Autres écrits : Ana de Guy Patin :
Borboniana 8 manuscrit, note 28.
Note [28]

« à la louange de la médecine. “ Voyez Swertius dans l’Athenæ Belgicæ, au bas de la page 501. ” {a} Quand Lipse fit ses harangues, il enseignait les belles-lettres à Iéna en Allemagne. {b} “ La religion n’était alors pas encore devenue son métier. ” » {c}


  1. Le passage mis entre guillemets anglais est une addition marginale du manuscrit.

    L’avant-dernière ligne de la rubrique consacrée à Juste Lipse (Iustus Lipsius, page 501) dans l’« Athènes belge », {i} donne cette indication :

    Orationes, quas Ienenses Lipsii nomine vulgarunt, sunt supposititiæ et confictæ.

    [Les Discours d’Iéna, qu’on a publiés sous le nom de Lipse, sont supposés et forgés de toutes pièces].

    Cela conduit à un ouvrage rare (qu’il m’aurait été difficile de trouver autrement) intitulé :

    Justi Lipsii Orationes octo Jenæ potissimum habitæ, e tenebris erutæ, et in gratiam studiosæ juventutis foras productæ.

    [Huit Discours de Juste Lipse, principalement prononcés à Iéna, sortis de l’oubli et publiés pour le profit de la jeunesse studieuse]. {ii}

    La préface de Lipse, adressée à Dorothée-Suzanne von Simmern, princesse palatine du Rhin (morte en 1592), est datée du 3 juin 1583 : soit huit ans avant la conversion de Lipse au catholicisme, et dix ans après son séjour à Iéna (1572-1574). {iii}

    Rien dans cette analyse ne met franchement en doute l’authenticité des huit discours ; quant au style latin si controversé de Lipse, le Borboniana incite à en regarder les titres :

    1. Oratio de Obitu illustrissimi principis Johannis Guilielmis Ducis Saxoniæ [Discours sur la mort de l’illustrissime prince Jean Guillaume de Saxe-Weimar] ; {iv}

    2. Oratio Iusti Lipsii Iscani, habita Jenæ anno 1572. cum inciperet publice interpretari Cornelium Tacitum [Discours de Juste Lipse, natif d’Isca, {v} prononcé à Iéna l’an 1572 quand il commençait à commenter Tacite] ;

    3. Oratio habita Jenæ, cum inciperet publice interpretari Epistolas ad Atticum Ciceronis. De ratione interpretandi Ciceronis [Discours prononcé à Iéna quand il commençait à commenter les Lettres à Atticus de Cicéron. La manière d’interpréter Cicéron] ;

    4. Oratio de Concordia, habita Jenæ xxiix. Julii, Hora Octava, Anno 1573 ; In promotione vii. Magistrorum [Discours sur la Concorde, prononcé le 28 juillet 1573 à huit heures du matin, pour la promotion de huit maîtres] ; avec deux annexes, Responsio Iusti Lipsii ad petitionem M. Ægidii Salii pro Candidatis [Réponse de Juste Lipse à la harangue que M. Ægidius Salius a prononcée au nom des postulants], et Leges juramenti. Ceremoniæ [Articles du serment. {vi} Cérémonies] ; {vii}

    5. Oratio pro defendendo Cicerone in criminibus ei objectis [Discours pour défendre Cicéron des accusations portées contre lui] ;

    6. Oratio utrum a solo Cicerone petenda sit eloquentia [Discours sur la question : l’éloquence n’est-elle à chercher que dans Cicéron ?]

    7. Oratio Utrum duæ illæ adversariæ Orationes, quæ nuper in his Scholis, Ciceronis et Salustii esse adsertæ sunt ; revera sint Salustii aut Ciceronis [Discours sur la question : les deux discours contradictoires qu’on a récemment attribués dans ces Écoles à Cicéron et à Salluste, ne devraient-ils pas, au contraire, être attribués à Salluste et à Cicéron ?]

