À André Falconet, le 5 septembre 1651, note 16.
Note [16]

Oliver Cromwell (Huntingdon 1599-Londres 13 septembre 1658) était issu d’une famille de gentilshommes campagnards puritains. Marié à 21 ans, il s’était jeté dans l’exaltation religieuse et consacré tout entier aux intérêts de la secte calviniste presbytérienne alors persécutée. Il avait fait partie du Short Parliament de 1628, vite dissous par Charles ier. Membre du Long Parliament (1640, v. note [11], lettre 39), Cromwell s’était rangé sous la bannière de John Hampden (1595-1643), son oncle, et avait appuyé avec chaleur toutes les mesures qui désarmèrent successivement la royauté et investirent le parlement d’une portion de la souveraineté.

Dès le début de la guerre civile (1642), Cromwell avait obtenu une commission de capitaine de cavalerie et constitué une armée redoutable dont la vaillance et la discipline se fondaient sur l’attachement de chacun de ses hommes au puritanisme le plus strict. Il était bientôt devenu le principal chef militaire du parti parlementaire et ses cavaliers (ironsides, côtes de fer), fanatisés par l’assurance d’accomplir une mission divine, avaient volé de victoire en victoire jusqu’à l’écrasement final de l’armée royale à Naseby (juin 1645). Devenu chef d’un tiers parti, les indépendants, entre les républicains du parlement et le roi, Cromwell avait cherché à s’allier au parti royal, mais se voyant dupé par le double jeu de Charles ier, il s’était résolu à purger le parlement désuni (Pride’s purge, 16 décembre 1648) et à faire organiser le procès du roi qui avait abouti à sa décapitation (9 février 1649). La république avait été proclamée (17 mars suivant) et Cromwell, devenu généralissime (30 mars), avait entrepris de juguler l’insurrection catholique et royaliste d’Irlande avant de battre les Écossais à Dunbar (v. note [16], lettre 244).

Guy Patin évoquait sans doute ici (avec de vains espoirs) l’imminence de la dernière grande bataille des guerres civiles britanniques qui se déroula à Worcester le 13 septembre 1651 pour aboutir à l’écrasement définitif des troupes royales par celles de la République (Commonwealth). Rien ne barra plus alors à Cromwell la route des pleins pouvoirs, ce qu’il obtint en s’entourant d’un parlement croupion (Rump Parliament) et en prenant, en 1653, libéré de toute opposition parlementaire efficace, le titre de Protecteur (Lord Protector) de la République d’Angleterre, pour se livrer à une forme de dictature qu’on a qualifiée de conservatrice. Tout cela était mal assorti avec son puritanisme sincère, opposé en principe à toute organisation hiérarchique, qui fut le moteur initial de ses actions et qui le détermina sans doute à refuser de se faire nommer roi. Ses convictions le rendirent fragile et le mode de gouvernement qu’il avait fondé n’eut pas de lendemain en Angleterre (G.D.U. xixe s. et J.‑P. Poussou, Dictionnaire du Grand Siècle).

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Correspondance complète de Guy Patin et autres écrits, édités par Loïc Capron. – Paris : Bibliothèque interuniversitaire de santé, 2018. – À André Falconet, le 5 septembre 1651, note 16.

Adresse permanente : https://www.biusante.parisdescartes.fr/patin/?do=pg&let=0266&cln=16

(Consulté le 19/04/2024)

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