploitation de la Gazette après le décès de son père), voire Isaac.

Géhenne
Mot qui sert à désigner l’enfer dans la Bible, à prendre au sens de torture ou de dure souffrance : « Je ne veux pas corrompre son esprit à le tenir à la géhenne et au travail » (Montaigne, Essais, i, xvi).
Gendarmes, gendarmerie
Un gendarme était un cavalier armé : il se dit particulièrement des gendarmes du roi ou de la reine, etc. qui ont succédé aux hommes d’armes des anciennes compagnies d’ordonnances qui étaient armés de toutes pièces (de pied en cap). Maintenant les compagnies des gardes du corps, des mousquetaires et des chevau-légers de la Maison royale tiennent rang de gendarmes et sont réputés du corps de la gendarmerie. Gendarme se dit aussi de toutes sortes de gens de guerre (Furetière).
Gens du roi, parquet
On appelle les Gens du roi ou le parquet, les avocats et procureurs généraux dans les cours (ou compagnies) souveraines (à Paris, le Parlement, la Cour des aides, la Chambre des comptes, le Grand Conseil et la Cour des monnaies), ou simplement avocats ou procureurs du roi dans les sièges inférieurs (Furetière). Le Parquet est le lieu du palais où MM. les Gens du roi donnent audience (Richelet). C’est plus tard devenu, comme à présent, l’espace qui est enfermé par les sièges des juges et par le barreau où sont les avocats (Académie).

Les Gens du roi étaient chargés auprès du Parlement des intérêts du souverain, et parfois désignés du nom de Parquet, d’après le local où ils se réunissaient ; c’étaient le procureur général, son substitut et les deux avocats généraux (Bertière).

Gentilhomme
Homme de famille (gentilitas en latin) noble.

En France, les gentilshommes étaient notamment des officiers royaux par quartier : ceux de la chambre servaient le roi à table ; les gentilshommes ordinaires recevaient et exécutaient ses diverses commissions.

Glorieux
Qui est dans la gloire céleste, qui jouit de la béatitude éternelle : la glorieuse Vierge Marie ; les corps glorieux ne sont plus sujets aux infirmités humaines.
Est aussi celui qui a acquis de la gloire par son mérite, par son savoir, par sa vertu, ou de ce qui donne de la gloire : le roi a fait plusieurs actions glorieuses ; cet auteur est bien glorieux d’avoir fait un si bel ouvrage ; il est mort au lit d’honneur, d’une mort glorieuse, d’une blessure glorieuse.
Se dit aussi en mauvaise part d’un orgueilleux, d’un homme qui a trop de vanité. En ce sens, on dit proverbialement qu’il fait bon battre glorieux car il ne s’en vante pas (Furetière).

Gouvernement, gouverneur
Un gouvernement est la charge qui donne pouvoir de commander au nom du roi dans une place, dans une ville, dans une province. Un gouverneur est l’officier du roi qui commande dans une province, dans une place. Il commande non seulement à la garnison, mais aussi aux bourgeois et à toutes les troupes qui entrent dans sa place Autrefois, un gouverneur était obligé de soutenir trois assauts avant que de se rendre (Furetière).

Les gouverneurs de provinces étaient des seigneurs du premier rang, souvent nommés primitivement dans les provinces où étaient situés leurs fiefs. Le roi leur déléguait ses pouvoirs : ils étaient lieutenants du roi. Ils ne faisaient pas double emploi avec l’administration locale, notamment judiciaire, mais devaient en surveiller le bon fonctionnement tout en assurant le maintien de l’ordre, comme l’aurait fait le souverain lui même s’il avait été en place. Les gouvernements de province n’étaient pas des offices, mais de commissions, non vénales et toujours révocables. Les grandes familles tendaient en fait à les considérer comme faisant partie de leur patrimoine et essayaient d’en assurer la transmission héréditaire. L’usage était de faire offrir à un titulaire qui était forcé d’y renoncer des compensations financières dites récompenses, à verser par le successeur (S. Bertière).

Il y avait un gouverneur de la Bastille, du bois de Vincennes, et un gouverneur de Paris (qui se substitua sous François ier au prévôt de Paris). Le mot servait aussi à désigner celui qui a soin de l’éducation d’un jeune prince, d’un seigneur, des enfants de bonne maison (Furetière).
Gouverneur de Paris
Représentant du roi, révocable à la volonté du souverain, le gouverneur de Paris a joué un rôle important jusqu’au début du règne personnel de Louis xiv qui, craignant l’ambition de ces personnages de haute naissance, ayant souvent des compétences militaires, limita en 1661 leur pouvoir à trois années renouvelables, et leur interdit de séjourner dans leur gouvernement sans son ordre et son autorisation. Les gouverneurs de Paris du temps des lettres de Guy Patin ont été (date de nomination entre parenthèses) (A. Fierro) :

  • Hercule de Rohan, duc de Montbazon (12 novembre 1620) ;

  • le maréchal François de L’Hôpital, comte de Rosny, seigneur du Hallier (28 décembre 1649) ;

  • François de Vendôme, duc de Beaufort, nommé par les frondeurs (du 6 juillet au 4 octobre 1652), puis de nouveau le maréchal de L’Hospital ;

  • Ambroise de Bournonville (16 janvier 1657) ;

  • Antoine, duc d’Aumont (mai 1662) ;

  • Gabriel de Rochechouart, duc de Mortemart (18 juin 1669).
Grabuge
Vieux mot qui signifie débat et différend domestique ; ce mot ne s’emploie qu’en burlesque et vient de l’italien garbuglio ou grabuglio (Furetière) ; querelle, noise (Littré DLF).
Grain
C’est, en médecine, le plus petit des poids, dont il en faut trois pour faire une obole, vingt pour faire un scrupule, et soixante pour faire la drachme ou le gros (Furetière ; vOrdonnances.). Le grain équivaut à environ dix de nos milligrammes.

Guy Patin employait surtout ce mot pour désigner les petites pilules narcotiques (opium, laudanum) dont on se servait pour abréger les souffrances des incurables.
Grains bénits
Grains de chapelet bénits par le pape, que les protestants et les libertins érudits accusaient d’être objets de superstition.
Grand Conseil (Conseil privé ou Conseil des parties)
Juridiction souveraine qui a été établie par Charles viii, l’an 1497, en juridiction particulière. C’était autrefois une assemblée de personnes notables qui donnaient avis au chancelier des difficultés qui s’offraient sur le fait de la justice, sur les règlements des parlements, et autres cas semblables. Son pouvoir s’étend par toute la France et il juge des contrariétés d’arrêts, des règlements entre juges royaux, des bénéfices consistoriaux, des indults des cardinaux et du parlement, des retraits des biens ecclésiastiques et des affaires de plusieurs grands ordres du royaume par des attributions particulières. Sous les synonymes de Conseil d’État, d’en haut ou des parties, le grand Conseil privé du roi était présidé par lui et composé de huit présidents, tous maîtres des requêtes, et de 54 conseillers servant par semestre, qui étaient autrefois obligés de suivre la cour (Furetière).

Lieu d’exercice du pouvoir absolu, le Conseil d’État (justice administrative) et la Cour de cassation (justice civile) sont à présents les lointains successeurs républicains du Conseil royal, mais sans ses attributions politiques, désormais dévolues au gouvernement, et aux assemblées élues des députés et des sénateurs.

Grand’Chambre
Première et principale chambre de chaque parlement où se tenaient les lits de justice (Littré DLF). En chaque parlement il y a une Grand’Chambre, qu’on appelle autrement la chambre des audiences (ou des plaids). Dans la première institution du Parlement (de Paris) il n’y avait que deux chambres, et deux sortes de conseillers : l’une était la Grand’Chambre pour les audiences, dont les conseillers s’appelaient jugeurs, qui ne faisaient que juger ; l’autre des enquêtes, dont les conseillers s’appelaient rapporteurs, qui ne faisaient que rapporter les procès par écrit (Furetière). Monter à la Grand’Chambre était un couronnement de carrière pour les conseillers au parlement. Le premier président présidait la Grand’Chambre et de là, tout le parlement.
Greffier
Officier qui tient un greffe, qui garde les dépôts des actes de justice, qui en délivre les expéditions. Le greffier en chef est celui qui signe les expéditions des arrêts, sentences et autres actes. Le greffier commis tient le plumitif à l’audience, à la Chambre du Conseil, soit au civil, soit au criminel. Le greffier des présentations est celui à qui les procureurs se présentent sur les exploits donnés ou reçus, qui délivre les défauts et qui fait les rôles ordinaires des provinces. Le greffier garde-sac reçoit les productions des parties et s’en charge. Le greffier des affirmations reçoit les déclarations sous serment que les parties sont obligées de faire. Le greffier qui met en peau est celui qui met en grosse (expédition) les arrêts et sentences. Le greffier des insinuations tient registre des donations et des substitutions dans les justices séculières, et de tous les actes qui concernent les bénéfices dans les cours ecclésiastiques, afin que tous ces actes soient publics. Le greffier de la geôle tient le registre des écrous et des décharges des prisonniers.

Au Conseil, on appelle greffiers ceux-là seulement qui expédient les arrêts du Conseil des parties, car ceux qui expédient les affaires des finances s’appellent secrétaires du Conseil (Furetière).
Guet-apens
Dessein prémédité d’assassiner quelqu’un ou de lui faire quelque affront, lequel pour cet effet on prend à son avantage en quelque lieu où on le va attendre. Les assassinats de guet-apens étaient punis du supplice de la roue (ou de décapitation si le coupable était noble). Ce mot vient de guet appensé, c’est-à-dire avec délibération, après y avoir bien pensé (Furetière).
Gueux, gueuserie
Un gueux est une personne qui demande l’aumône. La gueuserie est la mendicité. On a fait un Hôpital général pour y enfermer tous les gueux mendiants, les gueux de profession. Gueux se dit aussi hyperboliquement de ceux qui n’ont pas assez de biens de fortune pour soutenir leur naissance et leur qualité, et aussi de tout ce qui marque quelque indigence : un prince souverain qui n’a que 100 000 livres de rente est un gueux ; tout le bien de ce marquis est saisi, il vit en gueux, son train est fort gueux ; dans toute cette province les fermiers sont gueux, ne payent point leurs maîtres. On dit proverbialement qu’un homme est gueux comme un rat d’église, gueux comme un peintre, pour dire qu’il est fort pauvre, mais ce proverbe est devenu faux en ces derniers jours où la peinture a été cultivée et anoblie ; que c’est un gueux revêtu quand de pauvre qu’il était, il est devenu riche. On appelle aussi un gueux fieffé, un gueux qui s’attache à quelque endroit certain, à quelque coin d’église pour y attendre l’aumône ; et gueux de l’ostière, celui qui va par les rues, et qui geuse de porte en porte, qui vadit ad ostia (Furetière).
Guisard
Du temps de la Ligue (années 1560 à 1590) on donnait le nom de guisards à ceux qui étaient du parti des ducs de Guise ; au lieu qu’on appelait les autres royalistes ou bourbonistes (Trévoux).
Habitude, tempérament, tempéré, température
« Mélange et harmonie des quatre simples qualités élémentaires [eau (humide et froide, qualités de la pituite ou lymphe), air (humide et chaud, sang), terre (sèche et froide, atrabile ou mélancolie), feu (chaud et sec, bile)]. Les médecins distinguent deux sortes de tempéraments, ou habitudes, du corps : l’un qu’ils appellent au poids, ou ad pondus ; l’autre de justice. Le tempérament au poids est celui qui a égale proportion et mesure des qualités élémentaires, tel que doit être celui de la peau des doigts, sans laquelle égalité ils ne pourraient faire aucun jugement. Le tempérament de justice est celui qui contient des portions inégales de ces qualités, mais en proportion convenable pour bien exercer les actions de la partie à quoi elle est destinée ; et ainsi l’os a plus de parties terrestres que d’aqueuses, afin qu’il soit plus solide ; ce qui a du rapport à la justice, qui distribue à chacun ce qui lui appartient. Galien dit que le tempérament ad pondus est seulement dans l’imagination parce que, quand il serait réel, il ne demeurerait qu’un moment » (Furetière). En médecine, le mot servait à définir les qualités du corps, de ses humeurs ou de ses organes, autant que celles des médicaments.

L’adjectif tempéré désignait l’état bien équilibré de ces qualités ; on l’appliquait aussi à celles de l’air ambiant (climat), acception qui est toujours en usage. L’intempérie marquait le déséquilibre (et le marque encore quand nous parlons du mauvais temps qu’il fait).

Habituer (s’)
S’établir, habiter.
Hâbleur
Grand parleur, grand menteur, grand prometteur (Furetière).
Hanter
Être souvent en la compagnie de quelqu’un, soit qu’on lui fasse des visites, soit qu’on reçoive les siennes ; se dit aussi des lieux où on va ordinairement (Furetière).
Harangère
Femme qui vend du hareng, de la morue, du saumon et autres salines (poissons séchés et salés). On dit, figurément et par ressemblance, de toutes les femmes rustiques fortes en gueule, qui disent des paroles ou qui font des actions sales et insolentes, que ce sont des harangères, qu’elles disent des injures de harangères, parce que ces sortes de femmes sont grossières et insolentes (Furetière).
Hardes
Habits et meubles portatifs (coffres) qui servent à vêtir ou à parer une personne ou sa chambre (Furetière).
Hémophobe, hémophobie (hématophobe, hématophobie)
L’hématophobe (ou hémophobe) était celui, médecin ou malade, qui avait la saignée en horreur (hématophobie ou hémophobie).
Hibernie, Hibernais, Hibernois
Irlande, Irlandais. Ce vieux nom de l’Irlande « lui vient, si l’on en croit les histoires fabuleuses, de Hiber fils de Gathele et petit-fils de Cécrops [fondateur d’Athènes]. Gathele passa d’Égypte en Espagne, et son fils Hiber en Hibernie, à laquelle il donna son nom. On pourrait dire plus vraisemblablement qu’il vient de eber, qui signifie trans, “ fins, limites ”. On l’aura donné à ce pays, parce que c’était la dernière terre que l’on connût de ce côté-là » (Trévoux). D’autres étymologies rattachent Hibernie au latin hiber [hiver] ou à Erin.

Horoscopes, almanachs, éphémérides
Au xviie s., almanachs et éphémérides avaient le double sens (1) de calendriers banals et (2) d’ouvrages, autrement appelés horoscopes, décrivant les phénomènes célestes ; soit une partie essentielle de la philosophie naturelle qui visait à connaître non seulement la structure de l’univers (astronomie), mais aussi à deviner (pronostiquer) l’avenir (astrologie dite judiciaire ou divinatoire), touchant à la santé et aux autres destinées humaines.

Huissier
Officier qui garde la porte chez le roi. Il y a des huissiers de la chambre et des huissiers du cabinet. Dans les compagnies de judicature, les huissiers sont ceux qui gardent les portes des chambres où on rend la justice, qui tiennent la barre du Parquet, qui font faire silence, et qui exécutent les ordres des juges et leurs jugements. Au Conseil il y a des huissiers à la chaîne qui portent les ordres du roi ou de M. le chancelier, qui ont une chaîne d’or pour marque de leur charge, qu’ils portaient autrefois au col, et maintenant autour du poignet. Les huissiers du Parlement, de la Chambre des comptes et autres cours sont des huissiers qui rendent tour à tour le service à la Chambre, et alors on les appelle huissiers de service. Le premier huissier est celui qui appelle les causes suivant les rôles ou les placets que lui donne le président. Aux présidiaux, on appelle huissiers audienciers ceux qui servent à l’audience. Les sergents à verge ont aussi usurpé le nom d’huissiers quand ils font des ventes de meubles. Huissier s’est dit, par extension, des bedeaux qui servent dans quelques compagnies, comme les huissiers (proprement nommés bedeaux) de Notre-Dame, les huissiers de l’Assemblée du Clergé, de la Faculté, etc. (Furetière).
Humanités
Lettres humaines : grammaire, rhétorique, poésie, etc. Au collège, les classes d’humanités précédaient celles de philosophie, jusqu’à l’âge de 13 ou 14 ans.
i.
Abréviation du latin id est, c’est-à-dire.
Icelui, icelle, iceux, icelles
Formes anciennes des pronoms démonstratifs celui, celui-ci, celui-là ; celle, celle-ci, celle-là ; ceux, ceux-ci, ceux-là ; celles, celles-ci, celles-là.

