À Charles Spon, le 16 janvier 1652, note 18.
Note [18]

Paolo Zacchias (Rome vers 1584-ibid. 1659), médecin du pape Innocent x et premier médecin des États de l’Église, se distingua particulièrement dans la littérature, la poésie, la peinture et la musique. Son livre le plus connu est un grand recueil qu’on considère avec raison comme pionnier en matière de médecine légale : Quæstiones medico-legales, in quibus omnes eæ materiæ, quæ ad legales facultates videntur pertinere, proponuntur, pertractantur, resolvuntur [Questions médico-légales où sont exposées, approfondies et résolues toutes ces matières qu’on considère appartenir aux capacités légales] (Rome, 1621-1635, sept tomes in‑8o, pour la première édition, réimprimée à Leipzig, 1630, en quatre tomes in‑8o) (Z. in Panckoucke). Guy Patin parlait ici des :

Paoli Zacchiæ Medici Romani, Quæstiones medico-legales. Opus, Iurisperitis apprime necessarium, Medicis perutile, cæteris non iniucundum. Editio tertia correctior, auctiorque non solum variis passim locis, verum et subiunctis, quæ nunc recens prodeunt, partibus, octava et nona.

[Questions médico-légales de Paolo Zacchias, médecin de Rome. Ouvrage absolument nécessaire aux juristes, très utile aux médecins, et qui ne sera pas désagréable aux autres. Troisième édition améliorée et non seulement partout augmentée de divers passages, mais aussi de livres supplémentaires, huitième et neuvième, qui sont publiés pour la première fois]. {a}


  1. Amsterdam, Ioannes Blaeu, 1651, 9 parties en un volume in‑fo.

Cette édition contient un éloge de l’auteur par Gabriel Naudé, daté de Rieti (80 kilomètres au nord de Rome) le 23 janvier 1635, dont ce court extrait donne le style et le ton :

Miror potius, quosdam homines esse tam fatuo palato, ut parcius laudatum velint illud opus tuum præclarum et immortale, quod eiusmodi tamen Quadrumviris rei literariæ probatum est, quod Gallos in sui amorem et admirationem pellexit, quod à Germanis semel atque iterum erutum est, et quod omnibus, tanquam si Phidiæ simulacrum esset, simul aspectum fuit et probatum. Sed non ista mihi res videtur, quam gravi et iniquo animo ferre debeas ; multis enim displicent rosæ et balsama ; quosdam sol ostendit, alios vita ipsa ; quibusdam etiam pluvium atque sudum æque molesta sunt […].

[Je m’étonne plutôt que certains soient si infatués qu’ils rechignent à louer votre brillant et immortel ouvrage. Il est pourtant celui : que les quatre arts littéraires ont approuvé ; {a} qui a séduit les Français quand ils n’aiment et n’admirent qu’eux-mêmes ; que les Allemands ont imprimé plus d’une fois ; {b} et que tous ont en même temps contemplé et apprécié, comme s’il était une sculpture de Phidias. {c} Il me semble que vous ne devriez pas en être peiné ni chagriné, puisque les roses et les parfums déplaisent à bien des gens, puisque le soleil répugne à certains, la vie elle-même répugne à d’autres, ou puisque pluie et beau temps sont également désagréables à certains (…)].


  1. Quadrumvir ressemble à triumvir, mais n’appartient pas à la langue latine, qu’elle soit classique ou moderne. Je l’ai interprété comme une coquille d’impression, à la place de Quadrivium : « division supérieure des sept arts dans l’université du moyen âge, division qui venait après le trivium et qui comprenait l’arithmétique, la géométrie, la musique et l’astronomie » (Littré). Naudé voulait dire que tout le monde savant admirait le livre de Zacchias.

  2. La seule édition allemande avait été celle de Leipzig (1630), mentionnée au début de la présente note.

  3. Le plus célèbre artiste grec antique.

Comme beaucoup de ses contemporains (et de nombreux lecteurs depuis), Patin prisait fort ce livre, dont il a suivi les rééditions dans la suite de ses lettres. Ce commentaire de Sprengel (tome 3, page 238) en fournit la probable explication :

« Le premier écrivain systématique sur la médecine légale, Paul Zacchias enseigna également que les possédés ne sont, à proprement parler, que des hommes mélancoliques, mais ajouta que leur maladie engage le malin esprit à les faire servir d’instruments à sa malice. Il rappelle avec raison que beaucoup d’insensés et de femmes dont l’écoulement menstruel est supprimé sont accusés d’être possédés quoiqu’ils ne le soient réellement pas. On doit toujours soupçonner une cause naturelle et surtout des congestions atrabilaires chez les personnes qui passent pour possédées ou qui prétendent l’être ; car après l’intercession de l’Église, ces individus guérissent par l’emploi de moyens puisés dans la nature. La harpe de David délivra le roi Saül de sa mélancolie par la puissance de la musique, et d’une manière tout à fait naturelle ».

L’ouvrage novateur de Zacchias a eu un immense retentissement ; une édition franco-latine partielle en a encore été donnée en 2006 par Laurence Laugier : Questions médico-légales, des fautes sanctionnées par la loi (Presses universitaires d’Aix-Marseille).

Imprimer cette note
Citer cette note
x
Correspondance complète de Guy Patin et autres écrits, édités par Loïc Capron. – Paris : Bibliothèque interuniversitaire de santé, 2018. – À Charles Spon, le 16 janvier 1652, note 18.

Adresse permanente : https://www.biusante.parisdescartes.fr/patin/?do=pg&let=0279&cln=18

(Consulté le 25/04/2024)

Licence Creative Commons