    8. Oratio utrum Jurisprudentia, an Medicina plus boni hominibus attulerit [Discours sur la question : les hommes tirent-ils plus de bienfaits de la jurisprudence ou de la médecine ?] {viii}

      1. Répertoire bio-bibliographique établi par Franz Sweerts (Anvers, 1628, quatrième référence citée dans la note [3], lettre 584).

      2. Darmbstadt [Darmbstadii, sic pour Darmstadt, transcrit Hemstadis dans le manuscrit du Borboniana] Balthasar Hofmann, aux frais de Johannes-Jacobus Porsius, 1607, in‑8o de 118 pages.

      3. V. note [8], lettre 36.

      4. Mort, survenue en 1573, de l’époux de la susnommée Dorothée-Suzanne.

      5. Dans le Brabant.

      6. Au nombre de quatre.

      7. Ce discours polémique est discuté et échantillonné dans la notule {b‑i} infra.

      8. Discours que signalait le Borboniana.

  2. Une annotation manuscrite anonyme sur la dernière page de l’édition des Orationes que j’ai consultée (Google Livres) donne tout son sel à la remarque du Borboniana :

    « Juste Lipse nia avoir fait l’oraison de duplici Concordia qui est dans ce livre p. 46, {i} dans une épître adressée au bourgmestre et au Sénat de Francfort le 2 octobre 1603 ; {ii} mais Thomas Sagittarius soutint que Lipse n’avait pas dit la vérité, et il le prouve par les archives de l’Académie d’Iéna dans le livre intitulé Lipsius Proteus. {iii} M. Bayle prétend que Goldast était l’auteur de cette oraison. » {iv}

    1. Oratio iv (pages 46‑62) où, devant un auditoire d’étudiants luthériens, à peine un an après les massacres inaugurés par la Saint-Barthélemy parisienne (24 août 1572), Lipse a frontalement incriminé l’Église de Rome (pages 58‑59) :

      Vosne libertatem una cum relligione amittatis, non providebitis ? Nisi forte periculum Germaniæ nullum esse putatis a Pontificiis qui imminent profecto cervicibus nostris, qui adjiciunt oculos sæpe ad hanc patriam ; quam semel e faucibus ereptam dolent : qui vexillum Romanæ purpuratæ belluæ (ô Deus immortalis, averte quæso, et detestare hoc omen !) in media Saxonia defixuros se minitantur : qui non prædam nostram sed vitam ; non servitutem : sed sanguinem concupiscunt : quibus nullus ludus jucundior est, quam cruor, quam cædes, quam ante oculos trucidatio innocentium. An vero animi causa fingi putatis illa, quæ de Gallia nuper certissimis nunciis audivistis ? cum Pontifico instinctu fœdum illud, et immane facinus patratum est, quod nulla barbaria velit agnoscere ; cujus labem nullus Oceanus possit eluere. O rem cum visu crudelem ; tum auditu nefariam ! quam si non gestam : sed picturam videremus, non factam, sed confictam legeremus : tamen omnia muta, atque inanima tanta atrocitate rerum commoveri necesse sit. Jacebant in viis mediis tot insepultorum acervi corporum, senes cum pueris, viri cum fœminis promiscua cæde trucidati : quorum aliis abscissa membra, aliis amputata capita, ad Pontificem Romanum, tanquam in triumphum, mittebantur. Qua quidem in strage tot viri interfecti sunt, ut gladii ipsi et mucrones militum contremuisse mihi videantur, cum in tam augustis corporibus defigerentur.