Impatiemment
Avec empressement, mais aussi avec inquiétude, chagrin (Furetière).
Improuver
Condamner, désapprouver : l’Église improuve les bals et les assemblées nocturnes qui sont des occasions de péché ; les délicats improuvent plusieurs mots par caprice, qui sont bien français, et nécessaires dans la langue ; on se laisse aller par complaisance à faire plusieurs choses qu’on improuve, que l’on condamne soi-même (Furetière).
Incontinent
Aussitôt.
Indice
Table d’un livre, index.
Infatuer
Donner une prévention folle pour une personne ou pour une chose (Littré DLF). Être infatué, c’est s’être laissé coiffer, prévenir par quelqu’un, par l’apparence d’un grand mérite, et lui donner toute croyance (Furetière).
Infecter
Dans la langue de Guy Patin, ce mot a son sens premier, prémicrobien, de faire sentir mauvais, exhaler sa puanteur, sa corruption, communiquer des choses corrompues, venimeuses, pestilentes, au double sens matériel et moral (Furetière).
Intempérie (intemperies, intemperiei en latin)
Défaut d’un juste tempérament, des qualités requises en certaines choses. On le dit premièrement de l’air : l’intempérie de l’air de ce climat le rend désert. L’intempérie (déséquilibre) des humeurs est la source des maladies : l’intempérie du cerveau cause de grands dérèglements, tant dans l’esprit que dans le corps (Furetière). Mélange inégal des quatre premières qualités (chaud, froid, sec, humide) : intempérie froide et humide du cerveau (Richelet). Dyscrasie est le synonyme (hippocratique) de l’intempérie.

Intendant, surintendant
Au sens large, un intendant était un officier ayant « l’inspection, la conduite, la direction de certaines affaires. Il y a des intendants en chaque armée, un intendant sur la Marine pour y avoir l’inspection et pourvoir à ses besoins.
Les intendants des finances sont ceux qui en ont la direction, chacun dans son département. Ils ont été établis par François ier. Leur charge se faisait auparavant par les trésoriers de France. L’intendant des Bâtiments est l’ordonnateur général des bâtiments du roi, des Arts et manufactures de France.
Les intendants de justice, police, finances, sont des gens de robe que le roi envoie dans les provinces, ou en chaque généralité, pour donner ordre aux affaires extraordinaires. On les appelle maintenant commissaires de partis en une telle généralité pour l’exécution des ordres du roi.
Intendant signifie aussi dans la maison d’un prince, d’un grand seigneur, son premier officier qui a le soin et la conduite de sa maison, de son revenu et de ses affaires : intendant de la Maison de la reine, de Monsieur. Le mot d’intendant est devenu si commun qu’il n’y a point de si petit marquis qui ne dise “ mon intendant ”. Les intendants ruinent souvent leurs maîtres.

Surintendant : officier qui est ordonnateur général des finances du roi. La charge la plus briguée autrefois était celle de surintendant : le cardinal de Richelieu s’est fait qualifier chef et surintendant du commerce ; le surintendant des bâtiments du roi » (Furetière).

Le mot surintendant, employé seul, fait référence à celui des finances. Son épouse portait le titre de surintendante. En principe, deux surintendants occupaient simultanément cette charge, dans la louable intention de prévenir les prévarications grâce à la surveillance qu’ils exerçaient l’un sur l’autre.

Interdit
Censure ecclésiastique qui suspend les prêtres de leurs fonctions, qui ôte au peuple l’usage des sacrements et le service divin ; se dit proprement d’une excommunication générale contre une province ou une ville (Furetière).
Intermission
Cessation de travail, ou de douleur. Une fièvre continue est celle qui est sans intermission. il n’y a point de goutte si violente qui n’ait quelque intermission. On travaille à ce bâtiment sans intermission, jour et nuit, fêtes et dimanches (Furetière). Action de mettre un intervalle, une discontinuation (Littré DLF).
Jacobin, dominicain
Nom qu’on donne en France aux religieux et religieuses qui suivent la règle de saint Dominique (dominicains, frères prêcheurs), à cause de leur principal couvent qui est prés de la Porte Saint-Jacques à Paris, qui était un hôpital des pèlerins de Saint-Jacques quand ils s’y vinrent établir. D’autres prétendent qu’ils s’appelèrent jacobites dés qu’ils étaient en Italie, parce qu’ils imitaient la vie apostolique, et quelques auteurs les appellent prédicateurs de saint Jacques. Ils font un des corps des quatre ordres mendiants [avec les cordeliers, les carmes et les augustins] (Furetière).
Janissaires
Soldats de l’infanterie turque, qui étaient des enfants de tribut que les Turcs levaient sur les chrétiens et qu’on élevait pour servir à l’armée. L’aga ou le chef des janissaires était un des premiers officiers de l’Empire. Toute la puissance du Turc dépendait des janissaires. Ce fut Mahomet ii qui établit les janissaires pour la garde et sûreté de sa personne. À Rome, c’étaient des officiers ou pensionnaires du pape, qu’on appelait aussi participants à cause de certains droits assignés sur les annates (impôt annuel dû au pape), bulles ou expéditions de la chancellerie romaine (Furetière). Janissaires du pape était l’un des nombreux sobriquets dont Guy Patin affublait les jésuites.
Jeudi absolu
Jeudi saint, le jour où on fait la Cène chez le peuple (Furetière).
Joint que
Particule conjonctive qui sert de transition, et particulièrement dans les écritures du Palais, qui signifie ajoutez à cela que (Furetière), en outre.

Juif
L’Église condamnait les prêts à intérêt, même si le taux n’en était pas usuraire. Aussi le rôle de prêteurs avait-il souvent été tenu depuis le Moyen Âge par les juifs, qui s’étaient ainsi acquis une réputation d’usurier (Bertière). Les protestants (mont-de-piété de Théophraste Renaudot, par exemple) firent de même. Retz (Mémoires, page 381) appelle Mazarin « le juif le plus convaincu qui fût en Europe » parce que « la cour avait entrepris d’autoriser les prêts par déclaration, c’est-à-dire, à proprement parler, qu’elle avait entrepris d’autoriser les usures par une loi vérifiée en Parlement, parce que ces prêts qui se faisaient au roi, par exemple sur les tailles, n’étaient jamais qu’avec des usures immenses ».

Pour ce motif et d’autres, liés à la religion (condamnation et crucifixion du Christ), le mépris des juifs était de rigueur au xviie s. chez les chrétiens et les lettres de Guy Patin en donnent quelques durs exemples. Les juifs de France étaient principalement des sépharades installés dans le sud-ouest (Bordeaux, Bayonne), sans compter les « juifs du pape » vivant hors royaume, en Avignon et dans le Comtat-Venaissin. La petite communauté askhénaze du nord-est connut un grand développement entre le début et la fin du xviie s. : 25 ménages à Metz en 1595 ; 1 200 en 1699 (J.‑P. Poussou in D.G.S).

Les profonds érudits chrétiens devaient savoir l’hébreu pour interpréter et commenter la Bible, et la plupart d’entre eux, afin de progresser dans leurs études, entretenaient de respectueuses relations avec les rabbins ; mais Guy Patin n’appartenait pas à cette élite. Un chrétien était qualifié de juif quand il s’était tant imprégné d’études hébraïques qu’il avait adopté les préceptes du judaïsme, mais sans s’être converti à cette religion, qui n’était pas prosélytique (contrairement au christianisme et au mahométisme).

Comme j’ai fait pour les autres substantifs religieux (chrétiens, catholiques, musulmans, réformés, etc.), j’ai pris juif pour un nom commun (écrit sans majuscule initiale). La seule exception que j’ai faite est celle des Turcs, pris dans le sens de mahométans.

Jupiter capitolin
Jupiter (Iupiter, génitif Iovis), le maître des dieux romains, devait son épithète de capitolin (Capitolinus) au temple qui lui était dédié à Rome, placé sur le mont Capitole. De là-haut, Jupiter tonnant (Capitolinus Tonans) foudroyait les autres dieux et les humains qui lui avaient déplu. Guy Patin en a tiré un surnom ironique du pape, qui dirige le monde catholique depuis le Vatican. À ma connaissance, aucun autre auteur contemporain de Patin ou antérieur à lui ne l’a employé.

Juré
« Artisan élu par son corps pour avoir droit de visite sur les autres, pour faire observer les statuts et règlements, et empêcher les entreprises [fraudes] sur le métier. Les jurés ont droit de saisir les ouvrages mal conditionnés, quand ils vont en visite avec un officier de police. On ne reçoit point un maître qu’en présence et du consentement des jurés. On croit en justice le rapport des jurés sur la malfaçon d’une besogne. On dit au féminin, une jurée lingère, une jurée matrone [sage-femme], car il n’y a que ces deux corps où il y ait maîtrise de femmes » (Furetière).

Jussion
Lettre de chancellerie expédiée sur un édit ou déclaration, portant commandement exprès à une Cour souveraine d’en faire la vérification dont elle avait témoigné faire quelque difficulté. Il y a eu un temps où les édits ne se vérifiaient qu’après plusieurs jussions réitérées (Furetière).
L’hui (Luy)
L’hui (luy dans la graphie de Guy Patin), dérive du latin hodie (ce jour, aujourd’hui, ce jourd’hui). Suivi d’un nombre ordinal, l’hui était la manière d’indiquer le nombre de jours écoulés depuis le moment où on parlait : « l’hui [luy] quatrième » veut donc dire « aujourd’hui est le quatrième jour, il y a trois jours » (nudius quartus en latin).

Lairra (et dérivés aux temps futur et conditionnel)
Autrefois on disait je lairrai pour je laisserai, je lairrais pour je laisserais.
Landgrave
Prince ou seigneur allemand d’une seigneurie qu’on appelle landgraviat. Ce mot vient de Land, qui signifie terre, et Graven, qui signifiait juge : ce que les Latins appelaient Comes et ce qu’en Normandie on appelle encore vicomte, parce qu’autrefois la justice était rendue à la Cour par ces juges qui accompagnaient toujours l’empereur. Petit à petit, les juges ont empiété l’autorité, et la faiblesse ou la négligence des empereurs a été cause qu’ils se sont rendus propriétaires des terres dont ils n’étaient que gouverneurs et juges (Furetière).
Latin (pays)
L’actuel Quartier latin de Paris : on appelle l’Université et les collèges le pays latin, ce qui se prend souvent pour pédanterie (Furetière) ; originellement, l’expression venait du fait que c’était un quartier où se parlait le latin (un peu comme on parle aujourd’hui l’anglais à la Cité universitaire internationale de Paris).
Leste
Qui est brave, en bon état et en bon équipage pour paraître : une armée fort leste ; de l’infanterie bien leste, bien vêtue et gaillarde ; de la cavalerie bien leste, c’est-à-dire bien montée. Qui est brave, en bon état et en bon équipage pour paraître : les fêtes, les carrousels, les bals demandent que les gens soient fort lestes, pimpants et magnifiques (Furetière). Ce qualificatif s’associait souvent à brave.
Lettre de change
Rescription (mandat) que donne un banquier ou un marchand pour faire payer à celui qui en sera le porteur en un lieu éloigné l’argent qu’on lui compte au lieu de sa demeure (Furetière).

Libertin, libertinage
Qui ne veut pas s’assujettir aux lois, aux règles de bien vivre, à la discipline d’un monastère. Un écolier est libertin quand il frippe ses classes (perturbe la classe en chahutant), quand il ne veut pas obéir à son maître. Une fille est libertine, quand elle ne veut pas obéir à sa mère ; une femme à son mari. Les moines libertins sont ceux qui sortent du couvent sans permission. Libertin se dit aussi à l’égard de la religion, de ceux qui n’ont pas assez de vénération pour ses mystères, ou d’obéissance à ses commandements. Le père Garasse a fait un livre contre les athées et les libertins, qu’il appelle la Doctrine curieuse (v. note [1], lettre 58). Dans l’histoire et dans le droit romain on appelle libertin, un esclave affranchi, par relation à son patron (Furetière).

Charles Sorel dans sa nouvelle Les divers amants (Nouvelles françaises, 1623 ; Nouvelles du xviie s., Gallimard, La Pléiade, Paris, 1997, page 158) a défini les esprits libertins : « qui ne croient pas facilement aux choses qui leur sont inconnues et se figurent qu’il ne faut pas quitter les biens visibles pour ceux qui sont invisibles, et n’ont de la connaissance que pour les choses sensibles et matérielles. » En ce sens, on pourrait qualifier Guy Patin de médecin libertin.

On distingue au xviie s. le libertinage scandaleux, qui touchait les mœurs, et le libertinage érudit, qui touchait la pensée. Illustrés ensemble dans le personnage du Don Juan de Molière (1665), ils pouvaient se pratiquer indépendamment l’un de l’autre. Le premier est devenu le libertinage, tout court ; le second, critique des dogmes religieux, déiste, mais rarement athée, était un ancêtre de la libre-pensée moderne, mais il faut se garder d’une analogie trop stricte entre ces deux philosophies.

Licentiande
Étudiant (bachelier) aspirant à la licence des universités ; c’est un latinisme formé sur le gérondif, licentiandus, du pseudo-verbe latin licentiare.

Lieu
Rang de classement : avoir le premier lieu de la licence, lors des études médicales, c’était être classé le premier des candidats, honneur très envié.

Lieue
Unité de mesure dont la longueur variait d’un pays et d’une province à l’autre, mais correspondait généralement au chemin parcouru à pied en une heure. Il est difficile de choisir avec certitude l’équivalence kilométrique de la lieue dont parlait Guy Patin, entre la lieue commune (4,444 km) et la lieue de poste (3,898 km).

Lieutenant
De manière générale, un lieutenant était un officier qui tient le lieu d’un supérieur, qui exerce une charge en son absence, ou qu’il devrait exercer lui-même (Furetière).

Aux armées, le grade de lieutenant général, créé en 1621 pour le marquis de La Valette, se situait entre le maréchal de camp et le maréchal de France. C’était aussi le titre de l’officier qui dirigeait le bailliage d’une cité.

Dans une place de guerre, un lieutenant de roi ou commandant d’armes, commandait en l’absence du gouverneur. Ce gouverneur était lui-même lieutenant du roi. Les lieutenants de roi avaient la charge d’un secteur géographique plus étroit que le gouverneur, subdivision d’une province ou ville fortifiée ; ils étaient investis dans ce dernier cas de responsabilités importantes. Leur subordination d’origine aux gouverneurs représentait un danger de transfert excessif du pouvoir sur les grands des provinces. Pour y parer, on recourut à deux procédés : écarter les hommes peu sûrs des lieutenances sensibles, à l’occasion de leurs redistributions, ; soustraire les lieutenants à l’autorité des gouverneurs pour les rattacher directement au roi – d’où leur nom de lieutenants de roi – avec mission de contrôler et contrebalancer le pouvoir du gouverneur auquel ils étaient attachés (S. Bertière).

À Paris, le lieutenant civil était le « président premier » du Châtelet. Le lieutenant criminel était généralement chargé d’instruire les affaires criminelles et de diriger la police. Le lieutenant criminel du Châtelet partageait cette fonction avec le lieutenant civil, qui lui était hiérarchiquement supérieur. Pour clarifier la situation, source de nombreux inconvénients, les affaires civiles et criminelles des grandes villes furent nettement séparées à partir de 1667 : le lieutenant civil du Châtelet, dont les responsabilités étaient trop étendues, devint lieutenant civil du prévôt de Paris, et le lieutenant criminel, lieutenant général de police.

Lieux communs
Recueils qu’on fait de ce qu’on trouve de plus beau dans les auteurs qu’on manie pour s’en servir quand on traite quelque chose en général. Les ouvrages d’un tel auteur ne sont que des lieux communs, des rhapsodies (Furetière) ; vCenton.

Lit de justice
Séance solennelle que le roi fait en son Parlement de Paris, sous un haut dais, avec grande pompe et cérémonie, dans des occasions importantes pour le bien de son État (Furetière). C’était à proprement parler le trône, surmonté d’un dais, sur lequel s’asseyait le roi dans une telle occasion. Le Parlement au complet se réunissait alors dans la Grand’Chambre. L’enregistrement des édits et ordonnances royaux était alors la règle. C’était donc la manière de contourner les très humbles remontrances des magistrats (conseillers du Parlement).

Livide
De couleur plombée, entre le noir et le bleu, telle que devient la couleur d’une chair meurtrie par quelque coup (Littré DLF).

Machine
Se dit figurément en choses morales des adresses, des artifices dont on use pour avancer le succès d’une affaire. Il a fait jouer toutes sortes de ressorts et de machines pour venir à bout de cette entreprise (Furetière).
Magasin
Lieu où on serre (met à couvert), où on fait provision de marchandises, de vivres, de munitions. La guerre se fait commodément, quand on a le moyen de faire des magasins. Les places fortes doivent avoir des magasins de poudre, de munitions, de vivres. On appelle un marchand en magasin celui qui ne tient point boutique, qui vend en gros ses étoffes, ses marchandises (Furetière).
Main de papier
Assemblage de 25 feuilles de papier à imprimer, pliées ensemble pour former un cahier. Une rame faisait 20 mains, soit 500 feuilles.
Maître, maîtrise ès arts
Un maître ès arts (magister artium) était « celui qui a des lettres d’une Université pour pouvoir enseigner la rhétorique, la philosophie, etc. (disciplines dites profanes, de caractère général) dan un collège. C’est le premier degré qui donne droit aux bénéfices en qualité de gradué » (Furetière). Tous étaient des hommes et entendaient parfaitement le latin, et beaucoup connaissaient aussi le grec.

