À Charles Spon, le 26 août 1653, note 3.
Note [3]

Les Vénitiens étaient engagés contre les Turcs sur terre en Dalmatie et sur mer à Rhodes, île du Dodécanèse qui marque à l’est la limite entre les mers Égée et Méditerranée.

Semaine après semaine, la Gazette en a donné des nouvelles.

  • Ordinaire no 112, du 6 septembre 1653 (page 906) :

    « De Venise le 11 août 1653. Sur l’avis que le général Dolfino, qui commande les armes de la République en Dalmatie, a donné que les Turcs, ayant réduit les Morlaques {a} à ne pouvoir plus tenir la campagne, ruinent le pays par leurs courses qu’ils font maintenant avec liberté, on se hâte de lui envoyer du secours pour arrêter les progrès de ces infidèles qui ont achevé leur forteresse de Chrin {b} où ils amassent quantité de provisions, à dessein, comme plusieurs croient, d’assiéger Zara, Spalatro ou Sébénico ; {c} ce qui oblige notre général de faire promptement achever les fortifications du poste Saint-Jean, très avantageux pour la conservation de cette dernière place, l’une des plus importantes de la province. Cependant, on nous écrit du Levant que le généralissime Foscolo tient toujours la flotte ottomane enfermée dans le port de Rhodes et qu’il a fait enfoncer deux de ses vaisseaux à l’embouchure pour en empêcher la sortie aux ennemis ; de quoi le capitan bassa, {d} leur général, est presque au désespoir de ne trouver plus aucun moyen de se sauver et d’être réduit à faire périr malheureusement son armée, à moins que de forcer le passage ; ce qu’il n’ose entreprendre jusqu’à ce qu’il lui soit venu du renfort de Constantinople où il a envoyé pour la troisième fois avertir les ministres du Divan de cette extrémité. Ces jours passés, l’ordre a été donné de faire sortir de notre arsenal dix galères bien armées sur ce que le Sénat a appris que neuf galères de barbarie, jointes à cinq brigantins turcs, avaient paru vers Otrante, sans qu’on ait pu encore savoir si leur destin est de prendre la route de la Calabre ou de notre golfe. .»


    1. Monténégrins sujets de la République de Venise.

    2. Knin en Croatie.

    3. Zadar, Split ou Šibenik en Croatie.

    4. Pacha.

  • Ordinaire no 115, du 13 septembre 1653 (page 930) :

    « De Venise le 18 août 1653. La flotte ottomane est toujours étroitement enfermée dans le port de Rhodes, où les Turcs sont tellement incommodés qu’il se débande journellement plusieurs soldats, auxquels le généralissime Foscolo donne passeport et de l’argent pour retourner en leur pays ; de sorte que cette armée s’affaiblit grandement, et selon toute apparence sera bientôt ruinée, si le général bassa ne fait des efforts très puissants pour sortir ; à quoi ce généralissime est résolu de s’opposer vivement, ayant encore depuis peu envoyé trois vaisseaux en Candie afin qu’ils en amènent 500 soldats de la ville Métropolitaine, avec des munitions. On nous écrit de Constantinople que les ministres du Divan, extraordinairement touchés de cette nouvelle, ont mandé à ce général bassa, en des termes pleins de menaces, que sa lâcheté et non celle de son armée était cause de l’extrémité en laquelle il se trouve à présent ; et sans lui parler du secours qu’il demande, lui ont ordonné, à peine d’en répondre de sa tête, de sortir à quelque prix que ce soit, quand même il devrait hasarder la perte de toute la flotte, auquel cas le Grand Seigneur en pourrait aisément équiper une plus puissante. »

  • Ordinaire no 117, du 20 septembre 1653 (pages 942‑943) :

    « De Venise le 25 août 1653. Le 15 de ce mois, sept vaisseaux partirent de ce port pour la Candie, où ils portent 1 600 soldats de ceux qui sont naguère venus de Parme, avec quatre compagnies composées de différentes nations ; et l’ordre a été donné d’équiper encore six vaisseaux qui doivent être prêts dans peu de jours pour prendre la même route, et y porter quelques autres soldats avec 100 canonniers que l’on fait venir de terre ferme, et cent mille sequins qui se fabriquent en notre monnaie ; le général Molino ayant écrit à la République que cet argent y était particulièrement nécessaire pour la conservation de la ville Métropolitaine, de laquelle on a été obligé de tirer une partie de la garnison et des munitions pour envoyer au généralissime Foscolo afin de combattre la flotte ottomane au sortir du port de Rhodes, où l’on dit qu’elle est encore enfermée ; bien que l’avis nous soit venu par un vaisseau des Smirnes, qui dit l’avoir appris en l’île de Cérigo, que le général bassa voyant que son armée dépérissait tous les jours faute de vivres avait fait renforcer 50 galères, et prenant l’occasion que celles de Venise avec deux galéasses et deux vaisseaux étaient allées chercher de l’eau, était aisément sorti de ce port de Rhodes ; mais qu’ayant débarqué une partie de ses troupes vers la forteresse de Standia à dessein de s’en emparer, il y avait trouvé tant de résistance qu’il s’était vu contraint, après une très grande perte des siens, de retourner en ses vaisseaux et de continuer sa route vers La Canée, où le bruit court qu’il a jeté 4 000 hommes et une grosse somme d’argent. Le même avis porte qu’en suite de cette sortie, la moitié de notre armée a fait voile vers ladite ville de La Canée, et que le reste est demeuré sur les mers de Rhodes ; laquelle nouvelle est d’autant plus étonnante que le Snat n’en a reçu aucune lettre, ce qui fait croire qu’elles ont été prises en chemin par les Turcs qui courent ces mers avec 50 brigantins armés, outre cinq galères et onze vaisseaux de Barbarie. »

  • Ordinaire no 120 du 27 septembre 1653 (pages 966) :

    « De Venise le 1er septembre1653. Les lettres du Levant ne faisant aucune mention de la sortie des 50 galères turquesques du port de Rhodes, dont l’avis nous était ici venu la semaine passée, chacun croit que cette nouvelle n’avait été semée que par nos ennemis et que les Turcs y sont toujours enfermés. »

  • Ordinaire no 123 du 4 octobre 1653 (pages 990) :

    « De Venise le 8 septembre1653. Quelques lettres de Zaute et de Candie nous confirment la sortie du port de Rhodes des 50 galères de la flotte ottomane, et que le reste de notre armée était demeuré à l’embouchure de ce port-là, où notre généralissime Foscolo tient encore enfermés les gros vaisseaux de la même flotte. Néanmoins nous attendons plus ample confirmation avant d’y ajouter une entière foi. » {a}


    1. Il n’y a pas eu démenti. La guerre navale se déplaça ensuite en Crète.

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Correspondance complète de Guy Patin et autres écrits, édités par Loïc Capron. – Paris : Bibliothèque interuniversitaire de santé, 2018. – À Charles Spon, le 26 août 1653, note 3.

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(Consulté le 25/04/2024)

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