      [N’avez-vous pas prévu qu’avec la religion c’est votre liberté que vous abandonnerez ? À moins peut-être que vous ne pensiez que l’Allemagne n’a rien à craindre des pontifes quand ils menacent sérieusement nos têtes, quand ils tournent souvent les yeux vers cette patrie : eux qui sont peinés qu’elle se soit un jour soustraite à leur giron ; eux qui menacent d’y replanter bientôt le pourpre étendard de la bête romaine au beau milieu de la Saxe (puisses-tu, Dieu immortel, je t’en supplie, écarter et détourner cet oracle !) ; eux qui convoitent non pas le butin, mais la vie, non pas l’asservissement, mais le sang ; eux pour qui aucun jeu n’est plus plaisant que le carnage, que l’assassinat, que le spectacle des innocents trucidés. Pensez-vous vraiment que ces très certaines nouvelles que vous avez récemment entendues soient imaginaires ? C’est sur l’instigation pontificale qu’a été perpétré ce massacre épouvantable et monstrueux, dont nul océan ne pourra jamais laver la souillure. Que cette affaire est donc cruelle à voir, tout autant qu’horrible à entendre ! Si elle ne s’est pas produite, c’est que nous aurions vu un fantôme ! Si elle n’a pas eu lieu, c’est que nous aurions lu un roman ! Il faudrait pourtant que des événements d’une telle atrocité dissipassent tout mutisme et toute torpeur. Des monceaux de corps sans sépulture gisaient au travers des rues : vieillards comme enfants, hommes comme femmes, tous trucidés par ce massacre indistinct ; et pour marque de triomphe, on avait envoyé au pontife romain des membres arrachés à quelques-uns et les têtes coupées à quelques autres. Cette boucherie a tant tué d’hommes que les soldats eux-mêmes me semblent avoir dû trembler en enfonçant leurs poignards et leurs épées dans de si augustes corps].

      Catholiques et protestants ne se sont bien sûr pas privés de reprocher ces propos « cicéroniens » à Lipse quand, huit ans après les avoir tenus publiquement, il a abandonné le calvinisme pour se convertir à la religion romaine.

    2. V. notule {c}, note [22] du Grotiana 1 pour cette lettre, plus exactement datée de Louvain le 29 septembre 1600. Il y en a une autre aux mêmes sur le même sujet datée du 29 septembre 1600 (lettre lxviii, édition de 1609) ; mais sur cette controverse, je n’en ai pas retrouvé une qui soit datée du 2 octobre 1603.

    3. Thomas Sagittarius (1577-1621, professeur de grec et de philosophie à Iéna) : Lipsius Proteus ex Antro Neptuni protractus et claro soli expositus : ex Oratione cumprimis de Duplici Concordia, quam ipse Lipsius, anno 1573, Academiæ Ienensis Decanus et Professor publicus, adeoque Ienæ publice habuit… [Lipse, le Protée (v. note [8], lettre de Jean de Nully, datée du 21 janvier 1656), tiré de l’antre de Neptune et exposé à la clarté du soleil : d’après le Discours sur la Double Concorde que Lipse en personne, professeur et doyen de l’Université d’Iéna, y a publiquement prononcé pour la première fois en 1573] (Francfort, J.J. Porsius, 1614, in‑8o de 58 pages).

    4. Note I de l’article de Bayle sur Melchior Goldast (v. note [6] du Patiniana I‑2) : le livre dont on accusait Goldast d’être l’auteur est le Iusti Lipsii de Duplici Concordia Oratio, non prius edita [Discours de Juste Lipse sur la double Condorde, publié pour la première fois] (Lyon, sans nom, 1600, in‑4o de20 pages) ; le texte en est conforme à celui du discours imprimé en 1607, mais sans ses deux annexes ; le passage que j’ai cité dans la notule {a} supra s’y lit aux pages 14‑15.

  3. Vers de Hugo Grotius, v. infra note [29].

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Correspondance complète de Guy Patin et autres écrits, édités par Loïc Capron. – Paris : Bibliothèque interuniversitaire de santé, 2018. – Autres écrits : Ana de Guy Patin :
Borboniana 8 manuscrit, note 28.

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(Consulté le 03/12/2024)

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