Autres écrits : Ana de Guy Patin :
Borboniana 5 manuscrit, note 40.
Note [40]

Bien que la date indiquée par le Borboniana (« 15     ») soit tronquée et prête à confusion, le cardinal Jacques Davy Duperron {a} semblait vanter ici la :

Sainte Bible en français. {b}


  1. Mort en 1618, Duperron avait été élevé dans la religion réformée et s’était converti au catholicisme en 1577 (v. note [20], lettre 146).

  2. Lyon, Sébastien Honoré, 1558, in‑8o.

Ce volumineux ouvrage cumule 1 075 pages pour l’Ancien Testament et 261 pages pour le Nouveau. Les abondantes notes philologiques et références croisées sont toutes imprimées dans les marges, et agrémentées de plusieurs index et tables. Aucune préface ne permet d’en connaître les traducteurs et les éditeurs, ni de dire qu’ils étaient protestants. Le Borboniana est affirmatif sur ce point, mais un doute naît en y regardant de plus près.

  • Son imprimeur, le calviniste Sébastien Honorat (ou Honoré, Sebastianus de Honoratis, Sebastiano di Honorati ou Onorato ; Florence vers 1535-Genève 1572), s’était établi à Lyon. Il avait ensuite migré à Genève (en 1566-1567), confiant son atelier à son neveu, Barthélemy Honorat, qui publia 14 ans plus tard :

    La Sainte Bible, contenant le Vieil et Nouveau Testament. traduite de latin en français {a} par les théologiens de l’Université de Louvain, comme appert par l’Épître suivante, d’un des premiers docteurs d’icelle. {b} Avec une docte Table faite française de la latine de M. Jean Harlemius, {c} docteur en ladite Université, de la Compagnie de Jésus. {d}


    1. Le texte ne diffère que sur d’infimes détails de l’édition de 1558.

    2. Daté de Louvain 15 mars 1572, le Lectori S. [Salut au lecteur] est signé par le théologien catholique Jacques De Bay (vers 1531-1614 :

      Quemadmodum plurimum utilitatis accedere posse Ecclesiæ Dei, prudentissime censuerunt sacri Concilii Tridentini Patres, si ex omnibus Latinis editionibus quæ circumferuntur, sacrorum librorum, quænam pro authentica habenda sit, innotesceret : (statuerunt vero et declaraverunt, ut ipsa vetus et vulgata editio, quæ longo tot seculorum usu in ipsa Ecclesia probata est, in publicis lectionibus, disputationibus, prædicationibus, et expositionibus pro authentica habeatur, prout in Ecclesiæ legi consuevit, et ut nemo illam rejicere quovis prætextu audeat vel præsumat :) ita viri quidam sapientissimi non mediocrem Ecclesiæ fructum accessurum existimaverunt, si quoque ex tanta varietate editionum Gallicarum quæ passim manibus teruntur, unam eligerent, quam Reverendiss. Antistes aut Inquisitores secure eis concedere possint, quos intellexerint ex huiusmodi lectione non damnum, sed fidei atque pietatis argumentum capere posse. Porro dum nulla occurreret quæ vulgatæ Latinæ editioni per omnia responderet, operæ pretium duxerunt Theologos aliquot Lovanienses deligere, quibus curæ esset ut versio aliqua Gallica, vulgatæ Latinæ fideliter responderet, quæ, tanquam sano textu absque ullo liceret uti periculo, quod in hac translatione Gallica quorundam Theologorum Lovaniensium opera et labore maximum præstitum est. Dum autem ut hoc opus fideliter et emendate typis mandari posset, industrium Typographum desideramus, Christophorus Plantinus ultro ad eam rem suam obtulit operam, cui libenter annuimus, confidentes eum haud minore diligentia, parique studio Biblia hæc Gallica in lucem emissurum, quo sæpius Biblia Latina excudit, et recentissime Bibliorum Complutensium impressionem absolvit : quia etiam nostrum conatum suo tam rogatu quam sumptu, quantum potuit, exstimulavit, neque enim aut sumptus, aut molestias refugit in iis quæ cum ædificationi morum, tum augmento fidei profutura arbitratur. Quanti autem laboris fuerit translationem hanc absolvere, expendendum cuique relinquimus, Deum optimum maximum obnixe precantes, ut hos nostros labores et studium probare dignetur, quod speramus Ecclesiæ ipsius fructum uberrimum allaturum. Tu autem, Christiane lector, nostrum hunc conatum boni consule, eoque fruere, ac vale.

