À Hugues II de Salins, le 22 mai 1657, note 4.
Note [4]

« au livre iii des Épidémies, avec les commentaires de Galien et le témoignage même de Valles. »

Épidémies, livre iii, section iii, 10e malade (Littré hip, volume 3, pages 131‑133) :

« Dans la ville d’Abdère, {a} Nicodémus fut pris d’une forte fièvre après des excès de femme et de fortes boissons. Au début, il ressentait des nausées et de la cardialgie ; altération ; la langue était brûlée ; urine ténue, noire. Deuxième jour, la fièvre s’exapéra ; frissonnement ; nausées ; il ne dormit pas ; il vomit des matières bilieuses, jaunes ; urine semblable ; nuit passée tranquillement ; il dormit. Troisième jour, tout se relâcha ; amélioration ; vers le coucher du Soleil, le malaise recommença et la nuit fut pénible. Quatrième jour, frisson ; fièvre forte ; douleur de tout le corps ; urine ténue avec énéorème ; {b} de nouveau, nuit passée tranquillement. Cinquième jour, tous les accidents subsistaient, il est vrai, mais il y avait amélioration. Sixième jour, mêmes souffrances générales ; énéorème dans les urines ; beaucoup d’hallucinations. Septième jour, amélioration. Huitième jour, tout le reste se relâcha. Dixième jour et les jours suivants, les souffrances existaient encore, mais elles étaient toutes moins fortes ; les redoublements et les souffrances chez ce malade se faisaient constamment sentir davantage pendant les jours pairs. Vingtième jour, il rendit une urine blanche qui fut épaisse et qui, laissée en repos, ne donna point de sédiment ; il sua beaucoup et parut sans fièvre ; mais vers le soir, il eut un retour de chaleur ; les mêmes souffrances reparurent ; frisson ; soif ; légères hallucinations. Ving-quatrième jour, le malade rendit beaucoup d’urine blanche qui donna un dépôt abondant ; il eut une sueur profuse, chaude, générale ; il se trouva sans fièvre ; la maladie fut jugée. (Interprétation des caractères : il est probable que la guérison fut due aux évacuations bilieuses et aux sueurs). » {c}


  1. Antique cité de Thrace, sur l’actuelle rive méditerranéenne de l’Anatolie turque.

  2. Énéorème : « matière légère et blanchâtre, en suspension dans l’urine que l’on a laissée reposer » (Littré DLF).

  3. Jolie démonstration de l’ésotérisme hippocratique : il est aujourd’hui impossible de mettre un nom sur les symptômes qui sont ici décrits avec la plus grande minutie ; tout au plus peut-on évoquer vaguement une chaude-pisse (v. note [14], lettre 514), mais il y manque la typique blennorragie.

  • V. note [18], lettre 348, pour les commentaires de Galien : il est très bref sur cette observation d’Hippocrate, sans dire mot des abus vénériens.

  • V. note [17], lettre 280, pour les commentaires de Francisco Valles sur les Épidémies. Il y a interprété l’observation de Nicodémus de manière fort imaginative, comme une syphilis (morbus Gallicus [mal français]), comme on lit dans la réédition d’Orléans, 1654, colonnes 315‑316 (numérotée 314), malade numéroté ix (pour x) :

  • Vix est ullum morbi genus, quod non possit venus nimia facere, nam facit malignas succorum putrescentias, et omnium partium principum debilitates, et nervos emollit, et fluxiones commovet, et cruditatibus replet. […] Ut hac ratione mihi persuadeam, […] ut ob solum Veneris immoderatum usum, citra ullam contagionem, fiat id vitium, quod morbum Gallicum vulgo appellant.

    [À peine existe-t-il un genre de maladies que les excès vénériens ne puissent provoquer : ils engendrent les pourrissements malins des sucs, les affaiblissements de toutes les parties principales ; ils amollissent les muscles et induisent des fluxions ; ils emplissent le corps de matières crues. […] Je suis donc persuadé […] que cette affection, que l’on appelle vulgairement le mal français, provient de la seule pratique immodérée de la luxure, abstraction faite de toute contagion].

    Il faut vraiment vraiment toute la mauvaise foi de Guy Patin pour adhérer aux errements de Valles et en déduire que la syphilis existait en Grèce au temps d’Hippocrate.

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Correspondance complète de Guy Patin et autres écrits, édités par Loïc Capron. – Paris : Bibliothèque interuniversitaire de santé, 2018. – À Hugues II de Salins, le 22 mai 1657, note 4.

Adresse permanente : https://www.biusante.parisdescartes.fr/patin/?do=pg&let=0482&cln=4

(Consulté le 17/04/2024)

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