« et tout cela en vain : “ Contre la puissance de la mort, il n’y a pas de médicament dans les jardins. ” » Guy Patin a souvent cité cette sentence fataliste extraite de la Schola Salernitana [L’École de Salerne], dans les cinq vers De Salvia [La Sauge, v. note [2], lettre latine 307] (édition commentée de René Moreau, Paris, 1625 [v. note [4], lettre 12], chapitre xxxviii, page 406) :
Cur moriatur homo, cui salvia crescit in horto ?
Contra vim mortis non est medicamen in hortis.
Salvia confortat nervos manuumque tremores
tollit et eius ope febris acuta fugit.
Salvia, castoreumque, lavendula, primula veris
Nasturt. Athanas. hæc sanant paralytica membra.
Salvia salvatrix, naturae conciliatrix.
[Pourquoi mourrait l’homme, quand pour lui pousse la sauge dans le jardin ? Contre la puissance de la mort, il n’y a pas de médicament dans les jardins. La sauge donne des forces, elle enlève les tremblements des mains, et la fièvre aiguë se dissipe sous son effet. Sauge, castoréum, lavande, primevère, nasturce, athanasia guérissent les membres paralytiques. La sauge est secourable, elle nous gagne les bonnes grâces de la nature].
Traduction en vers burlesques de Louis Martin (probable pseudonyme de Guy Patin, Paris, 1650, v. note [5], lettre 203 ; pages 30‑31) :
« Pourquoi faut-il que l’homme meure,
Puisqu’en son jardin à toute heure
Il a de la sauge planté ?
Dieu contre la mort n’a planté
Aucune herbe dessus la terre
Pour garder l’homme de la guerre,
Et des lacs que la mort a tendus
À son chétif individu.
Sauge pourtant les nerfs conforte,
Rend la main qui tremble plus forte,
À la fièvre donne congé,
Si j’ai bien le latin changé
Sauge, lavande et primevère
Redonnent la santé première
Aux malades du mal saint Pris,
Quand avec cresson ils sont pris,
Y joignant de la tanaisie,
Dont j’ai mangé par fantaisie,
Sauge sauve de plusieurs maux,
Ainsi s’accordent ces deux mots. »
Sur la mort de Richelieu, Triaire cite la lettre de F.S.D.I.C. (le frère Séraphin de Jésus, alias Christophe Billard, carme tourangeau mort en 1644) au marquis de Fontenay-Mareuil, datée de Paris le 6 décembre 1642 (BnF L.B36.3315) :
« Richelieu succomba à une pneumonie. Cette affection aiguë n’était que le dénouement d’un état morbide préexistant depuis longtemps, surtout depuis son séjour en Roussillon. Voici la seule relation médicale qu’on possède sur sa fin : “ Le 28 novembre, le cardinal fut pris d’un violent frisson et d’un point de côté. Bouvard, appelé, le saigna deux fois dans la nuit du dimanche au lundi ; mais le malade cracha du sang et la fièvre redoubla. Du lundi au mardi, la douleur ayant augmenté, on pratiqua deux nouvelles saignées. Le mardi 2 décembre eut lieu une consultation dans laquelle il fut décidé de pratiquer une nouvelle émission sanguine et d’avoir recours aux purgatifs. La fièvre ayant redoublé le soir, on fit deux nouvelles saignées. Le mercredi, 3 décembre, un empirique de Troyes, nommé Le Fèvre, fut appelé et administra une pilule qui sembla donner un peu de soulagement. Enfin, le jeudi 4 décembre, septième jour de la maladie, le cardinal fut pris de sueurs froides et expira à midi. ” On ouvrit le crâne et on examina le cerveau. “ Il ne faut pas s’étonner, puisqu’on lui a trouvé tous les organes de l’entendement doublés et triplés, s’il avait un esprit qui s’arrêtait où il lui plaisait et s’en dégageait quand il voulait, avec autant de facilité qu’il semblait qu’il y eût autant de différents esprits en lui comme étaient différentes les affaires qu’il maniait. ” »
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