Autres écrits : Ana de Guy Patin :
L’Esprit de Guy Patin (1709),
Faux Patiniana II-6, note 40.
Note [40]

Cet article associe deux sources que je n’ai pas vues réunies ailleurs avant 1709.

  1. Vitruve, Dix livres d’Architecture, traduits par Claude Perrault, {a} livre iv, chapitre i, pages 102‑103 :

    « Une jeune fille de Corinthe prête à marier étant morte, sa nourrice posa sur son tombeau, dans un panier, quelques petits vases que cette fille avait aimés pendant sa vie ; et afin que le temps ne les gâtât pas si tôt, étant à découvert, elle mit une tuile sur le panier ; qui, ayant été posé par hasard sur la racine d’une plante d’acanthe, il arriva, lorsqu’au printemps, les feuilles et les tiges commencèrent à sortir, que le panier, qui était sur le milieu de la racine, fit élever le long de ses côtés les tiges de la plante ; qui, rencontrant les coins de la tuile, furent contraintes de se recourber en leur extrémité, et faire le contournement des volutes.

    Le sculpteur Callimachus, que les Athéniens appelèrent Catatechnos à cause de la délicatesse et de la subtilité avec laquelle il taillait le marbre, {b} passant auprès de ce tombeau, vit le panier, et de quelle sorte ces feuilles naissantes l’avaient environné. Cette forme nouvelle lui plut infiniment, et il en imita la manière dans les colonnes qu’il fit depuis à Corinthe, établissant et réglant sur ce modèle les proportions et les mesures de l’ordre corinthien. »

    Tout cela est repris en grand détail dans les Diversités curieuses de Laurent Bordelon {c} (dixième partie, 1699, pages 222‑223) : ce qui suffit à écarter l’idée que Guy Patin puisse être la source de cet article de son Esprit.


    1. Paris, 1673, v. note [6] du Faux Patiniana II‑1.

    2. Callimachus ou Callimaque est un sculpteur grec du ve s. av. J.‑C. (la 60e olympiade correspond aux années 540-536). Sa biographie tient surtout de la légende rapportée par divers auteurs antiques. Son surnom le plus courant est Κατατηξιτεχνος ou Κακιζοτεχνος (Katatêxitechnos ou Kakidzotechnos, translittération écorchée en Gaziotecnos par L’Esprit de Guy Patin), « jamais content de son ouvrage » ; Vitruve et Perrault le transformaient ici en Κατατεχνος, « d’un art consommé ».

    3. V. supra note [25].

  2. Pausanias le Périégète, {b} Description de la Grèce, livre i, chapitre xxvi, § 6‑7 (traduction d’Étienne Clavier, 1821) :

    « La ville d’Athènes est en général consacrée à Minerve, {b} ainsi que tout le pays, car dans les bourgs, même où l’on honore plus particulièrement certaines divinités, on n’en rend pas moins un culte solennel à Minerve ; mais de toutes les statues de la déesse, la plus vénérée est celle qu’on voit dans la citadelle nommée anciennement Polis. {c} Déjà même, elle était l’objet du culte de tous les peuples de l’Attique avant qu’ils se fussent réunis. L’opinion commune est que cette statue tomba jadis du ciel, je n’examinerai pas si elle est vraie ou non. La lampe consacrée à la déesse est l’ouvrage de Callimaque, on ne la remplit d’huile qu’une fois par an, et elle brûle jusqu’à pareil jour de l’année suivante, quoiqu’elle soit allumée jour et nuit. La mèche est de lin Carpasien, le seul qui brûle sans se consumer. {d} La fumée se dissipe par le moyen d’un palmier de bronze placé au-dessus de la lampe et qui s’élève jusqu’au plafond. Callimaque, qui a fait cette lampe, quoique inférieur aux sculpteurs du premier ordre, quant à l’art en lui-même, s’éleva cependant au-dessus de tous par son intelligence, car il inventa le premier le moyen de forer le marbre. Il prit le nom de Catatêxitechnos, ou peut-être ce nom lui fut-il donné par d’autres, et ne fit-il que l’adopter. »


    1. V. note [41] du Borboniana 8 manuscrit.

    2. Pallas Athéna, v. note [13], lettre 6.

    3. L’Acropole : v. note [33], lettre 223, pour le nom de Palladium donné à la statue de Pallas (Minerve) qui s’y dressait.

    4. Rabelais s’est inspiré de ce passage pour décrire le temple de la Bouteille dans le Cinquième livre, chapitre xl, Comment le temple était éclairé par une lampe admirable :

      « Chacune [des ampoules] était pleine d’eau ardente [eau-de-vie], cinq fois distillée par alambic serpentin, inconsomptible [inépuisable] comme l’huile que jadis mit Callimachus en la lampe d’or de Pallas en l’Acropolis d’Athènes, avec un ardent lychnion [mèche] fait part [partie] de lin asbestin, comme était jadis au temple de Jupiter en Ammonie, et le vit Cleombrotus, philosophe très studieux, part [et partie] de lin carpasien, lesquels par feu plutôt sont renouvelés que consumés. »

    5. La Carpasie est un ancien nom de l’île de Chypre, au centre de laquelle se trouvent le village et les mines d’Amiantos, qui ont donné leur nom à l’amiante ou asbeste (du grec asbestos, inextinguible et incombustible) : cela fait des lins asbestin et carpasien un seul et même minéral fibreux. Aujourd’hui redoutées pour leur toxicité (induction d’atteintes respiratoires et de cancers), ces fibres furent d’abord un sujet de curiosité sceptique (Trévoux) :

      « On faisait autrefois tant de cas des ouvrages faits d’amiante qu’on les estimait presque autant que l’or ; et il n’y avait que quelques empereurs, ou des rois, qui en eussent des serviettes. Cette grande rareté n’a pas empêché plusieurs antiquaires de croire après Pline que l’amiante servait à faire des chemises et des draps, dans lesquels on brûlait les corps des rois et des empereurs pour conserver leurs cendres, et empêcher qu’elles ne se mêlassent avec celles des bois et autres matières combustibles dont on formait leurs bûchers. Mais les historiens des empereurs n’ont jamais fait mention de ces toiles, quoiqu’ils décrivent exactement la cérémonie qu’on observait en brûlant ces corps, et les moyens qu’on avait de ramasser les cendres des morts, en sorte qu’il est inutile d’avoir recours aux toiles d’amiante ; d’ailleurs, on trouve dans plusieurs urnes sépulcrales des charbons mêlés parmi les cendres, ce qui fait assez voir que les Anciens n’étaient pas toujours si soigneux à ne ramasser que les seules cendres du mort. De cette erreur on est tombé dans une autre, en s’imaginant qu’on employait l’amiante à faire des mèches perpétuelles aux lampes sépulcrales. Personne cependant n’y en a jamais observé. Il est vrai qu’on se sert à présent des mèches d’asbeste pour des lampes auxquelles on ne veut guère toucher, car l’amiante ne se consumant pas, on n’est pas obligé de tirer la mèche qui en est faite. On dit qu’autrefois on a vendu des morceaux d’amiante pour du bois de la vraie Croix de Notre Seigneur ; et le public s’y laissait aisément tromper parce qu’on assurait que la meilleure preuve pour reconnaître ce bois précieux était de le mettre au feu, d’où il devait sortir entier. »

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Correspondance complète de Guy Patin et autres écrits, édités par Loïc Capron. – Paris : Bibliothèque interuniversitaire de santé, 2018. – Autres écrits : Ana de Guy Patin :
L’Esprit de Guy Patin (1709),
Faux Patiniana II-6, note 40.

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(Consulté le 13/12/2024)

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