À Charles Spon, le 4 décembre 1651, note 19.
Note [19]

La Gironde étant bloquée par une flotte espagnole placée sous les ordres du baron de Vateville (v. note [2], lettre 702), les troupes condéennes étaient remontées depuis Bordeaux vers le nord pour occuper Saintes et se rendre maîtresses de la Charente jusqu’à Angoulême. Seule Cognac, située à mi-chemin entre ces deux dernières villes, leur avait résisté car le comte d’Harcourt, général des troupes royales, était parvenu à déjouer les plans de Condé pour la prendre.

La Rochefoucauld (pages 227‑230) :

« Harcourt se contenta d’avoir sauvé cette place et laissa retirer M. le Prince sans le suivre. Bien que ce succès fût de soi peu considérable, il augmenta néanmoins les espérances du comte d’Harcourt ; il se crut même en état de faire des progrès et sachant que le marquis d’Estissac avait remis La Rochelle à l’obéissance du roi, excepté les tours qui ferment le port, il fit dessein d’y aller avec ses troupes, s’assurant de la bonne volonté des habitants qui pouvaient être bien disposés, non seulement par leur devoir, mais encore plus par la haine qu’ils portaient au comte Du Dognon, leur gouverneur. Il {a} avait fait fortifier les tours et y tenait une garnison suisse, se défiant presque de tout le monde et croyant trouver plus de fidélité parmi cette nation que dans la sienne propre ; mais l’événement lui fit bientôt voir que ses mesures étaient fausses ; car la peur et l’intérêt fournirent des prétextes aux Suisses de faire encore plus que ce qu’il avait appréhendé des Français. »


  1. Du Dognon.

Les tours de la Lanterne et de la Chaîne étaient tombées les 13 et 19 novembre, mais celle de Saint-Nicolas résista jusqu’au 27.

Dubuisson-Aubenay (Journal des guerres civiles, tome ii, pages 135‑136, décembre 1651) :

« Dimanche 3 au matin, courrier de M. de Brienne, secrétaire d’État, arrive de la cour à M. du Plessis de Guénégaud, autre secrétaire d’État, restant à Paris, qui tout aussitôt est allé chez le maréchal de l’Hospital et de là chez le garde des sceaux. Le paquet porte que le comte d’Harcourt, étant arrivé dans La Rochelle, a fait passer en un bateau un mineur vers les 150 officiers et soldats gardant la tour de Saint-Nicolas, et leur dire que la mine étant prête à jouer, il les faisait avertir, étant marri s’ils se perdent, qu’après cela il n’y avait plus de quartier ; lequel il leur offrait cependant s’ils se rendaient et contraignaient le commandant d’en faire autant ; ce qu’eux n’ayant pu gagner sur lui, ils l’ont tué et jeté par une ouverture dans le fossé, d’où le peuple l’a retiré et traîné par les rues, et mis en pièces. »

Comme tout le parti condéen, La Rochefoucauld (ibid.) s’est scandalisé de la conduite d’Harcourt et des Suisses à La Rochelle :

« Au lieu de répondre à ce qu’il {a} en attendait {b} et après avoir seulement résisté trois jours, le comte d’Harcourt leur ayant mandé qu’il ne leur ferait point de quartier s’ils ne poignardaient leur commandant, nommé Besse, un tel ordre ne leur donna point d’horreur et ils se mirent en devoir de l’exécuter ; mais lui, croyant trouver plus de compassion près du comte d’Harcourt que parmi ses propres soldats, se jeta, tout blessé qu’il était, du haut des tours dans le port, demandant la vie sans la pouvoir obtenir ; car le comte d’Harcourt fit achever de le tuer en sa présence sans pouvoir être fléchi, ni par les prières de ses officiers qui demandaient sa grâce, ni par un spectacle si pitoyable. La perte de cette place, qu’on n’avait pas seulement essayé de secourir, nuisit à la réputation des armes de M. le Prince, et on attribua au peu de confiance qu’il avait en ses troupes ce qui n’était en effet que le ménagement qu’il était contraint d’avoir pour les soupçons continuels du comte < Du > Dognon. Cette perte les augmenta encore et le comte Du Dognon s’imaginant que toutes ses autres places suivraient cet exemple, il se retira à Brouage et n’en sortit plus qu’après avoir fait son traité avec la cour. »


  1. Du Dognon.

  2. Des Suisses.

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Correspondance complète de Guy Patin et autres écrits, édités par Loïc Capron. – Paris : Bibliothèque interuniversitaire de santé, 2018. – À Charles Spon, le 4 décembre 1651, note 19.

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(Consulté le 28/03/2024)

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