Dans ce qui correspondrait aujourd’hui à l’enseignement secondaire, l’écolier devait étudier d’abord six ans au collège ; puis il entamait son enseignement supérieur avec deux années à la Faculté des arts qui lui donnaient accès à la maîtrise, grade le plus élevé qui venait au-dessus de ceux de bachelier puis de licencié ès arts. Dans les autres universités françaises, le cursus était similaire à celui de Paris.

La base de l’enseignement, prodigué en latin, y était la philosophie : logique, éthique, physique, métaphysique, doctrine d’Aristote. Une fois maître ès arts, l’étudiant pouvait accéder aux autres facultés dites supérieures (médecine, droit, théologie) pour obtenir baccalauréat, licence puis doctorat. Dans les cérémonies solennelles, le maître ès arts portait la longue robe à grandes manches, l’épitoge et le bonnet carré.

Dans les civilités académiques, quel que fût le grade ou la fonction universitaire dont il était pourvu, tout gradué de Paris était appelé Maître ou Monsieur, mais jamais Docteur.

Maîtres des requêtes
Les maîtres des requêtes de l’Hôtel du roi étaient des officiers royaux (c’est-à-dire propriétaires d’une charge qu’ils avaient achetée) de robe courte (portant dans l’exercice de leur fonction un vêtement plus court que celui des magistrats de rang supérieur). Leur rôle d’origine (xiiie s.) était d’être « auprès de la personne du roi pour recevoir les requêtes et placets qui lui étaient présentés » (Furetière). La compétence des maîtres des requêtes s’élargit peu à peu, jusqu’à en faire, du temps de Guy Patin, les intimes et puissants auxiliaires du pouvoir royal, tant à Paris que dans les provinces. Représentés dans toutes les cours souveraines (à Paris, le Parlement, la Cour des aides, la Chambre des comptes, le Grand Conseil et la Cour des monnaies) et dans les conseils du roi, ils menaient l’enquête générale dans la quasi-totalité des procès, les rapportant ensuite avec une proposition de jugement qui était ordinairement suivie. Ainsi mêlés à toutes les affaires du royaume, leur destin ordinaire était de devenir conseillers d’État, après quelque vingt années de bon service. Soucieux de conserver leur influence et leur prestige, les maîtres des requêtes supportèrent fort mal qu’à partir de 1630, la Couronne décidât d’augmenter leur nombre, tant pour diminuer leur influence que pour augmenter ses revenus. Leur mécontentement fut l’un des leviers qui fit émerger la Fronde en 1648. Leur nombre était alors de 72 (Ranum, page 86).
Major
Officier de guerre qui a différentes qualités et fonctions. Le major d’une place est l’officier qui y commande après le gouverneur et le lieutenant de roi. Il a soin de la garde, de la patrouille, des fortifications de la place (Furetière).
Malaisément
Difficilement.
Malencontreux
Celui qui porte ou qu’on croit porter malencontre (mauvaise fortune, malheur), ou à qui il arrive quelque malencontre (Furetière).
Malotru
Terme populaire qui se dit des gens mal faits, mal bâtis et incommodés, soit en leur personne, soit en leur fortune. Cet homme a un corps malotru et mal disposé qui ne promet pas une longue vie. La caution qu’il a présentée est un malotru chicaneur qui est insolvable. On le dit aussi des animaux et des choses : ce campagnard n’a qu’un malotru bidet pour tout équipage ; il habite dans une ville malotrue où il n’y a que des chaumières (Furetière).
Maltôte, maltôtier
La maltôte est une imposition faite sans fondement, sans nécessité et sans autorité légitime. Ce mot vient d’un vieux mot tollir, ou de male tolta. Le premier impôt qui fut appelé de ce nom fut celui qui se leva l’an 1296. pour faire la guerre aux Anglais ; d’où vient que ce mot, suivant Ragueau, veut dire tout subside extraordinaire. Le maltôtier est celui qui exige des droits qui ne sont point dus ou qui sont imposés sans autorité légitime. Le peuple appelle abusivement maltôtiers (ou maletoutiers) tous ceux qui lèvent les deniers publics, sans distinguer ceux qui sont bien ou mal imposés, ni les exactions des contributions légitimes aux nécessités de l’État (Furetière).
Mânes
Ombre, âme, souvenir d’une personne défunte. Mot pluriel qui est identique en français (masculin, mais anciennement féminin) et en latin (masculin sans accent circonflexe).

Maniaque
Adjectif et substantif : « furieux, transporté hors de soi. Ceux qui annonçaient les oracles entraient en telle fureur qu’ils paraissaient maniaques. On appelle aussi maniaques, les possédés » (Furetière).

Maquereau
Qui tient un lieu de prostitution, qui fait métier de débaucher des filles, qui fait les intrigues, les allées et venues nécessaires pour cela. On appelle proverbialement un maquereau, un poisson d’avril. On dit aussi de celui qui ne paye point son écot, sa part de quelque dépense commune, qu’il est franc comme un maquereau (Furetière).

Maquereau avait aussi le sens, atténué mais péjoratif, d’entremetteur en galanteries.

Maquignon, maquignonnage
Commerçant « qui vend des chevaux, qui les refait, et qui couvre leurs défauts ; ce mot est odieux ; on dit maintenant marchand de chevaux ». De là, le mot a servi pour qualifier les « gens d’intrigue qui se mêlent de donner des avis, de faire des mariages, de faire vendre des offices, des bénéfices et autres trafics odieux. On appelle aussi maquignons et vendeurs de chair humaine ceux qui débauchent les jeunes gens pour les enrôler et les vendre à des capitaines. Ce mot vient de maque, qui signifiait autrefois marchandise, aussi-bien que celui de maquereau ; quoique Ménage dise qu’il vient de l’italien machinone, qu’il croit être fait de mangone. On a dit dans la basse latinité mangonare, pour signifier trafiquer, et mango, manganus, pour signifier un trompeur » (Furetière).

Dans ses textes latins, Guy Patin a plusieurs fois employé le mot mangonium pour dénoncer la falsification des médicaments (comme la manne) : je l’ai traduit par « maquignonnage », avec la bénédiction du Gaffiot.

Maraud
Terme injurieux qui se dit des gueux, des coquins qui n’ont ni bien ni honneur, qui sont capables de faire toutes sortes de lâchetés : il ne faut point ajouter foi à tout ce que dit ce maraud ; cette femme est une maraude qui court les mauvais lieux (Furetière).
Marchand (bon, mauvais)
On dit proverbialement d’un homme à qui il doit arriver malheur de quelque chose, qu’il s’en trouvera mauvais marchand, qu’il ne s’en trouvera pas bon marchand, qu’il n’en sera pas bon marchand (Académie).
Martel
Vieux mot qui signifiait autrefois marteau, qui se dit encore en cette phrase : il a martel en tête, pour dire il a quelque chose qui lui donne du chagrin, du souci, de l’inquiétude, de la jalousie (Furetière).
Mâtin
Gros chien de cuisine, ou de basse-cour ; se dit aussi des hommes grossiers, mal bâtis de corps ou d’esprit (Furetière).
Médailles
Numisma ou nomisma en latin (pluriel numismata) : petite figure de métal en forme de monnaie, faite pour conserver à la postérité le portrait des gens illustres, ou la mémoire de quelque action considérable. Quelques-uns ont cru que les médailles ont servi de monnaie. Les antiquaires sont fort curieux de médailles. Il y a des médailles frappées, et d’autres moulées. On appelle la légende de la médaille l’écriture qui est autour (Furetière).

Outre les médailles (profanes de préférence aux pieuses), les numismates (tels Charles Patin) collectionnaient les monnaies anciennes. Les jetons étaient un type particulier de médailles.

Médecins par quartier, médecins ordinaires, conseillers médecins du roi
Outre le premier médecin, qu’on appelait archiatre, le service médical du roi comprenait quatre médecins par quartier (qui servaient chaque année un trimestre) et un nombre variable de « conseillers médecins ordinaires du roi » (où conseiller est à prendre dans le sens de consultant, plutôt que dans celui de personne ayant au moins une fois participé au Conseil du roi). Ceux-là servaient toute l’année, mais seulement en cas d’absence du médecin en quartier. Les quelques authentiques médecins ordinaires soignaient effectivement le roi ; ils payaient leur charge plusieurs dizaines de milliers de livres.

D’autres, en bien plus grand nombre portaient le titre de « conseiller médecin du roi », mais n’étaient à proprement parler que « médecins consultants du roi », office vénal et purement honorifique qui ne s’assortissait d’aucune pratique sur la personne du souverain, ni d’aucune rétribution, hormis une fort appréciable exemption de la taille (avec quelques privilèges comme celui de chasser sur ses terres). André Falconet et son fils Noël, Charles Spon ou Robert Patin attachaient ce titre à leur nom. Guy Patin ne s’en est jamais personnellement targué : il possédait pourtant cette charge (comme en attestent certaines pièces le concernant), mais sans doute la jugeait-il trop banale pour penser qu’elle rehausserait son renom ; il a écrit qu’en France, le nombre de ces médecins, qu’il appelait ad honores, était de quatre mille (v. note [8] de L’ultime procès de Théophraste Renaudot contre la Faculté de médecine de Paris).

Certains princes et princesses du sang jouissaient aussi des services d’un premier médecin et même de médecins par quartier.

En dehors de la Maison royale, le médecin ordinaire d’un homme bien nanti ou d’une institution, comme un collège ou un couvent, était son médecin traitant.
Médiocre, médiocrement, médiocrité
Mots qui, fidèles à leur racine latine (mediocris), n’avaient pas au xviie s. leurs sens péjoratif moderne, mais ceux de moyen (« entre le grand et le petit », Académie) ou modéré (sans excès), de moyennement ou modérément, et de modération ou modestie.
Ménage, ménager
Le ménage est l’épargne du bien acquis, et le soin d’en acquérir d’autre. C’est un bon ménage de faire toutes les provisions dans la saison. On peut vivre de ménage sans être avare, en dépensant à proportion de son bien. Le meilleur ménage est de ne rien devoir et de ne se point laisser accumuler d’arrérages (dettes). Est ménager celui qui est bon économe de son bien, ne fait pas de dépense superflue, fait bien valoir ce qu’on lui donne à manier (Furetière) ; à la ménagère, à l’économie.

Messager, messagerie
Le messager est celui qui est commis pour porter les hardes et les lettres des particuliers, et qui a pour cet effet un bureau établi par autorité publique et affermé. Il n’y avait autrefois si petit bourg qui n’eût son messager royal et son messager de l’Université. Il y en avait à pied pour porter les lettres, en charrette pour porter les hardes, et à cheval pour conduire les hommes. Il est plus sûr de prendre la voie du messager, on n’est pas si tôt volé. La messagerie est le bureau du messager et le droit de le tenir, de faire transporter les lettres. Toutes les messageries ont été réunies aux postes en 1672. On appelait facteur celui qui tenait le bureau et les registres des messagers (Furetière).

Métaphysique
Dernière partie de la philosophie, dans laquelle l’esprit s’élève au-dessus des êtres créés et corporels, s’attache à la contemplation de Dieu, des anges et des choses spirituelles, et juge des principes de toutes connaissances par abstraction et détachement des choses matérielles. On l’appelle aussi théologie naturelle, et c’est comme le tronc ou la racine de toutes les sciences. Son objet est l’Être en général, en tant qu’il est séparé de toute matière, soit réellement, soit par la pensée (Furetière).
Minimes
Ordre de religieux, qui portent un habit de couleur tannée avec un petit capuce, un scapulaire rond, et un manteau de même couleur. Il fut fondé par saint François surnommé de Paule, parce qu’il était natif de Paule, ville de Calabre, et fils de Jacques Maltotile qui mourut religieux de cet Institut. Le pape Sixte iv l’approuva en 1473 et il fut confirmé en 1506 par Jules ii. Les minimes de Nigeon, prés Chaillot (v. note [20], lettre 536), sont appelés bonshommes, à cause que Louis xi ayant fait venir François de Paule en France sur la réputation de sa sainteté, dans l’espérance d’obtenir sa guérison par ses prières, l’appelait ordinairement bonhomme. Ce saint fondateur voulut que ses religieux fussent appelés minimes, du latin minimus, qui veut dire très petit, comme se tenant le moindre de tous (pour « enchérir sur l’humilité des frères mineurs [ou franciscains] », Furetière). On les appelle en Espagne Pères de la Victoire à cause d’une victoire remportée sur les Maures par Ferdinand v selon ce qu’avait prédit saint François de Paule. Ces religieux, outre les trois vœux ordinaires de religion, en font un quatrième, qui est d’observer un carême perpétuel (Thomas Corneille).
Ministre
Dans son acception religieuse, le ministre de la Parole de Dieu ou du saint Évangile est le pasteur protestant qui prêche et accomplit les fonctions ecclésiastiques lors des célébrations au temple. Par leurs sermons et leurs écrits, plusieurs ministres de Charenton (Pierre Du Moulin, Edme Aubertin, Alexandre Morus, Jean Claude, etc.) eurent un grand rayonnement spirituel du temps de Guy Patin.

Les ministres du gouvernement étaient alors appelés secrétaires d’État.

Ministre d’État
Celui sur qui un prince se repose de l’administration de son État, à qui il commet le soin de ses principales affaires (Furetière). C’était le « principal ministre », qui dirigeait le gouvernement du roi. Tels furent notamment Sully, Richelieu et Mazarin.

Minuter
Projeter, avoir dessein de faire quelque chose, et surtout en cachette, à la sourdine. Ce marchand minute sa fuite, s’apprête à faire banqueroute. Ce mécontent minute quelque conspiration, quelque surprise (Furetière).
Moinerie
Se dit odieusement en parlant de l’humeur et de la clôture des moines : c’est un homme qui a mal fait ses affaires, qui s’est retiré dans une moinerie ; ce religieux est un galant homme qui s’est mis au-dessus des faiblesses ou des grimaces de la moinerie ; il y a toujours de la moinerie dans son fait (Furetière). Guy Patin s’est surtout servi du mot pour désigner les moines dans leur ensemble.
Momerie
Mascarade, déguisement des gens masqués pour aller danser, jouer ou autrement se réjouir ; se dit aussi figurément en morale de l’hypocrisie, des déguisements qui font paraître les choses autrement qu’elles ne sont (Furetière).
Monnaies, argent et or : livre, écu, sol, denier, pistole
L’étalon monétaire était la livre tournois (lt ou ℔, originellement de Tours ; aussi dénommée franc). Monnaie de compte, abstraite, la livre ne correspondait à aucune pièce de métal ; mais toutes celles qui circulaient, qu’elles fussent frappées en France ou à l’étranger, étaient cotées par rapport à la livre. Sa valeur en argent était fixée par édit royal. Cela permettait une dévaluation par simple diminution de sa valeur métallique (dite augmentation des espèces) et, par le procédé inverse, mais bien plus rarement, une réévaluation (dite renforcement de la livre). Jusqu’en 1641 (réforme des monnaies par Louis xiii), la livre a valu, à quelques oscillations près, 8,33 grammes d’argent à neuf dixièmes de fin, ou environ 0,6 gramme d’or ; elle n’a pas cessé de dévaluer dans la suite du xviie s., pour ne plus valoir que 4,702 grammes d’argent en 1700.

Étant donné les variations relatives du coût des biens, il est bien difficile de donner une équivalence exacte entre la livre du xviie s. et nos actuels euros. En partant du fait qu’une famille modeste pouvait vivre avec 25 livres par mois (Goubert) et en disant qu’il faudrait aujourd’hui pour cela 2 000 €, on pourrait se hasarder à donner 20 € comme l’équivalent approximatif d’une livre tournois.

Une livre tournois valait 20 sols (ou sous, s.), et un sol (soit l’équivalent possible d’un euro) douze deniers (d., 8,3  centimes d’euro). Un kilogramme de pain coûtait, les années de bonne récolte, un sol, mais le double ou le triple, les années de disette. Deux deniers faisaient un double, et trois deniers, un liard.

Le liard était l’une des petites monnaies, dites du billon. Il avait cours pour trois deniers ou le quart d’un sol. Il y avait en France deux sortes de liards, les uns de cuivre pur, les autres de billon (alliage de composition variable), ces derniers n’ayant cours que dans le Lyonnais et le Dauphiné. Il s’y ajoutait des pièces d’origine étrangère, sans garantie d’authenticité ou de bon aloi. Louis xiv, par déclaration du 1er juillet 1654, ordonna une fabrication de liards de cuivre, qui prirent le nom de liards de France, pour se distinguer des petits liards qui circulaient jusqu’alors. La déclaration portait qu’ils seraient fabriqués de cuivre pur et sans mélange de fer, à la taille de 64 pièces au marc (8 onces, environ 250 grammes). Le cours de ces liards fut fixé à trois deniers. Quatre ans après, il fut réduit à deux deniers par lettres patentes du 4 juillet 1658. Ces mesures prises contre l’inflation (et les faux-monnayeurs) étaient nécessairement très défavorables aux petites gens, ce qui fut la cause de plusieurs émotions populaires dont Guy Patin a parlé dans ses lettres.

