À Charles Spon, le 9 octobre 1654, note 4.
Note [4]

Retz était encore en Espagne, qu’il allait quitter pour l’Italie le 16 octobre (v. note [10], lettre 367). Son statut de cardinal archevêque de Paris ouvrait l’épineuse question de qui pouvait le juger : tribunal civil ou ecclésiastique, français ou romain ? Dans sa fureur contre l’évasion de Nantes, Mazarin commit une lourde erreur en faisant signer au roi la commission du 21 septembre 1654 qui chargeait le Parlement de Paris d’instruire le procès du fugitif. « Les magistrats parisiens n’eurent garde de laisser passer une pareille aubaine : le roi leur confiait le procès d’un archevêque ! Ils s’empressèrent, le 22 septembre, d’enregistrer l’édit de la commission » (Bertière b, pages 392‑393).

En 1657, cette irrégularité de procédure a servi de motif à l’Arrêt du Conseil d’État portant que les immunités et exemptions acquises aux cardinaux, archevêques et évêques seront inviolablement gardées, et qu’en cas qu’ils soient accusés de crime de lèse-majesté, leur procès sera instruit et jugé par des juges ecclésiastiques : {a}

« […] Néanmoins, au préjudice de ces droits, il a été expédié au grand sceau une commission du 21e septembre 1654, laquelle a été adressée à la Chambre des vacations du Parlement de Paris, qui a donné l’enregistrement, afin que par les conseillers de la Cour qu’elle commettrait, il fût informé sur certains chefs contre le sieur cardinal de Retz, archevêque de Paris, et que les informations seraient rapportées au Parlement lorsqu’il tiendrait < séance > pour être procédé à l’instruction du procès criminel, pour raison du crime de lèse-majesté ; ajoutant que ce cas notoirement privilégié fait cesser toute exemption et privilèges. Cette commission pour instruire et informer le procès, et la cause qui n’a jamais été mise dans aucun édit ni arrêt contre les évêques, savoir que le crime de lèse-majesté fait cesser toute exemption, assujettissent ouvertement la personne d’un cardinal et d’un archevêque à la juridiction du Parlement, au préjudice des immunités qui les exemptent en tous crimes de juridiction séculière. À ces causes requéraient lesdits députés de l’Assemblée qu’il plût au roi, comme protecteur et défenseur desdits droits, révoquer ladite commission comme contraire auxdites immunités, maintenir les cardinaux, archevêques et évêques de son royaume en la possession et jouissance paisible desdites exemptions et privilèges canoniques, et faire défense à ses Cours de parlement et à tous autres juges séculiers de prendre aucune juridiction ni connaissance contre leurs personnes pour raison du crime de lèse-majesté dont ils pourraient être accusés, sauf d’en faire la poursuite pour la punition des coupables par devant les juges ecclésiastiques, auxquels il appartient d’en connaître suivant les saints décrets et constitutions canoniques. Le roi étant en son Conseil […] a déclaré et déclare que ladite commission du 21 septembre 1654 demeurera nulle et comme non avenue […].

Fait au Conseil d’État du roi, Sa Majesté y étant. Tenu à Paris le 26e jour d’avril 1657. Signé, de Guénégaud. »


  1. Publié dans le Commentaire de M. Dupuy sur le Traité des libertés de l’Église gallicane de M. Pierre Pithou… (Paris, 1715, v. notule {d}, note [29], lettre 324), tome ii, pages 467‑468.

Imprimer cette note
Citer cette note
x
Correspondance complète de Guy Patin et autres écrits, édités par Loïc Capron. – Paris : Bibliothèque interuniversitaire de santé, 2018. – À Charles Spon, le 9 octobre 1654, note 4.

Adresse permanente : https://www.biusante.parisdescartes.fr/patin/?do=pg&let=0372&cln=4

(Consulté le 24/04/2024)

Licence Creative Commons