Autres écrits : Ana de Guy Patin :
Patiniana I‑3 (1701), note 2.
Note [2]

L’Arrêt mémorable du parlement de Toulouse. Contenant une histoire prodigieuse d’un supposé mari, advenue de notre temps, enrichie de cent et onze belles et doctes annotations. Par M. Jean de Coras, {a} conseiller en la Cour et rapporteur du procès. Prononcé ès arrêts généraux le xii. septembre, 1560 {b} a relaté en grand détail la célèbre affaire d’Arnault du Tilh, soi-disant Martin Guerre, ainsi présentée dans l’Argument et sommaire du fait :

« Martin Guerre, du lieu d’Artigat en Gascogne, ayant une belle jeune femme, appelée Bertrande de Rols, s’en va à la guerre et demeure huit ans absent ; passés lesquels, Arnault du Tilh, soi-disant Martin Guerre, se présente aux sœurs, oncle et parents du dit Martin, ensemble à {c} ladite de Rols, femme ; qui tous, pour la raison de la grande similitude qui était entre lui et ledit Martin absent, et pour les véritables enseignes {d} qu’il donnait à chacun de toutes choses, facilement se persuadèrent qu’il est Martin Guerre, et pour tel le reçoivent ; et est reconnu de tous les habitants du dit Artigat, mêmement de ladite de Rols, avec laquelle il cohabite trois ans comme mari, et de ses œuvres a deux enfants. Après l’imposture quelque peu découverte, il est fait prisonnier par autorité du juge de Rieux {e} et enfin condamné à perdre la tête ; de quoi appelle au parlement de Toulouse, où il est amené et ouï, soutenant toujours qu’il était Martin Guerre, comme aussi faisaient faire les quatre sœurs et leurs maris, beaux-frères du dit Martin, ensemble trente ou quarante témoins ; mais parce que plusieurs autres au contraire l’assuraient être Arnault du Tilh, ou bien en doutaient, n’osaient affirmer ni l’un ni l’autre pour la ressemblance grande du prisonnier avec ledit Martin et du Tilh, la Cour était en merveilleuse perplexité. Et comme {f} on voulait juger le procès, Martin Guerre arrive ; lequel, néanmoins, confronté au dit du Tilh, demeure presque vaincu, tant mieux savait l’imposteur farder ses mensonges que l’autre, s’aider de la vérité. Dont les juges, encore plus incertains, font venir les sœurs et certains autres témoins, par lesquels le nouveau venu est remarqué et reconnu pour Martin Guerre, et l’imposture faite évidente. D’ores {g} s’en ensuit arrêt que ledit du Tilh sera pendu et son corps brûlé ; les enfants néanmoins procréés de ses œuvres et de ladite de Rols déclarés légitimes. À l’exécution duquel, ledit du Tilh, condamné, confesse au long l’imposture. » {h}


  1. Outre ses commentaires sur l’affaire Martin Guerre, qui a fait son renom, Jean de Coras (Réalmont, Tarn 1515-Toulouse 1572), a publié plusieurs ouvrages de droit.

  2. Paris, Galliot du Pré, 1572, in‑8o de 160 pages.

  3. Ainsi qu’à.

  4. Marques évidentes, preuves.

  5. Ancien évêché suffragant de Toulouse, aujourd’hui Rieux-Volvestre (Haute-Garonne).

  6. Au moment où.

  7. Présentement.

  8. Montaigne a évoqué l’affaire dans ses Essais (livre iii, chapitre 11).

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Correspondance complète de Guy Patin et autres écrits, édités par Loïc Capron. – Paris : Bibliothèque interuniversitaire de santé, 2018. – Autres écrits : Ana de Guy Patin :
Patiniana I‑3 (1701), note 2.

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(Consulté le 28/03/2024)

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