La pistole, monnaie d’or battue en Espagne (double escudo) et en quelques endroits d’Italie, valait onze livres. Son exact équivalent français, créé en 1640, était le louis d’or (6,75 g dont 6,19 g d’or pur), qui circula jusqu’en 1928.

Les autres grosses pièces d’échange françaises étaient l’écu d’argent (écu blanc), valant trois livres, et le quart d’écu, pièce d’argent valant 15 puis 16 sols.
Montée, degré
Escalier et ses marches.
Montre
Ce qui est exposé aux yeux et qui paraît à découvert. La nature nous fait montre en tous lieux de ses trésors, de ses richesses. En termes de guerre, c’est la solde qu’on paie aux soldats ordinairement dans ces revues (appelées montres) qu’on fait des troupes pour voir si elles sont complètes, et pour en régler la marche et le paiement : les troupes n’ont point reçu d’argent depuis trois mois, il leur est dû trois montres. On appelait montre sèche les revues où on ne donne point d’argent (Furetière).
Morfondre (se), morfondu
Endurer du froid après avoir eu chaud. On dit aussi figurément d’un capitaine qui n’a pas réussi en quelque siège, qu’il s’est morfondu devant une place (Furetière).
Morguer
Braver par des regards fiers, fixes et méprisants. Les braves tiennent à grande injure qu’on les vienne morguer, qu’on les vienne regarder sous le nez (Furetière).
Mortier (président à, ou au)
Le mortier est une marque de dignité que portent les grands présidents du parlement. Ils le portaient autrefois sur la tête et ils le font encore aux grandes cérémonies, comme à l’entrée du roi. À l’ordinaire ils le portent à la main. Le mortier est la marque de la justice souveraine et c’est pour cela que le chancelier et les grands présidents le portent. Le mortier du chancelier est de toile d’or, bordé et rebrassé d’hermines ; celui du premier président est de velours noir bordé de deux galons d’or ; celui des présidents à mortier n’a qu’un seul galon. Il y a à Paris huit présidents à mortier qu’on appelle Messieurs du grand Banc, ce sont les présidents de la Grand’Chambre et de la Tournelle (Furetière).
Mortification, mortifier
Altérer un corps naturel, le rendre plus tendre, plus mou : on mortifie la chair en la frappant avec un bâton, en la laissant à l’air à demi pourrir ; on mortifie les drogues par infusion ; les chirurgiens mortifient, endorment les membres.

Se dit figurément en morale : la règle des chartreux est fort austère, ils se mortifient étrangement le corps ; la haire, le cilice mortifient la chair, apaisent l’ardeur des passions.

Signifie aussi recevoir quelque honte, quelque déplaisir : quand on découvre l’hypocrisie d’un cagot, cela le mortifie beaucoup ; ce banquier a été bien mortifié quand il a trouvé qu’on lui avait volé l’argent de sa caisse.

Mortification s’entend pareillement dans ces trois acceptions (Furetière).
Mouche
Se dit figurément d’un espion, de celui qui suit un autre pas à pas. C’est de là qu’on a dit une fine mouche, un maître mouche, pour dire un homme qui a de la finesse, de l’habileté pour attraper les autres. On dit aussi c’est un maître mouche, ce qui vient de ce qu’un nommé Mouche était autrefois un excellent joueur de gobelets et de passe-passes (Furetière).
Moyenner
S’entremettre, servir quelqu’un auprès d’un autre, l’accommoder (Furetière). Son participe présent, moyennant, est devenu une préposition d’usage encore courant pour dire au moyen de.
Muid, pinte
Le muid de Paris, pour les liquides, contenait deux feuillettes, soit 268 litres (Littré DLF). Le muid de vin de Paris contient 280 pintes, selon le règlement de Louis xiii, et suivant les ordonnances de Henri iv de 300 pintes (Furetière). La pinte de Paris valait 0,931 litre (Littré DLF).

Le muid est aussi une grande mesure de grains, qui n’est pas un vaisseau qui serve de mesure, mais une estimation de plusieurs setiers et minots, différente selon les lieux. Le muid de blé à Paris est de douze setiers, et chaque setier de quatre minots ; il doit peser 2640 livres (1,35 tonne) en blé (Furetière).
Muses
Dans la mythologie les Muses (aussi appelées Camenæ en latin, Camènes), avec majuscule initiale, sont les neuf déesses qui président aux arts libéraux : v. note [1], lettre 540, pour l’ode latine de Guy Patin dont les neuf strophes célèbrent tout à tour chacune des Muses.

Dixième Muse se dit, par flatterie ou par admiration, de toute femme qui cultive la poésie avec talent.

Avec une minuscule initiale, le mot sert à désigner les belles-lettres, et particulièrement la poésie. Au singulier, la muse est l’inspiration artistique.

Mystique
Qui est mystérieux (mustikos en grec) : les commentateurs de l’Écriture, outre le sens littéral, y trouvent un sens mystique, allégorique, et un sens moral (Furetière).

V. note [43] du Borboniana 6 manuscrit pour le sens théologique du mot mystique.

Nez (par le)
Prendre le monde par le nez a le même sens que mener par le nez : on dit qu’on mène un homme par le nez comme un buffle pour dire qu’il se laisse tromper, qu’on en fait tout ce qu’on veut (Furetière). À propos de certains livres, comme les Colloques d’Érasme, Guy Patin a parfois employé l’expression dans le sens positif d’éveiller l’intelligence des lecteurs, de « détromper les sots ».
Nippes
Terme général (sans connotation péjorative au xviie s.) qui se dit tant des habits que des meubles, et de tout ce qui sert à l’ajustement et à la parure (Furetière).
Noise
Querelle qui s’émeut entre gens du peuple ou dans les familles. Elle n’aboutit d’ordinaire qu’à des crieries, sans effusion de sang (Furetière).
Nonce et légat apostoliques
Légat : « cardinal que le pape envoie comme ambassadeur vers quelque prince souverain avec grande pompe et cérémonie pour quelque affaire importante. On fait des entrées solennelles aux légats apostoliques, aux légats du Saint-Siège. Il faut que les légats fassent vérifier en Parlement leurs facultés, avant que de faire aucune fonction apostolique. On les appelle aussi légats a latere : ce nom leur vient de ce que le pape ne donne cet emploi qu’à ses plus familiers amis qui sont toujours à ses côtés, ou à ceux qui sont de sa Maison » (Furetière).

Nonce : « ambassadeur du pape vers un prince ou un État catholique, ou qui assiste en une assemblée de plusieurs ambassadeurs : le pape Alexandre vii a été nonce en l’assemblée pour la paix de Münster. On ne souffre point en France que les nonces aient aucune juridiction. La plupart des nonces deviennent ensuite cardinaux » (ibid).

« Depuis le Moyen Âge [les] légats parcouraient la chrétienté et sans disparaître (il y a eu 34 légations en France au xvie s., cinq au xviie), ils sont remplacés par les nonces accrédités auprès des princes catholiques à titre permanent, qui cumulent les fonctions d’ambassadeur chargé de représenter le chef de la chrétienté, de défendre les intérêts du pape comme souverain temporel et de renseigner la cour de Rome, et de délégué apostolique, défenseur des intérêts des clercs et des fidèles dont il maintient l’union avec Rome. […] En France, le contexte gallican a donné à la représentation pontificale un caractère unique. Alors que les nonces sont généralement dits “ nonce avec le pouvoir de légat a latere auprès de… ”, le délégué du pape en France est dit seulement “ nonce auprès du roi très-chrétien des Français ” ; une titulature qui n’exclut pas les fonctions de délégué apostolique, mais dont les parlementaires prendront parfois prétexte pour la nier ou la limiter » (Hildesheimer a).

Nubile
Terme de jurisprudence : qui est en âge de se marier. Les filles sont nubiles à douze ans ; les garçons à quatorze. L’âge nubile est appelé autrement en droit la puberté (Furetière).
Obéré
Endetté.

Obvier
Aller au devant d’une difficulté, d’un inconvénient qu’on a prévu, et y apporter remède. Les lois et les formalités de justice sont établies pour obvier à plusieurs maux, à plusieurs tromperies qui se feraient tous les jours sans cela. En pensant obvier à un mal, quelquefois on donne lieu à un plus grand (Furetière).
Office, officier
Un office était une dignité avec fonction publique (Loyseau). Il existait diverses sortes d’offices : judicature, police, finance, chancellerie, ville, Maison du roi et des princes. Ces charges, presque toutes vénales, étaient créées par édit. Contrairement aux commissions, elles étaient ordinaires, viagères (accordées à vie) et perpétuelles (vacantes, le roi devait les pourvoir par lettres de provision) (Descimond et Jouhaud). Les officiers étaient les détenteurs d’office.

Dans les armées, les officiers étaient, comme aujourd’hui, ceux qui commandaient les troupes et les navires. Ils se divisaient en divers grades hiérarchiques.
Opérateur
Médecin empirique, charlatan qui vend ses drogues et ses remèdes en public et sur le théâtre, qui annonce son logis et sa science par des affiches et des billets qu’il distribue (Furetière).
Oratoire (congrégation père, prêtre de l’)
Congrégation particulière d’ecclésiastiques qui ne font pas de vœux. Pierre de Bérulle (1575-1629) a établi en France la Congrégation de l’Oratoire de Jésus en 1612, Congregatio presbyterorum Oratorii Domini Jesu [Congrégation des prêtres (ou pères) de l’Oratoire de notre Seigneur Jésus], sur le modèle de celle de Rome que saint Philippe Néri (1515-1595) a instituée sous le titre de l’Oratoire de sainte Marie en la Valicelle. Contrairement à la Congrégation de Rome, qui ne s’est pas instituée en mère des autres, celle de France renfermait en elle-même un grand nombre de maisons qui dépendaient d’un supérieur général. Les pères de l’Oratoire n’étaient pas religieux (moines), mais seulement prêtres séculiers associés ensemble, soumis à l’autorité de l’évêque du diocèse où ils étaient établis, et non directement à celle de Rome. La maison principale des oratoriens à Paris se situait rue Saint-Honoré, au niveau de l’actuelle rue de l’Oratoire (2e arrondissement), non loin du Louvre.
Ordinaire
On appelle un courrier ordinaire, « celui qui part régulièrement à un certain jour de la semaine ; et on dit écrire par l’ordinaire, pour dire par la voie de la poste, de ce courrier qui a accoutumé de partir » (Furetière). L’ordinaire de la poste entre Paris et Lyon était hebdomadaire, quittant la capitale le vendredi. Le tarif pour une lettre était de 3 sols. Le temps de livraison était usuellement de 5 jours.

La Gazette de France paraissait sous deux formes : entre les numéros ordinaires, contenant des dépêches (nouvelles) traitant au jour le jour les affaires européennes et françaises, s’intercalaient des numéros extraordinaires développant un événement particulier, au gré des besoins.

Ordonnances, once, gros, drachme, grain, Recipe
Les lettres de Guy Patin, en particulier celles qu’il envoyait à son ancien élève Hugues de Salins, contiennent des ordonnances (ou formules). Elles étaient écrites, à l’intention de l’apothicaire, en latin abrégé, et hermétiques pour le commun des mortels.

La prescription commençait par un symbole formé d’un R dont le jambage droit était barré (℞) ou d’un 2 barré (Ꝝ), signifiant Recipe (Prenez, en latin). Les deux unités principales de poids étaient :

  • l’once (12e partie de la livre, soit environ 32 grammes) était marquée par un symbole ressemblant à un chiffre 3 surmonté d’un z (℥), le tout formant, dans l’écriture de Patin, une sorte de ksi grec minuscule (ξ) ;

  • le gros (drachme ou dragme, 8e partie de l’once, soit environ 4 grammes) était marqué par un symbole ressemblant à un chiffre 3 (ʒ ou ℈), le tout formant, dans l’écriture de Patin, une sorte de dzéta grec minuscule (ζ). La drachme contenait trois scrupules ou 60 grains.
Le nombre d’unités pondérales à mettre dans la préparation s’écrivait en chiffres romains minuscules suivis d’un point : j. pour 1, ij. pour 2, iij. pour 3, iiij. ou iv. pour 4, v. pour 5, etc. La demi-unité se marquait par un symbole identique au double s (s dur) allemand : ß.

Page (de lettre)
Comme on l’apprend au début de sa lettre du 25 novembre 1655 à Hugues de Salins (ut mihi constat ex indice meo [comme mon index en fait foi]), Guy Patin tenait un aide-mémoire des lettres qu’il envoyait à ses correspondants : destinataire, date, longueur, et probablement traces du contenu (voire brouillon complet, comme en atteste sa correspondance latine conservée dans le ms no 2007 de la BIU Santé). Il lui arrivait souvent au début d’une lettre de faire référence à la précédente, pour vérifier qu’elle était bien arrivée. Patin écrivait sur des feuilles mesurant environ 17x24 cm, dont il utilisait le recto et le verso. Il laissait une marge à gauche d’environ 3,5 cm, qu’il utilisait volontiers pour corriger ou compléter son texte, pour indiquer la date à laquelle il écrivait le passage en regard, et quand la place lui manquait, pour achever sa lettre (en écrivant alors verticalement) sans avoir à entamer une feuille supplémentaire. Patin comptait la longueur de ses missives en pages, correspondant chacune à une face écrite d’une feuille (par exemple, 5 pages pour 2 feuilles recto verso, et une feuille recto). Le verso de la dernière feuille servait entièrement ou en partie (moitié ou tiers inférieur) à écrire l’adresse du destinataire. Les feuilles étaient pliées, fermées avec un cachet de cire et expédiées sans enveloppe.
Panser
Au sens général, c’est avoir soin d’un malade, lui fournir les choses nécessaires ; se dit aussi des médicaments qu’on donne aux malades et aux blessés. Au sens particulier, chirurgical, on dit qu’on panse une plaie lorsqu’on y met le premier appareil, qu’on le lève ou qu’on en change et qu’on en nettoie les emplâtres (Furetière). On a corrigé l’orthographe du xviie s., qui confondait souvent penser et panser.
Pantalon
Bouffon, ou mascarade qui fait des danses par haut, et des postures irrégulières et extravagantes. Se dit aussi de l’habit que portent d’ordinaire ces bouffons ou masques, qui est fait justement sur la forme de leur corps et tout d’une pièce depuis la tête jusqu’aux pieds. On appelle les pantalons de Venise, ceux qui portent des habits ainsi serrés sous leurs robes. Se dit aussi d’un caleçon qui est tout d’une pièce avec les chaussettes, ou d’un haut-de-chausses étroit qui tient avec les bas. Un pantalon de chamois, de toile, etc. (Furetière).
Papalin
Adjectif servant à qualifier un soldat ou une monnaie du pape, et plus généralement ce qui appartient au pape « (avec une idée de dénigrement ; en bonne part, on dit papal). Bossuet dit papalin pour partisan du pape, en faisant parler Luther : “ Ces ânes de papalins ne savent pas qu’ils sont des ânes ” » (Littré DLF).

Papimanie, papimanesque
La Papimanie est dans Rabelais un pays imaginaire supposé habité par le pape. Le mot a de là pris le sens de « zèle excessif pour le pape et son gouvernement » (Littré DLF). Guy Patin a employé deux fois le néologisme papimanesque.

Pâques fleuries
Le dimanche des Rameaux.
Parfait, perfection
Achevé, complet : cet architecte s’est obligé de rendre ce bâtiment fait et parfait dans un tel temps. On dit aussi en termes de Palais, que le procès sera fait et parfait à un accusé pour dire qu’il sera instruit jusqu’à sentence définitive. Parfait signifie aussi accompli, où il n’y a rien à désirer ni à ajouter : il n’y a rien de parfait sur la terre (Furetière). La perfection caractérise ce qui est parfait.
Parlement, Cour de Parlement, Palais
Créés au xiiie s., les parlements étaient surtout des cours du justice où se jugeaient les procès, principalement en appel des tribunaux de moindre rang. L’activité judiciaire de la « Cour de Parlement » (comme Guy Patin appelait parfois celle de Paris, dont il a naturellement le plus parlé), ou « Palais », se doublait d’une activité législative : elle vérifiait les ordonnances et édits royaux, en appréciant leur conformité au droit coutumier ; elle devait les avoir enregistrés pour les rendre exécutoires. Elle avait le pouvoir d’expliquer les édits (spécifier leur domaine d’application), mais sans le droit d’en changer la teneur ; elle sollicitait du roi les modifications souhaitées par de très humbles remontrances. La venue du roi devant le Parlement (lit de justice) permettait l’enregistrement sans discussions, autres que formelles et respectueuses. Durant la régence d’Anne d’Autriche (1643-1651), ce droit de regard relatif sur les lois (incluant les impôts) fut l’objet de vives contestations et à l’origine de la Fronde, en 1648, dont les ressorts politiques évoluèrent au fil de son déroulement.