      [Dans leu très grande prévoyance, étant donné que l’Église de Dieu peut en tirer grand profit, les pères du saint concile de Trente {i} ont décidé que soit identifiée, parmi toutes les éditions latines des Saintes Écritures qui circulent, celle qui est à tenir pour authentique (mais ils ont statué et déclaré que la vieille édition dite vulgate, {ii} qu’un long usage de tant de siècles a approuvée dans ladite Église, soit tenue pour authentique dans les leçons publiques, thèses, prédications et exégèses, dans la mesure où elle s’est accoutumée à la loi de l’Église et où personne n’ose ou n’envisage de la rejeter sous quelque prétexte que ce soit). De très sages personnages ont donc estimé que l’Église gagnerait beaucoup si, parmi l’immense diversité des éditions françaises qui passent de main en main, {iii} ils en choisiraient une à laquelle les révérendissimes prélats ou inquisiteurs puissent sans danger accorder leur consetement, en entendant qu’il n’y a pas péché à la lire, mais qu’on peut y alimenter sa foi et sa piété. N’en ayant trouvé pourtant aucune qui répondît en tout point à l’édition vulgate latine, ils ont été amenés à choisir quelques théologiens de Louvain, qui prendraient le soin d’établit une traduction française qui corresponde fidèlement à la vulgate latine et dont le texte soit si intègre qu’il puisse être lu sans aucun péril ; et c’est ce qu’ont de leur mieux accompli les soins et le travail dees dits théologiens de Louvain dans cette version française. Pour qu’elle puisse être fidèlement et correctement imprimé, nous avons souhaité faire appel à un typographe éprouvé. Christophe Platin {iv} s’est offert pour l’entreprendre et nous y avons volontiers consenti, étant assurés qu’il mettrait au jour cette Bible française sans épargner ni son talent ni sa diligence, car il a très souvent imprimé des bibles latines et qu’il a tout récemment achevé l’impression des bibles d’Alcala. {v} Tant par ses sollicitations qu’à ses propres dépens, il a même mis tout son possible pour aiguillonner nos efforts, n’épargnant ni ses peines ni son argent pour ceux qui, juge-t-il, seront utiles tant à l’édification des mœurs qu’à la démonstration de la foi. {vi} Nous laissons chacun juge de l’énorme travail accompli pour venir à bout de cette édition, priant fermement Dieu tout-puissant qu’il daigne approuver le labeur et les soins qui furent les nôtres, car nous espérons offrir ici le plus riche fruit que possède l’Église. Vale, lecteur, juge notre accomplissement d’un bon œil et tires-en profit].

      1. 1545-1563, v. note [4], lettre 0430

      2. V. note [6], lettre 183.

      3. Toutes étaient jusque là protestantes ou réputées telles, à l’exception remarquable de la toute première à avoir été imprimée, la Bible d’Anvers (1530), traduite par Jacques Lefèvre d’Étaples, humaniste catholique français dont l’édition fut interdite par la Sorbonne (mais inspira celles qui suivirent).

      4. Imprimeur d’Anvers (1514-1589), v. note [8], lettre 91.

      5. Référence erronée à la Biblia poliglota (en trois langues antiques, Alcala, 1520), confondue avec la Biblia Sacra (en trois langues antiques) dite de Philippe ii, que Plantin avait en effet imprimée en 1572 : v. premières notules {a} et {b}, note [17], lettre 293.

      6. La toute première édition de la Sainte Bible de Louvain a paru à Anvers, Plantin, 1578, in‑fo non illustré en deux parties de 860 et 216 pages.
    3. Johan Willemsz (Haarlem 1538-1578), jésuite, professeur d’hébreu et d’Écriture sainte à Louvain.

    4. Lyon, 1585, in‑fo richement illustré en trois parties de 494 pages (première partie de l’Ancien testament), 400 pages (seconde partie de l’Ancien testament) et 268 pages (Nouveau Testament) ; précédente édition (avec les mêmes illustrations de plus grand format) ibid. Étienne Michel, 1582, in‑fo en deux parties de 1 133 et 299 pages.

  • Cette Bible, dite de Louvain, était indiscutablement catholique, bien qu’elle n’ait jamais été approuvée par Rome, dont le dogme refusait le libre accès direct de ses fidèles aux textes des Saintes Écritures. Les bibles complètes publiées à Lyon en 1558 et en 1582-1585 par les Honorat, dont la seconde était fille de la première, me semblent être les premières traductions françaises catholiques, bien qu’elles soient à considérer comme officieuses ; et ce en dépit de la belle assurance du Borboniana qui tenait clairement la première (1558) pour huguenote.

    Les textes de ces deux éditions sont si semblables qu’on en vient à se demander si les théologiens n’ont pas faussement daté leur travail (achevé en 1572 et imprimé pour la première fois à Anvers en 1578), car il est difficile d’imaginer qu’ils aient pu simplement recopier l’édition lyonnaise de 1558.

  • L’article suivant du Borboniana illustre plaisamment les points de vue divergents des jésuites et des calvinistes sur la vertu de lire la Bible.

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Correspondance complète de Guy Patin et autres écrits, édités par Loïc Capron. – Paris : Bibliothèque interuniversitaire de santé, 2018. – Autres écrits : Ana de Guy Patin :
Borboniana 5 manuscrit, note 40.

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(Consulté le 19/04/2024)

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