À Charles Spon, le 20 juin 1653, note 19.
Note [19]

Tous les critiques n’ont pas partagé l’avis enthousiaste de Guy Patin sur ce livre de Casaubon ; voici ce qu’en a jugé Jean Le Clerc dans sa Bibliothèque choisie… (Amsterdam, Henri Schelte, 1710, tome xix, page 228‑230). :

« Mais le principal ouvrage de théologie que Casaubon fit en Angleterre fut ses Exercitations {a} contre Baronius, qu’il acheva le 21e de janvier 1614, et auquel il avait employé dix-huit mois. J’ai nommé cet ouvrage un ouvrage de théologie, quoiqu’à proprement parler, l’auteur n’y traite pas des dogmes, comme ont accoutumé de faire les théologiens ; parce qu’en réfutant les fautes historiques de Baronius, il y mêle souvent des choses qui regardent la théologie. Personne ne peut douter que cet ouvrage ne soit plein d’érudition et qu’il n’y ait beaucoup à profiter ; mais il y a trois choses qui ont fait dire que Casaubon avait entrepris un ouvrage au-dessus de ses forces en voulant réfuter Baronius. La première est qu’il n’avait pas assez médité les premiers principes de la théologie, entre lesquels est par exemple celui-ci, qu’il ne faut rien proposer comme de foi que ce qui est en termes exprès dans l’Écriture Sainte, ou qu’on peut en tirer par une conséquence nécessaire. La seconde, que pour écrire contre Baronius, il fallait avoir fait une étude toute particulière de la chronologie, soit à l’égard des empereurs et de ce qui regarde l’Empire romain, soit à l’égard de l’Histoire ecclésiastique ; ce qui demande beaucoup de temps et un homme tout entier. C’est ce que Casaubon n’avait pas fait. Troisièmement, que pour l’examen des dogmes et des usages ecclésiastiques, il faut avoir lu toute l’Antiquité chrétienne et l’avoir lue dans cette vue, et non à mesure que l’on en peut avoir besoin. Je ne crois pas qu’on puisse dire que Casaubon l’ait fait, car il faut pour cela infiniment plus de temps et de livres qu’il n’en avait. C’est ce qui m’a fait dire dans les Parrhasiana que ce grand homme avait entrepris une chose qu’il n’était pas en état de faire ; et dont je suis persuadé que tous ceux qui entendent la théologie et les antiquités ecclésiastiques conviendront facilement. » {b}


  1. Essais.

  2. Guy Patin rapportait quelques lignes plus bas l’avis de Saumaise qui rejoignait celui de Le Clerc.

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Correspondance complète de Guy Patin et autres écrits, édités par Loïc Capron. – Paris : Bibliothèque interuniversitaire de santé, 2018. – À Charles Spon, le 20 juin 1653, note 19.

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(Consulté le 24/04/2024)

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