Il existait dix parlements dans le royaume ; par ordre d’ancienneté : Paris, Toulouse, Grenoble, Bordeaux, Dijon, Rouen, Aix, Rennes, Pau et Metz. Le ressort du Parlement de Paris s’étendait bien au-delà de l’Île-de-France, puisqu’il comprenait aussi tout l’ancien Domaine du roi : Picardie, Brie, Perche, Beauce, Maine, Touraine, Sologne, Berry, Nivernais, Anjou, Poitou, Aunis, Rochelais, Angoumois, Marche, Bourbonnais, Mâconnais, Auvergne, Forez, Beaujolais et Lyonnais. Notre édition suit la règle orthographique (contestable) de réserver la majuscule initiale au Parlement de Paris, en employant une minuscule pour les autres parlements de France.

Le Parlement était issu de la Cour des pairs médiévale ; les princes du sang et les plus grands seigneurs y avaient droit de séance, ainsi que quelques dignitaires ecclésiastiques, dont l’archevêque de Paris. Il était composé de juges ou conseillers (au nombre de 140 en 1648), qui n’étaient pas des élus désignés par le suffrage du peuple, mais des officiers royaux, titulaires à vie de la charge qu’ils avaient achetée ou dont ils avaient hérité (sous condition de verser un droit annuel qui portait le nom de paulette). Ils se répartissaient entre huit chambres : Grand’Chambre, cinq chambres des enquêtes et deux chambres des requêtes. Deux émanations du Parlement étaient la Tournelle, chambre spéciale chargée des affaires criminelles (elle devait son nom au fait que les magistrats des diverses chambres y siégeaient à tour de rôle), et la Chambre des vacations, qui expédiait les affaires courantes pendant une partie (9 septembre au 27 octobre) des vacances du Parlement (7 septembre au 12 novembre). Chaque chambre était dirigée par un président : premier président pour la Grand’Chambre, présidents au (ou à) mortier pour les autres.

  • Composée des magistrats les plus anciens (qui couronnaient leur carrière en y « montant » depuis les autres chambres), la Grand’Chambre avait à connaître de toutes les affaires concernant le roi et la Couronne, les crimes de lèse-majesté, et les procès criminels des pairs et grands officiers de la Couronne, des membres du Parlement, de la Chambre des comptes et de l’Université.

  • Les Enquêtes préparaient les affaires avant l’instruction, connaissait des appels des différentes sentences, jugeait en première instance les causes réservées à la Grand’Chambre.

  • Les Requêtes connaissaient, en première instance, des procès concernant les affaires privées des gens attachés à la personne royale, jugeait les causes des églises fondées par le roi, et les causes des corporations.

Les parlements provinciaux étaient constitués sur ce modèle, mais avec une moindre dimension que celui de Paris.

V. note [4], lettre 955, pour l’anoblissement (droit de noblesse, dite de robe) pour les membres des parlements et son hérédité.

L’ordonnance de Villers-Cotterêts (1539) avait établi le français comme langue exclusive dans tous les tribunaux du royaume. Le latin n’y était plus utilisé que pour enjoliver les discours.

À Paris, plusieurs libraires vendaient leur livres dans les couloirs du Palais de justice.

Parler sommaire (ordonnance de parler sommairement)
En termes de Palais, c’était l’instruction sommaire et provisoire d’une affaire devant un rapporteur (Furetière). Sources de fréquents abus de la part des juges, les parlers sommaires ont été abolis par la grande ordonnance de la justice de 1667.
Partement
Action par laquelle on part, on quitte un lieu pour aller en un autre (Furetière).
Parties
Mémoire de plusieurs fournitures faites par des marchands, ou ouvriers. Les parties d’apothicaire sont leurs mémoires de frais, ou de fournitures, dont il faut retrancher la moitié pour les payer raisonnablement (Furetière). C’est une note (ou un relevé) de comptes.

En termes de Palais, partie se dit de tous les plaideurs. Les demandeurs et les défendeurs, les appelants et les intimés se nomment parties principales ; et les parties intervenantes sont celles qui s’y joignent par quelque intérêt, ou qui y sont appelées en assistance de cause. On dit des jugements, qu’ils sont rendus soit parties ouïes (après avoir entendu les arguments des parties), soit non ouïes (par défaut) (ibid.).
Partisan, traitant
À partir de 1635 (entrée de la France dans la ruineuse guerre de Trente Ans), les partisans, ou traitants, plus connus aujourd’hui sous le nom de fermiers généraux, prirent une part grandissante aux ressources de l’État. Il s’agissait de financiers (on dirait aujourd’hui banquiers ou courtiers) privés qui faisaient des traités ou partis (d’où leur nom) avec l’autorité royale, par extension du principe de la ferme : après adjudication (plus ou moins régulière), les partisans avançaient, avec un intérêt conséquent (couramment 15 à 30 pour cent), le recouvrement de sommes dues à l’État (impôts directs ou aides, ventes d’offices, augmentations de gages, etc.) ; en échange, ils faisaient leur affaire de procéder aux levées fiscales correspondantes. Les énormes quantités d’argent nécessaires à l’accomplissement de leurs engagements provenaient d’hommes de paille, derrière lesquels se cachaient des prêteurs appâtés par le gain potentiel (mais jamais garanti). Ceux-là appartenaient à la noblesse d’épée, de robe ou de soutane, ou à l’opulente bourgeoisie ; on y comptait en particulier bon nombre de magistrats des cours souveraines (à Paris, le Parlement, la Cour des aides, la Chambre des comptes, le Grand Conseil et la Cour des monnaies), les mêmes qui s’en prirent souvent avec véhémence aux « voleries des partisans » qui pourtant leur assuraient en sous-main de confortables revenus. Les financiers prêtaient aussi directement de l’argent à la Couronne.

Une autre de leurs activités, moins avouable, était de revendre à l’État les emprunts publics (rentes) qu’il était forcé d’émettre en période de grand besoin : quand, la crise financière s’aggravant, le cours de ces rentes avait bien plongé, les partisans les rachetaient à vil prix aux particuliers, puis, le bon moment venu, les revendaient à l’État à leur valeur nominale, c’est-à-dire avec de très substantiels profits. Ce système pervers d’avance privée sur recette publique, mêlant juges et parties, ne contribua pas peu à l’équilibre fisco-financier fuyant (on dirait aujourd’hui la cavalerie) qui a caractérisé l’époque de Guy Patin. L’illustration la plus marquante en a sans doute été la banqueroute de l’État en 1648, c’est-à-dire la suspension de ses remboursements et paiements d’intérêts, qui préluda à l’éclosion de la première Fronde (celle, précisément, qu’on a qualifiée de parlementaire), mais aussi, et plus heureusement, à la paix de Westphalie (face à l’obligation de réduire la dépense des guerres). Qualifiés de « serpents » vidant les caisses de l’État pour l’obliger à accroître sans limite ses ponctions fiscales, les partisans ont été, comme Patin s’en est souvent fait le témoin exaspéré, les boucs émissaires de la haine publique.
Pas de clerc
On dit qu’un homme a fait un pas de clerc pour dire qu’il a fait une faute par ignorance ; ce qui ne se dit pas seulement des clercs, mais aussi de toutes autres personnes qui se méprennent et qui font des choses dont ils se repentent (Furetière).
Passefin
Un des adjectifs employés par Guy Patin pour qualifier ironiquement les jésuites, avec le sens de « qui dépasse les autres en finesse, en ruse » (Littré DLF, qui emprunte à Patin l’expression « Ces maîtres passe-fins [les jésuites] » pour illustrer sa définition). Le passefin (substantif) était une étoffe très fine qu’on tissait notamment à Lucques (La Curne de Sainte-Palaye).
Passeport
Lettre ou brevet d’un prince ou d’un commandant pour donner liberté, sûreté et sauf-conduit à quelque personne pour voyager, entrer et sortir librement sur ses terres. Le passeport se donne aux amis, et le sauf-conduit aux ennemis (Furetière).
Passer (les troupes)
Faire passer en revue son armée, pour voir si elle est complète et en bon ordre (Furetière).
Patelin, pateliner
Homme adroit et fourbe qui trompe les gens en leur faisant accroire qu’il leur procure quelque avantage. Ce mot vient d’un nommé Patelin, avocat sur qui on fit une farce qu’on appelle la Farce de Patelin. Pateliner, c’est gagner une personne par adresse et par flatteries, la persuader qu’elle gagne lorsqu’on la trompe (Furetière).
Pédant, pédanterie, pédantesque
En son sens premier, pédant désignait au xviie s. un homme de collège qui a soin d’instruire et de gouverner la jeunesse, de lui enseigner les humanités et les arts ; on les appelle aussi régents, et quelques-uns sont simples répétiteurs. Pris en mauvaise part (comme aujourd’hui), pédant se disait aussi de celui qui fait un mauvais usage des sciences, qui les corrompt et altère, qui les tourne mal, qui fait de méchantes critiques et observations, comme font la plupart des gens du collège. Il y a aussi bien des pédants à la cour et dans la ville que dans l’Université. Les pédants ont défiguré Aristote et toute la philosophie. Les qualités d’un pédant, c’est d’être mal poli, mal propre, fort crotté, critique opiniâtre, et de disputer en galimatias (Furetière).
Pédéraste
Guy Patin a employé quelquefois les mots pédéraste et pédérastie dans ses lettres. Le seul dictionnaire du xviie s. à daigner les définir est celui de Richelet (1680) qui fait de pédéraste un synonyme de sodomite, avec cette citation :« Ce sont des discours de pédéraste. Ablancourt, Luc. ». Dans l’épître de son Lucien (1664), adressée à Conrart, Nicolas Perrot d’Ablancourt met en garde contre les mœurs de son auteur (« Toutes les comparaisons tirées de l’amour parlent de celui des garçons, qui n’était pas étrange aux mœurs de la Grèce, et qui font horreur aux nôtres »), mais on n’a pas trouvé l’endroit exact de la citation prise par Richelet.
Pendard
Qui a commis des actions qui méritent la corde, la potence (Furetière).
Persuader
La syntaxe de ce verbe a changé au cours du xviie s. : « persuader quelqu’un de quelque chose » se disait encore souvent « persuader quelquechose à quelqu’un ».

Petite bouche
On dit faire la petite bouche, non seulement pour dire affecter de faire paraître qu’on a la bouche petite, mais aussi pour faire paraître qu’on est petit mangeur, qu’on est délicat au choix des viandes ; et figurément, on le dit d’un homme qui est sobre en ses paroles, qui ne veut pas dire tout ce qu’il sait d’une affaire ; et au contraire, on dit qu’il n’en fait pas la petite bouche pour dire qu’il déclare franchement tout ce qui en est (Furetière).
Pharisien
Mot d’origine araméenne (perouschim ou perischin) qui signifie les séparés, ainsi nommés parce qu'ils se distinguaient des saducéens et des scribes par l’exactitude de leurs observances et leur zèle religieux. C’est devenu une manière de qualifier celui qui n’a que l’ostentation de la piété ou de toute autre vertu, l’hypocrite. V. note [14], lettre latine 83, pour une explication plus détaillée.

Guy Patin se servait du mot pour désigner les jésuites, à l’imitation de Blaise Pascal : « Ils [les jésuites] traitent de perturbateurs du repos public ceux qui ne se rendent pas complaisants à leurs desseins, et qui ne peuvent souffrir que ces pharisiens de la loi nouvelle, comme ils se sont appelés eux-mêmes, établissent leurs traditions humaines sur la ruine des traditions divines » (Deuxième factum pour les curés de Paris) (Littré DLF).
Phénix
Nom propre de l’oiseau fabuleux qui renaît sans cesse de ses cendres (v. notule {b}, note [38], lettre Naudæana 4) ; et nom commun désignant une personne unique dans son genre, supérieure aux autre, dont la mémoire sera immortelle.

Philargyrie
Hellénisme désignant l’amour excessif de l’argent. Philargyre est le nom d’un esclave bien aimé de Trimalcion dans le Satyricon (v. note [6], lettre latine 346).
Philiatre, candidat
En général et étymologiquement (philein, aimer, et iatreia, la médecine), un philiatre est celui qui aime la médecine ; c’était, en particulier, un étudiant préparant le baccalauréat de médecine, qu’on appelait aussi candidat, en référence à la roble blanche (candida) portée par les novices (candidati) dans l’ancienne Rome.

Le mot carabin n’était jamais employé dans ce sens au xviie s., il est apparu en français au début du xixe.

Philologie, philologique (philologia, philologicus)
Nom et adjectif dérivés du grec (philein, aimer, et logos, discours, doctrine). Dans son sens restreint, la philologie est l’« étude formelle des textes dans les différents manuscrits qui nous ont été transmis » (Robert) ; mais au sens plus large du xviie s., c’était « une espèce de science composée de grammaire, de rhétorique, de poétique, d’antiquités, d’histoires, et généralement de la critique et interprétation de tous les auteurs, en un mot une littérature universelle qui s’étend sur toutes sortes de sciences et d’auteurs » (Furetière) ; ce qui correspond de nos jours à l’encyclopédisme.
Physique, physicien
La physique (ou histoire naturelle), du grec φυσις physis, « nature », est « la science des causes naturelles, qui rend raison de tous les phénomènes du ciel et de la terre. Le physicien est celui qui connaît la nature, qui rend raison de ses effets, qui sait ou qui enseigne la physique » (Furetière).

Jusqu’à la Renaissance, on donnait en France le double nom de médecin et de physicien (medicus et physicus en latin) à celui qui pratiquait l’art de soigner. Le mot physician a subsisté dans ce sens en langue anglaise.

Pie au nid (trouver la)
On dit qu’on a trouvé la pie au nid quand on a rencontré quelque occasion de profiter. Il croit avoir trouvé la pie au nid, la pierre philosophale (Furetière).
Pied, pouce
Unité de mesure équivalant à 32,4 centimètres. Le pied vaut 12 pouces (qui font chacun 2,7 centimètres ou 12 lignes).
Pilule
Médicament qu’on prend à sec en forme de petite boule. Les médecins chimistes ne guérissent guère qu’avec des pilules (d’où venait la grande méfiance de Guy Patin à leur encontre). On les a inventées en faveur de ceux qui ont de la peine à boire des médicaments dissous. On enveloppe les pilules ordinaires d’une feuille d’or (d’où l’expression « dorer la pilule »), de pain à chanter (sans levain), ou de sucre, afin qu’on n’en sente pas le mauvais goût. On les a ainsi nommées à cause de leur figure ronde, comme une petite balle, ou de pila, le nom du mortier où on pile les drogues (Furetière).
Pipeur, piper
Le pipeur est un filou qui trompe (pipe, triche) au jeu, qui joue de mauvaise foi (Furetière).
Piqué au jeu
Un homme est piqué au jeu non seulement quand il veut se racquitter (regagner ce qu’il a perdu au jeu) à quelque prix que ce soit, mais encore quand il s’opiniâtre à poursuivre une affaire, quelque obstacle qu’il y trouve (Furetière).
Piquet (planter le)
Piquet se dit des petits bâtons pointus qui ont une coche vers le haut, qui servent à arrêter les cordages des tentes. Planter le piquet, c’est camper. Lever le piquet, c’est décamper. Et on dit figurément qu’un homme a planté le piquet en quelque lieu quand il y est venu demeurer et s’y établir (Furetière).
Placard
Terme d’imprimerie : feuille de papier étendue, propre à afficher et appliquer contre une muraille (Furetière) ; composition imprimée par colonnes et d’un seul côté (Littré DLF). Les thèses de médecine étaient généralement imprimées en placard.
Placet
Requête abrégée, ou prière qu’on présente au roi, aux ministres, ou aux juges, pour leur demander quelque grâce, quelque audience, pour faire quelque recommandation. Le roi reçoit gracieusement tous les placets qu’on lui présente. Il distribue, il répond les placets. Il y a des jours où on plaide des causes du rôle, et d’autres où on plaide les placets. On a de la peine à pouvoir entretenir cet homme-là, on n’a audience de lui que par placets. On donne des mémoires succincts des affaires dans des placets. Les lettres de chancellerie portent cette clause, « Sans demander placet », visa ni pareatis, pour dire qu’elles sont exécutoires par elles-mêmes, sans demander aucune permission à des juges. Ce mot vient du latin placeat, à cause qu’on les commence par « Plaise au roi, à monseigneur le président » (Furetière).
Plâtré, plâtrer
On dit qu’un visage est plâtré (ou fardé), quand il est chargé de céruse, ou de toute autre sorte de fard qui paraît ; Guy Patin employait surtout plâtré dans son sens de factice, sophistiqué (dans son acception première de frelaté).

