« En outre, a été banni de toute la France ce genre d’hommes de nouvelle et pernicieuse superstition : ils troublaient les affaires publiques et avaient poussé ce jeune pénitent à perpétrer son exécrable attentat. »
Cette prose n’est pas celle de Joseph Scaliger, elle appartient au texte anonyme gravé sur la Pyramide, « sur la face qui regarde le levant », intitulé D.O.M. Sacrum [Vœu adressé à Dieu tout-puissant], transcrit et traduit page 141 des Mémoires de Condé (v. supra note [2], notule {b}).
Le pamphlet anonyme de Voltaire intitulé Un chrétien contre six juifs (La Haye, sans nom, 1777, in‑8o), plus tard sous-titré Réfutation du livre intitulé Lettres de quelques juifs portugais, allemands et polonais, {a} a épilogué sur cette inscription, dans la Dix-huitième niaiserie. Sur Jean Chastel piacularis assassin de Henri iv ; laquelle niaiserie tient à des choses horribles (pages 164‑169), avec ce commencement :
« Voici une calomnie odieuse dont le fond est une niaiserie puérile, et dont les accompagnements sont atroces.
Commençons par le puéril : piacularis adolescens, dites-vous, ne signifie pas un jeune pénitent, un jeune homme qui expie ; il signifie un jeune misérable. Ouvrez les Estienne, les Calepin, les Scapula, {b} tous les dictionnaires, monsieur le professeur, vous verrez que piacularis vient de pio, piare, j’expie ; en grec, sebetaï.
[…] Vous imputez ici à mon ami d’avoir rapporté les paroles de cette inscription qui regardent les jésuites, et où se trouve ce mot piacularis. […] La traduction gravée à côté de la latine, portait : en outre a été banni et chassé de toute la France ce genre d’hommes de nouvelle et pernicieuse superstition, qui troublaient la république, à la persuasion desquels ce jeune homme, pensant faire satisfaction de ses péchés, avait entrepris cette cruelle méchanceté. {c}
Il est donc faux, monsieur, qu’on ait traduit, dans le temps du supplice de Jean Chastel, piacularis adolescens par “ jeune misérable ”, comme vous le dites : il est donc faux que “ pénitent ” soit un contresens. »
- Le titre est ainsi expliqué dans l’Avant-propos :
« Un ancien professeur, dit-on, d’un collège de la rue Saint-Jacques à Paris, écrivit en 1771 une satire contre un chrétien sous le nom de “ Trois juifs de Hollande ” ; et il en a fait imprimer une autre à Paris, en trois volumes assez épais, sous le nom de “ Trois juifs de Portugal, demeurant en Hollande près d’Utrecht ”. »
Cet « ancien professeur » était l’abbé Antoine Guenée, dont les libelles avaient courageusement blâmé et réfuté les virulentes opinions de Voltaire (le « chrétien » et « mon ami ») contre les juifs.
- V. notes [7], lettre 659, pour le dictionnaire de Robert i Estienne, [17], lettre 193, pour celui d’Ambroise Calepin, et [17], lettre 279, pour celui de Jean Scapula.
- À la différence de celle-ci, ma traduction n’attribue pas l’expiation de Jean Chastel à ses propres péchés, mais aux impiétés de Henri iv, c’est-à-dire sa bienveillance à l’égard des protestants, marquée par l’Édit de Nantes.
V. infra note [4] pour une riposte des jésuites.
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