Note [16] | |
Le bel ouvrage de Samuel Bochart « sur les animaux de la Sainte Écriture » ne parut qu’en 1663 sous le titre de Hierozoïcon… (v. note [14], lettre 585) ; v. note [34], lettre 237, pour sa Geographia sacra (ou Phaleg). Dans ses Mémoires, traduits du latin en français par Charles Nisard (Paris, L. Hachette, 1853), Pierre-Daniel Huet {a} a relaté son voyage à Stockholm avec Samuel Bochart. On y lit ce récit désenchanté de leur premier contact avec la cour savante de la souveraine (livre ii, pages 65‑68) : « Arrivés à Stockholm, notre premier soin fut de saluer la reine. Son favori était alors Bourdelot, médecin français né en Bourgogne […]. {b} La reine, à la recommandation de Saumaise, {c} aussi Bourguignon, lui avait confié le soin de sa santé délicate et chancelante, et Michon, {b} quoiqu’il ne manquât pas de connaissance en son art, en avait plus encore dans l’art du courtisan, qu’il avait pratiqué longtemps avec la médecine auprès de femmes de qualité. Il était dépourvu d’ailleurs de toute espèce d’érudition. Les excès de l’étude ayant fait tomber la reine dans un état de langueur accompagné d’une fièvre intermittente, Bourdelot commença par lui ôter tous ses livres ; en quoi il montrait bien le souci qu’il avait de sa place et de sa réputation ; il lui déclara ensuite qu’il y allait de sa vie, si elle persistait à étudier. Dans les conversations qu’il avait avec elle, il affectait de lui rappeler le ridicule dont les belles dames de la cour de France frappaient les personnes du sexe qui se piquaient de science ; il l’égayait de plus par des plaisanteries et des bons mots. Par là, il prit peu à peu un tel ascendant sur l’esprit de la jeune reine qu’il la dégoûta presque de ses doctes études. Christine était d’un caractère faible et inconstant. Elle adoptait sans examen les jugements d’autrui, de ceux surtout qui avaient su gagner son estime par la seule apparence du mérite. Pendant que, emportée par sa passion pour les lettres, elle étudiait avec Saumaise ou Vossius, {d} elle acceptait si docilement leurs opinions qu’elle invitait à veni à sa cour tous ceux dont ils lui avaient dit du bien. C’est ce qui eut lieu pour Bochart, le très ancien ami de Vossius. Ayant donc sur l’avis de Bourdelot, secoué le joug de l’étude, et cherché le repos et la distraction, elle commença de se mieux porter, et dit à tout le monde qu’elle devait à son médecin non seulement la santé, mais la vie. Tout cela troubla un peu l’agrément de notre voyage et fut cause que Bochart, appelé d’abord avec autant d’insistance que s’il eût été un homme de l’autre monde, ne fut pas reçu avec les égards qu’il méritait. Nous ne doutions pas qu’il ne fallût en imputer la honte à Bourdelot, auquel il importait, selon lui d’éloigner les savants, de peur que l’ignorance dont il se savait atteint ne devînt plus sensible par la comparaison. Ce fut là probablement le seul motif du renvoi sauvage de Vossius. […] |
Imprimer cette note |
Citer cette note
x
Correspondance complète de Guy Patin et autres écrits, édités par Loïc Capron. – Paris : Bibliothèque interuniversitaire de santé, 2018. –
À Charles Spon, le 28 mai 1652, note 16.
Adresse permanente : https://www.biusante.parisdescartes.fr/patin/?do=pg&let=0287&cln=16 (Consulté le 16/09/2024) |