Plâtrer se dit figurément en morale pour « excuser, couvrir les défauts de quelque chose » (Furetière).

Pluralité
Majorité des voix dans un vote, ou des avis dans une sentence.

Polypharmacie, polypharmaque
La polypharmacie est la mauvaise habitude de prescrire trop de médicaments ou des médicaments dont la composition contient un trop grand nombre d’ingrédients. Le polypharmaque est le médecin qui s’y adonne.
Port
Frais et salaires de ce qu’on porte, qu’on voiture, qu’on conduit : il a tant fallu payer à ce crocheteur pour le port d’un coffre, d’un cent de fagots ; les rouliers, les messagers prennent tant par livre pour le port des hardes et des ballots ; les trésoriers se font taxer de grosses sommes pour les ports et voitures d’argent ; il coûte à ce banquier mille francs tous les ans en ports de lettres (Furetière). Ordinairement, le port d’une lettre ou d’un paquet devait être payé par le destinataire. Quand l’expéditeur avait payé le droit postal, son envoi était dit franc de port. Le tarif variait selon la distance et le poids du courrier : par exemple, pour une lettre, il était de trois sols entre Paris et Lyon. Il était courant d’éviter la dépense du port en confiant son envoi à un voyageur de ses relations.
Poste
Au sens premier, c’est un lieu choisi sur les grands chemins de distance en distance, où les courriers trouvent des chevaux tout prêts pour courir et faire diligence (Furetière). En a dérivé le sens de coches transportant les personnes aussi bien que les lettres et les paquets. On distinguait deux postes : la poste aux chevaux (ou Poste royale) assurait le service du courrier officiel, et administrait les relais et leurs écuries ; la poste aux lettres était un ensemble de services privés de messagerie auxquels les particuliers recouraient pour leurs courriers et leurs déplacements, à l’aide des infrastructures organisées et entretenues par la poste aux chevaux. Le facteur de la poste tenait le bureau et les registres des messagers, et assurait la distribution des courriers. Guy Patin et ses correspondants recouraient moins volontiers à la poste, qui était tarifée, qu’aux poches et aux colis de voyageurs qu’ils connaissaient et se recommandaient les uns aux autres. V. note [3], lettre 302, pour le cumul illicite de la poste et de la messagerie.
Potiron
Autre nom du bolet, espèce de mousseron ou de champignon noir au-dedans (Furetière). On dit proverbialement d’un homme qui s’est élevé tout à coup en crédit, en fortune, qu’il est venu comme un potiron, tout en une nuit (Trévoux).
Pouls (tâter le)
On dit figurément tâter le pouls à quelqu’un pour dire : tâcher à découvrir sa pensée, ses desseins, sa valeur. Devant que de lui proposer cette entreprise, on lui a tâté le pouls, on a sondé s’il était d’humeur à y entrer. À la guerre, quand un jeune homme fait sa première campagne, ses camarades lui viennent tâter le pouls, lui faire quelque niche pour éprouver s’il a du cœur (Furetière).
Pource que
Parce que
Pratique
En matière médicale, au sens large, c’est la manière de pratiquer l’art de soigner, et, au sens étroit, c’est la clientèle du médecin (praticien), son gagne-pain.
Prédicament
Terme de logique : c’est une des catégories, une division qui se fait de la nature des substances ou des qualités des êtres. Les philosophes ne sont pas d’accord sur le nombre des prédicaments. On dit proverbialement qu’une personne est en un bon ou mauvais prédicament, selon qu’elle s’est mise en bonne ou en mauvaise réputation (Furetière).
Premier président
Le premier président d’un parlement était le magistrat qui présidait sa Grand’Chambre. Il s’agissait d’une commission confiée par le roi à une personne de son choix, prise parmi les titulaires d’une charge de président. N’étant pas titulaire d’un office, mais chargé d’une commission, le premier président était révocable par le roi. Les autres chambres avaient aussi chacune un premier président, mais on faisait suivre son titre du nom de la Chambre qu’il présidait (Bertière). Employé seul, « M. le premier président » désignait celui du Parlement de Paris.
Président
Officier créé pour présider toujours à une Compagnie : le premier président du parlement, de la Chambre des comptes, de la Cour des aides, des monnaies, des Élus, etc. Les présidents à [ou au] mortier ou grands présidents, qu’on appelle MM. du grand Banc, sont les présidents de la Grand’Chambre et de la Tournelle. Les présidents des Enquêtes, des Requêtes et du Grand Conseil ne sont que de simples commissions. On appelle présidentes les femmes des présidents (Furetière).
Présidial
Compagnie de juges établie dans les villes considérables pour y juger les recours en appel des juges subalternes et des villages dans des matières médiocrement importantes ; lieu où s’exerce cette justice (Furetière).
Prévôt des marchands
Magistrat populaire qui préside au bureau de la ville et qui y juge avec ses échevins (au nombre de quatre à Paris), qui a soin de la police des ports, de la taxe des marchandises qui arrivent par la rivière et de la navigation, et qui donne ordre aux cérémonies publiques de la ville. Il représente a la cour les bourgeois et le peuple (Furetière). À Paris, le prévôt était élu pour deux ans (et rééligible) par une assemblée de 77 personnes, composée de notables de la ville. L’élection était soumise au « bon plaisir du roi ». Elle avait lieu à l’Hôtel de Ville.

Le prévôt des marchands de Paris était distinct du prévôt des maréchaux de Paris, dit de l’Île (v. note [1], lettre 341), et du prévôt de Paris (v. note [8], lettre 333).

Privilège
Monopole, droit qu’on obtient de faire, ou de vendre quelque chose à l’exclusion de tous autres. Les privilèges sont fondés en bonne raison dans leur concession, mais dans la suite on en abuse. Les privilèges du roi pour l’impression des livres sont accordés afin que l’auteur en tire quelque récompense pour son travail ; mais dans les faits, il n’est qu’à l’avantage du libraire. Il est défendu aux libraires par les articles 33 et 77 de leurs statuts d’obtenir aucune prolongation de privilège pour la réimpression de leurs livres s’il n’y a du moins augmentation du tiers (Furetière). C’était l’équivalent de ce qu’on nomme aujourd’hui le copyright. Souvent signalé sur la page de titre (« Avec privilège du roi »), le privilège était reproduit en extrait au début ou à la fin du livre, généralement conclu par la date de l’« Achevé d’imprimer ».

À titre d’illustration, voici celui qui figure à la fin du Traité de la conservation de santé par un bon régime et légitime usage des choses requises pour bien et sainement vivre, de Guy Patin (Paris, Jean Jost, 1632) :

« Par grâce et privilège du roi, il est permis à Jean Jost, marchand libraire à Paris, d’imprimer ou faire imprimer un livre intitulé Petit traité de la conservation de la santé […] ; et défenses sont faites à tous libraires, imprimeurs et autres, de quelques qualité et condition qu’ils soient, d’imprimer ou faire imprimer, vendre ni débiter ledit livre, si ce n’est du consentement dudit Jost, et ce durant le temps et espace de dix ans, comme plus amplement est déclaré en l’original des lettres données à Paris le 20 janvier, l’an de grâce 1631. Par le roi en son Conseil, Le Long. »
Procureur
Celui qui est chargé de la procuration d’autrui, qui traite en son nom. Cet agent, ce député a traité au nom et comme procureur de sa communauté. Cette femme a traité en son nom et comme procuratrice de son mari, de lui fondée de procuration et autorisation nécessaires.

Procureur se dit aussi d’un officier créé pour se présenter en justice et instruire les procès des parties qui le voudront charger de leur exploit ou de leur procuration. On les appelait ci-devant procureurs aux causes, ou ad lites, quand ce n’était que de simples commissions. Procureur au parlement, au Châtelet, au Grand Conseil, aux Comptes, etc. Les procureurs ont aussi leurs substituts. On ne peut révoquer un procureur, qu’on n’en constitue un autre. On ne reçoit personne à plaider que par la voie de procureur (Furetière). Israélite, juif : il y a entre ces deux mots la même différence qu’entre avoué et procureur ; c’est la même signification, mais, juif et procureur pouvant se prendre en mauvaise part, on s’est nommé israélite et avoué. (Littré DLF).

Le procureur général est un grand officier qui est du Corps des magistrats, qui est l’homme du roi, la partie publique, qui seul peut conclure à peine afflictive et qui doit avoir la communication de tous les procès où le roi, le public, les mineurs, l’Eglise et les communautés ont intérêt. M. le procureur général du Parlement, de Paris, de la Chambre des comptes, du Grand Conseil, de la Cour des aides, de la Cour des monnaies.

Le procureur du roi est un substitut de M. le procureur général, qui exerce la même charge dans les sièges présidiaux ou royaux, et subalternes, et dans les commissions particulières. En toutes les causes criminelles le complaignant demande la jonction du procureur du roi.

Le procureur fiscal ou procureur d’office est celui qui fait la même charge dans une justice subalterne, et non royale, qui a soin des intérêts du seigneur du lieu et du public.

On appelle dans les moineries dom procureur celui qui sollicite les affaires du couvent et qui entend le mieux la chicane (Furetière).

Il existait à Paris deux sortes de procureurs académiques :
  • le procureur fiscal ou syndic de l’Université la représentait et défendait ses intérêts en justice ;

  • les procureurs des quatre nations représentaient la Faculté des arts dans le Conseil de l’Université que présidait le recteur et où siégeaient aussi les doyens des trois facultés (théologie, droit canonique et médecine).

Provision
En termes de Palais, ce qui est adjugé préalablement à une partie en attendant le jugement définitif ; en termes ecclésiastiques, droit de pourvoir à un bénéfice ; au pluriel, lettres par lesquelles un bénéfice ou un office est conféré à quelqu’un (Littré).
Provision (par)
En attendant.
Punais
Qui a le nez puant, ou l’haleine : cet homme est camus et punais. On appelle un égout, un trou punais ; du vin punais, qui est gâté (Furetière).
Purge, purgation, purgatio, purger, purgatif, purgans
La purge (purgatio en latin) et la saignée (ou phlébotomie, qui n’est au fond qu’une façon particulière de purger) étaient les deux grands principes thérapeutiques de la médecine hippocratique, toujours en vigueur au Grand Siècle. Purger, au sens large, c’était ôter les impuretés du corps ou son excès d’humeur. Dans un sens restreint (et implicite) c’était provoquer l’évacuation par la voie intestinale, haute (vomissement, « par haut ») ou surtout basse (défécation, « par bas »). Deux autres manières de purger étaient la sudation et la salivation, mais on les réservait essentiellement au traitement de la vérole (syphilis) par le mercure.

Il existait une vaste variété de remèdes purgatifs par le bas (cathartiques). Presque tous étaient actifs par voie orale. La voie rectale (clystère ou lavement) était moins employée que ne laisse penser l’imagerie populaire. Guy Patin n’y recourait presque jamais, donnant sa préférence aux cathartiques doux et simples (non mélangés les uns aux autres) d’origine végétale (séné, manne, sirop de roses pâles ou de fleurs de pêcher), et manifestant toujours haut et fort sa profonde aversion pour le vomissement procuré par l’émétique d’antimoine.

V. note [2], chapitre viii du Traité de la conservation de santé, pour la subtile nuance entre purgatif par en bas et laxatif.

Contrairement au cliché montrant le médecin moliéresque armé d’un clystère (grosse seringue), le lavement injecté dans le rectum n’était qu’une manière de purger, et loin d’être la plus commune.

Quant et
Avec : quant et soi signifie avec lui ou avec elle.
Quartanaire
Malade atteint de fièvre quarte, latinisme tiré de quartanarius (même sens).
Quartier
Chez le roi et les princes, le quartier était le service qu’on leur rendait durant trois mois, chacun selon sa charge : il y a des gentilshommes, des aumôniers ordinaires, et d’autres de quartier (Furetière).

Au service du roi, il y avait ainsi huit médecins par quartier, ne remplissant leur fonction qu’un trimestre par an et deux par deux. Ils assistaient aux repas et devaient coucher près de la chambre royale, d’où leur appellation de medici regis cubilarii (médecins de la chambre du roi) (B. Molitor-Canavesio in D.G.S.).

Les quartiers étaient aussi les unités de temps pour la durée desquelles on réglait les échéances des rentes et des loyers (v. note [4], lettre Comptes de la Faculté rendu le 5 février 1653 pour l’exemple trivial de la buvette des Écoles de médecine).

Quartier d’hiver
Les rigueurs du climat et le mauvais état des chemins forçaient ordinairement à interrompre les opérations guerrières depuis la fin de novembre jusqu’au début de mars (le mois du dieu de la guerre chez les Romains). Le quartier d’hiver était le lieu qu’on assignait aux troupes pour passer l’hiver, et aussi le temps qu’on demeurait en ces logements, et les avantages qu’en tiraient les capitaines : on a mis ce régiment en quartier d’hiver dans cette petite ville ; le quartier d’hiver ne durera que quatre mois ; chaque capitaine tirera du moins mille écus de son quartier d’hiver (Furetière).
Quasimodo
C’est le premier dimanche suivant Pâques. Ce nom lui vient du premier mot de l’introït de la messe qu’on dit ce jour-là : Quasi modo geniti infantes [Comme des enfants nouveau-nés]. On l’appelle aussi Pâques closes (Furetière).
Querelle d’Allemand
On dit proverbialement faire une querelle d’Allemand à quelqu’un pour dire l’attaquer sans sujet et de gaieté de cœur (Furetière).
Rabattre
« Ôter, retrancher, déduire », faire ou obtenir un rabais : « c’est un prix fait, on n’en peut pas rabattre un denier » (Furetière).
Raffiner
Rendre plus fin : le monde se raffine tous les jours ; les modernes ont bien raffiné sur les anciens en matière de sciences ; dans les affaires il faut y aller rondement, et ne point tant raffiner ; les Gascons raffinent sur le point d’honneur ; à force de raffiner et d’être délicat sur la langue, on la rendra stérile (Furetière).
Ramender
Diminuer de prix (Furetière).
Rapporteur
Juge ou conseiller qui est chargé du rapport d’un procès : l’âme d’un procès est le rapporteur ; on fait plusieurs brigues pour avoir un rapporteur à sa dévotion. Lors de la fondation du Parlement, il n’y avait que deux sortes de conseillers : les uns étaient jugeurs, qui ne faisaient que juger, et les autres rapporteurs, qui ne faisaient que rapporter les procès par écrit ; il n’y avait qu’une Chambre des enquêtes, dont les conseillers étaient appelés rapporteurs (Furetière). Le rapporteur était l’équivalent du magistrat instructeur d’aujourd’hui.
Rébus
Jeu d’esprits médiocres ou populaires qui font des équivoques sur des mots coupés ou joints ensemble, ou sur quelques peintures qui les représentent. Exemple tiré de Marot : une estrille, une faux, un veau, cela fait Estrille Fauveau. Il s’en conserve beaucoup dans les armoiries et cris de guerre. On les appelle communément rébus de Picardie parce qu’il n’y a pas longtemps que les clercs de Picardie faisaient tous les ans au Carnaval certains libelles qu’ils appelaient de rebus quæ geruntur, c’est-à-dire des railleries de ce qui se passait dans la ville, où ils faisaient de ces équivoques ; ce qui a été défendu à cause du scandale (Furetière).
Récollet
Religieux (ou religieuse) reformé de l’Ordre de saint François, qui va déchaussé et qui porte le soc ou hautes sandales (Furetière). On les nommait ainsi parce que l’on n’admettait dans cet ordre que ceux qui avaient l’esprit de récollection ou de recueillement. On les appelait aussi frères mineurs de l’étroite observance de saint François. La plupart des ordres religieux ont vu se former dans leur sein de nouveaux ordres qui n’étaient que la modification, la réforme de l’ordre primitif. C’est ainsi que trois réformes sortirent de l’Ordre des franciscains : capucins, religieux du tiers-ordre (cordeliers), et récollets. Chacune de ces réformes avait pour but de ramener à une plus scrupuleuse observation des règles établies par le fondateur de l’Ordre, et dont on s’était écarté peu à peu, soit par relâchement, soit que ces règles fussent trop rigoureuses pour être exécutées. La réforme des récollets est postérieure à celle des capucins et des religieux du tiers-ordre. Elle commença en Espagne en 1484, où elle eut pour auteur Juan de La Puebla y Sotomayor, comte de Belalcazar, fut admise en Italie en 1525 et en France en 1592. Elle s’établit d’abord à Tulle et à Murat, enfin à Paris en 1603. Les récollets ont fourni beaucoup de missionnaires et d’aumôniers dans les armées. Il existait en France, avant la Révolution, 168 couvents de récollets, répartis en sept provinces et placés sous la direction du général des cordeliers. Le pape Clément vii érigea en congrégation particulière les récollets en 1582 (GDU xixe s.).
Recommandations
Civilité par laquelle on témoigne à ses amis absents qu’on se souvient d’eux : faites mes baisemains, mes très humbles recommandations à un tel ; ses lettres sont pleines de recommandations pour tous ses amis (Furetière).
Recuit
Se dit, au sens propre, des humeurs épaisses et demi-sèches qui sont dans le corps, des excréments quand ils sont durs ou secs et quand ils marquent une grande chaleur d’entrailles (Furetière) ; retors, subtil, au sens figuré (Littré DLF).
Redoublement
Accès de fièvre qui est plus violent que la fièvre continue dont on est malade : les accès ne lui viennent pas par frissons, mais par des redoublements (Furetière).
Régent, régenter
Professeur public des arts ou des sciences, qui tient une classe dans un collège (qui régente), ou qui enseignait dans une faculté (docteur régent).
Relais
Équipage qu’on envoie devant, ou qu’on a ordonné de tenir prêt pour changer de chevaux ou de voiture, quand on veut faire diligence (Furetière). Le carrosse de relais était le moyen le plus rapide de voyager par route.
Relevée
L’après-dînée ou le temps d’après midi. Ce mot vient de ce qu’autrefois on faisait la méridienne (sieste) sur des lits de salle qu’on nommait grabats, et on nommait relevée le temps où on se relevait pour retourner à son travail (Furetière).
Remède, remédier
La médecine est « l’art de remédier », ars medendi.

