À Charles Spon, le 26 juillet 1650, note 19.
Note [19]

Sir Kenelm Digby (Gayhurst, Buckinghamshire 1603-Londres 1665) avait été nommé en 1623 gentilhomme de la Chambre par le roi Charles ier. En 1628, à la tête d’une escadre équipée à ses propres frais, il était allé combattre avec succès les Algériens et les Vénitiens en guerre avec les Anglais. Venu en France en 1636, il s’y était converti à la religion catholique. Partisan de la cause royale durant la révolution britannique, le Parlement de Londres l’avait fait emprisonner en 1642. Libéré en 1643 sur l’intercession d’Anne d’Autriche, il avait émigré en France où il jouit de l’amitié de Descartes et d’autres savants. Après la Restauration de la royauté (1660), Digby retourna en Angleterre, fut fort en faveur auprès de Charles ii, mais parut peu à la cour et jusqu’à sa mort, se consacra tout entier à ses travaux philosophiques.

Guy Patin parlait ici de ses Two treatises in the one of which the nature of bodies, in the other the nature of man’s soul is looked into, in way of discovery of the immortality of reasonable souls [Deux traités où sont examinées, dans le premier, la nature des corps et dans l’autre, la nature de l’âme de l’homme, de manière à découvrir l’immortalité des âmes douées de raison]. {a} Leur traduction est intitulée :

Demonstratio immortalitatis animæ rationalis, sive Tractatus duo philosophici, in quorum priori natura et operationes corporum, in posteriori vero, natura animæ rationalis, ad evincendam illius immortalitatem, explicantur. Authore Kenelmo equite Digbæo, Carolo Primo Magnæ Britanniæ regi a secretiori conclavi, et in rebus maritimis administratore præcipuo, etc. Ex Anglico in Latinum versa opera et studio I.L. Præmittitur huic Latinæ editioni Præfatio metaphysica, authore Thoma Anglo ex Albiis Eastsaxonum. Eidemque subnectuntur institutionum peripateticarum libri quinque, cum appendice theologica de origine mundi, eiusdem authoris…

[Démonstration raisonnable de l’immortalité de l’âme, ou deux traités philosophiques, dont le premier explique la nature et les opérations des corps, et le second, véritablement, la nature de l’âme raisonnable, pour convaincre de son immortalité. Par sir Kenelm Digby, membre du Conseil privé de Charles ier, roi de Grande-Bretagne, et principal administrateur de ses affaires maritimes, etc. Traduite d’anglais en latin par John Leyburne. Avec au début une préface de l’Anglais Thomas White d’Essex à cette édition latine, et à la fin, ses cinq livres de préceptes péripatétiques, ainsi qu’un appendice théologique du même auteur sur l’origine du monde…].


  1. Paris, Gilles Blaizot, 1644, in‑4o, avec cette citation de Socrate (tirée du Phèdre de Platon) en exergue du titre :

    Ψυχης ουν φυσιν αξιως λογου
    κατανοησαι οιει δυνατον ειναι
    ανευ της του ολου φυσεως ;

    Animæ naturam, absque totius natura,
    Sufficienter cognosci posse, existimas ?

    [Estimes-tu pouvoir connaître suffisamment la nature de l’âme sans connaître celle du tout ?]

  2. Paris, Jacobus Villery et Georgius Josse, 1651, in‑4o, avec la même citation de Platon que dans l’édition anglaise, pour la première de plusieurs parutions.

Vers 1625, Digby avait épousé Venetia Stanley (1600-1633), dont Vigneul-Marville a étrangement parlé dans ses Mélanges (volume 1, pages 240‑241) :

« Milord Digby étant à Paris, prenait plaisir à montrer le portrait en miniature de feu Mme la comtesse Digby, son épouse, l’une des plus belles femmes de son temps, ipso se se solatio cruciabat. {a} Il racontait que pour maintenir sa beauté et une fraîcheur de jeunesse, il lui faisait manger des chapons nourris de chair de vipère ; en quoi (à ce qu’il disait) il avait parfaitement réussi. Cependant, soit que cette nourriture ne fût pas saine, et que ce qui est bon à conserver la beauté n’est pas propre à conserver la santé et la vie, ou bien que l’heure de Mme Digby fût venue, elle mourut encore assez jeune et lorsqu’on y pensait le moins. On dit qu’elle avait eu quelque pressentiment de sa mort et qu’elle pria M. Digby, qui était obligé de sortir pour quelque affaire, de revenir au plus tôt, parce qu’elle avait dans l’esprit qu’elle mourrait ce jour-là. En effet, M. Digby étant de retour, il la trouva morte ; et la fit peindre en cet état, où, pour la consolation de ceux qui la regardent, le peintre a eu l’adresse de ne la représenter qu’un peu endormie. » {b}


  1. « elle était sa consolation et son tourment » (Apulée, Métamorphoses, livre viii, chapitre 7, § 7).

  2. Antoine Van Dyck (1599-1641) a peint ce tableau.

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Correspondance complète de Guy Patin et autres écrits, édités par Loïc Capron. – Paris : Bibliothèque interuniversitaire de santé, 2018. – À Charles Spon, le 26 juillet 1650, note 19.

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(Consulté le 29/03/2024)

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