À Christiaen Utenbogard, le 3 septembre 1658, note 2.
Note [2]

« mais je ne veux pas sembler vouloir crever les yeux des corneilles ».

Cornicum oculos confingere [Crever les yeux des corneilles] est un adage qu’Érasme a commenté (no 275), en disant notamment :

Siquidem cornix antiquitus concordiæ symbolum erat. Ejusdem vivacitas etiam Græco proverbio celebrata est. Ut is videatur cornicum velle configere, quisquis ea de quæ antiquitas magno consensu approbavit, damnare ac rescindere covellereque conetur. Nec admodum absurdum, si quis in hunc modum accipiat, ut dicatur oculos cornicum configere, qui perspicacissimis oculatissimisque visum adimat offundatque tenebras.

[La corneille était dans l’Antiquité le symbole de la concorde. Sa vivacité était aussi proverbiale chez les Grecs. Quiconque entreprend de condamner ou détruire ce que l’Antiquité avait unanimement approuvé paraît donc vouloir crever les yeux des corneilles. Cette expression n’a rien d’absurde quand on l’applique à celui qui ôterait ou obscurcirait la vue à ceux qui l’ont très claire et aiguë].

Dans ses « quatre livres sur la Peste » (v. note [2], lettre latine 90), Ijsbrand van Diemerbroeck s’est montré chaud partisan de la thériaque pour soigner la maladie, notamment dans l’Annotatio xiv du chapitre v, De antidotis et sudoriferis [Des antidotes et sudorifiques], livre iii (page 179) :

Theriaca et Mithridatium duo nobilissima sunt antidota, quorum adversus venena et pestilentem luem excellentissimas virtutes jam a multis seculis experienta probavit, eaque in peste aliisque malignis et venenatis ac contagiosis morbis plus profuisse semper compertum est, quam innumera alia magnis titulis decantata alexipharmaca. Hinc est quod semper ubique tanta curiositate confecta, et in celeberrimo usu per totum terrarum orbem, absque ulla compositionis immutatione, habita fuerint. Neque id sine ratione, nam calorem nativum suscitant, facultatem vitalem recreant, cor adversus venena et omnis generis malignitates firmant ac defendunt, easque procul a vitæ fonte semper poros cutis expellunt, et occulta specifica qualitate pestilentis luis vim ac perniciem infringunt. Imprimis autem theriaca, non neotericis tantum cognita, sed ab ipsis quoque veteribus summopere laudata est.

[La thériaque et le mithridate sont les deux antidotes les plus réputés ; {a} depuis déjà plusieurs siècles, l’expérience a prouvé leurs éminentes vertus contre les poisons et contre la peste. On les a toujours trouvés plus utiles dans la peste et dans les autres maladies malignes, vénéneuses et contagieuses, que les innombrables autres alexipharmaques {b} dont on a rabâché les hauts mérites. Voilà pourquoi on leur a toujours et partout porté un si grand intérêt, et pourquoi, dans le monde entier, on a tenu leur emploi pour très remarquable. Et ce non sans bonne raison, car ils excitent la chaleur innée, {c} ils restaurent la faculté vitale, ils raffermissent et défendent le cœur contre les poisons et les malignités en tout genre, en les chassant par les pores de la peau loin de la source de vie ; et par leur qualité occulte spécifique, {d} ils brisent la force destructrice de la peste. Les modernes comme les anciens ont loué et reconnu la thériaque comme étant le premier de tous les antidotes]. {e}


  1. V. note [9], lettre 5, pour ces deux médicaments.

  2. V. note [20], lettre 164.

  3. V. première notule {a}, note [14], lettre 150.

  4. V. note [7], lettre 3.

  5. Suivent les références aux auteurs antiques, Ætius d’Amide, Paul d’Égine, Nicolas Myrepsus, et surtout Galien.

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Correspondance complète de Guy Patin et autres écrits, édités par Loïc Capron. – Paris : Bibliothèque interuniversitaire de santé, 2018. – À Christiaen Utenbogard, le 3 septembre 1658, note 2.

Adresse permanente : https://www.biusante.parisdescartes.fr/patin/?do=pg&let=1140&cln=2

(Consulté le 25/04/2024)

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