Toute forme d’acte thérapeutique (du latin mederi, soigner, remédier), ou remède (θεραπεια [thérapéia], remedium en latin), était synonyme de « médecine », au sens large de médicament, de ce qui est appliqué ou préparé par l’art du médecin pour guérir une maladie, une douleur. Les emplâtres, céroènes (onguents cireux), cataplasmes sont des remèdes topiques qu’on applique sur la partie affligée. Le mercure, le quinquina sont des remèdes spécifiques pour certaines maladies. Les saignées, les potions sont des remèdes dont usent les méthodiques. Les eaux minérales, le lait sont les derniers remèdes des médecins. L’émétique (antimoine) et les remèdes chimiques sont violents et dangereux. On appelle le grand remède, la salivation ; et alors on dit qu’un homme se met dans les remèdes, quand il est résolu d’en user. On appelle un petit remède, un lavement qu’on prend souvent par délicatesse et pour se rafraîchir le teint. Il y a trois remèdes généraux : la diète, la chirurgie et la pharmacie (Furetière).

À l’instar des quatre éléments et des quatre humeurs (bile jaune, sèche et chaude comme le feu ; bile noire, sèche et froide, comme la terre ; sang, humide et chaud, comme l’air ; pituite, humide et froide, comme l’eau), les organes, leurs maladies et les médicaments qu’on y opposait étaient chauds ou froids, secs ou humides. Cela explique les qualificatifs d’échauffant, rafraîchissant, asséchant ou humidifiant (humectant) qu’on attachait aux drogues. À ces qualités premières de chacune, on attribuait un degré (allant du premier au quatrième) proportionnel à sont effet. Le système humoral avait une cohérence parfaite, quoique ses fondements fussent parfaitement faux : soigner revenait à rétablir l’intempérie des humeurs corporelles en la contrariant le plus habilement possible, c’est-à-dire au meilleur moment et avec le remède le plus adéquat.

Remonter sur sa bête
On dit proverbialement, qu’un homme est remonté sur sa bête, non seulement au jeu, quand il a regagné la bête (mise pedute au jeu de cartes) qu’il avait payée, mais aussi quand il a rétabli sa fortune qui était fort altérée, ou quand il est rentré en quelque charge ou affaire dont il avait été éloigné (Furetière).
Rencontre
Substantif souvent employé au masculin au xviie s., qui signifiait alors, comme aujourd’hui : « assemblage, jonction de deux choses qui se mêlent ensemble, ou qui se touchent simplement » (Furetière) ; mais aussi « circonstance, occasion, équivoque, allusion, pointe d’esprit, quelque mot facétieux dit à propos, une turlupinade » (ibid.) ; par rencontre, fortuitement ; en ce rencontre, en cette circonstance.
Rente
« Revenu d’un capital qui vient tous les ans : profit d’argent, fruits d’une terre. Rentes se dit aussi de celles que le roi constitue à ses sujets, qu’on appelle rentes de [ou sur] l’Hôtel de Ville [placement favori des Parisiens au temps de Guy Patin (v. note [8], lettre 39)], dont il avait autrefois plusieurs parties assignées sur divers fonds. Les rentes du sel, des aides, du clergé, des recettes générales et des tailles ; elles sont à présent [1690] toutes remboursées. Il y avait des payeurs et des contrôleurs de ces rentes sur chaque partie » (Furetière).
République
La république des lettres (ou littéraire) désignait collectivement tous les gens d’étude (Furetière), où le mot république était employé dans son sens étymologique (res publica) de bien commun. Guy Patin a aussi employé le terme de république médicale (respublica medica).

Politiquement, une république (comme celles de Venise, de Gênes, de Genève, de Strasbourg ou des Provinces-Unies) était en principe (comme de nos jours) un gouvernement dévolu au peuple (démocratie), mais, dans les faits, à un petit nombre de personnes (oligarchie) et sans transmission héréditaire du pouvoir. La République britannique établie par Cromwell (1649-1660) portait le nom de Commonwealth, traduction anglaise fidèle de res publica. Rome a été une république pendant les cinq siècles qui ont précédé l’Empire, au début de l’ère chrétienne.

Résous
Participe passé masculin de résoudre, pour résolu.
Ressentiment
En morale, les ressentiments sont des sentiments de l’âme quand elle est émue de certaines passions : la reconnaissance est un ressentiment qu’on a du bien que quelqu’un nous a fait ; la vengeance est le ressentiment qu’on a des injures qu’on a souffertes.

En pathologie, le ressentiment est une douleur ou maladie dont on sent encore quelques restes : il porte une canule en une plaie qu’il a reçue autrefois, cela lui cause souvent quelque ressentiment douloureux ; le fort de sa goutte est passé, il ne lui en reste qu’un petit ressentiment (Furetière).
Retentum
Terme du Palais et purement latin qui se dit d’une réserve que fait une Cour souveraine, apposée au bas de la minute d’un arrêt. Elle porte modération de la peine d’un accusé ou quelque autre intention des juges. Dans les grandes exécutions, il y a souvent un retentum que le criminel sera étranglé avant un plus grand supplice (Furetière).
Rhapsodie
Recueil de plusieurs passages (vlieux communs), pensées et autorités qu’on rassemble pour en composer quelque ouvrage (vcenton). Les Politiques de Lipse sont une rhapsodie, où il n’a mis que des conjonctions et des particules. L’Iliade d’Homère est intitulée rhapsodie. Quand on veut mépriser l’ouvrage d’un auteur, on dit que ce n’est qu’une rhapsodie, qu’il n’y a rien de son invention (Furetière). Un rhapsode est l’auteur d’une rhapsodie.
Robe
À l’égard des hommes, ne se dit que du vêtement que portent les gens de justice et les gradués, qu’on appelle pour cela gens de robe ou de robe longue. C’est un ample vêtement qu’on met par-dessus l’habit ordinaire, qui descend jusqu’aux talons et qui a les manches plus larges que les laïques, et plus étroites que les ecclésiastiques. Les conseillers de Cour souveraine et les médecins portent la robe rouge (Furetière). Guy Patin s’est beaucoup offusqué de la prétention qu’avaient les chirurgiens de Saint-Côme de porter robe longue et bonnet, alors que la plupart ne savaient pas même le latin.
Rodomontade
On dit d’un fanfaron, d’un faux brave qui se vante à faux de plusieurs exploits, qui fait des menaces vaines, qu’il veut imiter Rodomont (personnage de l’Arioste). D’où vient qu’une rodomontade est une vanterie ou menace vaine et sans fondement : c’est le propre des capitans de faire des rodomontades ; les poltrons qui font les braves et les gueux qui font les riches font des rodomontades (Furetière).
Roi (reine) très-chrétien(ne) et roi (reine) catholique
Le pape Étienne ii (752-757) avait décerné au roi de France Pépin le Bref (751-768) le titre de roi très-chrétien (rex christianissimus) qui devint officiel au xve s. : le pape Paul ii (1464-1471) avait alors refusé à Louis xi (1461-1483) l’autorisation d’agir contre le cardinal La Balue (accusé d’avoir trahi la Couronne de France), mais avait entouré son refus de considérations honorifiques réservant cette appellation aux seuls rois de France. Leur épithète est antérieure à la Réforme protestante et ne saurait couvrir les deux religions chrétiennes qui ont commencé à s’affronter en France durant le règne de François ier (1515-1547).

Ultérieurement (en 1494, sous le règne conjoint d’Isabelle de Castille et de Ferdinand d’Aragon), le pape Alexandre vi (1492-1503) accorda au roi d’Espagne le titre de roi catholique ; « ce qui lui vaut, à Rome, de venir dans les préséances après le roi de France, premier roi chrétien, et d’en concevoir un notable dépit. Le changement de préséance tenté par le concile de Trente au profit de l’Espagne alimentera les polémiques et ne sera jamais accepté par la France dont il entretient, entre autres raisons gallicanes, l’hostilité envers le concile » (Hildesheimer a, pages 29 et 85).

Rois (fête, jour des)
Roi se dit aussi des personnes qui sont de vaines images ou représentations du roi, comme celui qu’on fait au jour des Rois, qu’on nomme le roi de la fève. C’est celui qui a trouvé la fève au gâteau dans sa part. On va faire les Rois, crier Le roi boit ! en un tel lieu, pour dire y faire la cérémonie de cette réjouissance qu’on célèbre le 6 janvier en l’honneur de la fête des Rois ou de l’Épiphanie, qui est pourtant une imitation des saturnales des païens parce qu’en quelques lieux on mettait un enfant sous la table, qui représentait Apollon, pour le consulter comme un oracle sur la distribution du gâteau en criant Phœbe Domine ! [Seigneur Apollon !]. Tacite parle aussi des rois des festins qui se faisaient dans les fêtes saturnales et qui s’élisaient au sort des dés, qui avaient droit de commander tout ce qui leur plaisait (Furetière).
Romain
En imprimerie on appelle du gros romain les caractères dont la taille est entre le petit parangon et le Saint-Augustin ; le petit romain est entre le cicéro et le petit texte. On donne aussi ce nom à du papier d’une certaine grandeur (Furetière).
Roman
Livre fabuleux qui contient des histoires d’amour et de chevaleries, inventées pour divertir et occuper des fainéants (Furetière).
Romanesque, romaniste
Romanesque : qui tient du roman, qui est extraordinaire, peu vraisemblable (Furetière) ; mais par dérision, Guy Patin n’a employé ce mot que pour qualifier ce qui est relatif aux affaires du pape à Rome. Sous sa plume, on trouve aussi romaniste pour partisan du pape.
Rousseau
Qui a le poil roux. On tient que Judas était rousseau, c’est pourquoi on hait beaucoup les rousseaux (Furetière).
Sac
En termes de Palais, se dit de celui où l’on met les papiers d’un procès. Juger un procès sur l’étiquette du sac, c’est juger sans voir les pièces, décider une chose sans s’en vouloir bien instruire. Il faut voir le fond du sac pour dire s’instruire d’une affaire à fond ou aller jusqu’à la conclusion. On dit qu’une affaire est dans le sac pour dire qu’on est assuré qu’elle réussira. On dit aussi qu’un homme a perdu la meilleure pièce de son sac quand il a perdu celui qui lui donnait une puissante protection (Furetière).
Safranier
Banqueroutier qui n’a plus de bien. Quelques-uns disent que ce mot vient de safre et goulu, qui a mangé son patrimoine ; d’autres du mot de safran, parce que le chagrin d’un homme qui a mal fait ses affaires le rend jaune et sec, et l’on dit qu’il trafique en safran. Il peut venir aussi de ce qu’il n’y a pas longtemps qu’on peignait de jaune ou de couleur de safran les maisons des banqueroutiers, ou de ceux dont les biens étaient confisqués avec note d’infamie (Furetière).
Saint-Jean
Fête de saint Jean le Baptiste, célébrée le 24 juin, trois jours après la date ordinaire du solstice d’été.
Saint-Luc
Fête de saint Luc l’Évangéliste, célébrée le 18 octobre. M. saint Luc, comme l’appelait Guy Patin, est le patron des médecins car son ami saint Paul l’a appelé « le cher médecin » (Épître aux Colossiens, 4:14). La Faculté de médecine célébrait solennellement chaque année la Saint-Luc par une messe à laquelle devaient assister tous les docteurs régents et tous les étudiants ; après quoi, les principaux statuts des Écoles étaient lus devant toute l’assemblée.
Saint-Martin (d’hiver)
On célèbre la Saint-Martin avec une grande réjouissance le 11 novembre. Faire la Saint-Martin, c’est faire bonne chère ce jour-là ; boire le vin de la Saint-Martin. On a appelé l’ivresse, le mal Saint-Martin, à cause qu’autrefois on tenait des foires pour la vente du vin vers la Saint-Martin, où on buvait beaucoup (Furetière). La rentrée des facultés de Paris (tout comme celle du Parlement) se faisait le jour de la Saint-Martin : il marquait la fin des vacances (qui se prenaient durant l’automne, commençant un peu avant la Saint-Luc) ; les cours de la Faculté de médecine reprenaient et, dans les semaines qui suivaient, les thèses commençaient à être disputées (soutenues) ; le doyen avait été élu ou reconduit le samedi suivant la Toussaint.
Saint-Rémy
La Saint-Rémy se fête le 1er octobre. Dans l’Université de Paris les classes et l’année scolastique commençaient à la Saint-Rémy (Remigialia).
Saison (de, hors de)
Moment convenable.
Salut à toi, à vous, Vale, Valete
« Adieu », « portez-vous bien » (dans le vouvoiement constant de Guy Patin) : conclusion usuelle d’une lettre latine ; v. la fin de la note [52] du Patiniana 4, pour une explication complète.

Vale et vive est un renforcement qui ajoute « vivez heureux (ou longtemps) ».

Sangler
Donner à quelqu’un une atteinte, lui faire quelque préjudice notable (Furetière).
Scandaliser
Déchirer la réputation de quelqu’un, le blâmer : cet impudent va scandaliser partout cette femme, il la décrie, il la calomnie, il lui fait des affronts (Furetière).
Scolie
Commentaire, annotation ou observation qu’on fait sur quelque passage d’un auteur (Furetière).
Secrétaire d’État
Officier qui expédie par le commandement de son maître des lettres, des provisions, des brevets, et qui les rend authentiques par sa signature. Le roi a quatre secrétaires d’État, ou de ses commandements, qui ont souvent la qualité de ministres, qui expédient ses dépêches, ses lettres de cachet, ses brevets, et les arrêts du Conseil d’en haut, et les provisions qu’ils signent en commandement, qui gardent et signent les minutes des traités de paix, contrats de mariage et autres affaires importantes de la Couronne. Ce mot de secrétaire est un nom honorable que plusieurs ont pris au lieu de clercs et de scribes qu’ils avaient anciennement (Furetière).

Autrement nommés ministres, les quatre secrétaires d’État étaient respectivement chargés de la guerre, de la Maison du roi et Paris, des affaires étrangères et des affaires de la Religion prétendue réformée. Au moment de leur création, sous Henri ii en 1547, ils portaient le titre de conseillers du roi et secrétaires de ses commandements et finances, et ne prirent celui de secrétaires d’État qu’à partir de 1559. Ils n’avaient pas automatiquement rang de ministres, c’est-à-dire qu’ils n’étaient pas toujours membres du Conseil d’en haut, à l’exception du secrétaire d’État aux affaires étrangères, qui y avait toujours entrée, et qui en était le principal rapporteur. (DGS)
Secrétaire du roi
Les secrétaires du roi sont des officiers qui signent toutes les lettres qui s’expédient dans les grandes ou petites chancelleries au nom du roi et avec son paraphe fait en forme de grille, qu’ils mettent au devant du leur (Furetière). Ils étaient distribués en plusieurs collèges, parmi lesquels le grand Collège, servant la Chancellerie de France, conférait la qualité de « conseiller, notaire et secrétaire du Roi, Maison et Couronne de France, et de ses Finances », autrement nommés garde-notes et boursiers.

Au nombre de quelque 300, ces offices étaient fort courus des roturiers fortunés. Il s’agissait le plus souvent de sinécures qui, au prix d’une somme jugée raisonnable (moins de 100 000 livres), faisaient jouir leurs titulaires de beaux privilèges : exemption d’impôts et du logement des gens de guerre, privilège du committimus (droit de choisir ses juges en cas d’action en justice), autorisation d’exercer le commerce en gros, et surtout noblesse au premier degré (avec le titre de seigneur).

Ce dernier avantage valait à l’office de secrétaire du roi le surnom de « savonnette à vilain ». Un grand nombre appartenait à la classe des partisans enrichis : « À la différence des offices importants de l’État, anoblissants mais fermés aux élévations trop rapides, soupçonneux envers des candidats proches du maniement des toiles ou des sacs de grains, la chancellerie est plus complaisante. Les fils de marchands comme les enfants de modestes robins peuvent prétendre forcer sa porte. Les écus amassés par leurs pères ou par leurs soins y pourvoient. La fonction des offices de chancellerie est d’aspirer vers la noblesse la partie fortunée du tiers [état] » (J.‑F. Solnon, in D.G.S.)
Semestre
Moitié de l’année, pendant laquelle la moitié d’une compagnie s’assemble pour tenir sa séance alternativement. La Chambre des comptes est une compagnie semestre, tous les officiers y sont semestres. Il a mieux aimé prendre une charge semestre pour se reposer six mois durant. Henri iiI fit le Parlement de Paris semestre, mais ce semestre fut supprimé au bout de trois ans. Semestre, est aussi substantif, et se dit non seulement du temps que servent les officiers, mais encore des officiers mêmes. Il y a des semestres qui commencent en janvier et en juillet, comme celui de la Chambre des comptes ; d’autres en mars et en octobre, comme celui du Grand Conseil : le semestre d’été, le semestre d’hiver ; il est en semestre, hors du semestre (Furetière). Transformer une charge en semestre, c’était réduire de moitié les émoluments de l’officier et doubler les charges vénales vendues par le roi.
Sergent
Un sergent de justice, ou huissier, est le plus bas officier de justice, qui sert à exécuter ses ordres. Les sentences et arrêts en forme, les lettres de chancellerie portent commission ou mandement au premier huissier ou sergent de les mettre à exécution, de faire tous exploits, assignations et contraintes à ce nécessaires. Quand on ne peut rien tirer d’une personne, on dit qu’il lui faut envoyer un sergent, on la menace de sergents.

En termes de guerre, sergent se dit d’un bas officier d’infanterie qui est dans chaque compagnie, armé d’une hallebarde et préposé pour faire garder les distances, et dresser les files et les rangs. Le sergent est le premier des hautes payes. Chaque compagnie des gardes a six sergents. Celles des autres corps en ont deux. Les compagnies des dragons en ont aussi deux (Furetière).
Sérosité, séreux
Mots dérivés du latin serum, petit-lait, qui désigne tout liquide corporel aqueux, alors tenu pour être la forme diluée (déliée) de n’importe laquelle des quatre humeurs (bile jaune, bile noire [atrabile, mélacolie], sang, pituite [flegme]). Leur accumulation engendrait l’hydropisie ou anasarque. Aujourd’hui, le sérum est la partie liquide du sang (plus exactement nommée plasma) et de la lymphe. Hors des vaisseaux, l’eau corporelle est appelée liquide interstitiel ; sa richesse en sodium et en protéines régit ses échanges à travers les membranes. On donne le nom de séreuses à celles qui tapissent les grandes cavités viscérales : plèvres pour les poumons, péricarde pour le cœur, péritoine pour les viscères abdominaux. L’accumulation de sérosité (humeur séreuse) y provoque des épanchements (pleurésie, péricardite, ascite). La fuite de la sérosité sous la peau et dans les organes est responsable des œdèmes.

Simple
Qui est sans composition, sans mélange ; opposé à composé. C’est un nom général qu’on donne à toutes les herbes et plantes parce qu’elles ont chacune leur vertu particulière pour servir d’un remède simple. Le roi entretient en son jardin des simples des médecins botaniques, qui apprennent à connaître les simples (Furetière).
Solécisme
Grosse faute contre la langue et contre les règles de la grammaire, soit dans les déclinaisons, les conjugaisons ou la syntaxe (Furetière).
Soudoyer
Payer la solde aux gens de guerre pour les entretenir et faire subsister en corps (Furetière).
Souffleur
Chercheur de pierre philosophale, qui a un fourneau et qui convertit son bien en charbon, à la persuasion de quelques charlatans qui lui font entendre qu’ils ont de beaux secrets (Furetière). Nom donné aux alchimistes qui, en soufflant dans leurs fourneaux, espéraient trouver la pierre philosophale (Littré DLF) Pour Guy Patin, ce mot englobait tous les partisans et praticiens de la médecine chimique (chimiatrie).

Sourcilleux
Terme poétique, qui ne se dit que des montagnes et des rochers fort élevés, et qui semblent être orgueilleux par leur élévation (Furetière). Qui exprime par ses sourcils la hauteur, l’orgueil, la sévérité (Littré DLF).
Sourdement
Secrètement et sans bruit (Furetière).
Sous ombre
Ombre signifie aussi couleur, apparence, prétexte : les Turcs ont usurpé les terres de plusieurs princes sous ombre de leur donner du secours ; il se fait bien des méchancetés sous ombre de dévotion, de justice ; sous ombre qu’il faut aller à la messe, les femmes font parfois des escapades (Furetière).
Spécieux
Qui a belle apparence, surtout en matière de raisonnement. Voilà un argument bien spécieux, bien probable. La guerre s’entreprend toujours sous des prétextes spécieux, qui paraissent justes (Furetière).
Spirituel
Au sens premier, cet adjectif qualifie ce qui a trait à l’esprit : les substances créées se divisent en spirituelles, comme les anges et l’âme raisonnable, et en corporelles, comme les animaux, les métaux et les minéraux. Se dit aussi : d’un esprit éclairé, et qui a de belles lumières et de belles connaissances ; de l’application à la méditation, à la contemplation des choses divines, aux exercices de piété ; et en ce sens, il s’oppose à mondain, charnel, temporel (Furetière).
Stations
Églises qui sont assignées pendant le jubilé pour y gagner les indulgences en les allant visiter et y faisant certaines prières (Furetière).
Stibial
Adjectif qualifiant ce qui est relatif à l’antimoine (stibium). Les stibiaux (ou antimoniaux) étaient les défenseurs de l’emploi thérapeutique de ce métal, comme émétique (vomitif).
Stoïque
Ce mot a rapport à l’humeur, à l’esprit, à la conduite et à la mine, et veut dire sévère, grave, qui ne s’ébranle de rien, qui a une humeur particulière (Richelet). Il est venu en usage dans la langue parce qu’on dit une constance stoïque, pour dire une fermeté inébranlable. Celle des martyrs l’a emporté sur celle des stoïques (Furetière). V. note [8], lettre 340, pour Zénon de Cition, fondateur du stoïcisme.
Suffragant
Se dit d’un évêque particulier à l’égard de son archevêque, duquel il dépend et devant lequel se relèvent les recours en appel de l’official de l’évêque. L’archevêque de Paris a quatre suffragants : les évêques de Chartres, de Meaux, d’Orléans et de Blois. Est aussi un évêque ou archevêque coadjuteur, qui a un titre in partibus infidelium [dans les contrées des infidèles (c’est-à-dire avec un diocèse fictif)], et qui aide un autre prélat à faire des fonctions ou qui les fait en son absence (Trévoux).
Superbe
Mot qui est à la fois substantif féminin, pour vanité qui rend orgueilleux, et adjectif, pour vain, orgueilleux, qui a de la présomption, une trop bonne opinion de soi-même (Furetière).
Supputer
Calculer, examiner par les règles d’arithmétique, en ajoutant, soustrayant, multipliant, ou divisant (Furetière).
Surnom
Comme fait encore l’anglais (surname, nom de famille), le surnom était alors « le nom qu’on ajoute au nom propre ou au nom de baptême. C’est d’ordinaire celui de la famille ou d’une seigneurie » (Furetière). Surnom avait aussi le sens qu’il a conservé aujourd’hui de « sobriquet qu’on donne à quelques gens du peuple par raillerie et qui a quelquefois tourné en nom de famille » (ibid.).
Surséance
Grâce, terme, délai qu’on accorde à ceux qui sont obligés de payer quelque dette ou de faire quelque chose (Furetière). À la guerre, une surséance d’armes est une trêve.
Survivance
Privilège que le roi accorde à quelqu’un pour succéder à une charge, ou même pour l’exercer conjointement avec celui qui en jouit. Un premier gentilhomme de la Chambre obtient souvent la survivance pour son fils, et même l’exercice de sa charge en son absence. Un conseiller reçu en survivance n’a point besoin de nouvelle réception après la mort de son père. Une survivance empêche que la charge ne vaque (Furetière).

Guy Patin a beaucoup parlé de survivances pour les charges de professeur du roi : celle de Jean ii Riolan en sa faveur, et la sienne en faveur de son fils Robert.
Sus
Adverbe et (rarement) préposition qui avait le même sens que sur ou dessus : courir sus pour courir après, poursuivre ; mettre sus pour mettre sur le dos ; remettre sus pour rétablir, faire revivre, relancer.
Syndic
Officier qui est chargé des affaires d’une ville, d’une communauté ; on le dit aussi d’un avocat qui entreprend la défense de quelqu’un : le syndic des États de Languedoc ; les communautés de Provence envoient faire leurs remontrances par leur syndic. Il y a aussi un syndic en Sorbonne. Il y en a aussi du clergé, d’un diocèse, en plusieurs corps de métiers (comme les libraires). Le syndic est aussi chargé de solliciter une affaire commune en laquelle il a intérêt, après avoir été élu et nommé pour cet effet par ses consorts. Quand il y a plusieurs créanciers d’un même débiteur, on élit des directeurs et un syndic pour défendre les intérêts de la communauté. Syndicat : charge ou fonction de syndic (Furetière).

Tablature
Notes ou marques qu’on met sur du papier réglé pour apprendre à jouer des instruments. On dit proverbialement je lui ai bien donné de la tablature pour dire : je lui ai suscité une affaire fort difficile, et dont il aura bien de la peine à se démêler. Il lui donnera longtemps de la tablature : il est capable de l’enseigner longtemps (Furetière) ; on disait aussi, comme aujourd’hui, donner du fil à retordre.
Tablette
Assemblage de plusieurs ais ou de planches en divers rangs propres pour mettre des livres, des curiosités, ou autres choses qu’on veut garder et arranger. Dans cette bibliothèque il y a 20 tablettes ou armoires de livres. Chaque armoire a six tablettes, ou planches et rangées de livres. Les livres in‑8o se mettent dans les hautes tablettes ; ceux in‑fo dans les basses (Furetière)
Taille-douce, planche de gravure
Gravure faite sur une planche de cuivre avec le burin seul, sans le secours de l’eau-forte (Littré DLF).

Une planche de graveur était une feuille fine et fort polie de cuivre, sur laquelle on gravait au burin, ou en eau forte ; on faisait aussi des planches gravées sur bois, dont les estampes s’appelaient tailles de bois ; « cet auteur a fait graver les planches de son livre » (Furetière).

Te Deum
Cantique latin catholique qui, outre qu’il se dit ordinairement à la fin de matines, se chante extraordinairement avec pompe et cérémonie pour rendre publiquement grâces à Dieu d’une victoire remportée, ou de quelque autre événement heureux (Académie). Le texte, dont l’origine exacte n’est pas connue, commence par cette strophe : Te Deum laudamus,/ Te Dominum confitemur./ Te æternum Patrem,/ Omnis terra veneratur [Nous te louons, Dieu, nous t’acclamons, Seigneur. Père éternel, toute la terre te vénère].
Temporel
Adjectif et substantif, qu’on oppose à spirituel, notamment pour désigner le revenu qu’un ecclésiastique tire de son bénéfice.
Teston
Ancienne monnaie de France, ainsi nommée à cause de la tête du roi qui y était gravée. Il a valu 15 sols 6 deniers, puis 19 s. 6 d. (soit 6 d. de moins qu’une livre tournois) (Furetière). V. note [25] du Borboniana 2 manuscrit pour une digression plus longue.

Théologal
Chanoine, docteur qui prêche et qui enseigne la théologie dans un chapitre (Furetière).

Tout à l’heure
Aussitôt, tout de suite, sur-le-champ.
Tout à plat
Absolument, nettement : je lui ai dit tout à plat et à son nez qu’il avait tort ; voilà une proposition que je nie tout à plat ; cet homme est ruiné tout à plat, entièrement (Furetière).
Tout de bon
Sérieusement, véritablement, pour de bon.

Toutes et quantes fois
Toutes les fois que, autant de fois que.
Tranchée
En termes de guerre, c’est un fossé qu’on creuse dans la terre pour approcher à couvert du corps de la place assiégée. Il est large et profond de sept à huit pieds (2,3 à 2,6 mètres), et coupé en talus ; ce qui lui donne le nom de tranchée. On l’appelle autrement ligne d’approche ou ligne d’attaque, et il a un parapet du côté des assiégés. On fait aussi des tranchées sans creuser, en se couvrant de fascines, de gabions, de sacs de laine, ou de terre, quand le terrain est de roche, difficile à creuser, ou sujet à faire des éclats. Ouvrir la tranchée, c’est commencer de faire des lignes d’approches. On dit qu’on a pris une ville en huit jours de tranchée ouverte, c’est-à-dire depuis qu’on a commencé les approches. On dit que les ennemis ont nettoyé la tranchée, quand ils ont chassé ou tué les soldats qui la gardaient (Furetière).
Trémousser (se)
Se remuer doucement et mollement, frétiller, ne pouvoir demeurer en place ; signifie aussi s’empresser, s’intriguer, se mettre fort en peine de la réussite de quelque affaire (Furetière).
Très salubre Faculté
Attribut spécifique de la Faculté de médecine de l’Université de Paris, saluberrima Facultas ; aussi parfois traduit par « très salutaire Faculté ».

Tretous
Archaïsme (attesté par T. Corneille) qu’André Falconet utilisait pour dire « tous autant qu’ils sont ».
Trompette
Le cavalier qui sonne de cet instrument. Ce sont les trompettes qu’on envoie aux assiégés pour les sommer de se rendre, pour leur faire savoir quelque chose (Furetière).
Trop bien (que)
Même si.
Turc
Substantif et adjectif désignant soit les sujets de l’Empire ottoman (avec majuscule initiale dans l’emploi substantif) soit, plus largement, l’ensemble des mahométans (avec minuscule initiale).

Le Turc, Grand Turc ou Grand Seigneur, était l’empereur ottoman.

Ultramontain
« Qui est au delà des monts. Il se dit proprement par relation de la France et de l’Italie, séparées par les montagnes des Alpes. En France on ne reçoit point les opinions des canonistes ultramontains ni < celles > d’Italie. Les peintres appellent Ultramontains, ou simplement Tramontains, tous ceux qui ne sont pas d’Italie » (Furetière).

Vacances
Suspension d’affaires ou d’études. Les vacances du Parlement de Paris allaient du 7 septembre au 12 novembre (lendemain de la Saint-Martin d’hiver) ; celles de la Faculté de médecine, du 23 juin au 13 septembre.
Valétudinaire
Infirme, sujet à de grandes maladies.

Valise
Vaisseau (récipient) de cuir de figure ronde et oblongue qui se ferme avec une chaîne ou un cadenas, et qui sert à transporter les habits et les hardes d’un cavalier sur la croupe d’un cheval. Les lettres qu’on envoie par la poste sont enfermées dans une valise. C’est le cheval du valet qui porte en croupe la valise du maître (Furetière).
Version
Traduction de quelque livre ou écrit d’une langue en une autre.
Viagère
Qui dure pendant la vie : une rente, une ferme, une pension donnée à viage ou viagèrement, c’est-à-dire pour en jouir pendant la vie (Furetière).
Vieil
Vieux : vieux (âgé ou ancien) ; le Vieil Testament était l’Ancien Testament de la Bible.

Voire même
Voire vient du latin verum, veramente, vraiment. C’était au xviie s. un terme considéré comme archaïque et populaire [« reçu dans le burlesque » (Richelet) ; « dans le style bas ou en badinant » (Trévoux)]. Son association à même, aujourd’hui considérée comme un pléonasme, était alors admise (comme encore du temps de Littré). Guy Patin s’en servait volontiers.
Voiture
Transport de personnes ou de choses pesantes, qui se fait par le moyen de chevaux, charrettes, bateaux, etc. (Furetière) ; frais attenant à ce port. En dérivent le verbe voiturer et le substantif voiturier.

Lettre de voiture : « écrit qu’on donne aux voituriers en les chargeant de marchandises, qui contient l’indication des articles, et à présentation duquel ils sont payés de leur salaire » (Littré DLF).

Voltiger
Faire divers tours et retours à cheval autour de quelque place : les ennemis ont longtemps voltigé autour de notre camp, ont fait plusieurs escarmouches pour nous attirer en campagne (Furetière).